100 Phares ni Fards
À peine cinq minutes que je m’arrête sur le bas-côté et déjà l’envie de fuir, d’aller aux toilettes, de tout recommencer ailleurs. Mais évidemment, pas le temps d’enfiler une autre route que quelqu’un vient me coller au train.
— Madame, madame, s’il vous plaît...
Une gamine, une silhouette floue dans le rétroviseur. Je l’ignore, accélère le pas, mais elle s’accroche. Toujours là, toujours en train d’insister, jusqu’à lâcher, dans un sourire :
— Votre robe… elle est coincée dans votre culotte.
Le tableau de bord clignote. Je fronce les sourcils. Vérifie.
Rien.
Putain.
À l’intérieur, mon coéquipier ricane.
— T’y crois encore à ces conneries ? Sérieusement ?
Je peste. Comme une conne.
Encore une fois, je me suis laissée berner par le premier abruti qui passe. Mais après tout, c’est drôle, non ?
Les phares s’alignent dans mon rétroviseur. Une route sans fin.
Mon coéquipier soupire.
— Tu veux la jouer comment cette fois ? Tu fais demi-tour ou t’accélères ?
Derrière, des rires. Discrets, moqueurs. Agents de la bibliothèque, lecteurs, spectateurs de mon énième faux pas. Ils attendent. Ils jaugent.
Alors, moi aussi, j’attends.
J’attends que la gamine disparaisse derrière la porte des toilettes.
J’attends que mon égo enclenche la vitesse.
Puis, lentement, j’appuie sur la poignée. Juste assez pour qu’elle comprenne qu’elle n’est plus seule.
Et je murmure :
— Ta maison va brûler.
Un phare s’éteint. Un autre s’allume.
Mon coéquipier sourit.
— Enfin.
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