Chapitre 38 - 1

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  La foule les hua. Aquilée frissonna. La tension monta pendant qu’ils se firent escorter à l’écart du village, au pied d’un mont unique dans lequel était creusé deux entrées distinctes.

  Le gourou leur fit face, accompagné de quatre de ses congénères armés jusqu’aux dents. L’elfe noir les toisa et désigna la montagne de son grand bâton orné de crânes et de roues dentées.

— Voici le Chemin de la Mort. Œil-de-Sang veut vous tester sur cette épreuve. Il déterminera ainsi si vous êtes dignes d’avoir votre place dans le monde qu’il veut créer.

  Un mauvais sourire flotta sur son visage.

— Vous avez le droit de choisir votre chemin. Si vous arrivez les premiers au sommet, en admettant que vous y parveniez, vous gagnerez l’orbe. Il faudra nous tuer pour gagner votre liberté.

— Bien sûr, choisissons au pif ! railla Wil.

  Lya lui donna un coup de coude dans les côtes.

— Un instant, ordonna une voix semi métallisée et glaciale.

  Tous se retournèrent et aperçurent Œil-de-Sang l’homme sinistre à l’œil fixer Whélos avec une lueur meurtrière dans les yeux.

— Fouillez-le.

— Whélos ! s’écria Aquilée en tentant de s’interposer.

  Le chercheur l’arrêta du regard et avança vers les elfes qui le fouillèrent sans ménagement. Karel, comme les autres, se demanda ce qui était à l’origine d’une telle méfiance. Whélos resta parfaitement calme.

  Enfin, les elfes le relâchèrent, mais Œil-de-Sang serra son poing normal.

— Ses bottes.

— Allons, pourquoi tant de violence ? interrompit Whélos. Je ne suis qu’un Sans-Pouvoir, vous savez…

  Il retira ses bottes de voyage et laissa leurs gardiens les fouiller. Mais ils ne trouvèrent rien. Œil-de-Sang toisa Whélos d’un regard soupçonneux.

— Dans les semelles.

  Les elfes fouillèrent. Whélos soupira en réajustant ses lunettes. Ses compagnons n’osaient plus respirer, craignant de déclencher la fureur de leurs ennemis. Qu’est-ce que Whélos cachait ?

— Ah là là, quels vandales… C’est malin, je vais être obligé de m’en repayer d’autres !

  Les elfes se retrouvèrent encore une fois bredouilles. Ils jetèrent les bottes de Whélos à ses pieds. Il se rechaussa sous le regard intense et menaçant d’Œil-de-Sang.

— J’aimerai récupérer mon sac avec son contenu. C’est tout ce que je possède pour me défendre. Inutile d’avoir autant d’animosité.

  Les quatre Sorciers fixèrent Whélos, désarçonnés et admiratifs de le voir agir avec un tel flegme devant de redoutables ennemis.

  Œil-de-Sang exécuta un mouvement sec de la tête et les elfes leurs arrachèrent les disques anti-magie en leur rendant leurs artéfacts. Ils grimacèrent de douleur. Karel se frotta les mains pour chasser la douleur, répandant un peu de sang sur sa peau.

— Vous êtes bien surprenants, comme gens, chuchota Wil. Un gars muet avec deux pouvoirs, une fille avec un don draconique et un Sans-Pouvoir qui cache des tours dans sa manche. La rouquine, c’est quoi, ton excentricité ? Je commence à en avoir ma claque, des surprises, ça serait donc sympa de m’y préparer, cette fois.

— Je n’ai pas le temps pour ces bêtises, lui riposta Lya. Pour l’instant, je suis occupée à essayer de sortir de ce guêpier, si tu vois ce que je veux dire.

  Le gourou désigna à nouveau les deux chemins, au bout desquels deux cavités les attendaient.

— Choisissez. Que votre jugement soit rendu !

  Wil leva les yeux au ciel. Karel préféra rester discret. Inutile de provoquer plus encore leurs ennemis. Il rassembla ses réflexions. Devait-il réellement croire Serymar ? Karel redoutait d’avoir un jugement biaisé par un besoin de voir une vérité qui pourrait le rassurer, tout humain qu’il était.

— Le jugement ne peut attendre ! les menaça le gourou.

— Non, mais attendez ! s’insurgea Lya. Comment pouvez-vous nous condamner comme ça ?! Vous voulez nous affronter en connaissant déjà tous les pièges !

  Les guerriers elfes avancèrent pour se positionner et Karel, pris de panique, désigna le chemin de droite.

« Fichus pour fichus… » soupira-t-il, peu assuré.

— On peut savoir pourquoi cette voie ? interrogea Wil, soutenu par leurs compagnons.

  Karel ne leur répondit pas et les toisa.

« Ce n’est pas le moment de répondre aux questions ! »

  Il redoutait d’avoir pris la mauvaise décision. Si ses compagnons de route perdaient la vie ou étaient gravement blessés, il ne s’en remettrait jamais. Karel risqua un œil vers le gourou et fut surpris de déceler de la contrariété dans ses yeux rouges.

« Ainsi, vous connaissez vraiment ces gens et leurs absurdités… Et vous m’avez dit la vérité sur le chemin à prendre. »

  Si Karel ne comprenait rien aux intentions de Serymar, il était au moins soulagé. Il ignora le regard pesant d’Œil-de-Sang. Il frissonna.

« Cet homme… Que l’on s’en sorte ou pas, c’est certain, nous le reverrons. Comme si nous n’en n’avions pas déjà assez de Phényxia. »

  Karel se positionna sur le chemin choisi, suivi de ses compagnons. Le groupe d’elfe prit place sur le chemin de gauche.

— Que le jugement soit rendu ! cria le gourou. Gloire à Œil-de-Sang !

  Ce fut le signal. Les deux groupes partirent en trombe et l’obscurité les enveloppa dès lors qu’ils franchirent le seuil de la galerie.

  À peine entrèrent-ils qu’un rideau d’eau bouillant surgit pour les engloutir. Aquilée tendit sa paume et Karel sortit un gland de sa poche qu’il jeta dans l’eau et la fit éclore. La plante absorba une bonne partie de la masse aqueuse déjà repoussée par Aquilée. Ils passèrent dans la salle suivante.

  Une paroi leur barra la route. Karel attrapa la personne la plus proche de lui par le bras, Whélos, et invoqua une plateforme terrestre pour les hisser tous les deux. Aquilée déploya ses ailes de dragon, Wil saisit Lya et créa une plateforme d’eau pour les propulser. La sortie de la pièce se dressa devant eux. Ils s’y engouffrèrent.

  Un couloir étroit les accueillit. Ils continuèrent de courir, ne manquant pas de remarquer une vitre translucide sur le côté qui dévoila la pièce adjacente : les elfes s’y trouvait et étaient ralentis par les pièges mécaniques Avancés aussi dangereux que complexes.

  Ils pénétrèrent dans la pièce suivante et s’immobilisèrent, surpris de ne rien trouver d’anormal. Chacun échangea un regard. Ils devaient faire vite et conserver le peu d’avance qu’ils avaient. Ils approchèrent de la paroi à l’autre bout de la salle, méfiants. Soudain, des murs de flammes jaillirent de tous les murs de la pièce. La barrière se réduisit si vite qu’ils durent se serrer les uns contre les autres pour ne pas se brûler. Lya voulut agir, mais Wil la retint.

— Je gère. Passez devant !

  Il saisit la boussole pendue à son cou et exécuta un large mouvement circulaire de son bras, inondant la pièce et insista sur la barrière qui bloquait l’accès à la prochaine salle. Le groupe décida de lui faire confiance et s’engouffra dans la brèche le plus vite qu’ils purent. Une fois certain que tout le monde était passé, Wil dirigea sa boussole vers ses pieds : un geyser d’eau le propulsa en l’air et il atterrit avec souplesse en haut de la paroi aux côtés des autres. Ils s’empressèrent tous de passer la prochaine porte.

  Arrivés vers le milieu de la pièce, le sol et les murs se mirent en mouvement. Des lianes apparurent de partout. En haut, en bas, sur tous les côtés. Karel saisit son épée, mais Lya lui posa une main sur son bras en lui jetant un regard entendu. Elle invoqua plusieurs flammes qui rétractèrent les lianes. Le groupe se dépêcha d’avancer.

— Ils nous ont presque rattrapé, dépêchons-nous ! intima Wil, inquiet.

  Ils grimpèrent aussi vite qu’ils le purent et traversèrent une autre porte.

Dans la pièce suivante, aucune magie ne se déclencha lorsqu’ils arrivèrent à la prochaine porte, scellée. Un texte apparut dessus.




Né entre les deux mondes,

Les pouvoirs tous réunis en un seul,

Apportera la gloire aux elfes noirs,

Cœur de l’arme ultime,

Il nous élèvera.

À la manière de nos Créateurs,

Nous bâtirons un nouveau monde.




  Chaque Sorcier se regarda, à la recherche d’une réponse. Ce fut après quelques secondes de réflexion qu’une expression choquée s’afficha sur le visage de Whélos.

— …le Pouvoir Universel, répondit-il d’une voix blanche.

  La porte s’ouvrit. Whélos dut se faire violence pour bouger et mettre ses conclusions de côté.



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