Chapitre 1
— Quatre milliards partis en fumée. Quatre putains de milliards en six mois !
Victoria frappe du poing. Autour d’elle, une dizaine d’hommes en costume fuient son regard.
— Et que faisons-nous pendant que ce petit con de David s’enrichit sur notre dos ? Que fait mon équipe de direction ?
Elle jette la tablette. L’appareil glisse sur la table.
— Des rapports ! Vous pondez des conneries de rapports sur l’innovation pendant qu’on se fait massacrer.
Elle les dévisage, les yeux exorbités. À sa droite, le directeur de la R&D ose lever la main.
— Madame Chen, nous ne pouvions pas prévoir que…
Elle se tourne vers lui d’un mouvement si brusque que les mots s’étranglent aussitôt dans sa bouche.
— Que QUOI ? Que le petit génie que J’AI recruté, que J’AI formé, allait nous planter un couteau dans le dos avec son IA révolutionnaire? Vraiment? Il a réalisé ça dans NOS laboratoires, sous VOTRE nez.
Sa rage fait remonter les souvenirs. David Shailesh, son protégé… Elle avait tout donné à cet ingrat. Et comment l’avait-il remercié ? En développant en secret un produit concurrent, payé par Chen Industries. Il s’était ensuite tiré avec toute une équipe d’ingénieurs.
— J’ai été trop gentille, trop naïve. Trop idiote de croire que vous aviez la situation en main. Mais c’est terminé à présent.
Victoria se redresse, ajuste son tailleur.
— Deux mois. Vous avez deux mois pour sortir un prototype qui écrase MOS-Tech. Je me fous de savoir comment vous allez réaliser ce miracle. Doublez les équipes. Triplez les heures. Videz le putain de budget de recherche.
— Mais… les conditions de travail… commence le directeur des ressources humaines.
— Les conditions de travail ?
Victoria se tourne vers lui.
— Vous voulez en parler ? Parfait. Commencez par rédiger les lettres de licenciement. Débutez par la vôtre.
Un silence de plomb s’installe.
— Deux mois, ensuite je fais le ménage. Et croyez-moi, je ne serai pas tendre.
J’exulte. Zeus souhaitait m’humilier ? Cette fois, il s’est trompé de corps. Victoria Chen est une reine, une déesse des temps modernes. Des milliers d’hommes et de femmes se plient à sa volonté implacable.
Pitoyables, les conseillers quittent la salle un à un.
Allez-vous-en, misérables insectes !
D’un geste, elle retient Edward Morton, le directeur financier.
— Edward, vous êtes conscient que nous devons stopper cette hémorragie immédiatement. En attendant, il va falloir être… créatif avec les chiffres.
— Victoria, les investisseurs commencent à s’inquiéter…
— Je sais, si MOS-Tech continue sur cette lancée… Je vois déjà les vautours tournoyer au dessus de nos têtes. Alors maquillez les rapports, je me fous de comment. Utilisez les réserves, décalez les pertes, inventez des projets. Nous devons publier nos résultats dans un mois, faites-moi briller tout ça.
— Je vais faire mon possible Victoria, mais la SEC nous a dans le collimateur.
Il hésite puis soupire en passant une main dans ses cheveux gris clairsemés.
— Je vais essayer d'être… créatif.
Des coups timides à la porte interrompent leur conversation. Le corps de Victoria se tend.
— Entrez.
Un jeune homme apparaît dans l’embrasure. Grand, élancé, dans un costume qui met en valeur sa stature sportive.
— Excusez-moi, Madame Chen… Je ne voulais pas vous déranger. Je peux commencer à nettoyer la salle ?
Victoria lui adresse un sourire aimable.
— Bien sûr, James. Faites donc.
Elle accompagne Edward jusqu’à la porte et la ferme lentement. Ses yeux se plissent, et je sens la moiteur de ses paumes. Elle se retourne. Son masque de PDG plaqué sur son visage.
— Alors, James.
Sa voix se teinte d’une certaine douceur.
— Comment se passe votre stage chez nous ?
Le jeune homme, occupé à ramasser les verres vides, lève un regard timide.
— Très bien, Madame Chen.
Elle s’avance. Son excitation grandit, chargée d’une jubilation enfantine.
— L’équipe vous traite correctement ?
Elle s’arrête, fait mine d’examiner un document.
— Vous savez, en tant que PDG, je dois m’assurer du bien-être de tous mes employés.
Un pas de plus. Mon attention glisse et effleure le creux de ses reins. Victoria serre nerveusement les mains.
— Tout le monde est très… James hésite, baisse les yeux. Bienveillant.
À quoi jouent-ils tous les deux ?
Victoria n’est plus qu’à quelques centimètres de lui maintenant. Son ongle caresse l’épaule du jeune homme, le long de la couture de sa veste.
— Si quoi que ce soit vous… déplaît, vous pouvez venir m’en parler. En toute confidentialité, bien sûr. Je ferai tout ce qui est en mon pouvoir pour vous aider.
Je n’arrive pas totalement à séparer mes pensées des siennes. Il est si beau, comme un athlète grec. Il me remémore les jeux Olympiques d’antan, ces hommes musclés, nus. L’écho de ma réflexion roule dans son esprit et enflamme ses reins.
— C’est très généreux de votre part, Madame Chen.
Elle pose son doigt sur ses lèvres, le faisant taire, son souffle est chaud.
— Victoria, vous pouvez m’appeler Victoria.
D’un mouvement fluide, elle le glisse dans sa bouche. Avec une légère pression, elle s’amuse à tester sa docilité. Je sens la faim grandir dans son ventre. Toute son attention est absorbée par le visage de James. Il commence à sucer, Victoria frémit.
D’un geste possessif, il l’attire à lui. Leurs corps se collent. Sous la soie de sa chemise, ses seins durcissent, contre son ventre, la virilité de James s’éveille. Il saisit son cou et sa langue s’introduit entre ses lèvres.
Je ne comprends pas pourquoi cette femme qui commande à des multitudes se soumet au désir d’un serviteur. Où est passée la reine autoritaire qui faisait trembler son conseil ?
Pourquoi ? Pourquoi s’offre-t-elle à lui alors qu’elle pourrait simplement exiger qu’il la satisfasse ?
Les mains du jeune homme descendent le long de son dos, attrapent le bas de sa jupe et la remontent d’un coup sec. Son excitation s’emballe. Il les posent, une sur chaque fesse. Victoria étouffe un gémissement.
Une vibration discrète résonne sur la table derrière James. Son téléphone. Andrew, son mari. La sonnerie cesse à l’instant même où James glisse un doigt entre ses cuisses, sur son sexe trempé. Elle s’agrippe à lui, les ongles plantés dans ses épaules. Comme avec Marie, mon individualité se dissout dans ses sensations.
Nouvelle secousse. Encore Andrew. Cette fois, la réalité la rattrape. Victoria repousse James, ses jambes tremblantes, sa jupe retroussée. Elle saisit l’appareil mais ne décroche pas, incapable de parler, de penser.
Je sens la peur et la culpabilité s’infiltrer en elle comme un poison glacé. Un message s’affiche : — Tu fais quoi ? Je t’attends !
La honte lui tord l’estomac. Sa voix fléchit.
— James… Il faut que tu partes.
Elle fait un signe en direction de la porte, le regard fuyant.
Il dépose un baiser sur son front. Un geste tendre et intime qui la déstabilise.
— À bientôt… Victoria.
Il appuie sur son prénom.
Elle l'observe, incapable de bouger. Des fantasmes l’assaillent. Elle sait que cette attirance est insensée, presque obscène pour une femme de sa position. Pourtant, une question la hante : peut-elle encore séduire ?
La porte se referme. Elle descend sa jupe, inspire et expire lentement. Son regard glisse vers la paroi vitrée d'où s’étend une vue époustouflante. Les eaux calmes de la baie scintillent, tandis qu’à l’ouest, le soleil plonge vers l’océan Pacifique.
Sa maîtrise d’elle-même est impressionnante : toute trace de fragilité et de docilité a disparu. Elle récupère son sac, y loge son téléphone et quitte la salle.
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