La sonnerie retentit à nouveau, marquant le début de la pause déjeuner. Je n'attends même pas que le prof nous donne l'autorisation de quitter la salle. Je glisse mon cahier et ma trousse encore fermée dans mon sac et quitte la salle sans un mot.

Les couloirs de l'école se remplissent rapidement d'élèves affamés qui se bousculent pour arriver à la cantine. Très rares sont ceux qui rentrent manger chez eux car, pour la plupart, leurs deux parents travaillent toute la journée et ils n'ont aucune envie de se casser la tête à cuisiner par eux-mêmes. En ce qui me concerne, je ne rentre pas à midi parce que je n'ai aucune envie de croiser mon père à la maison. De toute façon, il ne sait même pas cuisiner et les rares fois où il fait des efforts, c'est juste immangeable.

J'entre donc dans la cantine au milieu de la foule d'élèves et empoigne un plateau pour faire la queue. Lorsque mon tour arrive, l'employée me sert une portion de frites, du poulet pané et une pomme. Je vais m'asseoir à une table, dans un coin de la salle, pour manger tranquillement.

C'est alors que du coin de l'oeil, j'aperçois cette fille s'avancer à son tour, plateau en mains, vers l'employée qui se charge du service. Je vois son visage prendre une mine déconcertée lorsque la femme lui sert son repas. Elle semble hésiter pendant quelques secondes, avant de ne prendre que la pomme et de se diriger vers le distributeur d'eau, laissant son plateau plein sur le meuble en métal, sous les yeux ébahis de l'employée.

Alors comme ça, mademoiselle fait la fine bouche. La nourriture servie ici ne correspond pas à Son Altesse. Non, mais pour qui elle se prend ? ! Elle commence sérieusement à m'exaspérer avec ses manières hautaines !

Je finis mon repas de mauvaise humeur, sourcils froncés, en fixant du coin de l'oeil cette fille croquer dans sa pomme après s'être servi un verre d'eau. Dès que mon plateau est vide, je me lève pour le poser à l'emplacement prévu à cet effet, mais en passant près d'elle, je donne un coup de bras à son verre. Ce dernier glisse de la table et tombe sur les genoux de l'adolescente avant d'atterrir au sol, se brisant en mille morceaux. Le liquide coule sur sa robe blanche. Elle regarde la scène avec étonnement. Je quitte ensuite la cantine sans un mot, mais, lorsque je regarde en arrière pour voir si elle va se mettre en colère ou juste pleurnicher, je constate qu'elle me sourit. Déstabilisé par cette réaction inattendue, je détourne aussitôt le regard et m'éloigne, furieux.

Cette sale peste se fiche ouvertement de moi ! Elle va voir ce qu'elle va voir, elle ne perd rien pour attendre. Je vais lui donner une leçon dont elle se souviendra toute sa vie !