Registre des enquêtes internes, page 147

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Limier Tinekerbas In Uksem, garde royale de Kuvalzum

Premier Lok de Chuteron, année 1212 de l'Arche de Torn

Je dois partir. Quelque chose de trop dangereux et de trop maléfique rôde, et, bien que j'aie du mal à l'admettre, j'y suis totalement impuissant. Même la garde et le Tribunal ne semble dissuader ce maléfice d'agir.

Je n'ai pas toutes les informations, mais je suis certain d'une chose aujourd'hui. Azel et Hila sont une seule et même personne. L'identité de Malifa n'est pas encore établie, mais j'ai de lourdes présomptions quant à la conseillère Ashka. Les liens qui l'unissent à cette affaire restent opaques.

J'ai aperçu une ombre hier au soir, rôdant aux alentours du palais. J'avais pris l'habitude de me promener à la nuit tombée près des jardins extérieurs, comme l'enquêteur Kobi le faisait avant sa disparition, à l'affût du moindre détail m'ayant échappé. Je n'ai pas été déçu.

La silhouette était celle que j'avais aperçue derrière les rideaux de la salle du trône, j'en jurerai. Toujours accompagnée de quelques gros chats noirs, au regard effrayant. Elle m'a semée alors que je la poursuivais, volatilisée dans la nuit au détour d'une allée. La même nuit, l'aile de l'Oraculaire a pris feu, brûlant vif la moitié des résidents. L'incendie a été difficilement maîtrisé et a ravagé tout le bâtiment. Puis l'Intendance, les archives des enquêtes internes, et la bibliothèque ont subi des dégradations matérielles et des meurtres parmi leur personnel. L'alchimiste a été également retrouvé assassiné, pas de subterfuge pour tenter de faire passer cela pour un accident ou un suicide, cette fois. Plus de preuves, plus de témoins, comme c'est pratique. Qui aurait intérêt à faire tout cela ? Hila, bien sûr. Nettoyant avec hâte les endroits où j'ai pu fourrer mon nez, et me donnant un avertissement mortel quant à ce qu'il adviendrait si je m'entêtais à continuer.

Je ne serai pas surpris d'apprendre que l'ancienne conseillère Fahrat soit portée disparue. Cela semblerait logique, quoiqu'un peu tardif.

Il ne peut s'agir que d'un motif de vengeance. La vengeance pour son mari Majid, contre ce peuple qu'elle hait, contre l'injustice dont il a été victime. Mais surtout la vengeance pour sa fille Zari. Maîtresse du Padishah, répudiée à la demande de la Shahbanu, sa femme légitime, et humiliée et exécutée en place publique pour avoir refusé de se soumettre à cette décision.

J'ai tenté d'alerter le Vizir, mais mes allées et venues l'ont tant irrité qu'il ne souhaite même plus m'accorder une audience. Le préavis de guerre imminente n'aide pas non plus. Que les Déesses aient pitié.

Je plie bagage en laissant ces mots derrière moi : ne faites confiance à personne.

Craignez cette Azel, ou quel que soit le nom sous lequel elle se présente à vous, car son pouvoir est certainement bien plus grand que ce que sa frêle stature ne laisse supposer. Son influence a perverti l'ensemble des hautes sphères du palais, et le reste de la Cour est gangréné par la peur. Le seul organe qui pouvait faire opposition, l'Oraculaire, a été décimé, et ses mots ne sont plus accueillis par l'oreille du souverain depuis longtemps.

Méfiez-vous de la conseillère Ashka Bin Salaad, car son implication est encore à déterminer et, à mes yeux, tout ce qui n'est pas limpide est suspect dans cette affaire. Je ne connais pas la portée de ses actes et de ses décisions, mais elle s'est peut-être compromise lors de son ascension rapide après la disgrâce du conseiller Majid.

Craignez la garde royale elle-même, car à mon sens, il n'est pas possible que tout les actes qu'a commis Azel aient pu passer inaperçus. Ils sont soit corrompus, soit sous influence.

Pour ma part, je retourne au Dhazzem. Bonne chance à qui voudra me poursuivre. Je préfère fuir et attendre que la tempête passe, que d'affronter des forces qui dépassent de loin mon entendement. Chaque jour supplémentaire passé ici est l'occasion de surprendre des messes basses à mon passage, ou des regards fuyants. Et toujours ces fichus chats noirs dans chaque recoin.

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