1. Les cendres d'un amour
C'était comme si un océan d'eau tiède scintillante l'enveloppait, comme si elle flottait dans une mer d'étoiles, suspendue entre l'éveil et le sommeil, incapable de dire si elle chutait ou s'élevait.
Tout n'était que silence, à l'exception d'une voix, douce et ancienne, qui murmurait son nom.
— Corinne...
Elle ouvrit les yeux.
Autour d’elle, un paysage irréel se dessinait. Un ciel aux teintes mouvantes, ni jour, ni nuit. Sous ses pieds, une étendue d’eau si claire qu'elle reflétait un autre monde. où des silhouettes s’y mouvaient, éphémères, majestueuses.
Le passé et l’avenir semblaient s’y entremêler dans un même instant.
Une femme se tenait devant elle, drapée dans une robe translucide, le regard empli d’une sérénité troublante. Ses cheveux flottaient doucement autour de son visage, obéissant à une gravité différente.
— Qui êtes-vous ? demanda Corinne, la gorge nouée.
— Je suis Lydie.
Le sol d’eau miroitante vibra sous ses pieds. Un frisson parcourut son corps.
— Quel est cet endroit ?
— Nous sommes à Lyndoria... Un lieu hors du temps, là où les âmes en transition perçoivent ce qui leur est caché.
Corinne ne comprenait pas. Était-ce un rêve ? Une illusion ? Pourtant, tout semblait si réel.
— Pourquoi suis-je ici ? murmura-t-elle, plissant les yeux :
— Tu es un lien entre les mondes...
Lydie s’approcha, posant une main légère sur son front. Une chaleur étrange se répandit en elle, et des images éclatèrent dans son esprit : des villes en ruines, des cendres balayées par le vent, un ciel déchiré par des feux venus d’ailleurs. Une douleur sourde emplit son cœur.
— Les Taals... Ils ont pris la voie interdite, poursuivit-elle d’une voix douce. Ils vont détruire Seyriss et ses Mondes. Nous avons vu leur avenir, mais nous ne pouvons pas intervenir. Seul un mortel peut changer ce qui est écrit.
— Je ne comprends pas... Mais que voulez-vous que je fasse ? demanda Corinne, perdue.
Lydie recula, levant une main vers l’horizon. Une lumière argentée déchira le ciel laissant apparaître une forme :
Une porte, massive, gravée de symboles étranges qui pourtant, lui semblaient familiers.
— La Porte. Lui seul pourra l’ouvrir. Lui seul pourra choisir.
Corinne sentit son souffle s’accélérer. Lui...?
— Mais... Qui ?
L’eau sous ses pieds se mit à s’écouler, puis le monde bascula.
Un cri fusa dans le néant, son propre cri. Elle tombait, happée par un vide noir. Une douleur atroce transperça son corps.
Tout disparut.
Juste avant que l’obscurité ne la prenne, un nom résonna en elle.
"Stéphane"
Puis le silence, le réveil, la douleur.
Elle ouvrit les yeux dans la pénombre de sa chambre. Son souffle était court, sa peau brûlante et moite. Son cœur battait à un rythme irrégulier, encore secoué par le rêve étrange qui l’avait happée.
Elle tenta de bouger, de se redresser légèrement contre les oreillers, mais une douleur sourde lui déchira le corps.
Sa maladie l'emportait...
— Stéphane... murmura-t-elle faiblement.
À travers la brume de sa vision, elle le vit assis à son chevet, la tête baissée, perdu dans ses pensées. Il lui tenait la main, ses doigts serrés autour des siens, comme s’il voulait l’ancrer à cette réalité qu’elle sentait déjà lui échapper.
Elle voulut lui parler. Lui dire ce qu’elle avait vu. Lydie. La Porte. Les Taals.
Mais les mots restèrent coincés dans sa gorge.
Une fatigue immense l’écrasait, plus lourde que jamais. Son corps était là, mais son esprit... son esprit était déjà ailleurs, flottant entre deux mondes.
Pourquoi n’avait-elle pas plus de temps ?
Elle serra légèrement la main de Stéphane. Il releva la tête, son regard fatigué, inquiet.
— Mon amour... murmura-t-il, des larmes brûlant son visage.
Elle aurait voulu sourire, lui dire que tout irait bien... mais elle savait que ce serait un mensonge.
Alors, elle le regarda simplement, ses yeux emplis d’une douceur infinie. Une promesse silencieuse.
Puis, elle ferma les paupières...
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