Chapitre 11

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Elle reconnut le même long corridor sombre dans lequel elle s’était déjà retrouvée par le passé, elle ne savait trop quand. Il lui était impossible de se rappeler comment elle était arrivée ici, mais cela ne revêtait que peu d’importance. L’imposante porte noire qui s’offrait à elle était entrouverte et des bruits émanaient de ce qui se cachait de l’autre côté. C’étaient des voix dissonantes et, étrangement, on n’aurait pu dire s’il s’agissait de cris ou de chuchotements. Tout était déformé, à la fois bruyant et proche de l’inaudible. Eldria elle-même n’aurait pas su dire en cet instant si elle était terrifiée ou au contraire exaltée par la curiosité. Ce qui était sûr, c’est qu’elle DEVAIT se rendre derrière cette porte avant qu’elle ne se referme totalement et ne la plonge dans l’incertitude de obscurité.

Elle s’avança donc péniblement, tendant le bras pour attraper la poignet dorée qui luisait dans la pénombre. Les réponses à des questions qu’elles ne s’était jamais posées l’attendaient, là, derrière...

Le calme se fit soudain lorsqu’elle fut happée par la lumière. Petit à petit, les contours d’un décors luxueux se dessinèrent tout autour d’elle et vinrent bientôt occuper son champ visuel. Boiseries savamment taillées, peintures complexes aux cadres flamboyants, mobilier ostentatoire... A n’en pas douter, cette chambre était digne, si ce n’était d’un roi, au moins d’un prince. Tout était calme, immobile et enveloppé d’une aura blanchâtre, comme si toute la scène était envahie par la brume d’une froide journée d’automne.

Derrière elle, elle perçut un bruit qui la fit se retourner. Le bruit semblait tout droit provenir du fond des âges mais pourtant il était tout proche. Au milieu de la pièce, elle discerna un magnifique lit à baldaquin, dans le même ton que le reste de la décoration. Au pied du lit, des vêtements épars ainsi qu’une robe déchirée par le devant avaient été négligemment laissés à même le sol. Eldria, comme étrangère à l’espace au temps, s’approcha.

Sur le lit, il y avait du mouvement. Elle distingua d’abord l’imposant dos nu d’un homme à genoux et à la peau noire. L’homme était si grand et râblé que ses innombrables muscles formaient d’interminables sillons qui serpentaient tout autour de sa colonne vertébrale. Sa carrure était telle que ses épaules étaient pratiquement deux fois plus larges sa taille, pourtant déjà impressionnante. Il ne portait pas de pantalon non plus. Ses cuisses et son fessier parfaitement taillés ne dépareillaient pas avec le reste de sa musculature.

La première pensée d’Eldria à la découverte ce corps exposé dans toute sa splendeur masculine fut égoïstement de nature érotique. Elle ne put le nier : elle aimait ce qu’elle voyait et ne se sentit pas gênée le moins du monde de balader un regard envieux sur ce corps à la fois puissant et rassurant. Un sentiment d’indiscrétion la poussa à s’approcher davantage.

Un autre corps se dévoila bientôt, féminin cette fois-ci. La femme, entièrement nue elle aussi, était également à genoux, le buste penché en avant. Ses deux bras étaient retenus en arrière d’une seule main ferme de l’homme dans son dos, ce qui l’empêchait de basculer. A côté de ce géant, elle paraissait bien frêle et fragile.

L’étrange couple était de toute évidence en plein coït mais aucun d’eux ne sembla remarquer la présence indélicate de leur observatrice fraichement débarquée. Cela ne surprit pas Eldria car, curieusement, elle ressentait au fond d’elle-même qu’ils ne pouvaient pas la voir, qu’elle n’était en réalité pas vraiment là, comme si elle ne faisait qu’errer dans un songe, bien que ledit songe lui parut tout ce qu’il y avait de plus réel et tangible. De manière détachée elle s’approcha encore pour mieux les observer.

La femme ne devait pas être plus âgée qu’elle. Ses cheveux blonds étaient savamment tressés et coiffés en chignon, même si des mèches rebelles commençaient, du fait de l’activité pour le moins intense à laquelle elle était en train de se livrer, à s’en détacher et à flotter autour de son visage. Les yeux fermés, les sourcils froncés, la bouche entrouverte, les traits rougissants de celui-ci étaient figés dans une expression d’inconfort, à la limite de la douleur. Même si elle ne semblait pas vouloir se débattre, il paraissait plutôt évident qu’elle ne passait pas un très bon moment.

Eldria se concentra un peu plus sur elle. Bien qu’elle ne l’ait jamais vue, son visage lui parut familier, ce qui était surement dû au fait qu’elle ressemblait plus ou moins à Salini. Mais, fort heureusement, la protagoniste de cette scène pour le moins déroutante n’était pas son amie, sans quoi elle l’aurait tout de suite reconnue.

Après un petit temps d’observation, elle focalisa finalement son attention sur l’homme qui la besognait sans discontinuer. Sa musculature était encore plus impressionnante de face que de dos. Ses abdominaux étaient comme d’imposantes collines sur son ventre couleur d’ébène, tandis que ses pectoraux trônaient fièrement, telles d’immenses montagnes de roc, sur son torse bombé. Ses bras, aux biceps encore plus large que les cuisses de sa partenaire, maintenaient celle-ci en place avec une poigne déconcertante. Son crâne était entièrement rasé et son visage anguleux aux sourcils froncés demeurait impassible, comme s’il ne ressentait rien. Pourtant, ses coups de reins secs et puissants arrachaient des gémissements empreints de honte à celle qu’il était occupé à pénétrer, comme s’il ne se souciait guère de ce qu’elle pouvait ressentir.

Eldria se sentit mal à l’aise. Une certaine forme de curiosité malsaine la poussait à observer la scène d’un regard distant, mais elle ne put s’empêcher de ressentir de la compassion pour cette pauvre femme qui avait à subir ces assauts implacables et répétés entre ses jambes. Elle aurait voulu intervenir mais elle savait que c’était peine perdue.

Soudain, comme si elle avait vu tout ce qu’il y avait à voir, elle se sentit comme aspirée en arrière par une force invisible, la même que celle qui l’avait amenée dans cette pièce. Prise de panique par cette sensation inhabituelle et venue de nulle part, elle voulut résister mais ce fut en vain. Très vite, les ténèbres l’enveloppèrent de nouveau et la porte à la poignée dorée devant elle grinça puis se referma, ne lui laissant que le vide pour toute compagnie.

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