Chapitre 17 : LES OMBRES DE LA RÉFORME : RENCONTRE DES NOBLES À LONDRES
La réunion des nobles à Londres se tenait dans l'une des grandes résidences des élites, typiques de l'architecture de l'époque. Les bâtiments imposants, aux pierres grises et aux fenêtres étroites, s'élevaient majestueusement, leurs façades souvent décorées de sculptures qui évoquaient le pouvoir et la richesse. Les toits en ardoise pointaient vers le ciel d’un gris lugubre, fidèle à l’atmosphère de la capitale anglaise du début du XVIe siècle. Des chandeliers de métal en métal poli éclairaient faiblement l’immense salle où la réunion se déroulait, tandis que des tapis tissés aux motifs complexes recouvraient les sols de bois sombre. La pièce résonnait des murmures des hommes puissants qui se tenaient en cercle autour d'une grande table en chêne, richement ornée de parchemins et de livres ouverts.
Monsieur John Walford était vêtu de son habit habituel : un costume en laine noire serré au corps, avec des broderies dorées sur le col et les manches. Il portait un chapeau à plumes, symbole de son statut élevé parmi les commerçants et les nobles en Angleterre. Il était l’un des invités privilégiés de la réunion, un homme important à qui l’on prêtait une oreille attentive, bien qu’il ne fût pas noble de naissance.
La réunion elle-même était une discussion stratégique concernant les tensions croissantes au sein de l’Empire anglais, notamment autour des conflits religieux et politiques, qui faisaient rage depuis l’ascension d’Henri VIII. À cette époque, l’Angleterre traversait une période de profonde instabilité, marquée par la Réforme anglaise. Henri VIII, après avoir rompu avec l’Église catholique romaine, fondé l’Église d’Angleterre, et annulé son mariage avec Catherine d’Aragon pour épouser Anne Boleyn, divisait la nation. Ce bouleversement affectait toutes les strates de la société et la politique, des nobles aux classes populaires.
Le 7 juin 1522, Henri VIII avait déjà reçu Charles Quint, l’empereur du Saint-Empire romain germanique, pour discuter des alliances possibles en raison des tensions entre l’Angleterre et la France. Ce traité avait suscité des discussions parmi les nobles anglais sur la place de l’Angleterre dans la politique européenne. Et ce jour-là, dans cette réunion, il était question de ces alliances, mais aussi des préoccupations internes grandissantes : les résistances à la rupture religieuse et les répercussions économiques de la rupture avec Rome.
Les hommes autour de la table étaient divisés : certains soutenant fermement Henri VIII et son schisme avec Rome, d’autres craignant que cela ne fragilise les relations commerciales avec le reste de l'Europe. Ils débattaient aussi des conséquences de la position d'Henri, qui affectait l’Angleterre dans sa position de pouvoir militaire, de commerce et de culture en Europe.
John Walford, bien qu'il n'ait pas pris la parole sur la question religieuse, intervenait sur les préoccupations commerciales et sur les effets de ces bouleversements sur le commerce avec les colonies en Afrique. Les intérêts des marchands d’esclaves étaient désormais au centre des discussions. On y parlait du marché des esclaves africains, un marché florissant pour l'Angleterre et ses alliés portugais. Mais l'hypocrisie de ces échanges n'échappait à personne : la rencontre des nobles était teintée de cette dualité, entre l’ombre des profits commerciaux et la lumière de l'illusion d’une époque dorée.
Pendant ce temps, à l’extérieur de la salle, la ville de Londres continuait de vivre sa propre crise. Les tensions religieuses entre catholiques et protestants étaient omniprésentes, et des émeutes avaient éclaté dans certains quartiers. Les rues de Londres étaient marquées par des contrastes : d'un côté, les magnifiques demeures des nobles et des marchands, de l'autre, les ruelles sombres où le peuple souffrait de l'instabilité. Les rues étaient encombrées de charrettes tirées par des chevaux, avec des marchands criant leurs produits sous des étals de bois. Dans cette ville bouillonnante, les regards des passants étaient souvent indifférents ou inquiets, conscients des bouleversements qui se jouaient, mais incapables de saisir l'ampleur de ces changements.
Pendant la réunion, John Walford restait silencieux, mais attentif. Il savait que la politique anglaise se mêlait directement à ses intérêts. Il avait vu son empire commercial se tisser à travers des liens solides avec le Portugal et l’Espagne, et l’instabilité de l’Angleterre pouvait nuire à ses affaires.
Dehors, le vent de l'Angleterre soufflait fort, poussant les nuages gris à se faufiler à travers les rues pavées. Dans cette atmosphère humide et froide, la silhouette de Walford se détachait parmi les autres participants à la réunion, un homme du Nouveau Monde, lié au commerce des esclaves, parlant des investissements futurs. Mais à l’intérieur, l’agitation, les discussions politiques et les espoirs de gloire résonnaient, tandis que la Réforme prenait encore plus de force, bouleversant l’Angleterre de fond en comble.
Annotations
Versions