La panne

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C’était bien sa chance, une rupture de caténaire… La voilà bloquée à Mons.

Elle revenait de sa mission de supervision de stage dans le grand hôpital de la région, elle devait rentrer à Bruxelles, mais là, le départ était impossible.

Il faut dire que si elle n’avait pas aidé la petite dame qui avait dérapé devant elle sur le trottoir, elle n’aurait pas raté le dernier train qui avait réussi à partir de la gare vers la capitale. A part s’enfoncer encore plus dans le Hainaut, rien d’autre n’était possible.

— Je suis vraiment désolée pour vous Mademoiselle, je vous ai mis en retard et vous avez raté le dernier train partant vers Bruxelles.

— Mais ce n’est pas de votre faute madame, il y a eu un souci technique, cela serait arrivé, de toute façon. Et vous, vous attendez toujours votre fils ?

— Oui, normalement, il arrive avec le train de cette heure-ci, mais je ne le vois toujours pas, il vient de Bruxelles où il travaille, j’espère qu’il n’a pas raté le sien, de l’autre côté. La ligne est bloquée dans les deux sens.

— Ah, oui, c’est risqué effectivement ! Vous ne pouvez pas le contacter sur son portable ?

— Oulàlà, la technologie et moi, vous savez !

— J’imagine. Bon, et bien moi, je vais m’en aller chercher un endroit où passer la nuit, vous connaissez de bons hôtels à Mons ? Il y a bien l’hôtel qui fait face à la gare, mais il affiche « complet » …

Pendant que Valentine parlait à la petite dame, qui se prénommait Marcelle, elle ne vit pas arriver le fils de Marcelle, Axel.

— Maman ?

Marcelle l’apostropha,

— Oh Axel, te voilà, j’ai eu peur que tu n’arrives pas, à cause des soucis techniques ! Viens que je te présente à quelqu’un qui m’a aidé quand je suis tombée là tantôt …

En coupant sa mère, Axel s’écria,

— Valentine ?

Cette dernière, très surprise de croiser son collègue devant la gare où elle se retrouvait bloquée, s’écria, elle aussi,

— Axel !

Interloquée, Marcelle demanda,

— Vous vous connaissez ?

Axel lui répondit,

— Oui maman, nous nous connaissons, nous sommes collègues, mais, explique-moi, tu disais que tu étais tombée ?

Valentine intervint et lui expliqua,

— Oui, ta maman s’est légèrement croqué la cheville, là tantôt, à cause d’un pavé manquant pas très loin. Je te conseille de passer par une pharmacie en la raccompagnant, un peu d’arnica ne lui ferait pas de tort et du repos aussi, avec un cool pack ou un sachet de petit pois surgelés à garder sur la cheville pendant trente minutes.

En souriant, elle ajouta,

— Ta maman est une dure à cuir.

Axel sembla acquiescer puis prendre les choses en mains.

— Ok, super ! Bon ben, tu vas pouvoir t’appuyer sur moi pour rentrer alors, heureusement qu’on n’habite pas trop loin. Et toi, tu prends le train ? Tu étais de passage ici ? Fait gaffe, il y a des soucis apparemment…

Marcelle intervint,

— Oui Axel, Valentine est bloquée ici ce soir, il n’y a plus de train vers Bruxelles !

Valentine confirma,

— Effectivement, je suis coincée ici. En fait, j’étais en supervision de stage toute la journée au grand hôpital et puis là, je me retrouve bloquée… Je vais donc me chercher de ce pas une nuitée à Mons ! Tu ne connaîtrais pas un petit hôtel sympa pas trop loin… Et pas trop cher ?

— Euh…

Axel réfléchit, puis, regardant sa mère qui souriait, il répondit,

— Écoute Valentine, si tu veux, il y a une chambre d’ami chez nous, si ça t’arrange …

— Oh mais oui, Valentine, venez, ce serait la moindre des choses après vous avoir fait rater le train ! Je vous en prie acceptez, les hôtels autour de la gare ne sont pas des endroits recommandables, je m’en voudrais s’il vous arrivait encore autre chose de désagréable aujourd’hui !

Étonnée par cette offre spontanée et émoustillée par cette proposition qui la placerait aux côtés d’Axel à qui elle trouvait un charme certain depuis qu’ils s’étaient croisés à l’école quelques mois auparavant, elle finit par répondre, avec un peu de réserve,

— Mais écoutez, c’est très sympathique comme proposition, mais je ne voudrais pas m’imposer.

Axel posa sa main sur l’épaule de Valentine et lui chuchota,

— Valentine, ne réfléchis pas trop, ce sera l’occasion de faire plus ample connaissance, enfin, si tu en as envie…

— D’accord Axel, ce serait effectivement l’occasion de nous connaitre un peu plus, nous ne faisons que nous croiser au boulot…

Ils étaient là à se convaincre tous les deux, la mère d’Axel sourit,

Tiens donc, serait-ce la collègue dont il parle avec son cousin, et pour qui il en pince ?

Pour les aider à se décider, Marcelle lança,

— Eh bien alors, allons-y, je commence à avoir la cheville qui enfle mes petits !

— Oh, mais oui Madame, j’en ai oublié votre cheville ! Est-ce que sur le chemin, nous passerons par une pharmacie ?

Valentine regarda sa montre,

— Et rapidement ! Il est près de 18h, certaines pharmacies doivent être fermées à cette heure-ci, ici, non ?

Avec un demi-sourire, Axel lui glissa,

— Il y en a une sur le chemin et elle ne ferme qu’à 19h… Ici… Ce n’est pas la cambrousse, tu sais…

En rigolant, elle lui lâcha,

— Excuse-moi, je ne voulais pas te froisser… Je sais, je suis de la capitale…

Le groupe se mit en route, lentement, Valentine acheta ce qu’il fallait pour soigner Marcelle dès leur arrivée chez ses hôtes improvisés.

Ils arrivèrent finalement, après de multiples pauses. François, le compagnon de Marcelle attendait à la porte d’entrée, il avait été prévenu par Axel pendant que Valentine était à la pharmacie.

François avait préparé une place dans le salon avec un repose-pied. Tout était prêt pour Marcelle qui commençait à souffrir solidement de cette cheville.

— Asseyez-vous et enlevez vos chaussures et vos chaussettes, je vois que monsieur a préparé une petite bassine pour rafraîchir votre pied avant que je ne vous le masse, quelle organisation ! C’est toi qui le lui as dit par téléphone Axel ?

— Oui, je mets le cool pack au réfrigérateur, il sera peut-être prêt pour quand tu auras fini de masser la cheville de ma mère.

— D’accord. Dis-moi, je peux aider à autre chose en attendant que ta mère soit prête ?

— Non, mets-toi à l’aise et vois sa cheville, je préparerais le lit d’appoint pendant ce temps-là.

Valentine s’approcha de Marcelle et s’occupa de sa cheville, elle était enflée, un bel hématome se dessinait autour des malléoles. Marcelle avait mal lors de la mobilisation de son pied, mais pouvait encore bouger, les ligaments ne semblaient pas totalement déchirés. De toute façon, elle allait devoir consulter son médecin généraliste dès le lendemain matin, ce qui ne sembla pas l’enchanter.

Valentine insista,

— Vous devez y aller, il faut éviter qu’en plus de la probable entorse, vous ayez aussi une micro fracture ! Le temps d’une consultation et peut être d’une radio et vous serez rassurée. Bon, cela vous prendra quelques semaines pour vous rétablir, vous devrez vous accommoder d’une paire de béquilles, mais avec quelques séances de kiné, vous devriez bientôt gambader à nouveau.

François intervint,

— Ne vous inquiétez pas Mademoiselle, je l’emmène chez le médecin dès demain matin, il a une consultation le samedi matin ; je viens de prendre rendez-vous.

Regardant son épouse qui fronçait les sourcils en le regardant, il lui adressa ceci ;

— Oui, ma chérie, c’est déjà planifié !

Elle lui rétorqua, un peu moqueuse,

— Au lieu de téléphoner au médecin, tu ferais mieux de nous préparer quelque chose à manger « mon chéri » .

— Eh bien, il me suffit de téléphoner… Chinois ou pizza ?

Valentine rigola en massant la cheville de Marcelle afin de faire pénétrer la pommade tout en veillant à ne pas faire trop mal à Marcelle. Axel les coupa,

— Vous vous commandez un menu chinois ou des pizzas, mais Valentine et moi nous allons manger à l’extérieur.

Valentine leva la tête et fit de grands yeux lorsqu’elle entendit cette décision d’Axel. Il le capta et se rattrapa.

— Enfin, si tu es d’accord Valentine ? Comme cela, tu connaîtras un petit resto italien sympa à Mons.

— D’accord, oui, tu me feras un peu visiter.

— Dès que tu as fini, je te montrerais ce que j’ai préparé à l’étage pour toi. En fait, je vis à l’étage, mes parents vivent au rez-de-chaussée.

— Ok, j’ai bientôt terminé.

En souriant à Marcelle, elle précisa,

— Je pose la bande pour le soutien de la cheville et je suis prête.

Marcelle la remercia pour le bandage, le soutien diminuait un peu la douleur. Valentine lui expliqua ensuite comment placer le cool pack et combien de temps ; le laisser, 30’ était un temps idéal, pour que ne froid ne soit pas que superficiel et puisse bien endormir la douleur, profondément.

Axel lui montra ensuite le chemin de la chambre d’ami, qui se révéla être une petite pièce à laquelle on ne pouvait accéder qu’en passant par sa propre chambre à lui. Il lui demanda si cela la dérangeait ? Elle lui demanda juste s’il avait un sommeil profond, histoire de savoir si elle ne le réveillerait pas en allant faire pipi la nuit … Ils redescendirent en rigolant et s’apprêtèrent à sortir manger.

Il la guida vers un petit restaurant italien, ils commandèrent tous les deux un plat de pâtes, des pâtes fraiches faites maison, le repas fut succulent.

Le restaurant était petit, ils se retrouvèrent très proches l’un de l’autre, cela enchanta Valentine et ne sembla pas ennuyer Axel.

Valentine était un peu émoustillée, elle avait toujours trouvé Axel très sympathique, mais n’avait jamais osé espérer se retrouver avec lui comme ça… Si près et en sachant qu’elle allait passer la nuit quasi à côté de lui.

Ils firent plus ample connaissance, dans la Haute École dans laquelle ils travaillaient tous deux, ils n’étaient pas dans la même section, et ne se croisaient pas très régulièrement.

Elle avait flashé sur lui lors d’un drink de fin d’année pour tous les membres du personnel, il l’avait aidé alors qu’elle avait failli dégringoler de l’escalier principal,

— Hé, ça va ? Tu retrouves ton équilibre ?

— Hou, oui, merci, il y a des épluchures sur les marches de l’escalier, fais attention aussi !

— Viens, on va se retenir l’un l’autre ! Tu travailles à la Haute École aussi ?

— Oui, cela fait 2 ans maintenant et toi ?

— Depuis 7 ans déjà, tu es dans quelle section ? Moi, je suis en section pédagogique, prof de futurs profs.

— Je suis dans la section soins infirmiers, je forme ceux qui nous soigneront quand nous serons vieux et dépendants !

— Ah prépare-les bien alors, j’ai envie d’être bien traité si un jour j’atterris à l’hôpital !

En souriant, elle lui répondit,

— Je fais de mon mieux, au fait, je m’appelle Valentine, et toi ?

— Moi, c’est Axel.

— Enchantée, Axel !

— Moi de même Valentine

Puis ils furent interrompus par un collègue d’Axel qui le harponna. Lorsqu’il la quitta, il lui lança,

— Désolé, à bientôt peut-être !

Le tout souligné par un clin d’œil.

Ils se croisèrent encore, en d’autres occasions, toujours un mot sympa l’un pour l’autre, mais rien de très personnel, ils ne se retrouvaient que dans le cadre du travail.

Dans le restaurant, par contre, ils étaient dans une autre atmosphère, ils se découvraient l’un l’autre, leur passion visiblement commune pour la science-fiction, les visites de musées, l’humour noir, … La soirée passa très agréablement, ils décidèrent de commander un dessert pour prendre le temps de terminer la bouteille de vin qu’ils avaient entamé.

— Ce vin est bon, tu ne trouves pas ?

Valentine acquiesça,

— Oui, pas trop sec, fruité, comme je les aime.

— Normalement, leurs desserts sont aussi bons que leurs plats.

— Eh bien, je comparerais avec les tiramisus que j’ai déjà mangés précédemment

Elle goûta et eu un grand sourire

— Effectivement, il est bon !

— Je te l’avais dit !

Ils dégustèrent leur dessert à leur aise, puis quittèrent le restaurant pour rejoindre la maison où habitait Axel.

— Alors tu penses quoi de ce petit resto ?

— Bien, bonne adresse, merci de m’avoir initiée !

— De rien, c’est mieux qu’une pizza avec mes parents !

En rigolant, elle lui répondit,

— Je ne peux qu’imaginer, je n’ai jamais mangé de pizza avec eux.

Sur un ton tranché, il rétorqua,

— C’est vrai, mais tu peux me croire sur parole !

Elle tiqua un peu, puis dissipa cette drôle d’impression ; elle avait dû se méprendre. Le plus important, à présent, c’est qu’elle était avec lui, il n’y avait que cela qui comptait.

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