3. Père Gilles
Stéphane décida d’installer une caméra dans les combles. Mais il avait à faire.
Il entreprit l'installation d'un chauffe-eau dans la cave. Elle était encombrée d’objets abandonnés depuis des décennies.
Un saloir en bois, un autre en granit, un vieux garde-manger, des porte-bouteilles poussiéreux.
Alors qu'il déplaçait un vieux confiturier encombrant pour dégager un mur, Stéphane découvrit quelque chose qui le fit frissonner. Derrière le meuble rustique, des runes anciennes étaient gravées sur la pierre nue.
"ᚢ, ᛚ, ᛝ, ᚦ, ᛉ, ᚠ,ᛏ. ᛞ,ᚾ,ᛜ"
Une pierre noire. Le rêve revint à son esprit.
Leurs traits semblaient précis, très anciens. Ils formaient une sorte de cercle, au centre duquel se trouvait un motif étrange, semblable à une croix stylisée. Intrigué, il prit des photos avec son téléphone. Puis, il recula quelque pas. Une porte emmurée apparut alors devant lui. Une relique oubliée, dissimulée depuis des années.
Il s’arrêta un instant, le souffle court. Il observa cette ouverture mystérieuse. Elle paraissait l’appeler.
Qui avait érigé ce mur ?
Pourquoi avait-on scellé ce passage qui ne donnait sur rien puisque la cave se trouvait sous terre ?
Il s’en approcha, scruta avec attention la voûte soigneusement formée par des pierres de taille. Tout était parfaitement agencé. Chaque pierre portait un symbole gravé, étrangement familier. En les observant de plus près, une évidence s’imposa à lui : ces inscriptions rappelaient immédiatement les écritures étranges qu’il avait remarquées sur la croix et la béquille.
Sans perdre une seconde, il remonta à la cuisine, s’empara des objets trouvés et redescendit précipitamment dans la cave. Sous la lumière blafarde de l'ampoule, il compara minutieusement les gravures de la croix avec celles des pierres.
Stéphane sentit son cœur s’emballer. Ce lien entre la croix et le passage scellé ne pouvait pas être une simple coïncidence. Une signification plus profonde se cachait derrière ces mystérieux symboles, et il était déterminé à en percer le secret.
Debout devant le mur, il ressentit une étrange chaleur. La pierre émettait une énergie qu’il ne pouvait expliquer.
"Un mystère de plus", pensa-t-il. Cela le fit sourire. Il finit son ouvrage.
Il s’installa dans sa chambre. Il espérait trouver des réponses sur internet. Il alluma son ordinateur portable et se plongea dans des recherches approfondies. Rien ne correspondait exactement à ce qu’il avait photographé. Les heures défilèrent, puis sa persévérance finit par payer.
Il découvrit quelques symboles similaires. On pouvait les lire dans un vieux manuscrit répertorié dans les archives d’un musée. Niché dans un château de Haute-Loire.
"Le château de la Rochelambert."
Il nota soigneusement l’adresse du site dans son calepin, l’esprit en ébullition. Cette piste semblait trop prometteuse pour attendre. Il décida qu’il partirait dès le lendemain pour explorer ce lieu chargé d’histoire. Peut-être, lèverait-il un peu plus le voile sur les mystères qui entouraient sa maison.
Le lendemain, décidé à élucider l'énigme du grenier, il se rendit à Saint-Flour pour y acheter une mini-caméra. Il pourrait l'y installer discrètement. Pendant plus d’une semaine, il s’attela à aménager les combles, prenant soin de les disposer pour filmer l’intégralité de l’immense pièce. Il plaça l’objectif avant d'effectuer plusieurs essais qui se révélèrent concluants. Le piège était prêt. Il brûlait désormais d’impatience de lever le voile sur ce mystère.
Le soir-même, alors qu’il venait de se coucher, des bruits résonnèrent à nouveau dans le grenier. Il se leva précipitamment et grimpa les escaliers en courant, avant de s'arrêter net devant la porte. Le cœur battant, il hésita quelques secondes avant d'ouvrir la porte d’un geste brusque.
La lumière, qu’il avait laissé allumée pour permettre à la caméra de filmer nuit et jour, baignait la pièce. Mais, il s’y attendait.
Il ne trouva rien, ni personne.
Frustré, il redescendit dans sa chambre et consulta immédiatement l’application connectée à sa caméra sur son téléphone. Les images étaient d’une netteté impeccable… jusqu’à 23h47. Puis, sans explication, elles devinrent brouillées, otalement inexploitables pendant une minute.
Cette coupure coïncidait précisément avec le temps qu’il avait mis pour monter et faire son entrée fracassante dans la pièce. Stéphane fixait l’écran de son téléphone. Les sourcils froncés, il tentait de comprendre ce qui avait bien pu se produire.
Une minute entière d’interférences. Une minute pendant laquelle la caméra, pourtant d’une fiabilité sans faille, n'avait rien enregistré.
Il passa et repassa les images plusieurs fois. Il cherchait un détail qui aurait pu lui échapper. Un tressaillement attira son attention. Juste avant que l’image ne devienne brouillée, il observa un mouvement subtil, presque imperceptible, dans un coin sombre de la pièce.
Il agrandit l’image.
Une ombre, une forme fine, mouvante, presque translucide. Elle se déplaçait dans le champ de vision de la caméra. Il arrêta la video, fixa cette ombre quelques instants. Son cœur battait à tout rompre. Il était incapable de comprendre ce qu’il voyait. Le mystère ne faisait que s’épaissir. Une sensation étrange s’empara de lui. Ce n’était plus seulement de la curiosité ou de l’agacement. C’était autre chose. Une tension diffuse, un frisson qui glissait le long de son échine.
Il était sûr maintenant. Quelque chose d’anormal se passait dans sa maison. La nuit fut longue.
Stéphane resta éveillé, l’oreille tendue, chaque craquement de la charpente ou souffle du vent alimentant son angoisse. Au petit matin, il monta à nouveau dans le grenier pour inspecter les lieux en plein jour. Il scruta chaque recoin, chercha des traces au sol, des indices d’intrusion.
Rien.
Tout semblait exactement comme il l’avait laissé
La nuit suivante, un son se fît entendre. Cette fois, il s’agissait d'un murmure lointain, presque inaudible, mais indéniablement humain. Allongé dans son lit, Stéphane resta figé de peur. Le mystère venait de prendre une tournure bien différente.
La voix avait parlé d'une... porte.
Il prit une décision radicale. Vider entièrement le grenier, ne laisser qu’une pièce nue et la caméra pour surveiller.
Pendant deux jours, il s’attela à cette tâche colossale, déplaçant chaque objet, chaque vieille malle entassée depuis des décennies. Il voulait que rien ne puisse dissimuler une présence ou perturber ses observations
Ce soir-là, une lueur douce émanait du poêle, baignant la cuisine d'une chaleur réconfortante. Le contraste était saisissant avec les températures glaciales qui s'étaient abattues sur le hameau ces derniers jours.
Assis à la table, Stéphane était absorbé par ses pensées. La fourchette suspendue entre ses doigts, il se sentit soudain très seul. Pas simplement isolé par la neige ou par les murs épais de cette vieille maison, mais seul à l’intérieur de lui-même. Quelque chose s’était creusé en lui, lentement, depuis des semaines, sans qu’il en prenne vraiment conscience.
Les bruits étranges dans sa maison, les symboles gravés sur la croix, la mystérieuse béquille. Tout devenait oppressant. Le silence de ces artefacts, leur immobilité.
Posés sur le buffet, ils le regardaient, pesaient sur ses épaules. Il n’était plus sûr de rien.
Chaque son lui portait un message, chaque courant d’air charriait une intuition qu’il n’arrivait pas à nommer.
Il avait la sensation d’être piégé entre deux mondes. Celui du rationnel, qu’il essayait encore de défendre, et celui, de plus en plus tangible, du mystère et du vertige.
Ses pensées tournaient sans fin, se heurtaient à des questions sans réponse. Et puis il y avait cette peur. Pas une peur brutale, criante, mais quelque chose de plus profond, de plus intime. La peur de perdre pied, de ne plus distinguer le vrai du faux.
Il ferma un instant les yeux, et dans le silence qui l’enveloppait, il la sentit.
Corinne.
Il n’avait même pas remarqué la neige qui avait redoublé dehors. Désormais plus dense, elle effaçait peu à peu les contours du monde, elle recouvrait la matérialité des choses d’un voile d’irréel. La morsure du froid pénétrait les murs de la vieille demeure.
Il commença à manger distraitement, ses yeux perdu dans le regard de sa femme disparue. Son nom effleura ses lèvres sans qu’il le prononce. C’était absurde, mais… il ne pouvait chasser cette idée.
Et si c’était elle, dans le grenier ? Si ces voix entendues n’étaient pas des hallucinations, mais sa voix à elle ? Il avait reconnu cette intonation, ce timbre doux, cette manière unique qu’elle avait de dire son prénom quand elle voulait l’apaiser.
Cela n’avait duré qu’un instant, mais cela avait suffi à raviver une douleur qu’il croyait enfouie, une déchirure qui n’avait jamais vraiment cicatrisé.
Il ne s'était pas aperçu qu'il avait fermé les yeux. Il les rouvrit et fixa les flammes dansantes du poêle.
Et s’il était devenu fou ? Et si cette maison ne lui servait pas de refuge ? Si elle n'était qu'un asile dont il serait l'unique patient.
Non. Il n'avait pas perdu la raison. Il était durement affecté par la perte de Corinne, c'est tout. Et cette maison...? Eh bien, elle était une passerelle entre les mondes ? Il y ferait une dernière rencontre. Il recevrait un dernier message ?
Corinne. Sa Corinne.
Le cœur serré, les mains tremblantes, il comprit qu’il devait savoir. Il devait monter. Revoir ce grenier. Rechercher cette voix. Même si ce n’était qu’un mirage. Même si cela le brisait à nouveau. Parce que ne pas savoir, c’était pire encore.
Il ferma les yeux un instant, laissant la chaleur du poêle l'envelopper. Le crépitement du feu apaisait son esprit, comme un murmure doux dans le silence pesant de la maison.
Une larme coulait le long de sa joue.
La nuit de Stéphane fut agitée par de nombreux rêves.
Dans son monde onirique, la maison était silencieuse. Trop silencieuse. Stéphane errait dans le salon, sans but précis. Tout semblait intact, figé dans le temps, comme si Corinne pouvait apparaître à tout moment, un sourire espiègle au coin des lèvres. Pourtant, le vide pesait. Chaque objet autour de lui murmurait son absence.
Il ouvrit machinalement un tiroir et tomba sur une petite boîte à bijoux qu’il n’avait pas vue depuis des années. Un frisson le parcourut tandis que ses doigts hésitants soulevaient le couvercle. À l’intérieur, une broche en argent, ornée d’une pierre bleu azur.
Corinne la portait toujours lors de leurs dîners au restaurant.
- Tu crois qu’elle fait trop vieille sur moi ? La pierre à la main, elle ajustait son reflet dans le miroir.
- Non, elle est parfaite, tout comme toi.
Elle avait éclaté de rire, ce rire cristallin qu’il aurait reconnu entre mille.
Une mélodie familière s’éleva soudain. Un vieux morceau de Rickie Lee Jones, celui qu’ils écoutaient en boucle lors de leurs longs trajets en voiture. Sa gorge se serra en l’entendant chantonner faux, comme toujours, mais avec tant de bonheur.
Puis, alors qu’il s’apprêtait à la rejoindre dans cet instant suspendu, son visage devint livide.
Corinne avait tourné vers lui un regard de cire. Vide. Sans ouvrir la bouche, elle murmura :
- Prends la pierre.
Stéphane se réveilla en sursaut, le souffle court, trempé de sueur.
Son regard se posa sur un coin de la pièce, où trônait une vieille horloge en bois, héritage de la grand-mère de Corinne. Il se souvenait encore de cette nuit où ils l’avaient remontée ensemble, riant de leur maladresse.
"Une horloge arrêtée, c’est comme un cœur qui ne bat plus" avait-elle soufflé en l’observant.
Ironie du sort. Aujourd’hui, c’était son propre cœur qui semblait à l’arrêt, figé dans le temps.
Il se leva et passa sous la douche.
L’eau chaude ruissela sur son corps encore engourdi, dissipant peu à peu la brume du sommeil. Après s’être habillé, il se dirigea vers l’armoire et ouvrit la petite boîte à bijoux de Corinne.
La broche en argent était là. Elle l'attendait.
Il la prit délicatement entre ses doigts. Le saphir scintillait d’une lueur étrange. Une lumière pulsait en son cœur. Il le glissa dans la poche de son pantalon, puis referma la boîte avec précaution.
Il pensa refermer un chapitre de leur vie.
Une heure plus tard, il avait pris la route en direction du château. La guide lui montra un manuscrit ancien, protégé sous une vitre, qu’il ne put approcher. Toutefois, elle lui confia que le prêtre de la paroisse de Loudes en connaissait les écritures et pourrait lui fournir des informations précieuses sur ce grimoire.
Il quitta le château, partagé entre excitation et appréhension.
"Le prêtre de la paroisse de Loudes..."
Tout cela semblait tiré d’un roman d’aventures, une piste improbable, presque trop belle pour être vraie. Mais il n’avait pas fait tout ce chemin pour reculer. Le village n’était qu’à quelques kilomètres. Il décida de s’y rendre sans attendre.
Loudes l’accueillit dans une atmosphère paisible, figée dans le temps. L’église, modeste mais imposante par sa simplicité, se dressait au cœur de la petite commune.
Ses murs de pierre, usés par les siècles, étaient porteurs de mille récits oubliés. Au sommet du clocher, la cloche silencieuse retenait un écho ancien, prêt à résonner au moindre appel.
Lorsqu’il poussa la lourde porte de bois, une chaleur discrète l’enveloppa. Elle contrastait avec le froid mordant de l’extérieur. L'église baignait dans une lumière tamisée, entre ombres et lueurs tremblotantes des cierges.
Près de l’autel, un homme vêtu d’une simple soutane noire était penché sur un banc, absorbé dans une lecture silencieuse. Stephane hésita. Il s'approcha à quelques pas de lui, puis se lança :
- Père, excusez-moi de vous déranger. On m'a dit que vous pourriez m'aider.
Le prêtre releva lentement la tête. Ses yeux d'un bleu perçant fixèrent Stéphane avec une bienveillance teintée de curiosité. Il ne ressemblait en rien à l'image qu'il se faisait d'un homme d'église. La Trentaine, peut-être quarante tout au plus, un visage serein mais marqué par une intensité silencieuse.
- Tout dépend de ce que vous cherchez, mon fils.
Stéphane sortit son calepin. Il le tendit au prêtre. Ses pages portaient l'esquisse des symboles qu'il avait relevé dans le grimoire.
- Ces gravures... Je les ai trouvés chez moi. En faisant des recherches, je suis tombé sur un manuscrit au château de la Rochelambert. La guide m'a dit que vous étiez familier avec ces écritures.
Le prêtre prit le carnet avec précaution. Son regard glissa sur les symboles avec une lenteur presque cérémonieuse. Un silence s'installa, seulement troublé par le craquement des vieilles boiseries de l'église.
- Ces lettres... Elles ressemblent à des runes remontant à une époque où les croyances anciennes coexistaient encore avec les débuts du christianisme. Leur sens, cependant, n'est pas toujours clair.
Il désigna un banc près de lui.
— Asseyez-vous. Voyons ce que je peux vous apprendre.
Stéphane s'exécuta, son cœur battant d'impatience.
— Ces runes, reprit le prêtre, forment un mot ou une phrase, mais elles sont incomplètes. Il faudrait replacer leur inscription dans un contexte pour en saisir le véritable sens. Mais cette combinaison...
Il marqua une pause, son regard se perdant un instant dans les hauteurs voûtées de l'église.
- Elles me rappellent une ancienne légende locale qui parle de Lyndoria.
- Lyndoria ?
Le prêtre hocha lentement la tête.
- Ce mot est connu depuis des générations. Il désignerait un passage, une porte vers un lieu sacré... interdit.
- Un lieu interdit ? répéta Stéphane, intrigué.
Le prêtre lui adressa un sourire énigmatique.
- Si ces runes vous ont conduit jusqu'ici, peut-être que votre maison abrite plus que de simples vestiges du passé.
- Que voulez-vous dire ?
L'homme d'église se redressa légèrement, nouant ses mains devant lui. Une lueur indéchiffrable brillait dans ses yeux.
- Ce que je veux dire, c'est que certaines légendes ne sont pas que des histoires. Parfois, elles cachent des vérités. Ou des avertissements. Si ces runes vous ont guidé jusqu'à moi, peut-être avez-vous trouvé une trace de cette vérité oubliée.
Un frisson parcourut l'échine de Stéphane. Les paroles du prêtre résonnaient étrangement en lui, éveillant une sensation qu'il ne parvenait pas à définir.
- Mais... Lyndoria, c'est quoi exactement ? Une clé ? Une porte ? Qu'est-ce que cela signifie ?
Le prêtre inspira profondément avant de répondre.
- On parle de Lyndoria comme d'un passage. Pas une porte physique, mais un lien entre deux mondes. Le tangible et l'intangible. Le monde des vivants et celui des esprits... ou peut-être autre chose encore. On dit que ceux qui découvrent Lyndoria doivent faire face à une épreuve... et que rares sont ceux qui reviennent.
- Une épreuve... murmura Stéphane, partagée entre fascination et appréhension.
- Il ne s'agit pas d'un simple défi, mon fils. L'épreuve de Lyndoria met à nu votre essence. Elle révèle vos peurs, vos regrets, vos vérités les plus profondes. Ceux qui échouent se perdent. Et parfois, ils laissent passer...
Le prêtre s’interrompit brusquement.
Stéphane sentit son cœur s'accélérer.
- Laisser passer quoi ?
L'homme d'église se contenta de le fixer un instant, avant de sourire doucement.
- Mais tout cela n'est que rumeur et légende.
Stéphane ne se laissa pas désarçonner.
- Disons que je ne veux pas ouvrir ces portes... Juste comprendre pourquoi ces runes sont apparues chez moi.
Le prêtre le contempla un instant, puis se pencha légèrement vers lui. Il baissa le ton comme pour se mettre à l'abri d'oreilles indiscrètes.
- Peut-être que le choix ne vous appartient plus.
- Que voulez-vous dire ?
L'homme posa une main sur son bras et l'entraîna à l'écart.
- Il se pourrait que ce soient les runes qui vous aient trouvé, et non l'inverse. Peut-être que votre venue ici était déjà écrite...
Un silence pesant s'installa entre eux, seulement troublé par le bruissement du vent à travers les vitraux.
- Soyez prudent, mon fils. Certains mystères ne demandent qu'à rester enfouis.
Stéphane aurait pu reculer, abandonner cette quête insensée. Mais au lieu de la peur, il sentit une étrange détermination monter en lui.
- Père, ce manuscrit au château... Est-il possible de le consulter ?
Le prêtre plissa légèrement les yeux.
- Ce grimoire... Il n'est pas un simple manuscrit. Il a été catalogué, mais il est entouré d'une certaine méfiance. Ceux qui l'ont étudié par le passé en ont rapporté des récits troublants. C'est pourquoi il est conservé sous surveillance.
Stéphane serra les poings.
- Mais vous, vous connaissez ces écritures. Vous y avez eu accès, n'est-ce pas ?
L'homme d'église hocha la tête.
- En effet. Mais je ne peux pas le sortir du château.
Il marqua une pause, comme s'il pesait ses mots.
- Si vous êtes réellement déterminé, je pourrais demander une autorisation spéciale. Mais je ne garantis rien. Et je dois vous avertir : ce texte contient des choses que nous, mortels, ne devrions peut-être pas chercher à comprendre.
Stéphane plongea son regard dans le sien.
- Je comprends les risques, Père. Mais ces symboles... cette histoire... tout semble me concerner.
Le prêtre soupira.
- Très bien. Je vais voir ce que je peux faire. Je vous contacterai dans une semaine. En attendant, rassemblez toutes les runes que vous trouverez. Chaque symbole est une pièce d'un puzzle plus vaste.
- Et ensuite ?
Le prêtre le fixa avec gravité.
- Ensuite, vous devrez décider si vous avez le courage d'affronter ce que Lyndoria pourrait vous révéler.
Les mots résonnèrent en Stéphane comme un écho lointain, porteurs d'une promesse aussi excitante que terrifiante. Il savait qu'il n'y avait plus de retour en arrière.
Il se leva et tendit la main au prêtre.
- Merci, Père. Je vais essayer de trouver d'autres indices.
Après une brève hésitation, il ajouta, plus doucement :
- Je m'appelle Stéphane.
Le prêtre lui serra la main avec une fermeté surprenante.
- Je suis le Père Gilles. Souvenez-vous, Stéphane. Le passé ne dort jamais vraiment. Il veille. Prenez garde à ce que vous pourriez réveiller.
Stéphane quitta l'église, emportant ces paroles avec lui. Dans l'air glacé du village, un vent léger soulevait des flocons de neige qui venaient caresser son visage. Il n'y prêta pas attention.
Son esprit était ailleurs. Des questions le hantaient encore.
Que renfermait réellement ce grimoire... et quelle vérité allait-il lui révéler ?
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