Atelier n°8

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Extrait du journal de Romain M.

Mercredi 22 mars

J’ai l’impression qu’ils se lassent de moi. De mon écriture aussi. J’étais un mystère, j’avais un style particulier. Mais maintenant, je suis moi et à force, ma particularité est devenue une habitude, presque même aujourd’hui un défaut. Je veux bien les croire. Je m’épuise tout seul parfois. Je me relis et je m’ennuie. Je parle trop. Je ne vais pas à l’essentiel. Je dois économiser les mots. Penser à l’implicite, aux non-dits, à ce qu’il y a en-dessous, à ce qui se lit entre les lignes. Je veux tout dire, tout écrire, comme si j’avais besoin d’accompagner le lecteur pour tout lui expliquer. Une seule solution, le travail. Et encore le travail. Il faut écrire sans cesse. Et lire beaucoup. Seul immense problème, comme un mur infranchissable, le temps.

Extrait du journal de Caroline M.

Mercredi 22 mars

Écrire. J’adore ça. C’est incroyable. Écrire. J’aime même seulement écrire ce mot.

J’ai regardé les ateliers d’écriture proposés pour la saison 2 et certains m’intéressent. Celui sur la nouvelle, celui sur la boite à outils d’un écrivain, celui encore sur la littérature érotique. Et pourquoi pas ? Surtout que ces derniers temps, j’ai bien besoin de toute mon imagination pour évoquer un soupçon d’érotisme ici. Romain est inexistant, un fantôme qui erre entre nous. Il est toujours dans l’attente pour pouvoir monter dans le bureau et écrire. Il prend sur lui pour passer du temps en famille mais je sens que ça lui coûte. Ça me fait mal de le voir comme ça. Je pensais que l’atelier d’écriture lui ferait du bien, l’aiderait ou je ne sais quoi, mais c’est plutôt l’inverse. On dirait qu’on lui a inoculé un virus nocif dont il ne parvient plus à se défaire et pour lequel il n’existe aucun remède. Il me fait peur. Comme si la vie que nous lui proposions n’était pas suffisante, comme s’il lui en fallait plus, toujours plus, et que nous ne pouvions pas suivre.

J’ai peur qu’il abandonne, qu’il se décourage, et qu’il se contente de peu. J’ai peur aussi qu’il aille jusqu’au bout de lui-même et qu’il découvre que nous ne sommes qu’un fardeau qui l’empêche d’avancer.

Quand on est désespéré comme lui, on est capable de tout.

Extrait du journal de Sophie F.

Mercredi 22 mars

J’ai beaucoup bossé cette semaine pour corriger mon texte. Je suis motivée. J’y crois beaucoup. Pour certains élèves, d’après les remontées que j’entends sur les autres ateliers, ce temps de l’écriture arrive au bon moment de leur vie. Comme s’ils avaient attendu un signe pour sortir de leur grotte, parler avec des gens, écrire et lire leurs textes. Pour une grande majorité, il s’est passé quelque chose de fort. Pour les écrivains professeurs, les animateurs, ou je ne sais pas comment on peut nous appeler, cela a eu aussi un retentissement. Ils s’enrichissent de ce qu’on leur donne. Moi la première. Ce n’est peut-être qu’un concours de circonstances mais il y a eu des déblocages dans ma vie ces dernières semaines, du plus infime ou plus puissant. Et ce que j’ai entendu dans notre salle, ce que mes élèves ont bien voulu partager avec moi, m’a remué moi aussi.

Je sais à quel point ils ont pu être sincères. Ils s’investissent, ils se livrent. Parfois, quand l’un deux a terminé sa lecture, il y a un silence à la fois gêné et admiratif. Trop d’intimité dévoilée et en même temps, un certain talent pour en faire quelque chose de littéraire. Ils me fascinent. J’ai de la chance d’avoir ce petit groupe.

Le plus dur, c’est pour Pauline. Elle est si jeune, si naïve, si innocente, pas encore atteinte par la vie et ses déceptions. Elle pose souvent cette question : « Est-ce que c’est vrai ? Est-ce que ce que tu as écris là, ça s’est vraiment passé comme ça ? » Elle a besoin de se connecter au réel. Elle a besoin pour y croire vraiment de savoir s’il s’agit d’une fiction ou d’un témoignage. Ce n’est pas l’important. Au contraire, il faut qu’on reste dans ce flou, même si nous savons entre nous toute la part de vérité qui existe dans ces textes.

Extrait du journal de Damien M.

Mercredi 22 mars

J’avance. Pas assez vite, mais j’avance ! Il faut que je prépare la fin des ateliers, que je prépare la suite, que je prépare ma sortie. Quelque chose est en train de se finir quand je suis en train de commencer. Tout doit bien coïncider. Je sais ce que je dois faire. J’ai pris ma décision. Je vais devoir m’armer de courage, garder en tête mon objectif et tenir bon. Ça ne va être facile pour personne !

En tout cas, mon roman s’épaissit. Je garde en tête mon chemin. Je suis ma ligne directrice et je ne change rien. Tout droit vers le point final.

Chaque seconde de ma nouvelle vie est tournée dans le même sens : l’écriture. Je commence même à trouver tout à fait normal ce nom que j’ai donné lors du premier atelier. Ce nom que je voudrais être celui qui sera indiqué sur les couvertures, ce nom qui sera le mien pour la postérité, ce nom qui remplacera définitivement celui de ma naissance. Je n’avais rien contre lui. C’est juste que je voulais renaître, recommencer, repartir de zéro. L’atelier était une première étape. Et soudain, dire mon vrai nom n’a pas été possible. Je ne pouvais pas être là et m’annoncer avec tous ces textes qui dorment dans mes tiroirs et qui ne servent à rien. Je ne pouvais pas être ce mec là, ça se voyait sur ma tête que j’étais un raté. Je devais être un autre, un être nouveau, vierge, une page blanche à écrire d’abord avec eux puis tout seul.

Je sens que j’ai laissé Romain derrière moi désormais et que je suis vraiment Damien.

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