Chapitre 40: Réflexions sur le retour

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 En sortant, ils purent constater que les affrontements en extérieur n’avaient pas été de tout repos non plus. C’est David qui les accueillit, alors qu'il s’apprêtait à les rejoindre. Il tenait la lame de sa hachette dans une main et le manche dans l'autre. Plus loin, Jessé reprenait sa respiration, sa truelle à ses pieds, appuyé contre sa pelle. La furie qui l’avait mis dans cet état semblait tout aussi épuisée, affalée plus loin contre un arbre, une grimace au visage. Samuel menaçait deux esclaves de sa machette de cuisine tandis que Nathan, à l’image de Spartacus, restait étendu au sol, face à son adversaire qui se tenait dans la même position. Ils s’étaient tous les deux acharnés à main nues, en témoignaient leurs nombreux bleus.

 Comme la jeune Cyanidienne sortait avec leurs deux amis, les Assyriens poussèrent un cri de victoire. Orbia sursauta de les voir si nombreux, mais fut rapidement distraite par Célian qui lui lécha le bras de son immense langue. Paco se posa ensuite sur la corne du velucéros en bombant le torse, jaloux, et elle lui fit une légère caresse sur le bec.

 — Si on y allait ? proposa David.

 — Oui, Célian va rapatrier les blessés en premiers, ainsi qu’Orbia, et…

 — Je peux marcher ! protesta la jeune fille. Tes amis, par contre, ils ont l’air d’être dans un sale état…

 Malgré les protestations des Assyriens, Orbia refusa de prendre une place sur le velucéros, qui fut donc monté par Jessé, Nathan et Saul. Ils étaient ceux qui avaient le plus souffert des affrontements. L’animal ainsi chargé démarra le trajet de retour, sans se presser. Vu l’état des esclaves, ceux-ci étaient vaincus. Seulement, par sécurité, David et Samuel se proposèrent pour rester un peu en retrait, en compagnie des oiseaux qui les avaient manifestement bien aidés dehors.

 Quetzu sur les épaules, Orbia marchait donc en compagnie d’Amset, escortés par Célian. Ils ne s’étaient plus lâchés depuis qu’ils étaient sortis de la masure. Ils n’avaient pas dit grand-chose, à vrai dire. Malgré le contact physique, ils se fuyaient des yeux, presque gênés. Ils avaient pourtant tant de questions à se poser.

 — Dis, tu me présenteras, quand on sera sortis d’ici ? demanda finalement Orbia en brisant ce silence.

 — Oui, bien sûr ! Ce sont des amis que j’ai rencontrés à Réunion, tu sais, cette grande ville en construction.

 — Et … Et ils sont arrivés aussi vite que ça pour m’aider ? Je pensais que c’était plus loin…

 Amset ne répondit pas, évitant de nouveau son regard. Il n’avait pas envie de gâcher sa surprise mais il ne voyait pas comment justifier leur présence. Il allait devoir lui avouer ce qu’il fabriquait depuis plusieurs semaines déjà. Cependant, il voulait d’abord le lui montrer. Une fois qu’ils seraient sortis de là, il l’inviterait à les suivre à Nochélys. Il devait changer de sujet de conversation. Une question lui trottait justement en tête.

 — Tu as une idée de ce qu’il s’est passé, quand on était là-bas ? demanda-t-il. Tu sais, quand la masse s’est libérée de sa main et l’a attaqué… toute seule… ?

 Cette fois-ci, ce fut à Orbia de regarder ailleurs, son teint rougissant. On eut dit une enfant prise en faute. Amset ne put s’empêcher de trouver sa moue mignonne, presque amusante. Il pouffa le plus silencieusement possible, réfléchissant en même temps à la réponse à sa propre question.

 À vrai dire, il existait bien une force capable d’interagir avec les objets sans les toucher. C’était un Don, au même titre que celui de Dompteur. Mais il s'agissait certainement du plus rare de tous, au point que beaucoup le considéraient comme un mythe. On appelait les personnes capables de manipuler les objets par l’esprit les Héritiers de Psyendé, en hommage au Colosse du même nom. On attribuait à cet être à la limite du divin le cadeau des connaissances du Culte aux humains. C’était elle qui aurait fondé les premières églises et mené la première Croisade, utilisant ses capacités hors du commun pour rallier des peuples ou soumettre les autres. Des huit Colosses du Culte, elle était certainement le plus important et puissant.

 Pourtant, il savait Orbia déjà dotée d’un premier Don. Il n’avait jamais entendu parler de qui que ce soit en possédant deux. Elle n'en avait pas parlé non plus et l'avait encore moins montré. Ou bien était-il possible qu’elle ignore son propre pouvoir ? Après tout, lui-même n’avait découvert celui de communiquer avec certains animaux que récemment. De toute évidence, elle y était pour quelque chose dans le miracle qui lui avait sauvé la vie.

 Finalement, après de longues minutes de marche, David et Samuel les rattrapèrent. Ces deux-là en profitèrent pour se présenter brièvement à Orbia, qui les remercia avec son entrain habituel. Ils omirent tout de même d’expliquer la raison de leur présence, ce en quoi Amset leur fut très reconnaissant. Ceux qui voyageaient à dos de velucéros firent de même, sans qu’elle ne pose plus de questions. Enfin, alors que la nuée d’oiseaux qui les suivait encore se dispersait dans la jungle, ils virent des rayons de soleil éclairer le haut de la petite colline où ils avaient l'habitude de se voir à midi. Là-bas les attendait Hypatie, ainsi que Barabbas.

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