Chap 41 : Anne, Jules, Juste et la Rouquine
- Enfin te voilà mon fidèle et loyal ami, je pensais que tu avais été aspiré par tes bouquins.
- Je n’allais pas t'abandonner à ton sort bien que te connaissant tu n'avais pas besoin de moi pour partir à sa recherche.
- Sabre en main, je défie les gredins et remet à sa place les vauriens mais sans ton savoir j' errais dans les bas fonds des océans.
- Je t’ai appris l’art et la manière de manœuvrer les galions par grand beau et tempête, à te repérer à l’aide du moindre indice que l’univers t'offre.
- Et si je te disais que j’ai seulement envie de t’avoir à mes côtés pour me rassurer, tu es le seul à qui je confierai ma vie et celle de mon fils depuis que ma chère et tendre à péri sous le joug de ce tyran.
- Anne, ne soit aussi si dure avec toi-même, tu n’y peux rien, lutter contre l’ignominie d'un tel homme était suicidaire. Partir le retrouver pour te venger aurait été voué à l’échec et tu aurais mis en péril tout ton équipage.
- Pourtant aujourd'hui, je n’ai pas le choix, ce fourbe est derrière ce plan tordu.
- Comment peux-tu en être sûre ? Il n'est hélas pas le seul à vouloir découvrir où tu caches ton trésor.
- Et à me mettre dans son lit, rugit-elle excédée par les souvenirs brouillant sa vue.
La scène est surréaliste, le bateau, amarré au quai, tangue de droite à gauche, ballotté par le roulis de l’eau. Sur le ponton, la tension est palpable et contraste avec les festivités qui se déroulent sur la terre ferme. Sur les terrasses des troquets, les hommes trinquent en levant leur chope de bière. Des enfants se faufilent entre les caisses prêtes à être embarquées pour jouer à chat. Un petit groupe moins intrépides chantent en choeur :
Allez venez sur mon bateau
Découvrir les flots
Prenez votre baluchon.
Quand nous reviendrons
À bord de notre galion
Nous aurons dans nos poches
Des tas de pièces d’ors
Un véritable trésor
Une sacrée belle pioche.
Des femmes se blottissent dans les bras de leurs maris. Les pauvres fous sont prêts à tout pour retrouver leur maîtresse aux doux reflets argentés. Les épouses ne peuvent pas rivaliser avec la déesse des mers. La rugissante les appelle et eux repartent à ses côtés. Dès que les voiles auront fondus dans l’horizon, elles rangeront leur larme, vaqueront à leur occupation avant de prier tous les soirs pour que cette fourbe aux courbes soyeuses soit clémente avec leur bien aimé. Parce qu’elles, elles savent que si Atlande se montre colérique, elle les emportera dans son sillage et il ne le restera plus alors que leur mouchoir.
- Juste, nous n'avons plus de temps à perdre, si nous tardons à prendre la mer, leur avance sera considérable.
- Anne, soyons prudents, je comprends ton empressement et ton inquiétude, mais partir sans plan serait …
- Absurde, le coupe-t-elle.
La femme qui se tient fière à la barre ne quitte pas des yeux le libraire. Maintenant je connais son nom, est-ce pour autant rassurant ? Je ne comprends pas comment j’ai pu me retrouver sur ce bateau. Mon dernier souvenir, une bouteille et un grand courant d’air.
- Victor, bienvenue à bord de La Rouquine, me salue la capitaine.
- Je ne sais pas encore ce que je dois comprendre à tout ce qui m’arrive.
- Samy m’a parlé d’un ami qui lui était cher et que si un jour il avait des ennuis, tu saurais le retrouver.
Je ne sais ce que je dois penser de toute cette histoire. Pourquoi pourrai-je retrouver son fils au nom de Samy ? Comment ai-je atterri ici ? Je suis en train de rêver ? Je vais me réveiller. Y avait-il un truc suspect dans le thé ? Un voyage temporel mais pourquoi moi ? Dois-je comprendre que Samy s’est vu embarquer dans le même délire. Allez arrête Victor, tu vas te réveiller dans ses bras et vous pourrez reprendre la route paisiblement dans votre camping car.
- Capitaine, nous sommes prêts à lever les voiles, s'époumone le marin en remontant l’ancre.
- Attendez-moi, crie un jeune moussaillon sur le quai.
- Dépêche-toi de monter à bord Jules, nous aurions pu partir sans toi.
- Pardon maman, j’ai trouvé ce chien qui errait sur les quais et il semblait vouloir me suivre sans y être invité.
- Ulysse, non j’y crois pas que fais-tu là toi aussi ? m'écrié-je.
- Tu le connais, me demande aussitôt l’enfant, un tantinet déçu.
- Il est possible que ce soit mon compagnon.
- D’ailleurs t’es qui toi ? Je t’ai jamais vu à bord.
- Un ami de ton grand frère, précise Anne en lui caressant les cheveux.
- Pourquoi ne m’en a-t-il jamais parlé ?
- Peut-être parce qu’il a ses petits secrets.
- Dis, tu vas nous aider à le retrouver ?
- Je ne peux rien te promettre mais je pense qu’Ulysse pourrait bien être utile à sa façon.
- Alors sois bienvenu à bord, tu pourras dormir sur sa couche si tu veux, elle est juste à côté de la mienne. Et on trouvera une petite place à ton chien pas loin de nous deux.
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