Chapitre 52

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  Après avoir soigneusement amarré son navire et s’être assuré que la mer démontée plus loin ne risquait ni de l’emporter ni de l’endommager, Wil vérifia à nouveau un nœud d’amarrage pour se rassurer.

  Karel s’approcha et lui tapa gentiment l’épaule. Wil sursauta et se redressa. Lorsqu’il vit l’expression de Karel, il afficha une mine gênée et se gratta l’arrière du crâne.

— Tu exagères, je n’ai rien fait d’exceptionnel… Ne me place pas plus haut que ce que je suis.

— Attends, tu plaisantes ? lui envoya Lya. Depuis deux siècles, plus aucun marin n’ose braver la mer ! Seul ton peuple, et peut-être le Clan de l’Eau malheureusement, en sont capables. Personne d’autre n’aurait réussi !

— C’est quand même grâce à votre aide, tempéra Wil. Sans vous, j’aurais sûrement mal fini chez ces tarés d’elfes.

— N’empêche, vos bateaux sont incroyables, conclut Aquilée.

— Bon, et si on y allait ? lança Wil pour changer de sujet. Nous devons lever cette malédiction, pour pouvoir continuer.

— Affronter un Dragon ne te fait pas peur ? s’étonna Aquilée.

  Wil ricana.

— Oh que si ! Si je m’écoutais vraiment, là, je partirais en courant en hurlant comme un demeuré. Mais j’ai de bonnes raisons de vouloir faire face à la situation. Ça va vous paraître un peu bête, et peut-être même égoïste, mais… j’ai la naïveté de croire que le Dragon pourra peut-être sauver ma mère.

  Il s’interrompit, visiblement gêné.

— Je sais, c’est complètement stupide…

  Karel lui jeta un regard lourd de sens : non, personne ne le trouvait stupide. À sa place, ils auraient peut-être fait de même. Espérer vaincre Phényxia avec l’aide des Dragons n’était-il pas aussi fou ?

  Ils se mirent en route. L’île était verdoyante. Ils s’enfoncèrent dans une zone boisée. Plus ils avançaient et plus le sol devenait humide, comme s’il y avait eu une inondation récente. Cela rendait la marche pénible. Seul Wil ne semblait pas gêné et avançait comme si le sol était sec. Karel chercha à comprendre pourquoi alors que le sol laissait échapper un bruit spongieux lorsqu’il retira son pied à demi enfoncé dans la boue.

  Son regard s'attarda sur les pieds du marin : Wil était le seul à ne pas porter de chausses fermées, et de surcroît beaucoup plus légères que les leurs.

« Comment a-t-il fait pour lutter contre le courant de la mer lorsqu’il a plongé ? C’est impossible quand on est chaussé… »

  Il eut beau l’observer et essayer de l’imiter pour marcher avec moins de difficulté, ses efforts restèrent vains. Il ne comprenait pas. Karel signa à l’adresse de Wil.

— Lyyya ! Traduction, s’il te plaît !

— En gros, il faut que tu comprennes que nous t’envions tous parce que marcher là-dedans est un enfer, répondit Lya.

— Ah, ça…

  Wil désigna des rouages très discrets au niveau de ses spartiates, ne dépassant pas quelques millimètres. Ses compagnons remarquèrent que ses semelles étaient rétractées sur l’avant pour laisser les palmes entre ses orteils libres et en contact direct avec le sol.

— Sérieusement, le nombre de gens que je vois tenter de nager avec des chaussures aux pieds… C’est stupide, expliqua-t-il. Nous avons de fines plaques métalliques à l’intérieur du revêtement. Quand nos pieds sont immergés, l’avant se rétracte, et c’est comme ça que l’on peut nager sans problème. On s’est inspirés du savoir des Avancés pour les concevoir et les adapter à nos spécificités. C’est pour ça que vous n’avez jamais pu en voir sur vos étalages.

— Ah qu’est-ce que je ne donnerai pas pour voir au moins une fois votre île ! soupira Whélos.

— Commençons par survivre, ça sera un bon début, ironisa Wil.

  Soudain, il s’arrêta, comme les autres. Un vaste marécage s’étendait devant eux.

— Laissez-moi passer devant, proposa Wil. Je suis le plus à même de trouver un chemin plus ou moins sûr. Faites attention. Marchez plutôt de cette manière, vous vous enfoncerez moins dans le sol.

  Chacun s’en remit à lui. Wil prit un peu d’avance pour tâter le terrain. Le groupe le suivit, les uns derrière les autres. Malgré cela, la traversée fut éreintante. La boue leur montait jusqu’à mi-mollet malgré les indications du Sorcier de l’Eau. Leur équipement n’était pas adapté pour ce genre de terrain. S’ils traînaient, le marécage les absorberaient comme s’il s’agissait de sables mouvants.

  Après une bonne demi-heure de marche fastidieuse, un son tonitruant de tempête en mer leur parvint. Ils échangèrent un regard inquiet et continuèrent à avancer prudemment. Le son s’amplifia de plus en plus, jusqu’à devenir assourdissant.

  Ils aperçurent enfin une partie de la Tour dépasser de la cime des arbres, atteignant presque le ciel. De leur position, ils découvrirent une chute d’eau s’écoulant du sommet. Des vagues scélérates plus hautes que les plus grands bâtiments de Weylor se mouvaient autour d’elle.

  Ils continuèrent dans cette direction et se figèrent devant la Tour. Les vagues ne cessaient de se mouvoir, inondant le sol autour. Un pas de plus et ils risqueraient de se noyer ou d’être emportés au loin.

— Bon sang… Comment allons-nous entrer là-dedans ? demanda Wil tout haut.

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