Marioupol, un symbole
Les résistants aux visages sales et burinés par les combats restaient de marbre devant l'avancée des forces armées de l'envahisseur.
Sans doute l'héroïsme, les privations et l'esprit de sacrifice...
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Il était à présent certain que l'ennemi s'installerait pour longtemps. Les moyens militaires déployés s'avéraient considérables et traduisaient un pouvoir évident.
Dehors, de jour comme de nuit, des tirs en rafales et des bombardements par des missiles à sous munitions ou des roquettes de LRM, pétrissaient, labouraient les infrastructures, résonnaient sans cesse à l'impact et mettaient les habitants sous une pression physique et psychologique insoutenable.
L'eau et l'électricité manquaient et dans tous les immeubles en grande partie écroulés, il régnait une odeur de mort, d'urine et de déchets extrêmement forte.
Dans les caves, certains prostrés claquaient des dents tellement ils avaient froid et peur. D'autres avaient, à l'extérieur, délimité sommairement avec un ruban de couleur, des tombes pour sortir les morts qui se décomposaient sous les gravats. Sous des croix, un objet personnel ou rien tout simplement, dormaient à jamais les corps sans vie de tant de personnes qui n'avaient su où aller, trop vieux, trop faibles ou manquant du simple courage de tout quitter pour fuir vers l'inconnu à travers l'enfer de leur ville.
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Marioupol était détruite en totalité ou presque.
Partout dans le ciel, des citernes de raffineries en flamme, près de la zone portuaire, dégageaient des fumées denses et noirâtres qui obscurcissaient un ciel bleu et froid de printemps.
Ils restaient encore des milliers de pauvres gens terrés, comme des lapins, dans des couloirs, des caves ou des souterrains sordides, sortant parfois après plusieurs jours, éblouis par l'excès de lumière, pour manger collectivement quelques restes de vivres à l'angle d'une cour, juste pour voir le ciel, respirer, parler, vaincre sa peur.
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Il restait aussi des unités militaires régulières...
Mon escouade se repliait vers les usines sidérurgiques. Il nous fallait rejoindre mon unité et faire mon rapport d'observation. De grandes étendues, sorte de plages de béton, étaient parcourus de tuyauteries, de gaines, de conduites et jalonnées de hauts-fourneaux et de cheminées. Sous la surface, comme à l'intérieur d'un immense sous-marin, des couloirs permettaient de se déplacer à couvert et en sécurité.
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Du moins, était-ce encore possible !
Après plusieurs traversées, montées et descentes, d'une course effrénée dans cette sorte de labyrinthe, mon équipe rejoignit une salle tactique. Il régnait une atmosphère fiévreuse et active comme autant d'abeilles ouvrières autour de leur reine. Des maquettes de la ville, faites à l'aide de moyens de circonstances, reprenaient les positions respectives des belligérants.
Chaque patrouille qui rentrait, permettait en retour de remplir et de renseigner des informations essentielles pour réagir au plus près de l'ennemi. Des outils de communications par satellite nous informaient également des mouvements terrestres à plus grande échelle.
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Sans doute obtenus auprès de différents services de renseignements.
Si l'envahisseur visait à rayer de la terre nos unités, il était évident que nos forces conforteraient tout autant leur volonté de gagner et de bouter les armées qui tenteraient de s'incruster.
On s'était fait le serment pour la patrie, nos familles, nos enfants et nos aînés.
Mais, Marioupol tiendrait-elle encore ?
=O=
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