20 octobre 2020 (Le grand bain)
Moi : « Et comme ça ?
Elle : - Oui, bof.
Moi : - Même un masque "Hello Kitty" n’y suffirait pas.
Elle : - Trop de choses à changer.
Moi : - C’est peine perdue. Quoi que je fasse, je ne crois pas que je vais réussir à me faire passer pour une élève de CM2.
Elle : - Non, c’est pas gagné.
Moi : - J’ai beau faire un peu plus jeune que mon âge, de là à ressembler à une scolaire…
Elle : - Tu as pensé au tuning ?
Moi : - Tu vois, le couvre-feu, ça ne me gêne pas beaucoup : je ne sors pas le soir. Mais le fait de ne plus pouvoir aller à la piscine, ça, c’est ce que j’aime le moins dans cette période.
Elle : - Ah oui, ne pas voir ta famille, tes amis, tout ça, c’est pas embêtant, mais ne pas aller à la piscine, c’est tout un drame ?
Moi : - Il faut comparer ce qui est comparable. Ce n’est pas toi qui dois vivre avec le mal de dos au quotidien. C’était bien de pouvoir retourner à la piscine cet été, mais c’est à nouveau la mouise.
Elle : - Je ne savais pas que le sport était si important pour toi.
Moi : - En fait, il ne l’est pas, et en plus j’ai horreur de la transpiration.
Elle : - Et donc pour éviter de transpirer… tu préfères être toute mouillée.
Moi : - Voilà.
Elle : - Je comprends pas quel plaisir on peut avoir à se foutre à l’eau, surtout quand on n’a pas de joints d’étanchéité.
Moi : - La natation soulage mes vieilles douleurs, me réaligne la colonne vertébrale, dégonfle mes jambes, me rafraîchit quand il fait chaud, me réchauffe quand il fait froid, me tonifie les muscles…
Elle : - Pfff, t’as pensé à la révision des 20 000 kilomètres ? Comme ça, tu cernerais le problème au lieu de tourner autour.
Moi : - Tu ne comprends donc pas l’importance de l’entretien physique pour un être humain ?
Elle : - Ouais, si, peut-être. Vous êtes comme les chiens, il vous faut de l’exercice et ne pas manger tout le temps. Ce que je pige pas, c’est cette obsession de la piscine chez toi. Il y a bien d’autres sports, non ?
Moi : - Soulever des choses qui n’ont pas besoin d’être soulevées ou courir pour aller nulle part, très peu pour moi.
Elle : - Tu préfères tourner en rond dans un bassin, c’est nettement mieux.
Moi : - Touché. J’admets que le sport n’a pas vraiment de sens, hormis nous bouger la graisse.
Elle : - Donc tu pourrais courir comme tous ces types que je vois passer devant la grille d’entrée de la résidence et qui se précipitent à l’hippodrome comme s’ils devaient y faire urgemment leurs besoins ?
Moi : - Ils vont y faire quelques tours de piste pour entretenir leur santé.
Elle : - Ils se prennent pour des bourrins, oui ! Enfin, là n’est pas le problème, tu pourrais faire comme eux. Quand on a la chance d’habiter à côté d’un hippodrome, on en profite et on ne gémit pas sur l’absence de piscine.
Moi : - Désolée, mais la course à pied, c’est pas mon truc. D’abord, courir, c’est de droite.
Elle : - Hein ?
Moi : - Le jogging, pardon, le "running"… comme on dit maintenant, est synonyme avant tout de performance et d’individualisme. C’est donc de droite.
Elle : - Ah ben moi qui pensais que tous ces gens qui courent autour du golf de l’hippodrome comme les canassons, c’était pour être en contact avec la nature ! C’est pas un peu écolo ?
Moi : - Mmm.
Elle : - Et un sport apparemment accessible à toutes les bourses, ce serait pas un peu coco ?
Moi : - Toi, tu viens d’inventer le sport de droite à tendance écolo-marxiste.
Elle : - Et c’est mal ?
Moi : - 2020, c’est vraiment l’année du grand chamboule-tout, même dans la perception du jogging. Mais ça ne va pas régler mes soucis d’arthrose. Et pas question que je revête une combi fluo près du corps qui fait des mollets de coq.
Elle : - Je ne vois plus guère comme solution qu’essayer la natation sur herbe, ça rentabiliserait au moins la pelouse.
Moi : - La natation au ras du gazon, quoi… »
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