SCÈNE I. Oracle, Diamartène.
La scène s’ouvre sur une pièce plongée dans le noir.
L’encens embaume, et un braséro éclaire le visage érémitique de l’Oracle.
La porte s’ouvre, DIAMARTÈNE se précipite.
DIAMARTÈNE
Pitié ! Oracle ! Voilà déjà que ma dix-septième année s’achève ! Et ça me prend aux viscères, entre hydatismes et borborygmes !
ORACLE
Des rumeurs de foire.
DIAMARTÈNE
Oh ! Sage parmi les sages ! Vos mystères m’honorent ! Je dois savoir, moi qui suit né de la déesse Aphrodite Despoina, maîtresse du cœur des Hommes !, quel destin glorieux m’attend ?
L’ORACLE prend une grande inspiration, mais DIAMARTÈNE lui coupe la parole.
DIAMARTÈNE
Oh non ! Laissez-moi deviner ! Je suis plutôt bel homme, ce qui va de soi quand on connaît ma mère ! (gonflant ses petits muscles) Ma daronne m’a dit avoir une ascendance spartiate, et je trouve que ça se voit plutôt bien, n’est-ce pas ? Elle a même ajouté, un jour de nouvel an, que le fort Héraclès était de la famille, un oncle, quelque chose comme ça, alors si ça c’est pas de la génétique olympienne !
ORACLE
Je-
DIAMARTÈNE
-Je dois forcément finir en héros à la Guerre. J’ai cru entendre que l’Empire Achéméno-helvétique menaçait les frontières du monde civilisé, vous pensez que j’ai l’étoffe d’un Pâris-Sébastien ou d’un Hector-Haliday ? Je sens déjà sourdre en moi la fièvre héroïque !
ORACLE
Mais !-
DIAMARTÈNE
Et puis je suis sûr que l’on vous a conté mon incroyable intellect ? J’ai eu 16 en Dorien, et 17 en Hérodotismes moderne ! Oui oui, je sais, peu peuvent s’en vanter, mais c’est ça, quand on est le fils prodigue de l’Olympe !
ORACLE
Bons dieux ! Mais c’est intenable ! Allez-vous vous taire ?!
Le silence prend place. DIAMARTÈNE fait les yeux ronds.
ORACLE
N’avez vous donc jamais vu l’ombre de l’Hybris ?
Vous êtes un béotien. Et de ce que les moires
Me murmurent, vous en êtes l’idéal gyratoire !
Voyez-vous, vous tournez, des idées que l’on visse
Dans votre front des plus vierge en attendant une gloire
Quelconques pour se penser, car il faut bien croire !
Alas, votre foi est toute aussi vaine que motrice …
DIAMARTÈNE
Je … Je ne comprends pas bien.
ORACLE
Vous rêvez en héros ! Vous finirez zéro.
Le vide. Sans héritage, un futur sans présages !
Vous connaîtrez l’échec, et les joies du drame grec !
Vous serez seul, et sourd au véritable amour,
Sans jamais consacrer ce que vous appelez
“Mon immense cyclope” !
DIAMARTÈNE titube, recule.
ORACLE
Maintenant, courez, quittez mon sanctuaire à jamais !
Il quitte la scène.
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