Chapitre 14
Phil vit arriver Louis suivit d'Iris vers leur campement. Il voulu parler à la jeune femme, mais elle le dépassa sans un mot pour entrer dans la première tente qui se présenta.
- Elle est contrariée je pense, ricana Al en voyant la mine surprise de son frère.
- Le Capitaine l'a présenté à tout le monde et il a parlé de sujet sensible. Il a même essayé de montrer ses marques.
Sam ouvrit de grands yeux,
- Il l'a touché sans lui demander ? Il cherche a perdre ses mains l'idiot..
Elle le disait sur un ton moqueur mais au fond, elle savait ce que son amie pouvait ressentir. Être orphelin était un traumatisme, ils avaient tous leur histoire. Mais tous les enfants avec qui elle avait grandi pour surmonter ce traumatisme, se cacher derrière un toc ou une obsession. Quelque chose qu'il pouvait contrôler après n'avoir jamais eu le choix. Sam se cachait derrière sa mauvaise humeur et son air détaché. Iris devait avoir trouver se refus de contact humain pour se protéger.
Elle vit Phil lever les yeux au ciel avant de retourner à sa cuisine. Alors elle décida de rejoindre sa camarade dans la tente. Elle était roulée en boule sous une couverture et son souffle indiquait qu'elle s'était endormie.
Sam prit alors une autre couverture pour la déposer sur son amie afin qu'elle n'ait pas froid. Puis elle sortie pour reprendre elle aussi l'installation du camp.
- Je pense qu'Iris en a trop vu d'un coup et que tout ressort maintenant. Evan va pas être content que vous soyez partie sans rien lui dire, déclara Al en aidant Louis à nourrir les chevaux.
- Apparemment on est sa meilleure équipe, des génies ! Alors il va pas nous en vouloir de prendre du repos.
Il expliqua par la suite en détail ce qui avait été dit durant cette réunion. Al vit son ami reprendre confiance en lui pour la première fois depuis leur rencontre. Il avait après tout permis de réussir l'exercice. Il espérait que Louis se rendrait enfin compte de toutes ses qualités.
- Je pense que venant du Capitaine Evan, ça ne peut que être un compliment. Si on est sa meilleure équipe, on va sûrement réussir cette mission sans soucis !
Louis hocha la tête tout en gardant un grand sourire.
- oh que oui ! J'ai hâte de raconter tout ça à ma grand-mère.
Les deux jeunes hommes continuèrent leurs discussions en s'occupant de leur tâche. Phil, les yeux rivés sur une casserole fumante écoutait d'une oreille leur bavardage. Pour lui, ils comprenaient bien trop d'espoir et de fausses idées. Il avait affronté un sorcier, un seul et son combat n'avait duré que quelques secondes. Leur mission ne serait pas simple bien au contraire, il avait peur que tous ne rentre pas, et ne revoit jamais leur famille. Pourtant il ne dit rien, continuant de remuer sa soupe aux pommes de terres et aux racines. Il aimait s'occuper de la cuisine, cela lui permettait de faire une activité calme pour une fois et ils étaient certain qu'aucun aliment n'allait essayer de le blesser.
Une fois que la soupe fut prête, il prévint son équipe avant de servir deux bols. L'un des deux était destiné à Iris. Il savait que quand elle était dans cet état elle faisait semblant de dormir. Il l'avait bien trop observé pour se faire avoir. Son rôle de chef l'obligeait à s'assurer qu'elle mangerait ce soir. Mais malgré lui, ce n'était pas la seule raison, qui le poussa à retrouver la jeune femme. Il s'assit sur une autre couverture à côté d'elle avant d'entreprendre de manger sa soupe, sans lâcher des yeux le paquet de couverture sous lequel se cachait Iris.
- C'est puéril, tu ne peux pas te comporter comme une enfant à chaque fois que tu es de mauvaise humeur. Apprend à avoir des réactions matures, dit-il en donnant un léger coup de pied dans le tas. Elle bougea et un œil apparut entre ses longues mèches de cheveux.
- Je n'ai pas eu d'enfance alors je me rattrape maintenant, marmonna-t-elle. Iris sentit le doux fumé qui s'échappait du bol de son camarade. Elle n'avait pas envie de bouger, elle avait besoin de se remodeler un cocon. Mais son estomac gronda.
- Tu vas vraiment utiliser la carte de la petite orpheline maintenant ? C'est votre spécialité avec Sam, répondit Phil sans cacher son agacement.
Iris le fusilla du regard mais elle se releva pour s'asseoir en tailleur. Il lui tendit son bol avec un vrai sourire. Il était ravie que son honnêteté la fasse sortir de son trou.
- J'utilise la carte de l'orpheline quand j'en ai envie...mais pas ce soir. C'est vrai ma réaction est exagérée. Mais Evan est insupportable ! Il ne nous informe de rien, ne ressent rien, et ne connaît même pas mon prénom. Il a voulu me toucher...je sais que tu ne comprends pas mais c'est terrible pour moi.
Phil regarda son amie toujours cachée derrière un rideau de cheveux. Il ne la comprenait pas en effet, car pour lui ce monde était bien trop sombre pour y vivre sans contact humain. Mais il tentait de s'imaginer ce qu'Iris avait pu endurer depuis son plus jeune âge. Il ne pourrait sûrement jamais le savoir mais cela était forcement lié.
- J'ai compris tes limites, tout le monde les respectes ici. Evan ne les connaît pas encore, il s'y fera.
Elle haussa les épaules, avait-elle vraiment envie d'en parler à son capitaine sans cœur ? Elle était certaine que non. Hors se confier à son ami Phil ? elle ressentait soudain une forte envie de le faire.
- Je dors mal en plus...je crois que chaque nuit je vois un petit bout de ce qu'il s'est passé dans la forêt avec les sorciers.
Il se redressa immédiatement, depuis cette nuit là, il ne pouvait s'empêcher de se demander comment cette femme avait pu s'en sortir. Elle n'avait que deux blessures, mais il avait beau retourner ses souvenirs dans sa tête, quand il l'avait trouvé elle n'avait pas l'air de s'être battue. Il avait vu ses armes parfaitement accrochées sur son équipement, hormis son long couteau.
Iris avait apparemment plus d'informations, mais il ne souhaitait pas la brusquer. Il décida alors de prendre un air détaché pour l'encourager à parler.
- Tes souvenirs reviennent petit à petit, c'est ce qu'il se passe après un traumatisme. Tu...tu as envie d'en parler ?
Elle avait le nez dans son bouillon mais son regard était rivé sur lui. Il pouvait voir ses grands yeux noires l'observer à travers ses boucles.
- je..je ne suis pas certaine que mon cerveau donne les bonnes informations. Ces rêves...ils sont presque impossibles.
Phil pencha la tête ne semblant pas comprendre où elle voulait en venir. La jeune femme serra son bol plus fort pour empêcher ses bras de trembler. Quand elle repensait à ses rêves, ses cicatrices la faisaient énormément souffrir. Elle ignorait encore si elle devait en parler. Phil était un garçon très pragmatique pourtant il était aussi très ouvert. Si les mots venaient de la bouche d'un de ses équipiers, ils les croiraient. Alors elle prit un grande inspiration, avant de tout lui raconter.
- Je suis dans la forêt, et...les sorciers m'attrapent un bras...chacun. alors je ressens une douleur insoutenable, tellement horrible qu'elle m'empêche de respirer correctement et donc de hurler. Au bout d'un moment, j'accepte de mourir, et je pense à vous. Mais j'essaie quand même de me libérer et quand enfin j'y arrive...j'ouvre les yeux.
Le chef d'équipe était suspendu à ses lèvres buvant chacune de ses paroles. Il l'encouragea à continuer quand elle fit une pause, hésitante.
- Et ?
Iris inspira profondément avant de lui tendre son bol. Il le prit et le posa rapidement sur le sol.
- Ils brûlent, ils brûlent tous les deux pourtant je n'ai rien fais.
Et c'est tout, je pense que par la suite vous êtes arrivés, où bien ce n'est pas du tout un souvenir mais un rêve...qui revient.
Phil se gratta un début de barbe naissante tout en réfléchissant à ce qu'elle venait de dire. Il ne savait trop quoi en penser, ça n'avait pas l'air réaliste et pourtant Iris paraissait si troublée en racontant son histoire..
- Il doit te manquer des bouts encore. Il va falloir que tu dormes un peu plus pour que ton rêve puisse aller jusqu'à sa fin.
Il récupéra ses bols avant de faire mine de se lever. Iris fut aussitôt triste de voir partir son ami juste après qu'elle lui ait révélé son rêve étrange. Elle aurait souhaité qu'il reste plus longtemps avec elle, mais elle n'avait pas le droit de lui demander cela. Surtout après tous les efforts qu'il faisait pour tourner la page. Alors elle s'allongea sur sa couchette, sentant un grand vide s'emparer de nouveau de son ventre.
- Merci d'être venue me parler...tu n'étais pas obligée, murmura-t-elle avant de remonter la couverture sur sa tête pour disparaître à nouveau dessous. Il l'observa faire se doutant qu'il la rendait triste en partant. Il aurait souhaité passer une nuit à ses côtés comme autrefois, mais c'était trop compliqué pour lui de ne pas se faire d'idée. Il n'avait pas besoin de penser que leur situation pouvait changer.
- oui, c'est mon rôle de chef d'équipe, répondit-il simplement avant de quitter la tente ignorant le soupire que poussa Iris.
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