Arc II, Chapitre 22 : Préparation.

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Les Orphelins, cinq jours avant le couronnement.

Couverte de sueur, Béatrice se laissa s'affaler sur le sol du fort. Ses muscles semblaient vouloir exploser et bien que le sol était sale, elle y trouvait du réconfort. Ses amis étaient tous en train de haleter, cherchant à reprendre leur respiration. Gigotant avec ses derniers efforts elle fit glisser son sac sur le sol.

- Vous avez une petite pause, Ricana Rikkes en essuyant nonchalamment la sueur qui coulait sur son front. Nous enchaînons avec l'entrainement d'arme.

Béatrice ne tenta même pas de répondre, trop fatiguée pour ça. Ils avaient commencé l'entrainement alors que le soleil n'était pas encore levé, encore plus dur pour certains qui avaient veillés toute la nuit. L'entrainement était à la fois simple et horrifique, descendre la montagne en portant l'armure en cuir, ainsi qu'un sac remplit de pierres. Maintenant qu'elle y pensait si les cuisses de tous les soldats étaient aussi épaisses, ce n'était pas sans raison.

Reprenant des forces en voyant Rikkes s'éloigner, elle cracha le gravier qui collait à ses lèvres avant de se lever tant bien que mal. Son corps lui supplia de rester coucée, mais elle avait encore à remplir son devoir.

D'un pas décidé, elle entra dans la forteresse et monta deux étages pour entrer dans un bureau. Dans la pièce simplement décorée, deux personnes étaient présentes, l'une debout aux paupières et l'autre assise au bureau avec des papiers dans ses mains. La jeune adolescente était habillée avec un tablier couvrant une petite robe beaucoup trop onéreuse pour les yeux de l'orpheline

À son entrée, le gros lev à peine les yeux tandis que la visage d'Axil s'illuminait soudainement. Elle n'eut même pas le temps de se préparer que la jeune adolescente se jeta dans ses bras.

- Tu vas être sale, maugréa Béatrice en se dégageant mollement.

- Elle ira se laver, commenta Caëlan en portant à ses lèvres une tasse. Il va falloir que tu arrêtes de te salir, Axil.

Axil jeta un regard noir à l'homme avant de sourire bêtement à Béatrice.

- Mais tu mérites un peu d'attention, répondit-elle avec douceur. Tes muscles doivent souffrir le martyr.

- Axil, l'interpella Caëlan en tapotant la tasse sur le socle. J'en ai mis à côté.

L'interpellée fit volte-face et sortit un chiffon de son tablier avant d'aller nettoyer la tâche sur le bureau avec colère.

- Vous pourriez faire attention ! Pourquoi la seule chose que j'ai à faire c'est nettoyer et du thé ?!

- Son Altesse aime le thé, et tu aurais dû remarquer la tâche par toi-même et la nettoyer. Tu ne devrais pas parler comme ça, la princesse a beaucoup moins de patience que moi.

- C'est bon, répondit-elle avec une grimace en rangeant rapidement le chiffon dans son tablier. Je vais me nettoyer, à moins que vous vouliez que j'essuie mes mains sur vos papiers.

Caëlan lui répondit avec un regard noir et un geste assez dédaigneux de la main. Toute contente, Axil attrapa Béatrice par la main et l'emmena avec elle dans les couloirs.

- Je ne savais pas que tu t'entendais avec lui, commenta Béatrice avec dégoût.

- Il a beau ne pas aimer les pauvres, il reste relativement gentil. Par contre il ne supporte pas les choses sales.

- Gentil ? Je n'y crois pas.

- Ce n'est pas parce qu'il est gros qu'il est cruel et égoïste.

Béatrice cracha en réponse puis jeta un regard chargé de haine à Axil, un regard qui ne lui était pas destiné.

- Tu es gros parce que tu manges trop, si tu manges trop c'est que tu es une pourriture qui aurait pu nourrir des dizaines de personnes dans le besoin. Tu n'es pas gros par obligation, tu l'es par égoïsme !

Axil lâcha sa main et attrapa le visage de son amie, plongeant ses yeux dans les siens. La douceur d'Axil remplaça la colère de Béatrice par une soudaine timidité.

- Ne t'inquiète pas, tu es une merveilleuse cheffe, puis nous serons riches à notre tour. Nous pourrions même faire des bas-quartiers un bel endroit !

Béatrice grimaça et se dégagea. D'un pas en arrière elle créa une distance entre les deux.

- Je vais reprendre l'entrainement, à ce soir.

Sur ses mots elle s'échappa dans les couloirs, laissant Axil entrer dans la pièce avant de bloquer la porte de l'intérieur.

Dans la cour, le petit groupe d'orphelin était à peu près en ligne encore suant. Rikkes criait comme à son habitude, tapant les jambes pour corriger les postures.

- Si vous n'êtes pas prêt tout le temps, vous êtes morts !

En arrivant, Béatrice tenta d'esquiver son regard pour rentrer silencieusement dans le rang, mais bien sûr cela était impossible.

- Ah, donc notre femme ratée a enfin daigné venir, la cuisine t'as soudainement appelée ?

Le groupe se mit à grogner, mais il s'en moquait et il prit dans ses mains deux bâtons. Il jeta le premier sur Béatrice avec force, lui arrachant une grimace quand le bâton la frappa au genou.

- Viens te battre, clocharde.

Elle n'attendit pas un instant avant de prendre l'arme et se jeter sur lui. Malgré sa haine profonde envers lui, elle retint ses enseignements et l'attaqua tout en bougeant. Ses muscles la faisant souffrir, elle limita ses mouvements à ceux strictement nécessaires.

- Ta garde est molle, aboya-t-il en la frappant sous les côtes.

Le souffle coupé, elle manqua de se laisser tomber au sol, mais d'un bond en avant elle assena avec rage un coup au genou de Rikkes. Il eut un cri de douleur et posa son genou au sol alors que Béatrice s'écrasait au sol à côté de lui.

- On ne fait que commencer, grogna-t-il en se relevant. Lèves-toi où je vais voir la jolie fille.

***

Le soir

Elle resta allongée sur le ventre, complètement vidée de son énergie. Son corps répondait à peine à ses commandes au point que le repas avait été difficile. Après s'être lavée, ses muscles avaient abandonnés tout effort, la forçant à rester le nez sur le lit. Ce laissant porter vers le sommeil, elle aurait pu s'endormir facilement si une tornade n'était pas soudainement entrée dans la chambre.

- Tu as bien mangée ? Oui, je sais que tu as bien mangée, s'égosilla Axil en claquant la porte derrière-elle. Tu sais pourquoi ? Parce que j'ai aidée à faire le repas se soir.

Béatrice ne soupira même pas, laissant sa camarade chambre s'exciter toute seule. Puis soudainement un poids s'ajouta à son dos.

- Tu m'as l'air en souffrance, lui murmura Axil par-dessus son épaule. Je vais t'aider un peu.

Béatrice sursauta en sentant les mains douces d'Axil se poser sur son dos. Elle tenta de se débattre mais une soudaine pression entre ses omoplates la cloua au lit.

- Tu fais quoi là ?! S'exclama Béatrice, sentant son corps se plier sous ses doigts

- Un massage, répondit-elle avec une joie épidémique.

- Depuis quand tu sais masser ?

- Depuis hier, enfin j'ai finis hier l'entrainement. J'ai voulus garder le secret pour ce genre d'occasion.

Béatrice voulu se plaindre, l'engueuler mais une nouvelle pression autour de sa colonne vertébrale lui arracha un petit gémissement qu'elle étouffa immédiatement. Tournant la tête pour jeter un regard noir à Axil, elle vit la jubilation de cette dernière qui s'attaqua à nouveau à d'autres points sensibles de son dos. Mélangeant subtilement la douceur et la force, Béatrice senti ses muscles fondre.

- Alors ? Demanda Axil avec son petit air moqueur. Tu souhaites dire quelque chose ?

Réagissant à sa petite condescendance Béatrice contracta ses muscles et se redressa soudainement. La masseuse perdit alors l'équilibre et tomba en arrière alors la cheffe se retournait, mimant une terrible colère.

- Mademoiselle veut jouer à la plus forte ? S'interrogea-t-elle en passant au-dessus d'Axil. Ce n'est pas en appuyant sur quelqu'un que tu vas le vaincre.

- J'abandonne ! Explosa Axil en riant à gorge déployée voyant des mains s'approchant de ses côtes.

La cheffe ne s'arrêta pas directement, profitant de l'occasion pour lui faire travailler ses abdominaux contre son gré.

- Allez va te coucher, ordonna Béatrice avec un petit sourire. Je suis crevée et demain on va a nouveau faire la même chose.

La blonde obéit et descendit de son lit, mais étant donné la taille de la chambre elle n'eut qu'à faire un pas pour atteindre le sien. Après s'être installée de profil sur son lit, elle regarda avec insistance Béatrice.

- Qu'est-ce qu'il y'a ? Demanda dans un soupire Béatrice en s'allongeant.

- Je viens de me rendre compte que tu es vachement musclée.

- Tu t'en rend compte que maintenant ?

- Mais tu as l'air d'en avoir plus qu'avant.

- Est-ce vraiment surprenant ? On mange à notre faim et la journée nous avons un entrainement intensif.

- J'ai l'impression de ne servir rien à côté...

Béatrice renifla bruyamment, laissant comprendre qu'elle ne pouvait réellement dire le contraire. Voyant le visage abattu d'Axil, elle chercha quand même quelque chose pour la réconforter, mais en vain.

- Mais je demande quand même à quoi ressemble la princesse, continua Axil avec un petit sourire. Caëlan en semble assez effrayé.

Elle aurait bien rétorqué qu'il semblait être assez fragile pour être terrorisé par une aveugle, mais elle se ravisa, sachant très bien que c'était faux.

- Je ne sais pas, mais je n'en attends pas grand-chose.

- C'est quand même important que tu t'y intéresse, tu vas la défendre.

Béatrice ricana amèrement en voyant l'implication dans les yeux bleus d'Axil. Jamais elle n'avait eu l'intention de respecter correctement son engagement.

- Soyons claire entre nous deux, si j'ai à choisir entre elle et toi, tu sais très bien que je laisserais crever sans hésitation.

- Mais nous ne gagnerons plus d'argent.

- Il suffit qu'elle survive quelques semaines, après ça nous devrions pouvoir nous débrouiller. Oh et si on peut garder notre équipement, ce sera une vraie victoire.

Axil se releva de son lit, s'approchant de celui de Béatrice. D'un mouvement elle lui fit signe de se tourner sur le ventre.

- Pourquoi ?

- Tu as des pensées trop sombres, je vais te faire un petit massage pour te calmer.

Béatrice tenta de refuser mais cette fois Axil était sérieuse et insista jusqu'à qu'elle cède. Assise sur les cuisses de sa cheffe, la masseuse leva la tunique de Béatrice jusqu'à sa poitrine.

- Pour juger la princesse, tu devrais attendre de la rencontrer, si ça se trouve se sera une personne extraordinaire.

- C'est une princesse, sa chance est la seule chose d'extraordinaire à son sujet.

Lentement Axil passa ses doigts sur les nombreuses cicatrices de son amie, arrachant des petites grimaces à Béatrice pour certaines.

- Tu dis ça, mais regarde toutes tes blessures, elles ont toutes un point commun : celui de nous protéger, rajouter une personne te dérangerais vraiment ?

Ponctuant ses mots en pressant certains points de son dos, elle baissa le ton de sa voix, essayant de la faire la plus douce possible. Béatrice gigota un peu, appréciant timidement le massage.

- Elle est née princesse, elle ne devrait pas avoir besoin d'une orpheline pour la protéger, il lui suffit d'écarter ses jambes et de pondre des gamins pour que son mari la protège comme un trésor. Je ne ferais pas plus d'effort pour quelqu'un qui ne les mérites pas.

- Nous verrons bien, dit tendrement Axil en accentuant la pression tranquillement. Je suis certaine qu'il y a des raisons pour tout. Après tout, c'est étrange qu'elle ne soit pas mariée, ni que le peuple l'ait déjà rencontrée. Je me dis qu'il doit y avoir autre chose, de plus caché. Tu ne penses pas ?

Continuant son massage, Axil attendit une réponse en vain. Après quelques secondes, elle se pencha pour voir les yeux fermés de Béatrice.

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