Partie 2
Au café Le Cygne pourpre, de nos jours...
- Ah te voilà enfin, Jérémy ! Je commençais à me demander si tu allais venir.
- Voyons Damien, tu sais bien que pour rien au monde je ne manquerais notre rendez-vous hebdomadaire sur cette belle terrasse !
- Alors donne-moi une bonne raison pour justifier ton retard.
- Sérieux, on se croirait en cours, là !
Damien et lui pouffèrent de rire puis il lui expliqua que ses parents avaient rendez-vous à la banque pour l’hypothèque de leur maison et qu’il devait garder sa sœur malade. Son ami se senti gêné et aurait voulu l’aider mais Jérémy lui certifia que leur jeu habituel lui apportait énormément de réconfort. Damien le remercia en souriant puis il observa son ami et son regard se posa sur une chaîne que Jérémy tenait à son cou :
- Je ne me souvenais pas que tu avais pour habitude de porter des bijoux, dit-il surpris. Qu'est-ce donc ?
- Ça ? dit son compagnon en extirpant la chaîne de dessous sa chemise, laissant apercevoir le collier en question. C'est un médaillon qui appartient à ma famille depuis des siècles ! On se le passe de génération en génération. C'est mon père qui me l'a donné, il l'avait oublié au fond d'un tiroir et l'a retrouvé par hasard.
- Il est magnifique ! Il a peut-être de la valeur.... L'as-tu fait expertiser ?
- Inutile, la seule valeur qu'il a est sentimentale. Bon alors, on commence ? demanda Jérémy en s'asseyant autour d'une table de la terrasse. Damien prit place en face de lui en acquiesçant.
Jérémy proposa à son ami de dessiner le rêve qu’il avait fait la nuit dernière. Damien n’était pas fermé à l’idée mais lui demanda de le lui raconter. Il commença :
- Une très jolie fille...
- Ah je vois : tu t'es encore imaginé câliner Jenny Wels !
- Ah non, pas cette fois. Pourtant, crois-moi, j'aurais préféré, vu l'état dans lequel j'étais à mon réveil. Je visualisais la scène : une petite fille rousse d'environ dix ans je dirais, concentrée par la lecture d'un bouquin. Mais pas comme si elle cherchait simplement le sens d'un mot en lisant plusieurs fois la phrase. Elle était concentrée et peut-être même frustrée comme nous quand on ne comprend rien à l'énoncé du devoir de français. Tu vois le genre ?
- Oui, trop bien même.
- Et puis je ressentais quelque chose aussi, comme si elle était triste.
- Tu ne lui as pas parlé ?
- Eh bien, j'aurais voulu, mais avant que je ne le puisse, l'image s'est effacée subitement et une jeune femme rousse d'une vingtaine d'année m’a transpercé de son regard noir.
- Et après, que s'est-il passé ?
- Je me suis réveillé, en sueur et complètement affolé, je ne savais plus où j'étais. Autant te dire que j'ai eu la peur de ma vie !
- Tu m'étonnes ! s'exclama son ami.
- D'ailleurs, en y songeant de nouveau, c'est depuis que j'ai ce médaillon sur moi que je fais inlassablement ce même rêve...
- Tu crois au hasard ?
- Oui... répondit Jérémy songeur. Bon, convaincu ? On le fait ce dessin ? finit-il par reprendre joyeusement. Damien accepta sans se faire prier.
Tandis que Jérémy griffonnait sans s'arrêter sa feuille Canson, Damien, lui, était « bloqué ». Certes son ami avait plutôt bien décrit la scène et la jeune rousse mais il n'arrivait pas à se l'approprier pour la dessiner : aucune de ses visions de la scène ne lui convenait.
Le portable de Jérémy se mit à vibrer sur la table :
- Désolé mon pote, faut que je réponde, c'est ma mère.
- Je t'en prie, vas-y.
- Oui, maman ?
- Jérémy, c'est papa. Ta sœur vient de nous appeler. Elle est très malade et nous sommes coincés dans les bouchons avec ta mère. Tu peux rentrer t'occuper d'elle ?
- Mais papa je suis avec Damien, là ! Je ne peux pas !
- Je sais bien que tu es avec ton ami, mais on ne peut pas faire autrement, ta sœur à besoin que quelqu'un soit avec elle, s'il te plaît.
- Bon, dac'. A plus, dit-il déçu.
- Je suis désolé Damien, il faut que j'y aille : ma sœur à besoin de quelqu'un et mes parents sont coincés sur la route.
- Ce n'est pas grave. Ne soit pas déçu, on continuera ça demain !
- Ouais... à demain.
Jérémy s'éloigna, triste. Damien sentait bien qu'il devait faire quelque chose pour aider son ami à se sortir des ennuis. Mais comment faire ?
Incapable de dessiner quelque chose qui l'aurait satisfait, Damien avait rangé ses affaires. Il sirotait un diabolo grenadine sur la terrasse du Café, quand il aperçut une jeune femme traverser la route pour passer sur le trottoir d'en face. Là, il comprit. Jeune femme rousse d'une vingtaine d'année, grande, svelte et très bien habillée. Avant de traverser la route, la jeune femme avait posé un regard très appuyé sur Damien. C'était bien elle, celle qu'il n'avait pas réussi à mettre sur le papier, celle qui avait terrorisé son ami : Jérémy avait rêvé de cette femme.
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