Chapitre 7
Sylvestria, Pacifia, Utopia
Les agents Hunter Greaves et Dante Zavaleta arrivèrent à Sylvestria. Comme prévu, ils se dirigèrent vers la taverne des oubliés où ils avaient donné rendez-vous au chasseur de prime Akeba Leonas. Ce dernier était accoudé au comptoir, en train de boire. Ce qu'il buvait n'était pas assez fort pour lui faire perdre sa lucidité.
— Leonas, dit l'agent Greaves.
Le chasseur de Prime se retourna et vit les deux agents efdéemois en costume noir. Personne n'aurait deviné qu'il s'agissait d'agent du Efdéème.
— Et bah... C'était pas trop tôt. Je hais cet endroit.
— Il vous va pourtant bien, ajouta Zavaleta.
Leonas se mit à rire.
— Vous me connaissez mal.
— Oui visiblement. On pensait que vous seriez suffisamment compétent pour nous ramener le garçon.
— Seul j'aurais réussi. Pas ma faute si on me colle des gars à peine capable de se servir de leurs armes. Et puis je ne pouvais pas savoir que Kesselius l'aiderait.
Après quelques secondes de blanc, les deux agents invitèrent Leonas à aller s'asseoir à une table pour continuer la conversation.
— En tout cas c'est votre jour de chance Leonas, dit l'agent Greaves.
— Comment ça ?
— Nous ne raconterons à personne qu'une cible vous a échappé.
— Oh... C'est vrai ? demanda ironiquement le chasseur de prime. Qu'est-ce qui me vaut cette faveur.
— La guerre.
— La guerre ?
— L'Empereur à changé d'avis concernant le garçon. Puisque nous n'avons aucune idée de l'endroit où le capitaine Kesselius à pu l'emmener, l'empereur Emilien a décidé qu'il était inutile de continuer à investir des moyens considérables pour le retrouver. Le Efdéème a trop à faire avec cette nouvelle guerre.
— Contre le Véerème ?
— Entre-autre oui.
— "Entre autre" ? Vous vous êtes fait des nouveaux ennemis ? demanda Akeba en se moquant des agents efdéèmois. Laissez moi deviner... Vous vous êtes mis toute la planète sur le dos.
Fort heureusement pour le Efdéème, ça n'était pas encore le cas. La majorité des pays souhaitaient rester neutres. La guerre opposait actuellement le Efdéème au Véerème et ses alliés, c'est à dire l'Empire et le Nord-Véerème. Dalkia quant à lui n'avait pas ouvertement déclaré qu'il entrait dans le conflit. Mais il se préparait avec l'aide de ses alliés à un éventuel retour des forces Efdéèmes.
Cependant, même si la guerre était déclarée, aucun affrontement direct n'avait eut lieu depuis la fin de celle de Dalkia. Actuellement il s'agissait plus d'une course à l'armement qu'à un conflit direct. Mais les deux camps n'attendaient plus que la petite étincelle qui ferait exploser le baril de poudre, l'événement qui les pousserait à s'affronter directement comme à Dalkia.
— On aura sans doute besoin de vos services, reprit Hunter Greaves.
— Ahhh... et pour quoi faire ?
— Sabotage, destruction, assassinat, soutien de nos troupes. Vos capacités pourraient nous être très utiles, répondit l'agent Zavaleta.
Leonas réfléchit un court instant avant de répondre.
— Et bien vous avez de la chance que votre empereur paie bien... Et que je déteste le Véerème.
***
À quelques kilomètres du Pays des Rêves, Utopia, 13 juillet 1990, 18h00 environ
Le Rêveur atterrit dans une prairie adjacente à une route piétonne. Kesselius indiqua à Jack que pour se rendre au Pays des Rêves il devait la suivre. Il n'exposa pas les raisons pour lesquelles il n'avait pas voulu le conduire directement au Pays et Jack ne chercha pas à savoir.
— Dites moi combien je vous dois pour le voyage... demanda tout de même le jeune homme.
— Rien, répondit le capitaine.
— Rien ?
— Je t'avais dit que le Pays des Rêves était la destination la moins chère, dit Kesselius en riant. C'est très rare que j'emmène quelqu'un ici... Les rares fois où je l'ai fait, c'était pour elle, répondit Kesselius en parlant de Naturia. Et après tout ce qu'elle a fait pour mon équipage et moi, je peux au moins amener les rares personnes qu'elle souhaites rencontrer, ici, gratuitement...
— Merci... Merci capitaine, dit Jack avant de descendre du Rêveur.
Il avança sur quelques mètres puis se retourna.
— Vous êtes vraiment sûr de ne pas vouloir m'accompagner ? Demanda Jack.
— Certain.
— Vous ne voulez pas la revoir ?
— Bien sûr que si mais c'est pas le problème...
— Ok, alors qu'est ce que c'est ? lui demanda Jack en écartant les bras.
— Petit, reprit Kesselius, tu verras que le Pays des Rêves n'est pas un endroit commun. Tu y perdras vite tes repères. C'est un pays magnifique, fabuleux, magique, tout ce que tu veux. Mais tellement différent de ce que l'on connait. Je m'y suis rendu à plusieurs reprises et ça m'a toujours fait le même effet.
— Lequel ?
— J'ai toujours eu l'impression d'être de trop, d'être perdu, dit Kesselius en remontant à bord du Rêveur.
Jack se mit à rire.
— Sûrement... j'imagine en tout cas.
— Tu salueras la Lady de ma part... lança Kesselius à Jack.
— Je n'y manquerais pas, lui promis ce dernier avant de voir Nathaniel refermer la porte du vaisseau.
Quelques secondes plus tard, le Rêveur effectua son ascension dans le ciel puis s'en alla. Jack le regarda disparaître dans les nuages, puis continua sa route vers le pays des rêves. Il emprunta la route que lui avait indiqué Kesselius. Il n'y avait personne. Comme si l'endroit était abandonné. Et pourtant, elle donnait l'impression d'être régulièrement entretenue. "étrange" pensa Jack.
Le jeune homme marcha pendant quelques minutes jusqu'à se retrouver face à une intersection.
"Merde" se dit-il "Kesselius ne m'en avait pas parlé". Heureusement qu'il y avait des panneaux. En les lisant, Jack se demandait si l'endroit ne se moquait pas un peu de lui. "Sérieusement ?" se dit-il.
Les panneaux pouvaient être surprenants pour quelqu'un qui ne connaissait pas l'endroit. Plusieurs directions s'offraient à Jack : le pays des merveilles à gauche, la cité endormie à droite, le Chaos à l'est. Jack se demanda ce qu'ils entendaient par "Chaos". Probablement une ville déserte.
Certaines destinations étaient un peu plus classiques, beaucoup plus classiques même. Comme Pacifia avec un panneau qui l'indiquait dans toutes les directions, montrant que le Pays des Rêves était entouré par le royaume elfique, et le Véerème à l'ouest. Même si ce dernier se trouvait à plus de cinq mille kilomètres de l'endroit où se trouvait actuellement Jack.
La destination la plus improbable fut quand même celle indiquée par un panneau pointé vers le ciel. Ce dernier indiquait tout simplement la lune utopienne. Comme s'il était aussi simple de s'y rendre. De plus, comment pouvait-on l'indiquer avec un panneau alors que sa position dans le ciel variait constamment ?
"C'est n'importe quoi..." se dit Jack.
Selon les panneaux, si Jack désirait se rendre au Pays des Rêves, il devait continuer tout droit. Il reprit donc sa route en restant sur le même chemin.
Au fur et à mesure de son avancée, tout devenait de plus en plus étrange. Comme s'il arrivait progressivement dans un endroit enchanté, merveilleux. Il réalisa qu'il s'approchait de là où il voulait aller.
Une fois arrivé au Pays des Rêves, Jack le comprit alors un peu mieux. Dans les histoires, on mentionnait la présence d'éléments fabuleux, improbables tels que des arc-en-ciel sur lesquels les gens pouvaient marcher, des nuages sur lesquels on pouvait se poser, des trèfles géants, des champignons géants dans lesquels habitaient la population locale. Tout cela, Jack le voyait. Mais c'était différent des histoires. Disons qu'à présent, tout prenait sens. Ou du moins en partie.
Oui les arc-en-ciel étaient présents. Mais il ne s'agissait que d'immenses arches construites peintes aux couleurs de celui-ci, oui les champignons géants étaient là, mais il ne s'agissait que de constructions en forme de champignons et non pas de vrais champignons. Oui les nuages sur lesquels on pouvaient marcher étaient présents eux-aussi. Mais là encore, il s'agissait visiblement d'une prouesse technologique qui permettait d'avoir des engins volants ressemblant à des nuages. Pour ce qui est des trèfles géants par contre, il y en avaient de deux genres. Les trèfles de nature végétale qui, oui, étaient beaucoup plus grands que ceux que tout le monde pouvait voir ailleurs sur Utopia. Ils faisait la taille d'un arbre. Puis il y avait ceux construits par la population. Ces derniers étaient aussi grands que les autres mais chaque "feuille" étaient en fait un panneau solaire captant les rayons du soleil pour les convertir en énergie. Le tout donnant à l'endroit un aspect merveilleux, tel qu'on le retrouvait dans les histoires pour enfants, et tel que l'avait dit Kesselius.
Jack avait littéralement l'impression d'être en plein rêve d'enfant ou d'être le héros de l'une de ces histoires. Tout ce qu'il voyait contrastait avec ce qu'il vu à Pacifia et surtout avec les paysages de Dalkia.
Préoccupé par ce qu'il voyait dans les airs. Jack ne faisait pas attention où il marchait. Il heurta quelqu'un, un individu de petite taille, entre un mètre et un mètre vingt environ, barbu avec des oreilles pointues, ressemblants à celles des elfes.
— Oh, excusez moi... je ne vous avez pas vu, s'excusa Jack.
— Pas de quoi, lui répondit le petit être. Dites moi, je ne vous ai jamais vu ici. Vous êtes Humain ?
— Euh... oui... Oui, je viens d'arriver. Je cherche quelqu'un. Une elfe qui s'appelle "Naturia". Vous savez où je peux la trouver.
— Tu cherches Naturia ? C'est notre protectrice. Elle doit sûrement se trouver près de la rivière éternelle, là où elle a établi son domicile.
— Ah... Et où elle est cette "rivière éternelle" ? demanda Jack tout en regardant l'individu.
C'était la première fois qu'il voyait un tel personnage. Il ne savait même pas s'il s'agissait d'une espèce à part entière ou simplement d'un elfe de petite taille. Il ignorait qu'il s'agissait en fait d'un Gnome, espèce rare et méconnue d'Utopia. Ils ne vivaient qu'au Pays des Rêves et aux alentours. Beaucoup pensaient qu'ils n'existaient que dans les histoires pour enfants.
— Il te faut passer l'arc-en-ciel et le champ pignon. Puis tu entreras dans la forêt enchantée. De là, la rivière est assez facile à trouver. Tu n'auras plus qu'à la suivre dans le sens inverse du courant et tu finiras par tomber sur Naturia.
— Ok... Quel "champignon" ? Vous parlez d'une maison particulière ?
— Oh... non. C'est la première fois que tu viens ici toi... Le Champ Pignon est un champ qui appartient à la famille Pignon. Il se trouve à quelques pas d'ici. On peu d'ailleurs l'apercevoir de là où nous sommes.
Jack regarda dans la direction indiquée par le gnome. Il y avait en effet un immense champ.
"Ok... un truc de fou" pensa t-il.
— Donc rien à voir avec les maisons ?
— Bah non mon petit... sinon, je n'aurais pas dis "Champ Pignon", mais "Maison"... lui répondit le gnome.
— Ok...D'accord...Logique..., répondit Jack qui ne le pensait pas une seconde. Merci beaucoup.
— De rien jeune homme... Je te souhaite un très bon séjour, termina le Gnome avant de reprendre ses activités.
"Donc les maisons en champignon ne s'appellent pas champignon mais les champs appartenant à la famille Pignon, si..." se dit Jack. "Quand je vais raconter ça à Olympe... elle ne va pas me croire..."
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