Chapitre 4: Léona
J'étais fière de moi. Je venais de finir le premier tableau de ma nouvelle vie. Il avait beau être simple, la personne que j'avais peinte n'était pas banale : mon tatoueur sexy, Callum Mackerty. Je l'avais imaginé nu, sur un lit de drap noir qui couvrait juste son anatomie. J'avais, certes, l'œil pour voir les muscles sous les fringues, selon les postures que prenaient les gens, mais pas au point de savoir ce qu'il y avait dans leurs boxers.
J'avais reproduit au mieux sa peau doré, légèrement poilu aux avant-bras, ses cheveux bruns en désordre et ses yeux gris qui, bien qu'ils puissent paraître froids au premier abord, étaient brûlant de désir. Je l'avais imaginé dans une position torride et virile : sa main gauche derrière sa tête, mettant en valeur son biceps, son pectoral, son dorsal, ainsi que ses abdominaux divinement sculpté, tandis que sa main droite était dirigée vers son sexe, dissimulée par le drap. Sa jambe gauche était aussi repliée, ce qui laissait entre apercevoir un ou deux centimètres de sa toison à la lisière du drap.
Même représenté sur une toile que j'avais peinte, j'avais envie de lui, bien que le tableau ne surpasse en aucun cas l'homme original.
Je ne suis pas venue ici pour ça!
Mais... avoir enfin un petit ami, n'était-ce pas aussi un super moyen de faire place à ma nouvelle vie ?
Ayant changé de numéro de téléphone hier, j'appelais pour la première fois depuis mon départ mon meilleur ami, Ryan, un loup-garou.
_ Ryan Grayson, j'écoute ?
_ Salut beau gosse !
_ Ma Sweety ! S'exclame-t-il, enfin tu m'appelles ! Comment vas-tu ?
_ Je vais bien, Ry. Mais merde, tu me manques, Honey.
_ Toi aussi tu me manques ! Mais tu n'avais pas le choix... il fallait que tu t'éloignes de ce malade.
_ Je sais. Et je suis heureuse de l'avoir fait. Comment va Noah ?
_ Il ne pourrait pas mieux aller ! Nous nous sommes fait une sortie romantique plutôt coquine au restaurant hier soir et j'ai eu une fois de plus la délicieuse preuve de sa... vigueur. J'adore cet homme et il me vénère dès qu'il en a l'occasion. Le pied total quoi!
Je pouffais ; j'adorais entendre le bonheur dans sa voix.
_ Hey, comment ça coquine ? Demandais-je avec curiosité.
_ Eh bien... tu crois qu'il faut que je te le dise... ? fit-il trainer.
_ Je sais que tu me caches un détail croustillant et je sais que tu veux me le raconter alors crache le morceau, bougre d'âne !
_ Vu comme il est monté, c'est plutôt Noah, l'âne. Mais tu me connais trop bien Sweety ! Ce n'est plus aussi amusant de te taquiner en te faisant poireauter... Bref, si tu veux tout savoir, il se trouve qu'au cours du diner, Noah a testé sur moi un anneau pénien vibrant... dont il tenait la télécommande ! Entre les différents styles de vibrations et les cinq degrés de rapidité, je ne te dis pas le nombre de fois où ce petit con à faillit me faire jouir dans mon pantalon.
J'éloignais mon portable de mon oreille et éclatais de rire.
Ryan avait eu une adolescence horrible. Alors qu'aujourd'hui l'homosexualité n'était plus un tabou, ce n'était pas le cas pour son ancienne meute, qui l'avait banni à l'âge de seize ans. Subissant ensuite une famille d'accueil aux idées aussi rétrogrades que sa meute, sans compter les multiples négligences afin de privilégier les deux fils naturels de celle-ci, il était partit le jour de ses dix-huit ans.
Tombé au plus bas, il avait failli se faire violer par deux types dans la rue quand Noah, Métamorphe Ours et mécanicien moto, l'avait défendu et permis d'avoir un toit ou se réfugier, ainsi qu'un emploi à l'accueil de son garage. Un an après, ils s'étaient déclarés leur amour et ne s'étaient plus jamais quitté. Aujourd'hui âgé de vingt-six ans, cela faisait sept ans qu'il vivait avec Noah, lui-même âgé de trente ans.
Entendant des « allo ? Allo ? Sweety ? » frénétiques, je rapprochais le téléphone de mon oreille, puis déclarais :
_ Je suis contente que tu sois si heureux, Tu le mérites.
On se connaissait depuis nos vingt ans. Notre amitié avait débuté dans une bibliothèque, où au lieu d'étudier, je passais mon temps à dessiner. Par-dessus mon épaule, il m'avait un jour félicité pour mon croquis et nous nous étions mis à discuter.
_ Merci ma puce, souffla-t-il, une pointe d'émotion dans sa voix. Mon seul problème est que j'aimerais qu'il en soit de même pour toi ! Que tu trouves un bonheur aussi grand que le mien. Je me rappelle très bien toutes ces fois ou tu as joué la médiatrice entre Noah et moi. Sans toi, j'aurais pu être célibataire aujourd'hui !
_ Tu exagères ! M'esclaffais-je, Noah t'aimait déjà trop à l'époque pour te quitter à la moindre dispute. Sans moi vous auriez juste fait la gueule plus longtemps, c'est tout.
_ Pff... moi, je crois que tu minimises un peu trop ton rôle dans ma relation avec lui.
_ Vraiment ?
_ Certes, la plupart du temps ce n'était que de petites disputes. Mais il y a quand même eu une ou deux fois ou ce n'est pas passé loin et ce n'est que grâce à toi qu'on a pu se rabibocher. D'ailleurs... je vais faire comment moi, maintenant que tu n'es plus là, pour le faire céder à mes caprices ? Il faut que je trouve une solution... Mais mon dieu, petite démone ! Tu me fais changer de sujet !
_ Ah bon ? Mon pauvre Honey, je n'avais pas remarqué...
_ Mais oui, fiches-toi de moi ! Il doit bien y avoir plein de jolis garçons autour de toi, non ? Sors et choisis-en un sexy mais fidèle, qui te vénèreras !
_ Sortir sans toi ? Trop emmerdant, pas envie. Je préfère peindre. Et puis, il y a ce type, Callum...
_ Callum ? fit-il, inquisiteur. Nom sexy, c'est déjà un bon début... qui est-ce ?
_ Mon futur tatoueur. J'ai rendez-vous avec lui demain pour commencer.
_ Ah ? Tu sautes enfin le pas ? Avec le dessin que tu m'avais montré ?
_ C'est ça.
_ Et... il est comment ce Callum ? demanda Ryan,
_ C'est un Orc.
_ Ola, c'est du lourd ! s'écria-t-il. Tu ne sais pas tout ce qu'on raconte sur les Orcs ? Sweety, ce ne sont pas des enfants de cœurs, d'après ce qui se dit sur leurs comptes.
_ Justement, ce ne sont que des rumeurs, contrais-je avec aplomb. Il ne dégage pas une once de méchanceté... Il me fait d'ailleurs penser à Noah. Les ours n'ont pas non plus une super réputation, que je sache, pourtant Noah est génial.
_ Dit comme ça...
_ Je t'assure, il a l'air d'être un homme vraiment bien. Tu sais qu'il a reconnu de suite les Ephémères de Virginie ? Il m'a avoué que c'est parce que sa mère adorais jardiner.
_ Je vois. Et physiquement ? Dis-moi comment il est !
_ Grand ! Plus que Noah en tout cas. Et plus balèze aussi. Seigneur, il est tellement sexy ! Sa musculature est impressionnante, sans pour autant faire bodybuilder. Les cheveux bruns en batailles, des yeux gris magnifique, un sourire si torride... que j'en ai mouillée mon string ! Bref, il est parfait.
_ Hum... j'admets qu'il m'a l'air vraiment pas mal vu comment tu en parles...
_ Et tu es loin du compte, je peux le prouver. Je viens de finir un tableau avec une pâle copie de lui dessus. Je t'enverrais une photo.
_ Ok j'ai hâte d'admirer ton apol... je veux dire ton travail !
_ Mais bien sûr, Ry, ironisais-je. Fais gaffe à ne pas baver dessus sinon je te cafte à ton mec !
_ J'en étais sûr ! Persifla mon ami, tu es une démone dans un corps humain.
_ C'est bien pour ça que tu m'aimes, n'est-ce pas ?
_ Bien évidemment que je t'aime, affirma-t-il.
_ Hey ! A qui tu dis des « je t'aime », toi ?? Interrogea la voix de Noah au loin.
_ Chéri, C'est Sweety, répondit Ryan, elle a enfin daignée m'appeler.
_ Oh, Léona ! Dis-lui bonjour de ma part, à la fripouille.
_ Je l'ai entendu, assurais-je. Remercie Noah pour moi. Putain, vous me manquez tous les deux !
_ Je m'en doute, on est tellement unique.
_ Petit con ! Pouffais-je en riant.
_ Oui, je sais. Mais c'est plus fort que moi. En tout cas j'ai hâte de voir celui qui te mangera bientôt toute crue ! Il serait temps que tu de fasses dévorer d'ailleurs. Le sexe, c'est la vie ! Du moins, version emboitage naturel avec les hétéros. Et toi, ma douce Sweety, tu es bien trop belle pour être encore vierge !
_ Ouais, ouais, je sais, arrête de m'embêter avec ça... je ne l'ai pas gardé par choix et tu le sais.
J'avais carrément honte de n'avoir jamais été plus loin que de simples baisers avec le mec sympa qui m'avait emmené au bal de promo ou l'homme charmant et gentil qui me servait de cavalier officiel lors des soirées mondaines obligatoires, mais choisit par mon putain de paternel. Je soupirais, dépité.
_ Tu me connais, poursuivis-je, tu sais que je ne suis pas du genre à être fan des plans cul.
_ Je sais ma puce. Je veux juste que tu aies quelqu'un avec toi qui t'aime et te soutienne. Non seulement pour ton propre bonheur mais aussi au cas où, malheur à nous, ton salopard de père te retrouverait. Je n'aime pas te savoir toute seule.
_ Ne t'en fais pas pour ça, Ry. Et puis s'il me retrouve, je partirais encore plus loin, et je me paierais une nouvelle identité ! Si mon héritage peut me permettre d'avoir la paix, je l'utiliserais.
_ J'espère sincèrement que tu n'auras pas à en arriver là. Je te laisse, Noah m'attend pour diner.
_ D'accord. Bonsoir à vous deux. Je te recontacte très vite.
_ T'as intérêt ma Sweety ! Bisous.
Je raccrochais et lui envoyais une photo de mon tableau. Il me répondit illico un « seigneur, il est sexy ! Je veux le même tableau avec Noah à la place pour mon anniversaire ! » Cela me fit sourire. Je mis mon portable à charger près de mon lit et réchauffais une petite part de hachis parmentier fais maison, que je dégustais devant Nat géo wild.
Une heure après, je me douchais rapidement et allais au lit.
Demain je vais me faire tatouer. Demain je vais revoir Callum...
Je frissonnais d'anticipation tant j'avais hâte. Les yeux à peine fermé, je m'endormais.
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