Chapitre 35 : Hamster et tour de magie
Bonjour les p'tites poules ! Enfin, pour la musique de ce chapitre, faisons plutôt honneur aux hamsters avec : Nagini - Fumer des Hamsters. Attention, paroles hautement philosophiques.
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Le dénommé Vlaarkamp, vêtu d’un costume trop large pour lui, monte sur scène en petites foulées et vient attraper le micro des mains de l’étudiant qui venait de l’annoncer.
- Bonsoir Mc Cartneeeeeey ! hurle-t-il face à un public des plus réceptifs.
- M. Vlaarkamp, je vais vous laisser vous présenter, ensuite pouvez-vous nous dire un mot sur vos activités chez Kronenbourg, et d’éventuelles opportunités à destinations de nos étudiants ? l’interroge ce journaliste en herbe, apparemment fier de sa question.
- Bien sûr ! Comme vous le savez déjà, je me présente, Steven Vlaarkamp, commercial chez Kronenbourg depuis 7 ans, enfin… récemment promu assistant à la direction du marketing secteur Sud France ! Pour moi, Kronenbourg était une pure évidence. Vous connaissez tous un pote qui a fini à l’hôpital après un black-out, eh bah, c’était moi ! Le mec qui a dégueulé devant la meuf qu’il essayait de serrer depuis deux heures, eh bien ! C’était encore moi !
En bon orateur, il laisse une petite pause, puis reprend, tout en traversant l’estrade de part en part :
- Quelle nostalgie de retrouver ce si beau campus, que de souvenirs ! Eh oui, j’étais assis sur ces mêmes bancs il y a une dizaine d’années.
Alors qu’il savoure les applaudissements qui ponctuent sa phrase, l’étudiant s’empare à nouveau du micro :
- Très bien, très bien, pouvons-nous revenir à l’objet du concours ? tente-t-il.
- Mais évidemment ! Peut-être juste un dernier détour, si vous le voulez bien !
Alan et Roger participent joyeusement à l’effort collectif consistant à couvrir les tentatives de contestations de l’étudiant, qui ferait mieux de se plier quelques minutes au jeu de ce M. Vlaarkamp.
- Je suis certain qu’on vous a bassinés avec des sensibilisations à la “consommation d’alcool lors d’évènements à caractère festif”. “Sans alcool, la fête est plus folle”, je n’ai jamais entendu pire daube, j’espère que nous sommes tous d’accord ?
Évidemment, la foule manifeste bruyamment son approbation. Je me demande à quel point le mec avait préparé son coup, ou s’il est en totale improvisation. N’empêche que Chloé qui nous à lâchement abandonné et Thibaud Messmer, les deux derniers concurrents, doivent commencer à s’impatienter. M. Vlaarkamp, avec un sérieux à toute épreuve, reprend son one-man-show :
- Et en ce qui concerne le consentement… dit-il avant de s’arrêter et de recevoir une réaction plus mitigée du public… bah ça pour le coup, on ne transige pas ! D’ailleurs, en parlant de ça, je dois un fier tribut au hamster…
Les quelques sifflets qui s’étaient élevés se sont transformés en une ovation généralisée, avant que tout l’amphi ne se mette à reprendre en coeur, jusqu’à littéralement scander :
- Le hamster ! Le hamster ! … Le hamster ! LE HAMSTER !
Ce type est un génie. Pas dans le genre d’Alan, une autre expression de génie. Je ne comprends pas exactement de quoi il s’agit mais tout le monde semble connaître cette histoire du Hamster. J’interroge Alan du regard, qui m’explique alors que c’est une légende du campus qui se transmet de génération en génération. Cela avant que M.Vlaarkamp reprenne avec entrain :
- Il était une fois un petit hamster roux, répondant au doux nom de Rothschild, adopté par quatre mecs en coloc’ en quête d’originalité. Ils avaient bien fait les choses : sa cage, spacieuse, avait été disposée à côté du grand canapé, et il était nourri avec abondance. Mais… pourquoi est-ce que je vous raconte tout cela ? Lors des soirées que nous organisions chez nous, la technique de drague était simple : quoi de plus efficace pour se retrouver seul avec une fille dans sa chambre que de lui présenter le hamster ! Je vous l’accorde, si les choses se passaient bien, il fallait avoir bu quelques verres pour ne pas être gênés par le fourrageage incessant de la bestiole dans sa cage. Malheureusement, Rothschild échappa à notre vigilance au cours d’une soirée particulièrement arrosée, jusqu’à ce qu’on le retrouve se délectant d’une flaque de vodka qui avait coulé sur une table. Le lendemain, il s’était envolé vers d’autres horizons. Observons une minute de silence en sa mémoire.
Un silence de cathédrale se fait dans le public, désormais totalement acquis à la cause de M. Vlaarkamp. Il finit par saluer celui-ci au bout d’une vingtaine de secondes, mais tenir l’audience pendant bien plus longtemps n’aurait pas été difficile. L’étudiant qui l’interviewait en profite pour reprendre la main et enfin en terminer :
- Merci beaucoup pour votre passage, passons directement aux résultats ! L’affiche gagnante va s’afficher derrière moi dans cinq… quatre… trois… deux… un…
Un puissant ‘Whaaa’ s’élève devant l’affiche au design particulièrement léché, qui représente au premier plan une bouteille constellée de gouttelettes de condensation, sur fond de soirée étudiante. Le slogan “T’as les crocs ? Prends une Kro ! “ en gros caractère donne le ton à cette affiche qui semble bien plaire à mes deux compères.
- Bravo au club de design du campus, qui remporte le prix monétaire, ainsi que les cent litres de bière !
***
Après cet intermède qui a failli nous faire oublier la raison principale de la soirée, on fait enfin entrer Thibaud Messmer sur scène. Il attend que les applaudissements se taisent, puis sort un paquet de cartes et se dirige vers la jeune étudiante qui fait partie du jury. Il mélange et coupe plusieurs fois le paquet avec de grands gestes sous le regard intrigué de la jeune fille.
- Si vous le voulez bien, je vais vous demander de tirer une carte complètement au hasard, vraiment celle que vous voulez… Très bien, dit-il en sortant un feutre de sa poche, maintenant vous pouvez la signer.
- Sur la face de la carte ?
- Exactement, allez-y ! … Parfait, maintenant, déchirez-la nettement en deux parties, à travers la signature… Vous pouvez montrer les deux morceaux au public !
Thibaud récupère ensuite les deux moitiés et les replace dans le paquet, qu’il coupe à nouveau. Il remonte au milieu de la scène pour faire durer le suspens tout en continuant à manipuler les cartes.
- Bon allez, accouche ! hurle Alan à travers l’amphi.
- Laisse-le un peu profiter, lui chuchoté-je.
- Ouais, mais…
- Et voici le moment que vous attendez, l’interrompt le magicien, je vais reconstituer la carte que vous venez de déchirer.
Il dépose le paquet sur le bureau du jury, en face de sa partenaire du soir, et lui demande de sortir la septième carte du paquet depuis le haut, puis de la montrer au public.
- Mais quelle originalité, souffle Alan à mes côtés, même moi je connais le truc !
Pourtant sur scène, tout ne semble pas se passer comme prévu. La membre du jury qui vient de retourner la carte la manipule à plusieurs reprises, comme si elle pouvait avoir plus de deux faces, tandis que Thibaud semble complètement démuni. Ce dernier jette des regards rapides sur les côtés, mais personne ne pourra le sortir de ce mauvais pas… Il se ressaisit du paquet de cartes et en retourne quelques unes supplémentaires, espérant sûrement rattraper sa gaffe.
- Je propose de recommencer le tour, dit-il en essayant de poser au maximum sa voix.
- Ce n’est pas la peine, veuillez enchaîner, lui indique un des membres du jury.
Je n’aimerais pas être dans sa situation, heureusement pour moi notre prestation de tout à l’heure à furieusement cartonné.
- Et l’un de nos concurrents qui se chie dessus ; si c’est pas un signe du destin ! lance Alan, goguenard.
- T'es méchant avec lui, il s'était bien débrouillé pendant les sélections.
- Non mais je rêve ! Léo, un peu d'esprit de compétition ! Tu n'arriveras à rien sans un minimum de hargne.
- Euh… jusque là, tout ne se passe pas trop mal dans ma vie… J'ai des bonnes notes en cours et je suis quand même resté en couple un an et demi !
Les quatres membres du jury décident de mettre fin au carnage et demandent à notre ancienne chanteuse de monter sur scène. Elle commence a cappella avant que la musique ne se lance derrière sa voix, qui stoppe net tous les ricanements de la salle.
- Les choses sérieuses commencent ! Là, c’est notre vraie rivale ! dit Alan.
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