Mamie Elianne
Ma grand-mère s'est réveillée pour la dernière fois ce matin. Je n'en savais rien lorsque je suis partis travailler, en coupant mon portable.
N'est-ce pas pathétique? De recommencer sans cesse la même journée tout en laissant crever ses ainés?
Voilà donc la parfaite allégorie de ce qu'est la vie, une longue pénitence que l'on passe à se faire exploiter plutôt que d'être auprès de nos bien aimés. Tout ça pour que d'autres, plus fortunés, passent le temps qu'ils nous ont volés, à s'amuser.
Est-ce tout? N'y a t-il rien d'autre pour nous? Que de travailler à en pleurer, de s'y épuiser jusqu'à rire de tout tant on est ivres de fatigue?
Que nous reste t-il ensuite? Des miettes de temps, que l'on passe à oublier que l'on va mourir, en regardant la Télé, en buvant, en partant en vacances.
La vie n'est qu'une mauvaise blague, une sale histoire dont on connait déjà la fin, mais dont personne n'ose en parler. Et pourtant on se retrouve tous étonnés, lorsque la dernière page se tourne sur ceux que l'on aime. Tout n'est que pleurs et incompréhension, alors que c'était couru d'avance.
Mais merci quand même mamie Eliane, pour ces quelques poussières d'éternité que tu as passée avec moi. A me raconter ton histoire et celle de papy, a m'aider à faire ce devoir de mémoire de la guerre. Je n'oublierais jamais ce que vous m'avez racontés, les épreuves que vous avez endurés. Merci de t'être occupée de moi quand ma mère était hospitalisée. Merci pour tes baisers lorsque la famille venait te rendre visite, j'ai rarement croisé dans ma vie quelqu'un aussi heureux de me voir.
Je me rappelle qu'à chaque fois que tu nous voyais mon frère et moi, tu disais: "Ils sont devenus si grands, est-ce que ce sont eux qui grandissent, ou est-ce qu'on se tasse à force de vieillir?"
Merci d'avoir si bien élevé ma maman, d'en avoir fait une femme aussi douce, forte et intelligente car sans celà je n'aurais jamais eu d'enfance heureuse, ni des bases aussi solides.
Je te dois des excuses Eliane, j'ai été trop avare de mon temps avec toi, alors que je l'ai dépensé à foison pour des profiteurs et des divertissements aliénants. Je t'ai délaissée et je le regrette tant. Maintenant c'est trop tard, et tu ne vis que dans ma tête.
Là où je n'ai jamais tenu mes promesses, je ne peux t'en faire qu'une dernire. Tu ne mourras qu'une seule fois mamie, promis, car je ne t'oublierais jamais.
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