Partie 5 - Désespoir
LAZARE
Partie 5 - Désespoir
Une heure passa. Bientôt, Lazare nageait dans une mare de sang pourpre, si caractéristique de l’espèce de son bourreau. La manticore, en piteux état, dormait profondément. Sa poitrine se soulevait à un rythme irrégulier, signe qu’elle souffrait au moins autant que lui de la situation.
Point positif : l’effet de son venin déclinait progressivement avec elle. Même s’il ne pouvait toujours pas bouger, l’elfe retrouvait des sensations basiques : le froid, pour commencer, fouettant sa peau au travers des fissures de ses vêtements lacérés ; mais aussi la douleur, accroissant son autorité sur son être de minute en minute. Il ne souhaitait pas voir l’état de son genou maintenant que la bête l’avait traîné dans les fourrés. Il commençait à sentir l’effet de son voyage dans la gueule du monstre. Il était à peu près certain qu’elle l’avait mordu autour du ventre. La zone était de plus en plus douloureuse.
Le temps continua sa course immuable, se souciant peu de sa condition. Dans l’éternelle attente, Lazare, les yeux tournés vers la lune décroissant peu à peu, se posa des questions existentielles. Où était-il ? Finalement allait-il mourir ici plutôt que dans le ventre de la bête ? Qui viendrait à bout de lui le premier : la faim ou le froid ? Il revoyait aussi l’aiguillon empoisonné qui avait transpercé son abdomen plus tôt. Mourir d’une hémorragie, agoniser pendant des heures ne le séduisait pas. Il se savait condamné mais il ne voyait pas comment abréger ses souffrances. Ou ne le voulait-il pas ? Cette petite voix, au fond de lui, s’accrochait toujours à la vie et à l’image de ses filles.
Le vent glacé lui brûla la peau, le sortant de ses rêveries sombres. Il frissonna de manière incontrôlée. Il devait bouger. Il ne voulait pas mourir. Doucement, il releva la tête avec la forte impression qu’elle pesait dix fois son poids initial. L’immense patte de la manticore l’empêchait de voir le bas de son corps.
Un grognement sur sa droite le figea. Il pivota lentement la tête, sans geste brusque. Deux grands yeux curieux le dévisageaient intensément.
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