L'interrogatoire de Lisa

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Alex décolle son oreille du plancher et ramasse en précipitation nos affaires, avant de m'attraper par le bras pour m'entrainer derrière lui. Il descend des combles au pas de course, jette un rapide coup d'oeil par l'une des fenêtres, puis descend l'escalier de secours métallique en courant.

Je ne comprends absolument pas ce qui se passe, mais je déduis de l'attitude du jeune homme que quelques chose de grave est en train de se produire. Quelque chose qui l'inquiète en tout cas.

Lorsque nous arrivons dans la rue qui se situe derrière l'usine et qui est celle sur laquelle donnent les escaliers de secours, j'aperçois les lumières rouges et bleues des sirènes de police et comprends alors : c'est d'eux qu'Alex est en train de fuir.

J'attrape les mains de mon ami en freinant ma course, arrêtant la sienne par le même coup. Il me lance un regard plein d'incompréhension et tire sur mes bras pour me pousser à continuer à courir, mais je m'y oppose.

Deux policiers arrivent au même moment au coin de la rue et nous remarquent. Ils nous font alors signe de ne plus bouger et avancent vers nous.

La panique se lit aussitôt dans les yeux d'Alex. Ses yeux gris se posent sur les deux policiers qui approchent inexorablement, puis sur moi, qui le fixe avec un regard plein d'assurance, sans sciller. Je sens ses mains trembler dans les miennes. Tous ses membres sont tendus. Cependant, il ne cherche plus à fuir.

C'est mieux ainsi. Il doit arrêter de toujours fuir ses probèmes et ses peurs. Il faut qu'il affronte son destin, c'est le seul moyen qu'il a d'arranger les choses. Fuir et se cacher ne règle jamais rien.

Les policiers arrivent à notre hauteur. En voyant que nous ne leur opposons aucune résistance et que nous ne représentons aucune menace, ils rangent leurs armes et ne prennent pas la peine de nous passer les menottes. Ils nous demandent tout de même de les suivre, sans doute pour une simple vérification au commissariat. C'est en tout cas ce que je comprends lorsque l'un d'eux passe une main derrière mon dos pour me conduire à l'un des véhicules.

Alex et moi nous installons sur la banquette arrière et mettons nos ceintures de sécurité. En tournant la tête vers mon ami, je constate que ce dernier affiche une expression calme et impassible, mais le léger tremblement de ses mains trahit son inquiétude.

Après plusieurs minutes de route, la voiture s'arrête devant le commissariat. L'un des deux policiers nous ouvre la portière et nous entrons avec eux dans le bâtiment aux murs blancs. Ils nous guident dans les couloirs, jusqu'à arriver devant une pièce où l'un des hommes me fait entrer, pendant que l'autre emmène Alex autre part.

La salle où j'entre est plutôt petite et n'est meublée que d'une table et de deux chaises en métal qui trônent au centre de la pièce. Sur la table se trouve une lampe de bureau et un petit ordinateur. Les murs sont blancs et vides. Tout cela donne à l'endroit une atmosphère froide et triste.

L'agent de police allume la lampe et m'invite à m'installer sur l'une des chaises. Je lui obéis calmement. Il s'assied en face de moi et ouvre l'ordinateur. Il s'affaire dessus quelques instants, avant de bouger les lèvres. Je comprends qu'il est en train de me parler, mais n'entends rien de ce qu'il me dit, naturellement . . . Je lui fais donc signe que je suis incapable de l'entendre. Il se lève aussitôt et quitte la pièce, en prenant bien soin de verrouiller la porte derrière lui.

Il revient quelques minutes plus tard avec une femme, qui porte aussi l'uniforme de la police. Elle prend place en face de moi, sur la chaise qu'occupait son collègue peu de temps auparavant et s'adresse à moi en langue des signes :

- Bonjour. Étant donné la situation, c'est moi qui vais m'occuper de ton interrogatoire. Tu n'auras qu'à répondre à mes questions en toute franchise et tout se passera bien, tu verras.

Je hoche la tête pour lui indiquer que j'ai compris. Elle poursuit :

- Commence par décliner ton identité.

- Je m'appelle Lisa Lone.

Elle tape sur les touches du clavier de son ordinateur, puis me demande :

- Que faisais-tu dans cette zone industrielle à l'abandon ?

- Mon ami et moi nous rendons là-bas après les cours pour faire nos devoirs ensemble et discuter tranquillement.

- Il n'y avait que vous dans cet endroit ?

- Non, il y a des gens qui occupent les étages inférieurs, mais nous ne nous mêlons pas de leurs affaires. Nous ne le leur avons même jamais adressé la parole et ils n'étaient pas au courant de notre présence.

- Pourquoi avoir choisi un endroit aussi peu accueillant pour passer du temps entre amis ? Pourquoi ne pas vous retrouver chez vous ou dans un quelconque autre lieu ?

- Nous voulions avoir un endroit rien que pour nous deux, sans que nos parents ni personne d'autre ne puissent nous déranger, ce qui n'est pas possible à la maison. Mon ami connaissait déjà cet endroit avant de m'avoir rencontrée et il m'a proposé qu'on s'y rende après l'école pour y être tranquilles. J'ai accepté.

- Vous avez essayé de fuir avec l'arrivée de mes collègues ?

- Oui, au début, on s'est dit qu'il valait mieux déguerpir pour éviter des problèmes inutiles, mais finalement, on s'est rendu compte que fuir ne ferait qu'accentuer les soupçons sur nous et que puisque nous n'avons rien fait de mal, nous ferions mieux de nous rendre sur le champ sans résistance afin de ne rien risquer.

- Sage décision, en effet.

Elle prend encore quelques notes sur son ordinateur, avant de me demander :

- Savez-vous pourquoi nous sommes intervenus dans ce bâtiment ?

- Non, mais j'imagine que c'est parce que les gens qui occupaient les étages inférieurs ont fait quelque chose de mal . . .

- En effet. Êtes-vous au courant de leurs activités ?

Je secoue la tête, à la négative. Je me doute bien qu'Alex en sait quelque chose, mais il ne m'en a rien dit et je n'ai pas cherché à savoir. Je suis contente de pouvoir couvrir mon ami sans avoir à mentir.

La femme tape encore sur les touches de son clavier, puis ferme l'ordinateur et m'informe :

- Bien, c'est tout. Merci pour ta coopération. Nous allons appeler tes parents pour qu'ils viennent te chercher. En attendant, tu vas attendre dans le couloir.

Elle se lève ensuite et me fait signe de la suivre. Nous sortons de la pièce et elle me fait asseoir sur un banc, avant de s'éloigner.

Je sais que je ne risque absolument rien. Les policiers ont bien compris que j'étais juste au mauvais endroit au mauvais moment et je vais bientôt pouvoir rentrer à la maison. En revanche, je ne suis pas aussi sereine en ce qui concerne Alex. Lui n'est pas aussi innoncent que moi et j'ai bien peur que les policiers découvrent ses délits et le condamnent sévèrement pour ses erreurs . . .

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