Allons voguer sur l’eau des ondes passagères
Où l’écho d’un rivage assagit mon ego,
Allons voir une ride assoner la misère
Dans les frêles pâleurs d’une larme indigo ;
Allons dire au chemin qu’une main fleurit d’ombre
Mille matins de mai, malappris galopins,
Et puis rire en semant de satin l’ami sombre
Et bercer de mots doux les calices des pins,

    Tant que le temps ne cède pas
    Aux sirènes du souvenir,
     Amère scène en devenir,
    Brûlant de douloureux appas.

Allons nous promener sous les voûtes filasses
D’éphémères embruns ruisselés sur le ciel,
Adorer l’incendie orangé d’ires lasses
Que dessine Apollon de son pinceau de miel ;
Allons nous abreuver d’enivrantes mélasses
Au goût d’air envolé, d’un fil artificiel,
Espérer en chemin que nos pas se prélassent
En pétales posés sur un filet pluriel,

    Avant de virer sans espoir
    Aux grises mines du passé,  
     Oubli ne sachant caresser
    Que l’encre de l’abîme noir.

Allons voir une rose en volutes véloces
Étaler ses parfums sur les plumes du vent :
Douce fêlure éclose envoûtant les cent noces
De nos sens au dessein qui s’envole souvent ;
Allons enfin finir la route passagère
Au sentier de ton âme oubliant mon ego,
Allons sourire encore, et malgré la misère,
D’un reflet déposé sur ton cœur indigo…