Ally

Nous étions début octobre. C'était une belle journée d'automne. Ce week-end, le groupe ne répétait pas, et Treddy était reparti pour Glasgow : c'était le dernier week-end où il pourrait voir sa fille avant que les Dark ne partent pour Londres, dans dix jours. Comme tous les vendredis soirs, Stair m'avait récupérée à la fin des cours et nous avions passé la soirée et la nuit chez lui. Je voulais profiter autant que possible de lui, avant cette prochaine séparation.

Après une grasse matinée câline et un brunch, nous avions décidé de sortir pour profiter du beau temps. J'avais alors proposé qu'on retourne au parc où nous allions ensemble, au début de notre histoire, quand j'étais encore au lycée. Je n'y étais pas retournée depuis le lendemain de la présence de Maggie et ses copains au Blue Limon, six mois plus tôt.

Nous fîmes d'abord une belle balade, main dans la main, tout autour du parc, prenant les nombreuses allées, traversant le petit bois paré des belles couleurs d'automne. Le soleil jouait dans les feuilles, c'était joli et apaisant.

- Demain, s'il fait encore beau, on pourrait faire une balade jusque sur la côte, si ça t'tente, me proposa Stair à un moment.

- Pourquoi pas ? On emmènera un pique-nique alors. Faudra pas qu'on se lève trop tard pour en profiter...

Il me sourit d'un air taquin :

- Ouaip, faudra pas musarder au lit comme ce matin.

- C'est de ta faute...

- Non ! fit-il en ouvrant de grands yeux. Et pourquoi ce serait de la mienne ?

- Tu me tentes trop.

- C'est la meilleure. C'est toi qui m'tentes...

Nous éclatâmes de rire. Un rire frais et joyeux, comme la lumière de ce début d'automne. Puis il déposa un léger baiser sur mes lèvres.

Nous finîmes par gagner notre banc et je m'assis sur ses genoux, légèrement de profil. J'avais passé mes bras autour de son cou, appuyé ma tête contre son torse. J'entendais battre son cœur contre mon oreille. Ce son se mêlait au chant des oiseaux et du vent léger qui passait entre les branches. J'étais bien. Juste bien. Comme après la première nuit de nos retrouvailles, quand, après lui avoir coiffé les cheveux, il m'avait prise entre ses bras, que nous étions restés un long moment ainsi.

- Stair...

- Hum ?

- Je suis bien, là. Juste bien.

Je le sentis sourire :

- Moi aussi, baby. Juste bien. Et heureux.

Je souris à mon tour.

Stair

J'aimais bien ces journées tranquilles. Quand j'avais demandé à Ally si elle avait beaucoup de travail à faire le week-end, elle m'avait répondu que sauf exception, elle réussirait à s'en occuper les soirs de semaine, au moins jusqu'à ce que je parte pour Londres, avec les Dark. On pouvait donc être tous les deux, le plus possible.

Elle était nichée dans mes bras et nous profitions simplement de ce moment. C'était juste bon. Juste bien. Un merle qui vola à vive allure au-dessus de la pelouse en contrebas en lançant son cri pointu me tira de ma torpeur. Tout en gardant Ally contre moi, je me redressai et m'adossai au banc.

- Tu sais... J'étais rev'nu là, pour écrire Reviens !.

- Oh... fit-elle avec étonnement.

- Quand... Quand j'ai parlé avec Jenna, j'ai tout de suite compris qu'il fallait que je fasse quelque chose. Que ça ne pouvait plus durer et surtout... Je ne voulais plus que tu aies mal, que tu souffres... A cause de moi. Dans les heures qui ont suivi, j'ai beaucoup joué. Petit à petit, j'ai commencé à entrevoir une ligne de basse, une mélodie. C'était encore très fragmentaire, mais ça se dessinait. J'ai pensé aussi à c'que Lynn avait fait, avec Redemption. Je savais que j'allais devoir écrire les paroles. Et là... C'était beaucoup plus compliqué pour moi. Alors, je me suis dit que j'allais m'rapprocher de toi. Chuis d'abord retourné au pub où on avait fait connaissance, puis ici.

- Tu as mis du temps à écrire les paroles ?

- Une bonne semaine. Par moments, j'avais l'impression d'avoir trop à dire, que les mots se bousculaient. Parfois, c'était l'inverse, le grand vide. Et après... Après, les gars m'ont aidé. Pour construire la chanson, la peaufiner. On n'avait plus beaucoup d'temps devant nous pour la répéter, pour qu'elle soit prête pour le concert.

- Tu savais que j'étais là ?

- Non. Jenna me l'avait pas dit. J'pense... qu'elle voulait pas me mettre plus de pression. De toute façon, j'avais décidé d'jouer en étant sûr que t'étais là.

- Des fois... Quand j'y repense, j'ai encore du mal à réaliser.

- A réaliser quoi ? demandai-je doucement.

- Que tu as écrit une chanson pour moi. Ca donne... presque un sentiment de vertige.

Je souris doucement, l'embrassai dans les cheveux.

- C'était... le plus simple pour moi. J'aurais p't-être pu aller t'chercher un soir, à la sortie du Blue Limon, ou un truc dans l'genre... Pas à la sortie de l'école, j'aurais pas voulu te mettre de la pression par rapport à tes cours, tout ça. Mais au pub, oui. Pour t'obliger à m'écouter. Mais comme j'étais parti sur l'idée d'la chanson...

- C'était une très belle idée, me dit-elle. Je l'aime beaucoup. Et je t'aime tout court.

- J'l'ai écrite... avec tout mon cœur, Ally. Avec tout mon amour.

Elle s'écarta un peu de moi et nous nous regardâmes un moment, avant de nous embrasser.

Ally

- Viens par là.

Nous venions tout juste de franchir la porte de l'appartement que j'attrapai Stair par le bas de son t-shirt et le tirai avec moi jusqu'à la chambre. Il me fixa, un instant surpris, puis je vis une lueur à la fois douce et chaude s'allumer dans son regard. Il avait très bien compris mes intentions. Il me poussa tout autant que je le tirai, jusqu'à me faire tomber en arrière sur le lit. Je me retrouvai juste en-dessous de lui, ses mains autour de mon visage.

- Pourquoi fallait v'nir là ?

- Pour ça ! répondis-je en glissant mes mains sous son t-shirt pour le lui retirer.

Eddie en version hallucinée vola dans la pièce. Puis je m'occupai de déboutonner ses jeans, quand il m'arrêta.

- Attends, l'tiroir est vide...

Sous-entendu, il n'y avait plus de préservatifs dans le tiroir de la table de nuit. Je souris alors :

- On pourrait faire sans, non ? Je prends la pilule, Stair.

Il me regarda comme si j'avais parlé dans une langue étrangère.

- Hein ?

- J'ai profité de mon retour à Manchester au mois d'août pour m'occuper de ça. Ca fait maintenant plus d'un mois et demi que je la prends. On court aucun risque.

- Tu...

Il était toujours sous le coup de la surprise, comme s'il avait été saisi d'une soudaine tension. Je lui souris, caressai sa joue, puis rapprochai son visage du mien pour l'embrasser. Je fis durer ce baiser jusqu'à ce que je sente qu'il se relâchait un peu. Je repris alors mon expédition autour des boutons de ses jeans.

- Ally... fit-il en se redressant pour me regarder.

Nous demeurâmes immobiles un instant, à nous fixer. Puis ses mains se glissèrent sous mon pull, qui rejoignit bien vite Eddie sur le plancher. Et ce fut ensuite avec mon propre pantalon que Stair se mit à batailler.

Une fois nus, on se glissa sous les draps, couchés face à face. Sa main caressait doucement mon cou, la naissance de ma poitrine, s'aventurant par moments à frôler la pointe de mon sein. Je le caressai pareillement, sans oublier de m'attarder un peu sur sa salamandre.

- Ally... J'l'ai jamais fait sans.

- Moi non plus, répondis-je en souriant. Ca va être une première.

Il me répondit par un sourire, avant de m'embrasser délicatement. Il me paraissait comme hésitant, presque... impressionné. Au fond de moi, j'étais très heureuse : je n'avais pas été sa première fille, il n'avait pas été mon premier garçon. Mais nous allions quand même partager une première fois un peu particulière pour nous deux. Je n'avais pas besoin de plus : juste de vivre des moments comme celui-là avec lui.