Dans la bâtisse, Spartacus et les trois autres se tenaient aux aguets, fixant la porte d’entrée sans oser bouger. Avec tout ce vacarme, ils avaient compris que des assaillants s’apprêtaient à venir à leur rencontre. C’était sûrement la pire chose qui pouvait leur arriver, eux qui tenaient justement à s’éloigner des hommes libres pour éviter d’être soumis de nouveau.

 Lorsque Saul fit voler la porte d’un grand coup de pied, ils se renfrognèrent tous, serrant leurs armes. Le grand Assyrien entra en premier, jetant des regards furtifs à la recherche d'un potentiel ennemi dissimulé. Amset suivit. S'il était prêt à tirer, il persistait à garder son arc baissé. Lorsqu’ils le virent, Saa et Caius eurent un mouvement de recul, ce qui attira l’attention de leur chef.

 — C'est lui, l’enfoiré qui t’a blessé, Saa ? lança-t-il en fusillant le jeune prêtre du regard.

 Le concerné confirma d’un geste de tête et Amset déglutit. Il avait reconnu les intrus qu’il avait surpris à fouiller dans Nochélys. Il se serait bien justifié en prétextant l’accident, mais la vue de la Cyanidienne, derrière eux, pieds et mains liés, lui fit oublier tout le reste.

 — Orbia ! Ils ne t’ont pas fait de mal ?

 — Non, je vais bien ! Mais ils ont pris le…

 — Maintenant ! ordonna Spartacus.

 Il s'élança vers les Assyriens, suivi de Nola et Caius. Si leur leader tenait sa lourde masse à deux mains, les deux autres n’avaient que des pieux déjà usés. Le Cobalte n’y alla pas de main morte. Il asséna d’un large mouvement latéral qui aurait été capable d’arracher la tête d’Amset si ce dernier ne s’était pas baissé à temps. Le mur juste derrière n’eut pas cette chance et fut en partie démoli par la force de l’ancien soldat. Quetzu quitta les épaules du cultiste et  enfonça ses crochets dans la jambe de Caius qui arrivait sur le côté pour se joindre au combat. Dans un hurlement de douleur, il tenta de se dégager du serpent, le martelant sans viser. Pendant ce temps, Nola s’était attaquée à Saul. Loin d’être intimidée, elle se servit de son pieu comme d’une arme d’estoc. Saul étouffa un cri de douleur lorsqu’elle frappa au foie. La douleur le fit cracher, plié en deux. L’arme, heureusement, n’était pas capable de transpercer sa chair. Toujours était-il que le coup fit son effet et fut suivi de multiples revers. Il ne parvint à s'en échapper qu'en roulant sur le côté.

  Amset dut se jeter plusieurs fois dans l’une ou l’autre direction afin d'éviter d’avoir le crâne fracassé par les violents coups de masse de Spartacus. Plus d’une fois, il passa à un cheveu d’être tué. Orbia lui criait des encouragements ou le prévenait d’un assaut à venir. Mais le Cobalte était rapide. Il frappait sans s’arrêter, dégageant poussières et éclats de bois à chaque attaque. Il ne laissait aucune ouverture au cultiste.

 Au bout de quelques instants, au lieu de relever sa masse pour l'écraser, Spartacus tendit le bras et se saisit de la jambe d’Amset. Capturé, ce dernier poussa un juron. Il essaya de se dégager avec des gestes brusques, sans succès. L’esclave, d’une seule main, leva alors son arme. Même si l'impact serait moins puissant que s’il avait utilisé les deux, il allait certainement lui briser les os.

  Spartacus s’apprêtait à baisser son arme quand il sentit soudain une gêne, comme des fils invisibles qui freinaient sa masse et l’empêchaient de l’abattre. Puis un sifflement à ses oreilles attira son attention. Le serpent à plumes s’était discrètement glissé dans son dos. Il lâcha la jambe d’Amset pour récupérer toute possession de son arme et se secoua dans tous les sens. Il parvint à faire chuter Quetzu avant qu’il ne puisse le mordre. Il s’apprêtait à le frapper quand un cri l’avertit.

 — Ne bouge plus ! Dépose ton arme !

 Spartacus déglutit. Amset était debout et le menaçait de son arme. Il ignorait que l’Assyrien n’était pas très doué. Par contre, il avait vu de près la plaie de Saa. Il s'imaginait déjà le crâne transpercé. Il vit aussi que Caius était inanimé plus loin. De l'autre côté, Saul venait de reprendre le dessus sur Nola après une riposte bien placée. La situation ne jouait plus en leur faveur. Fronçant les sourcils, Spartacus jeta un bref coup d’œil au reptile avant d’obtempérer. Il jeta sa masse derrière lui et leva les bras en signe de reddition. La colère se lisait sur son visage.

 Amset haletait sans oser quitter le Cobalte du regard. Un sourire se dessina sur son visage en prenant conscience qu’il était parvenu à le désarmer, sans le blesser qui plus est. Lui-même n'avait rien de plus que quelques égratignures à force de rouler sur le sol abimé. Saul, un peu plus loin, poussait des soupirs de satisfaction. Nola s’était révélée une adversaire acharnée. Quetzu, lui, était rapidement venu à bout de Caius. Le prêtre se demanda d’ailleurs si l’esclave était mort. Les serpents à plumes disposaient-ils de poison ? Une plainte de protestation le sortit de ses divagations. Il tourna la tête vers Orbia et écarquilla des yeux, horrifié.