Il était une fois un
Il était une fois un
Malheureux citadin
Qui attendait un train
Au petit matin.
Il se désespérait
De le voir arriver,
À l'instar du Grand Amour.
L'emporterait-il un jour ?
Il était une fois deux
Bienheureux amoureux
Flânant sur les quais
Sans nullement se soucier
De l'instant présent
Ni du moment
Où la rame apparaîtrait.
Tandis que le jeune homme tristounet
Commençait à douter de lui,
L'Amour avait surgi.
Après le boulot,
À la sortie du métro,
Une passagère égarée
Lui avait demandé
De la guider
Dans le dédale des allées.
Vêtu de sa chemise hawaïenne,
Il l'avait accompagnée
Au milieu de la grisaille parisienne
En lui parlant du Louvre et de la Seine.
Le moment s'était prolongé ;
Ils s'étaient raconté
Leur vie, leurs passions, leurs projets.
Chaque jour, ils se retrouvaient,
Puis ne s'étaient plus quittés.
Il était une fois trois
Cœurs esseulés
Qui ne l'étaient plus
Depuis qu'ils formaient
Une tribu.
Voué à un funeste sort,
Un chétif labrador,
S'était glissé,
Épuisé,
Sous la table de la terrasse d'un café
Que le nouveau couple occupait.
Alarmés par l'inquiétant halètement
De ce chien errant,
Les amoureux l'avaient aussitôt ramené chez eux
Et entouré de tant d'affection
Que, pour l'animal en question,
Ce fut une douce révolution.
Plus habitué aux coups ou aux injures,
Sa vie d'avant n'avait été que tortures.
À côté,
Celle-ci lui paraissait
Un rêve éveillé.
Il croisait les pattes
Pour qu'il ne s'arrête jamais.
Il était une fois six
Êtres comblés
Qui partageaient
Un bonheur illimité.
Contrairement à ce qu'ils croyaient,
Les tourtereaux n'avaient pas adopté
Un mâle fort mal-en-point,
Mais une adorable femelle en manque de soins.
Elle s'était sauvée de l'endroit où elle vivait
Pour protéger les trois petits trésors,
Cachés,
Dans son misérable corps.
Les trois craquants chenapans
Naquirent et vécurent choyés
Dans le plus chaleureux des foyers
Auprès de leur maman exténuée
Et des jeunes mariés,
Plus amoureux que jamais.
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