10. Le château de Valren

15 minutes de lecture

La serveuse les guida à l’étage. La lanterne qu'elle tenait à la main, projetait des ombres tremblantes sur les murs de pierre. Les marches en bois craquaient sous leurs pas fatigués. L’air, plus frais, portait encore l’odeur du feu de l’âtre.

— Voilà, annonça-t-elle en ouvrant les premières portes. Vos chambres sont simples, mais propres. Vous trouverez de l’eau et du linge si besoin.

Stéphane la remercia d’un signe de tête avant de récupérer la clé qu’elle lui tendait. Il entra dans sa chambre, suivi de Teryn avec qui il la partagerai, dans un silence presque religieux. Son compagnon s’étira avec un soupir. Il observa sa paillasse d’un air dubitatif avant de hausser les épaules. Il n’était pas difficile. Tant qu’il pouvait dormir, ça lui convenait.

Geilweis posa son sac au pied du lit. Il s’adossa contre le mur, le bras croisés, et fixa le plafond. Il repensait aux paroles de Mirok.

"Cette princesse... cette fillette..."

Il sentait que quelque chose d’énorme leur échappait encore.

Mirok, lui, était resté debout près de la fenêtre. Son regard se perdit sur la place en contrebas.

"Lisa, Eugénie... j'espère que, là où vous êtes, vous êtes ensemble"

Liawen, quant à elle, était assise au bord de son lit. Elle observait la flamme de la bougie vaciller. Ses penséees allaient à Stéphane :

"Il y a quelques heures, il n'était qu'un inconnu et maintenant..."

Velkhan, couchée à ses pieds, ronronnait comme à son habitude.

Stéphane, s'allongea sur le lit. Son bras derrière sa tête comme un oreiller, il fixait le plafond. La question lui revenait, insistante, presque douloureuse :

Et après ? Une fois la princesse retrouvée, que devra-t-il faire ? Quel est son rôle dans cette histoire ?

Une sourde angoisse monta en lui, puis un frisson, qui le parcourut. Il serra les draps entre ses doigts. Il aurait voulu une réponse, une certitude. À la place, seuls le silence et l’ombre de ses propres doutes lui tenaient compagnie.

Le sommeil ne venait pas. Son esprit était trop agité. Après un moment, il se leva, attrapa sa veste et ouvrit la porte sans bruit. Il descendit lentement l’escalier. La lueur du feu de la cheminée dans la salle commune vidée de tous ses clients, l’accueillit dans un halo orangé.

Une brise fraîche s’engouffra par la porte entrebâillée. Dehors, la nuit était calme. Les étoiles perçaient le ciel comme mille éclats de lumière.

Devant lui, la fontaine du Par exhalait une vapeur fine qui ondulait dans l’air nocturne. Elle tissait des filaments éphémères sous la lueur pâle des étoiles. L’eau s’écoulait lentement du cœur de la pierre. Son murmure presque imperceptible, se trouvait étouffé par la chaleur qui s’en dégageait. Elle surgissait du sol avec une force tranquille, une résurgence ancienne qui portait en elle la mémoire des profondeurs.

Le bassin miroitait sous la lueur lunaire. Une alchimie étrange se faisait entre le froid de la nuit et la brûlure du cœur terrestre. De fines gouttelettes s’évaporaient en volutes fantomatiques. Elles caressaient les pierres moussues avant de disparaître dans le silence. L’air, chargé d’une humidité tiède, portait une odeur minérale, métallique, qui éveillait une sensation d’étrangeté, comme si l’endroit murmurait à ceux qui savaient l’écouter.

Stéphane s’arrêta au bord du bassin. Il observa les bulles qui crevaient la surface avec une régularité hypnotique. C’était une source vivante, palpitante sous la roche millénaire. Une faille entre deux mondes où le passé semblait affleurer. Une pensée fugace lui traversa l’esprit :

Combien de voyageurs, avant lui, s’étaient arrêtés ici, cherchant une réponse dans ces eaux brûlantes, comme si elles pouvaient dévoiler un fragment de vérité cachée ?

Puis dautres pensées affluèrent à son esprit. Il était persuadé d'avoir été choisi... mais par qui ? Et pourquoi ? Et ce protecteur, qui était il ?

La nuit était claire. Un manteau étoilé s’étendait au-dessus de lui. Il sortit son smartphone. Il choisit Acid rain d'Avenged Sevenfold qu'il écouta silencieusement. Instinctivement, il s'assit sur un banc de granit qui faisait face à l'auberge, avant de lever les yeux vers le ciel.

  • J'ai toujours aimé regarder les étoiles...

La voix douce et lointaine de Liawen le fit sursauter. Elle était là, debout à quelques pas de lui, le regard perdu dans l'immensité céleste.

  • Toute gamine, je rêvais de les rejoindre.

Il arrêta la musique de son téléphone :

  • Tout va bien, Liawen ? demanda-t-il en observant son expression. Elle dégageait un mélange de douceur et de mélancolie. Elle lui adressa un sourire fugace, mais ses yeux restaient voilés :
  • Les étoiles racontent une histoire, une légende ancienne que ma mère me murmurait quand j’étais enfant.
  • Une légende ?

Liawen pointa du doigt un groupe d’étoiles près de Cassiopée.

  • La constellation du Héros, murmura-t-elle. On dit que là-haut repose un homme dont le nom a été oublié par beaucoup, mais pas son sacrifice.

Stéphane leva à son tour les yeux vers la constellation désignée par Liawen. Les étoiles y brillaient avec une intensité incroyable .

  • Quel genre de sacrifice ?

Elle inspira profondément avant de poursuivre. Sa voix était teintée de tendresse :

  • Il aimait une femme, une princesse d’un monde lointain. Leur amour était pur, mais les ténèbres menaçaient tout ce qu’ils connaissaient. Lorsque le moment fatidique est venu, il a choisi de se sacrifier pour elle, pour son peuple, pour leur avenir. Il savait que son destin serait plus grand que le sien.

Elle désigna une petite étoile de couleur rouge au cœur de la constellation.

  • On raconte que cette étoile, c’est lui. Il veillerait toujours sur elle, encore aujourd’hui. Grâce à lui, la princesse est devenue une grande reine, unifiant deux mondes.

Un silence s’installa. Stéphane, absorbé par ses paroles, sentit un frisson ourir le long de son dos :

  • Et leur amour ? souffla-t-il.

Liawen lui offrit un regard tendre.

  • Il ne s’est jamais éteint. Leur union a donné naissance à une fille, une princesse portant l’héritage des deux mondes. Il est dit qu’elle liera à jamais les étoiles à la Terre.

Stéphane baissa les yeux :

  • C’est une belle histoire... et triste à la fois.

Liawen hocha la tête :

  • Les plus grandes histoires sont celles qui laissent une empreinte, même dans la douleur.

Il la regarda, troublé :

  • Tu crois à cette légende ?

Un ange passa. Elle chuchota :

  • Parfois, je crois que ce genre d’amour existe. Et toi ?

Il inspira lentement, le regard perdu dans le firmament :

  • J'aime à penser que même dans les ténèbres, il y a une lumière.

Liawen le fixa. Ses yeux brillaient :

  • Stéphane...
  • Oui Liawen ?
  • J'ai entendu dela musique lorsque je suis arrivé. Elle venait de ce drôle d'appareil que tu as dans ta poche.
  • Oh... C'est de la technologie... de la bonne technologie, dit-il en souriant. Ecoute, tu vas aimer !

Il refit jouer la playlist. Liawen parut comme hypnotisée puis elle se détendit :

  • Stéphane...
  • Oui...
  • J’ai apprécié que tu prennes la défense de ce pauvre homme tout à l'heure.

Il haussa les épaules:

  • Tu sais, tout le monde en aurait fait autant.

Elle secoua doucement la tête, une lueur grave dans les yeux.

  • Non, Stéphane. Je peux t’assurer que non.

Dans le calme retrouvé de sa chambre, Liawen s'allongea sur le lit. Elle tendit sa main en direction de Velkhan avant de carresser son épaisse fourrure grise. La Nylaris ronronnait de bonheur.

Le sommeil tomba plus vite sur Stéphane qu'il ne l'aurait cru. Mais la nuit ne fut pas paisible :

Une brume flottait autour de lui. Elle caressait sa peau comme un voile d'eau tiède. Il connaissait cet endroit, cette sensation.

"Stéphane..."

Il se retourna. Corinne se tenait là, baignée d'une lumière douce, indéfinissable. Son regard était grave, empreint de cette tendresse qui lui manquait tant.

"Tu avances, souffla-t-elle. Mais fais attention. Dans ta progression, tout ne sera pas ce qu'il paraît être."

Il voulait lui poser mille questions, lui dire qu'il avait besoin de plus, qu'il avait besoin d'elle. Mais sa voix resta prisonnière dans sa gorge. La brume s'épaissit, le froid se referma sur lui.

Corinne disparut telle une étoile filante.

Il ouvrit les yeux, haletant. La lumière du matin filtrait à travers les volets mal fermés. Stéphane resta un instant allongé. Ses pensées erraient entre son rêve et la réalité. Il se leva, s'habilla en silence, et partit rejoindre le reste du groupe qui l'attendait dans la salle commune.

Le vent du matin avait chassé la brume nocturne. L’air restait chargé d’humidité, comme si la nuit s’accrochait encore aux pierres de l’auberge. Sans un mot, Stéphane posa son sac sur une table et en resserra les sangles, le regard perdu sur l’horizon.

Liawen s'approcha de lui en baillant :

  • Mauvaise nuit ?

Il hésita avant de répondre. Le goût de son rêve était encore suspendu sur ses lèvres :

  • Corinne m’a parlé dans un rêve.

Elle ne répondit pas tout de suite. Son regard se durcit imperceptiblement, puis elle hocha la tête.

  • Et elle t’a dit quoi ?
  • Que tout ne serait pas ce qu’il paraît être à Valren.

Liawen soupira. Elle savait que ses rêves n’étaient jamais anodins.

  • Tu penses que c’est un piège ?

Stéphane lui lança un regard surpris.

  • Valren ? Non, je ne crois pas. Je pense seulement qu'il faudra être vigilant en y allant.

Elle esquissa un sourire alors que Geilweis s'approchait d'eux :

  • Tout va bien, s'enquit-il ?

Stéphane occulta la vérité :

  • Oui, juste une mauvaise nuit...

Ils prirent la route en silence. L’aube peinait à se frayer un chemin à travers un ciel bas et chargé. Elle diffusait une lumière blafarde sur le sentier couvert de neige fraîche. L’air était vif, chargé d’une odeur de givre et d’humus figé par le froid. Chaque pas des chevaux crissait doucement. Il brisait le silence d’une nature figée dans l’immobilité de l’hiver.

Après une heure de marche, le sentier s’élargissait. Il longeait une rivière aux eaux sombres bordées de glace où ils s’arrêtèrent prendre un repos de quelques minutes. A peine descendu de leur monture que chacun ajusta son manteau pour glisser ses mains sous ses bras, cherchant un peu de chaleur.

Le vent glacial s’accrochait aux mèches de cheveux de Liawen, les fouettant contre son visage. D’un geste rapide, elle les rassembla et les noua avant de resserrer son écharpe autour de son cou.

Mais une onde glaciale, plus oppressante encore que le froid, s'abattit sur le petit groupe. Un silence anormal tomba. La nature elle-même retint son souffle. Un bruissement dans la neige, un déplacement fluide et silencieux, à la limite du perceptible se fit entendre.

Velkhan grogna. Stéphane tourna la tête et les vit :

Trois silhouettes élancées. Trop grandes pour humaines. Elles se dessinaient entre des troncs dénudés. Leur peau grise pâle semblait absorber la lumière blafarde du matin. Leurs yeux noirs, immenses, reflétaient une intelligence insondable. Ils n'avaient presque pas de bouche, ni de nez. Des orifices se tenaient à la place des oreilles.

Les Taals !

"Nous faisons enfin connaissance", pensa Stéphane.

Teryn recula brusquement. Il trébucha une racine cachée sous la neige. Il émit un couinement étranglé et agrippa les rênes de son cheval comme s'il pouvait disparaître derrière l'animal.

  • C'est pas vrai... c'est pas vrai..., marmonna-t-il d'une voix tremblante.

Velkhan, elle, ne tremblait pas. son grondement devint une menace pure, instinctive. Son corps tout entier s'était tendu, prêt à bondir.

  • Ne faites rien, murmura Geilweis, les yeux fixés sur les créatures. Ne bougez surtout pas. Il posa doucement la main sur l'épaule de Mirok et fit signe aux autres de s'accroupir.

Liawen, immobile, scrutait les intrus avec la froide lucidité d'un prédateur. Elle avait posé la main sur son arc mais ne bougeait pas, attendant le moindre signe d'hostilité.

Les Taals avancèrent sans un bruit. Ils glissaient plus qu'ils ne marchaient sur le sol enneigé.

Puis, ils stoppèrent leur progression. Une pensée s'immisça dans l'esprit de Stéphane. Un son qui n'en était pas un.

"Les humains... quelle drôle de race... ils se croient supérieurs... Nous ferions mieux de les éradiquer... Ils seraient nos esclaves..."

Il tressaillit. Ce n'était ni une voix, ni un langage articulé. Seulement une impression qui naissait directement dans son esprit. Un murmure à l'intérieur de lui, une pensée qui ne lui appartenait pas.

Les Taals se trouvaient à quelques mètres, impassibles. Il ne leur sentit aucune émotion

Un vertige le prit. Une pression diffuse s'installa dans son crâne. Quelque chose cherchait à y entrer, à fouiller, à comprendre. Ce n'était pas une agression, juste... une connexion.

La présence de ces êtres dans son esprit n'était pas intrusive. Elle sondait, effleurait les contours de sa conscience comme un courant d'eau glacée. Il devait rompre ce lien, masquer leur présence avant qu'ils ne comprennent.

"Si je les entends, ils peuvent m'entendre"

Il ferma les yeux. Il enta d'éteindre cette connexion naissante, pensa au silence, à l'absence, à la neige qui recouvrait tout d'un manteau immaculé. Il ralentit son souffle, apaisa son esprit puis une pensée.

Une seule pensée. Le visage de Corinne, lui souriant :

"Tu veux un café, mon coeur ?"

Les Taals s'immobilisèrent. Leurs yeux noirs scrutèrent l'espace devant eux, mais ils ne semblaient pas les voir. Comme si, d'un seul coup, le groupe n'existait plus à leurs yeux. Le silence dura de longues secondes. Puis, sans un bruit, les créatures pivotèrent et s'éloignèrent. Leurs mouvements fluides se fondèrent dans le décor hivernal.

En quelques instants, elles disparurent entre les troncs noueux.

Stéphane releva les yeux. Il sentit son cœur cogner dans sa poitrine. Puis, ils se tourna et regarda les autres. Ils semblaient figés dans le temps, comme si l'action s'était passé au ralenti. Il comprit qu'il n'avait rien perçu. Seul lui avait ressenti cette étrange proximité. Il ferma les yeux une fraction de seconde, cherchant à savoir si ces voix était toujours présentes.

  • Qu'est-ce que... qu'est-ce qui s'est passé ? balbutia Teryn, encore livide.
  • Je ne sais pas, répondit Stéphane d'une voix rauque. Ils ne nous ont pas vus.

Liawen le dévisagea, l'expression grave :

  • Tu as fait quelque chose, souffla-t-elle.

Il secoua la tête, mal à l'aise.

  • J'ai juste pensé à... disparaître.

Geilweis le fixa à son tour puis détourna le regard :

  • Peu importe. Ce qu'il est arrivé, c'est arrivé. On ne traîne pas ici.

Liawen hocha la tête et remit son cheval en marche. Velkhan leva le museau et renifla l'air, à la recherche des Taals.

Stéphane jeta un dernier regard vers les bois avant de prendre les rênes et de suivre le groupe. Ils les avaient sentis, il étaient dans sa tête.

Le silence retomba sur la forêt alors qu'ils reprenaient la route, mais l'atmosphère n'était plus la même. Chacun jetait des regards furtifs autour de lui, tendu, attentif au moindre bruit suspect. Stéphane avait beau essayer de chasser l'étrange sensation laissée par sa rencontre avec les Taals, il ne pouvait s'empêcher d'y repenser. Ce lien qu'il avait perçu, cette connexion évanescente...

Était-ce une simple coïncidence ? Ou possédait-il réellement une forme de sensibilité à leur présence ?

La marche se poursuivit sous un ciel gris, les flocons recommençant à tomber en un voile léger qui étouffait le bruit de leurs pas. Après une bonne heure de progression prudente à travers la forêt, le paysage changea peu à peu. Les arbres devinrent plus clairsemés, et la neige s'amoncelait en congères sur les bas côtés du chemin. Ils arrivèrent sur des terres dégagées, balayées par un vent cinglant qui leur mordait le visage.

Puis, au détour d'un sentier bordé de collines blanches, Valren apparut.

Le château se dévoila à mesure qu'ils approchaient. Il émergea de la brume hivernale comme un vestiges d'un autre temps. Perché sur un léger promontoire rocheux, il dominait les terres enneigées alentours, ses remparts épais semblant défier les assaults du vent glacial.

Les pierres sombres qui le composaient lui donnaient une silhouette austère et robuste. Le château arborait ses hautes tours surmontées de toits coniques où s'accrochaient quelques plaques de neige. La façade principale, percée de meurtrières, n'offrait qu'un regard sévère aux étrangers. Le large fossé à moitié gelé, était traversé par un pont de pierre. A son extrémité, se trouvait une lourde porte en bois, protégée par une imposante herse abaissée.

De rares lueurs y brillaient, vacillantes comme des veilleuses dans l'ombre d'un crépuscule naissant. Teryn soupira :

  • Vous êtes sûrs de vouloir y entrer ?

Personne ne répondit à sa remarque. Chacun avait les yeux fixés sur les remparts de la bâtisse. Geilweis serra les rênes de son cheval. Il jeta un regard scrutateur sur la forteresse. Stéphane, lui, ne pouvait détacher son regard du château. Quelque chose dans ces vieilles pierres éveillait en lui un écho inconnu. Un sentiment diffus entre la familiarité et l'étrangeté, un mélange d'appréhension et de soulagement. Il n'était pas sûr d'aimer cet endroit mais ils n'avaient guère le choix. Valren signifiait la fin de ce voyage épuisant à travers la neige.

Même s'il devinait que d'autres épreuves les y attendaient entre ces murs.

Ils engagèrent leurs montures sur le pont. Leurs pas résonnaient contre la pierre froide. Stéphane fronça les sourcils. Quelque chose clochait. Ils n’avaient pas voyagé jusqu’ici pour se heurter à une forteresse close. Pourtant, aucune trace de guet, aucun cri d’alerte.

Le château n’attendait pas leur visite ou bien, il la redoutait.

Liawen ferma les yeux un instant, tendant son esprit vers l’invisible.

  • Il y a quelqu’un, murmura-t-elle. On nous observent. Mais, ils doutent. Ils ne savent pas qui nous sommes.

Un froissement. Une ombre sur le rempart. Puis un sifflement strident fendit l’air. Une flèche se ficha dans le sol, à quelques centimètres du pied de Geilweis. Il se pencha pour la ramasser. Un petit parchemin y était enroulé. Il le déplia d’un geste précis

"Partez. Vous n’êtes pas les bienvenus."

  • Charmant, grogna Teryn.
  • Ils ont peur, murmura Stéphane.

Il leva les yeux vers la muraille.

  • Nous ne sommes pas vos ennemis ! Nous cherchons un refuge !

Sa voix se perdit dans les pierres. Un long silence. Stéphane cria une nouvelle fois :

  • Mes amis et moi cherchons un gîte pour la nuit.

De nouveau un silence. Puis, une autre flèche. Celle-ci se ficha au pied de Stéphane :

  • Stéphane. Approche. Seul.

Un frisson parcourut son échine. Ils connaissaient son nom. Il se tourna vers ses compagnons. Teryn hocha la tête en souriant :

  • Tu es attendu, on dirait.

D’un pas mesuré, Stéphane avança. Chaque battement de son cœur résonnait dans sa poitrine. Lorsqu’il atteignit la porte, un grincement se fit entendre. Lentement, le lourd battant s’ouvrit sur l’obscurité. Deux silhouettes se dessinèrent dans l'embrasure. Deux hommes. L'un, en uniforme, tenait une arme inconnue aux yeux de Stéphane. L'autre, marqué par les années, avait un port militaire. Il s'affichait dans des vêtements qui lui semblaient familiers. Ils étaient de son époque, de son monde.

Le soldat s'adresse à lui d'un ton sec :

  • Toi seul. Entre.

Stéphane obéit. Il venait de franchir une porte qui allait bouleverser son destin. Guidé par le militaire qui le tenait en respect, il traversa la cour du château. Il sentait derrière lui la présence silencieuse de l'homme plus âgé. Un escalier monumental s'élevait le long des remparts. Il contournait l'édifice dans une ascension solennelle.

Ils s'arrêtèrent devant une porte massive de bois sombre, renforcée de ferrures épaisses. Le soldat prononça quelques mots dans une langue incompréhensible pour Stéphane. Presque aussitôt, la porte s'ouvrit de l'intérieur. Un autre garde, armé, leur fit signe d'entrer.

S'ensuivit un long dédale de couloirs austères. Leurs murs de pierre suintaient l'humidité et le silence. L'atmosphère pesait sur les épaules de Stéphane. Une tension sourde se noua dans sa poitrine.

Enfin, ils débouchèrent dans une vaste salle. Un trône se dressait en son centre

  • Restez ici, ordonna le garde avant de s'éloigner de quelques pas.

Stéphane tourna sur lui-même. Il observant cet univers inconnu. Des lustres allumés projetaient une lumière vacillante. Ils dessinaient sur les murs de pierre des ombres mouvantes aux allures spectrales. Puis, des pas résonnèrent sur le sol de granit.

Il se retourna.

Une femme venait d'apparaître. D'une beauté saisissante. Ses cheveux d'un noir profond encadraient un visage au port altier. Ses yeux, captivants, reflétaient un ciel de Provence. Elle le fixa longuement, comme si elle lisait en lui. Puis elle murmura, plus pour elle-même que pour les autres :

  • C'est lui. Celui des visions.

Une émotion fugace passa dans son regard, un éclat que Stéphane ne sut déchiffrer. L’homme âgé s’avança d’un pas mesuré jusqu’à se placer aux côtés de Stéphane. Son regard, empreint d’une autorité naturelle, se posa sur lui avant qu’il ne prenne la parole d’une voix grave et solennelle :

  • Jeune homme, vous vous tenez en présence de Son Altesse Elena de Lyraan, Princesse Héritière du Trône de Seyriss, Princesse des Océans et des Cités englouties de Velyria, Duchesse d’Alessan, Lune Majestueuse de Seyriss, Dame des Îles Royales d’Elenthis, Fille de la Grande Aerolia... et Régente de la Terre !

Annotations

Versions

Ce chapitre compte 5 versions.

Vous aimez lire A7x ?

Commentez et annotez ses textes en vous inscrivant à l'Atelier des auteurs !
Sur l'Atelier des auteurs, un auteur n'est jamais seul : vous pouvez suivre ses avancées, soutenir ses efforts et l'aider à progresser.

Inscription

En rejoignant l'Atelier des auteurs, vous acceptez nos Conditions Générales d'Utilisation.

Déjà membre de l'Atelier des auteurs ? Connexion

Inscrivez-vous pour profiter pleinement de l'Atelier des auteurs !
0