Chapitre 54 - 1

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— Wil, réagit Whélos. Ton peuple est celui qui en sait le plus sur Némésis. Aurais-tu des informations à partager sur ces lieux ?

  Wil se gratta nerveusement l’arrière du crâne.

— Non, malheureusement. Je ne suis qu’un simple habitant de la Tribu, rien de plus, je n’ai aucun pouvoir social particulier. Ces informations sont précieusement gardées, et sorties uniquement lorsque l’un d’entre nous décide d’affronter l’épreuve du Dragon. Cela fait donc au moins deux cent ans que ces documents prennent la poussière dans notre Grande Bibliothèque. Je n’avais pas prévu d’affronter cette Tour en quittant ma Tribu, à vrai dire.

— Vous gardez bien des secrets, observa Lya.

— Évidemment. À cause des Clans, répondit Wil. Et de d’autres personnes peu scrupuleuses. Si l’une de ces personnes lisent nos souvenirs, ils risquent de nous trouver et de nous détruire. Si cela arrive, je te laisse imaginer les conséquences sur Weylor, si nous ne sommes plus là pour faire transiter les ressources de tout le pays, contre vents et marées. Je ne dis pas que malgré cette stratégie, il n’y a plus de risques, mais les attaques sont devenues plus rares.

  Karel examina la Tour, impressionnante. La vague géante qui l’entourait se mouvait autour comme un gardien. Karel aperçut l’entrée pendant une seconde. Lorsque la vague repassa devant et que la porte fut de nouveau visible, il compta le temps qu’elle le resta avant d’être de nouveau cachée. Il se rendit compte que la vague n’était pas régulière dans ses mouvements.

« Impossible de compter sur la cadence, donc. »

  Il observa le bâtiment, à la recherche d’un mécanisme caché comme la Tour du Vent, mais la terre était beaucoup trop boueuse pour distinguer quoi que ce soit.

— Wil, tu es capable de nager à contre-courant, rappela Lya ; tu penses que tu pourrais traverser et ouvrir un passage ?

— Traverser, sans problème. Ouvrir un passage, certainement pas. Je ne suis qu’un Sorcier. Il n’y a que les Mages qui pourraient écarter de telles quantités d’eau.

— Nous pourrons peut-être tirer quelques avantages du pouvoir terrestre de Karel, intervint Whélos.

— « La terre absorbe l’eau », rappela Aquilée. Ça vaut la peine d’y réfléchir.

  Karel tempéra : s’il avait l’avantage de l’élément, il ne pouvait pas avoir l’ascendant sur autant d’eau. Un silence accueillit sa réponse.

  Il essaya de repérer un détail qui lui aurait échappé. S’il sollicitait d’éventuelles graines dans le sol, il n’obtiendrait pas grand-chose : la terre était beaucoup trop saturée d’eau. Il soupira face à son manque d’idées.

  Soudain, Wil claqua les doigts.

— Eh, Karel, es-tu capable de téléporter d’autres personnes que toi-même ?

  Karel lui répondit par la négative, gêné. Ce niveau était bien au-dessus du sien. Il regretta de ne pas avoir essayé de s’y entraîner avec Lya, de la même manière dont ils s’étaient tous les deux entraînés à communiquer par télépathie.

— Mince, je sèche, là, répondit Wil. Sans mauvais jeu de mot.

— Vous venez de me donner une idée, intervint Aquilée. C’est un peu risqué, mais ça vaut le coup d’essayer. Avec ma magie, je peux percer ce mur d’eau. Il faudra par contre être très rapides, car je doute de tenir très longtemps contre ce raz-de-marée.

— Avec la célérité que nous a accordée Zmeï, ça devrait être faisable, ajouta Lya.

— Il vous a donné quelque chose, aussi ? s’étonna Wil. Dîtes-moi, il y en a d’autres, comme ça, que je devrai savoir ?

— Je pense que tu as tout vu, répondit Whélos. L’idée d’Aquilée me paraît bonne. Mais prudence : n’oublions pas qu’une malédiction est présente. Elle rend les éléments imprévisibles. À tout moment, cette déferlante peut de se retourner contre nous. À part Wil, aucun d’entre nous n’a les moyens de lutter.

— Les moyens, les moyens, pas tant que ça, tempéra Wil. Si je le pouvais vraiment, je n’aurais pas eu besoin de m’attacher une corde pour éviter d’être emporté en mer, juste au cas où !

  Aquilée repéra l’entrée au travers de l’eau. Cela fait, elle s’approcha de quelques pas mais resta suffisamment loin pour s’enfuir à temps si la vague géante l’attaquait. Elle attendit que tout le monde se mette en position. Karel tint le bras de Whélos pour traverser avec lui, Lya prit celui de Wil, qui afficha un sourire taquin.

— J’aime bien quand une fille me prend comme ça.

— Tu crois vraiment que c’est le moment de faire des blagues ? grommela Lya en rougissant.

— Oh que oui !

— Karel ! On échange !

  Son frère leva les yeux au ciel et échangea sa place avec Lya. Wil afficha une moue déçue.

— Je crois que j’ai manqué une occasion, là…

« Je ne te le fais pas dire. »

  Aquilée déclencha son pouvoir. Elle écarta soudain les bras de chaque côté et deux murs de vent s’imposèrent à l’intérieur de la vague, révélant la porte.

  Aidés de la célérité de Zmeï, ses compagnons se ruèrent vers l’ouverture. La vague se renforça au même moment et Aquilée eut toutes les peines du monde à tenir. Sans y croire, Karel tira son artéfact et décrivit un large arc de cercle au-dessus du groupe, érigeant une barrière de terre. Cette dernière s’effondra aussitôt, les obligeant à s’enfoncer un peu plus dans une lame de fond au pied de la tour, entre la porte et eux. Wil saisit vivement sa boussole et créa une large sphère aqueuse qui les engloba tous les quatre, leur évitant de justesse d’être violemment emportés. À la grimace d’effort qu’il tirait, chacun sut que l’entreprise était difficile, même pour lui.

— Passez devant ! ordonna-t-il. Il vaut mieux que ça soit moi qui me fasse emporter que vous !

  Wil étendit son sortilège, créant ainsi une sorte de tunnel d’eau jusqu’à l’entrée. Le groupe s’y précipita. Karel se retourna, inquiet pour Wil. Lya voulut répliquer que c’était trop dangereux, mais elle fut arrêtée par l’expression sereine du marin.

— Faites-moi confiance. Je dois aider Aquilée !

  L’inquiétude les saisir lorsque la vague se dirigea vers Aquilée pour l’engloutir. Wil se transforma et disparut aussitôt de leur vue, emporté par les flots.

— Wil ! Aquilée ! cria Lya.

  Karel la retint vivement avec ses bras. Elle se débattit.

— On doit les aider !

— Fait leur confiance, Lya ! On ne peut rien faire pour l’instant !

  Deux doigts joints sur son épaule. Ainsi, elle l’avait entendue. À contrecœur, elle cessa de se débattre, mais la tension dans ses muscles fit comprendre à son frère qu’elle ne parvenait pas à surmonter son angoisse seule. Alors il resserra son étreinte, cette fois dans une pression plus douce.

— Ça va aller. Wil nous a déjà montré qu’il savait gérer les tempêtes.



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