Arc II, Chapitre 7 : Mélissandre.

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L'odeur écœurante des plats maintenant froid tirèrent la princesse de ses pensées peu accueillantes, ainsi, son esprit rejeta l'idée même d'avaler quelque chose, laissant l'estomac vide.

D'un geste vide de toute énergie, elle se redressa avec l'idée en tête d'aller à la fenêtre si lointaine du lit. Longeant les murs en s'égratignant comme toujours les genoux, Aurora serra les dents et redoubla d'effort pour atteindre l'alcôve qu'elle n'avait pas touchée depuis longtemps.

-"Tu n'as toujours pas mangée." Constata Mélissandre en entrant dans la chambre grande ouverte.

Aurora ne répondit pas, se contentant de se hisser dans son petit creux joint à la fenêtre. En l'ouvrante, un courant d'air frais passa dans la pièce et amena avec lui l'odeur singulière de la mer.

Mélissandre ne soupira pas ni ne parut gênée par le silence de la princesse et au contraire elle se rapprocha cette dernière et prit sa main pour lui faire prendre un verre.

-"Au moins bois un peu d'eau, c'est important."

Aurora hésita un instant avant de refermer sa main dessus et de le porter à ses lèvres. Pourquoi avait-elle eu besoin de thé auparavant ? C'était complètement ridicule car ce n'était pas important pour vivre... Comme ses biscuits, ses robes et ses maquillages... Tout cela n'était que des cosmétiques pour vivre. Et pourtant, tous ces cosmétiques ne pouvaient rien faire face aux sentiments qui dominaient la vie.

-"Mél, pourquoi j'aime le thé ?"

Mélissandre resta un moment à réfléchir, la question qui paraissait pourtant si évidente ne l'était en rien.

-" Parce que cela te fais ressentir une sensation de chaleur et de calme." Tenta-t-elle, elle même pas si convaincue que ça.

À vrai dire, Aurora n'écouta même pas sa réponse, elle l'avait posée comme une question rhétorique à des interlocuteurs même si cela n'avait strictement aucun de sens.

-"Tu sais que mon père est venu, tout à l'heure."

-"Que t'as-t‘il dit ?"

-"Que j'allais être reine et qu'il fallait que je me remette de tout ça."

La vieille femme posa sa main fripée sur celle d'Aurora en réponse et la caressa doucement, donnant un réconfort.

-"Et je me suis dit qu'il avait raison, "continua Aurora en finissant son verre d'eau."Mais... Je ne peux pas m'en remettre, je suis si fragile en fait."

C'est d'un ton étrangement calme qu'elle avoua sa vulnérabilité, jusque-là jamais elle ne l'aurait fait. Mais la mort de Julia lui fit comprendre une chose, c'était qu'elle devrait déjà être morte depuis longtemps. Que peut-elle y faire ? S'y résoudre et mourir ? Car l'abandon du trône était inimaginable maintenant du fait qu'elle souillerait le nom de sa famille et le donnerai à d'autres nobles plus ou moins proches de la famille... Peut-être que Ulfray serait un bon choix tiens, son éternel cousin dont elle n’avait pas eu de nouvelle depuis un moment.

Mais finalement, c'est d'un soupire las qu'elle abandonna l'idée, elle qui s'était tant battue pour être l'héritière l'était devenue par chance et maintenant ne le veut plus, quelle honte.

-"Mél, tu peux m'apporter l'épée s'il te plait ?" demanda Aurora après quelques minutes dans son esprit."

La femme âgée se plia à la volonté de la princesse et quelques instants plus tard la lourde épée tomba dans ses bras.

L'épée familiale de Damoclès, un véritable symbole de puissance, mais quand elle sentit le contact froid de la lame contre son doigt elle se dit que malgré toutes les morts qu'elle avait causées, elle restait toujours la même : tranchante et parfaite. Hésitante, elle tira la lame jusqu'à ce que le fourreau tombe au sol et la colla à sa joue. Peut-être qu'ainsi elle pourrait s'en approcher.

-"Aurora!" S'écria Mélissandre en voyant la lame posée contre la jour d'Aurora." Tu vas te couper."

Aurora n'écouta pas un instant les paroles pourtant sages de sa gouvernante et se concentra davantage sur ses pensées. Ce moment précis était incroyable pour elle, ses émotions semblèrent se confondre dans un fond flou alors que son esprit réfléchissait encore et encore à quoi faire.

Pourquoi avoir une épée ; c'est pour se défendre or une aveugle est incapable de se défendre donc pourquoi avoir une épée ? Et si l'on retentait de l’assassiner ? Abraham devrait être capable de la protéger... Mais il risquerait de mourir lui aussi. Donc il était impératif de trouver le ou les meurtriers. Mélissandre? Si elle mourrait, la princesse en perdrait la tête... Il lui fallait donc la protéger, mais comment... En fait la réponse est d'une simplicité dégoûtante. La faire partir, loin d'ici.

En se rendant compte de la triste évidence, le cœur d'Aurora se serra cruellement encore, manquant de couper toute respiration dans sa gorge.

-"Mél..."

-"Qu'est-ce qu'il y a mon chaton ?"

Sa main douce passa dans les cheveux de la princesse, caressant à la fois son crâne et son cœur. Aurora tenta de parler une première fois mais sa gorge se noua à l'idée d'être seule. Peut-être il vaudrait mieux tenter le risque au pire, Abraham doit les protéger toutes les deux après tout.

Non! Abraham doit la protéger elle et personne d'autre, le connaissant un minimum il refuserait de prendre la charge de deux personnes. De plus rien ne garantirait une protection contre les enlèvements... La torture.

-"Il faut que tu partes loin, Mél," Finit par lâcher Aurora, les yeux larmoyants et la gorge sèche."Sinon tu risquerais de mourir toi aussi."

La main se retira de ses cheveux alors qu'une inspiration choquée parvint à ses oreilles.

-"Non, je res--"Tenta de sa voix maternelle Mélissandre."

-"Vas-t'en!"La coupa en hurlant Aurora." Tu... Tu vas mourir sinon."

-"Mais voyons, tout le monde est vigilant maintenant et le risque qu'un assassin s'infiltre est nul."

-"Non Mel... Ce sont des nobles mes ennemis. Ils ont les moyens de faire parler, de remplacer ou d'infiltrer. Je t'en supplie, pars."

La main de sa chère gouvernante se posa sur la sienne, calmant quelque peu le cœur tourmenté de l'adolescente.

-"Je suis vieille et usée, je préfère mourir en servant une adorable jeune fille comme toi plutôt que de rester seule à attendre mon heure."

Les yeux d'Aurora s'embuèrent alors que des larmes commencèrent à ruisseler le long de ses joues déjà fatiguées.

-"Mel... C'est un ordre."

Un long silence s'installa alors que la main de Mélissandre caressait doucement la paume d'Aurora. La princesse avait terriblement mal au cœur au point que sa tête commençait à tourner, mais c'était pour son bien. Si sa gouvernante venait à mourir assassinée également, Elle savait très bien qu'elle ne serait pas capable de le supporter. En quelque sorte, Mélissandre la rendait faible émotionnellement comme un dernier support la maintenant debout dans sa marche suicidaire.

Alors que ce moment de douceur touchait à sa fin, des petites gouttes tombèrent sur l'avant-bras d'Aurora, la sortant de ses pensées moroses. Intriguée, Elle toucha son bras pour y découvrir des gouttes d'eau qui ruisselaient lentement. La princesse réalisa en quelques secondes d'où elles provenaient et sa tête vrilla en un instant, ne pouvant plus supporter.

-"Je... Suis désolée ma chérie,"murmura Mélissandre entre deux sanglots."SI j'avais étais là, si j'avais sus. Tout cela ne serait jamais arriver et tu n'aurais pas eu a autant souffrir."

En entendant sa gouvernante pleurer, Aurora crût bien que son cœur allait lâcher, mais avant que ça n'arrive sa conscience s'évanouit et son corps s'affaissa lentement sur le côté en silence.

Abraham, qui avait été là tout le long se redressa en voyant cela et poussa sans ménager la vieille femme pour toucher le pouls de la princesse alors que Mélissandre commençait à réaliser la scène.

-"Elle s'est simplement évanoui." Rassura Abraham en soulevant le corps frêle de la princesse.

Abraham coucha Aurora et se tourna vers Mélissandre qui pleurait de plus belle, s'accusant de tous les mots.

-"Elle vous a donner l'ordre de partir, si vous voulez encore son bien, obéissez et revenez quand tout cela sera passer, quand elle aura rétabli l'ordre."

Il voulait laisser un message positif en fin malgré le fait que son message soit plus utopique que prémonitoire. Néanmoins, il parvint quand même à faire sortir Mélissandre de la pièce.

Une fois seul avec Aurora, il s'installa à nouveau dans son fauteuil dans le coin proche de la porte et s'y reposa en attendant le réveil de la princesse.

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