47 - Hiloy : Je me fatigue pour rien là

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Hiloy Plilaz

Rang : Or

Héritière de la grande famille Plilaz

Héritière de la charge de gardien

Elle avait réussi à se redresser quand son réveil avait sonné. Ce qui était déjà un exploit. Cela faisait bien deux minutes qu'elle fixait le bout de son lit, sans avoir bougé d'un pouce. Les jumeaux étaient venus la chercher la veille pour ce qu'ils avaient appelé une réunion secrète. Ils avaient dû attendre la nuit et s'étaient glissés dehors. Ils avaient rejoint Weikom et Onfionne dans un endroit à l'écart des bâtiments. Hiloy avait été surprise que le Premier ne soit pas là, mais on lui avait expliqué qu'il ne sortait jamais. La raison de ce petit rassemblement était le Second qui les informa que des soldats de la garde royale avaient été aperçus dans les bois. Ce n'était sans doute rien, mais en tant qu'héritiers des Cinq, ils devaient être au courant. Ils s'étaient tournés vers Hiloy. Après tout, si la garde bougeait, c'était forcément les ordres de son père. Elle leur avoua que ce n'était certainement pas à elle que son père aurait confié les raisons de ses agissements. Ils s'étaient ensuite perdus en conjecture, si bien qu'il était tard quand ils regagnèrent leur chambre.

Résultat, la Cinquième voulait se recoucher et tant pis pour les cours. Je vais juste fermer les yeux, deux secondes. Toujours assise, elle commença à se rendormir. Un coup léger sur la porte la força à réagir :

-C'est qui ?

-Falibi.

Elle se redressa avec effort :

-Entre.

La jeune fille entrouvrit la porte :

-T'es réveillée ? Cool.

Hiloy répliqua, les yeux à demi-fermés :

-Non, je parle en dormant.

Falibi prit un air désolé :

-Tu veux bien venir ? Il y a une araignée dans le lavabo.

Hiloy glissa hors de son lit, s'étira autant que possible et s'obligea à ouvrir les yeux.

-Elle est comment ?

Son amie eut un air dégoûté :

-Énorme.

La Cinquième sourit en s'emparant de deux feuilles. Elles se rendirent dans la salle de bain commune, encore vide. Falibi était toujours la première à sortir de sa chambre pour aller à la douche. Si bien que Rafirin et Hiloy s'amusaient à l'imaginer se tenant derrière la porte de sa chambre, prête à bondir dès que les serrures étaient ouvertes.

Hiloy sourit en apercevant la tache noir dans le lavabo :

-Elle est belle.

Falibi resta à l’entrée :

-Il en faut pour tout le monde, je suppose.

La Cinquième posa une feuille devant l'insecte et le poussa de l'autre. Voyant que l'araignée ne bougeait pas, Falibi tenta une approche :

-Tu veux que je t'aide ?

A ce moment, l'insecte se mit en mouvement et la jeune fille poussa un cri perçant. Hiloy éclata de rire, alors que son amie lui lançait riant et pleurnichant en même temps :

-C'est pas drôle, elle m'a fait peur.

Hiloy eut pitié d'elle et lui demanda :

-Tu veux bien aller ouvrir la fenêtre du couloir ?

La jeune fille ne se le fit pas dire deux fois. Elle s'écarta quand Hiloy arriva pour jeter l'insecte par la fenêtre. Quand ce fut fait, elle se figea une seconde avant de se tourner vers son amie :

-Merde, j'espère qu'il n'y avait personne en dessous.

Falibi la dévisagea avec des yeux ronds, avant de se pencher à l'extérieur :

-Je crois que c'est bon.

Elles se mirent à rire et retournèrent se préparer. Hiloy vérifia son uniforme avant de sortir attendre Falibi. Celle-ci mettait toujours un temps fou pour se préparer, bien qu'Hiloy ne comprenne pas comment c'était possible. Quand elle sortit enfin, ils se rendirent en cours.

Hiloy retrouva Ora à son bureau :

-Salut.

Elle lui répondit par un sourire. Quand Hiloy fut installée, l'héritière d'argent se pencha pour lui demander :

-Dis, t'as fini le devoir à rendre sur la littérature du début des rois ?

La Cinquième fronça le nez :

-J'ai fait l'introduction. Falibi a quasiment fini, elle.

Ora ouvrit des yeux ronds :

-Non, c'est vrai ?

Mr Irdrour entra et abattit sa règle sur la table pour réclamer le silence. Ils étaient plongés dans des théorèmes qu'Hiloy trouvait bien trop compliqués, quand les haut-parleurs se mirent en marche :

-De un à vingt.

Ce fut tout. La Cinquième allait se tourner vers Ora pour lui demander si elle savait de quoi il s'agissait, mais elle s'arrêta en voyant la crispation de sa voisine. En fait, la classe entière semblait s'être figée. Leur enseignant prit la parole :

-Je suis désolé. Vous avez une heure.

Une heure pour quoi ? Cette pensée venait à peine de lui traverser l'esprit que ses camarades se levèrent d'un coup pour se précipiter hors de la salle. Hiloy resta bouche bée, figée sur place. Qu'est-ce qu'il se passe ? Falibi apparut soudain à côté d'elle, lui saisissant le bras et la tirant à l'extérieur. Dans le couloir, la sortie des classes provoquait une bousculade monumentale.

-Qu'est-ce qu'il se passe ? On a une heure pour quoi ?

Falibi, inquiète de la perdre dans la cohue, lui serrait le bras de toutes ses forces :

-C'est un Grand Jeu. On a une heure pour les adieux.

Hiloy eu une impression de vertige. Il y avait quelques jours à peine, elle avait reçu un manuel lui expliquant les règles des Grands Jeux, ainsi qu'un formulaire à remplir si elle souhaitait donner son code à des héritiers d'argent. L'adolescente avait inscrit Rafirin et Falibi, malgré les éternels avertissements de Tefpiro. Elle avait passé un bon nombre de soirée à lire et relire le manuel depuis. Pourtant, les Grands Jeux lui semblaient encore bien irréels à cet instant là. Ressaisis-toi. Concentre-toi. C'est maintenant. Hiloy fit en sorte d'accélérer le pas pour marcher à hauteur de son amie. Les escaliers des dortoirs étaient blindés, mais en poussant des coudes, le duo réussit à atteindre leur étage.

-Normalement, Rafirin...

Avant que Falibi ne finisse sa phrase, ils aperçurent le jeune homme qui attendait devant la chambre d'Hiloy.

-Les gars...

Falibi lui sauta au cou.

-Vous faites attention, hein ?

Hiloy les informa :

-Vous devriez recevoir mon code normalement.

Falibi relâcha Rafirin :

-OK, on se retrouve dès qu'on peut.

Le garçon ressentit le besoin de préciser :

-Si on peut, on ne sera pas forcément sur le même terrain.

Hiloy acquiesça et demanda :

-Qu'est-ce que je dois prendre ? Dans le manuel, ils disaient que le nécessaire était fourni, mais qu’on pouvait amener juste un truc.

Falibi rassembla ses idées :

-Heu... ce que tu veux qui te sois utile. Fais un tour dans ta chambre dans le doute.

Hiloy allait obéir quand Rafirin leur dit :

-Je vais y aller. Ma classe se rassemble près de l'hôpital. Bonne chance.

La Cinquième eut un faible sourire :

-Toi aussi.

Elle fit rapidement le tour de sa chambre, mais ne vit rien qui lui soit absolument nécessaire. L’adolescente s'empara rapidement du manuel pour revérifier quelques détails, notamment la liste des classes et leur lieux de rassemblement. Falibi toqua à sa porte :

-Tu as pris quelque chose ?

Hiloy secoua la tête :

-Non, et toi ?

La jeune fille sortit un porte-clef de sa poche :

-Un porte-bonheur. Mon père l’avait lors des Grands Jeux.

Ils allèrent rejoindre leur classe dans les temps. Lorsque l'heure fut écoulée, des voitures identiques à celles qui étaient venues les chercher pour les mener à l'école, arrivèrent à la queu-leu-leu. Falibi la serra fortement dans ses bras avant de monter en voiture :

-On se voit à la fin au pire.

Hiloy eut un pâle sourire. Si tout va bien. Une femme lui fit signe d'approcher et elle la suivit jusqu'à son véhicule. Une fois installée et la voiture en marche, on lui banda les yeux.

-Avez-vous des questions concernant le déroulement du Grand Jeu ?

La voix de la femme avait quelque chose de rassurant au vu de l'angoisse qui ne cessait d'augmenter chez Hiloy. Aucune question ne lui traversa l'esprit, cependant et elle répondit :

-Non, je ne crois pas.

-Votre bras, s'il vous plaît.

La Cinquième le lui tendit et sentit qu'on y attachait la tablette, puis, la femme glissa un bracelet à son autre bras. Le reste du trajet se déroula dans le silence. Hiloy s'efforça de garder son calme en respirant profondément. Une fois à destination, la femme lui saisit doucement le bras pour la guider. Se fiant à ses sens, la Cinquième crut bien qu'ils étaient en pleine campagne. Comme elle trébuchait sur des pierres et qu'elle s'emmêlait les pieds dans des herbes hautes, Hiloy déduisit qu'ils ne devaient pas y avoir de chemin. Ensuite, elle eut l'impression de pouvoir marcher plus librement. Sa main libre frôla un arbre. Une forêt ?

-C'est ici.

Hiloy s'arrêta et la femme lui retira le bandeau. Elle se trouvait dans un bois. Les arbres étaient moins hauts que ce qu'elle avait imaginé. La femme posa un sac-à-dos à ses pieds :

-Vous trouverez tout le nécessaire là-dedans.

Elle lui montra, ensuite, le fonctionnement de la tablette avant de dire d'un air qui paraissait sincère :

-Bonne chance.

Quand elle s'éloigna, Hiloy prit une minute pour manipuler la tablette. Elle navigua dans les différents menus, jusqu'à trouver l'explication du Grand Jeu.

Vous vous trouvez seul(e) dans une zone fermée. Vous devez trouver l'interrupteur qui vous permettra d'accéder à la zone suivante.

Hiloy trouva cela assez simple, ce qui ne fit qu'éveiller sa méfiance. Elle trouva la liste énumérant le nombre de points privilèges accordés, en fonction de l'ordre de sortie du jeu. Le manuel avait expliqué ce que Falibi lui avait déjà appris. Chaque jeu rapportait des points privilèges aux participants qui leur permettraient, à la fin de l'année, de faire n'importe quelle demande au Roi, sans crainte de se la voir refuser. Hiloy avait également découvert que les héritiers d'argent partaient avec zéro points, alors que ceux d'or en avait cinquante d'avance. Quand aux héritiers des Cinq, ils partaient avec une avance ridiculement avantageuse de cent points. Il était clair que, même si les jeux étaient supposés permettre de s'élever, la réalité était que l'on faisait en sorte de garder chacun à sa place.

Hiloy afficha ensuite, la carte. Sur le côté, elle vit la légende qui résumait les différents points et couleurs. En bleu, les endroits où elle pourrait trouver de l'eau potable. Les points rouges, les refuges qui offraient lits, couvertures et nourritures supplémentaires. Une écriture rouge se mit à clignoter sur son écran, l'informant qu'un héritier d'argent venait d'entrer son code. Elle revint sur l'explication du jeu pour vérifier une information. Dans le coin de l'écran, le mot « classe » apparaissait, signifiant que les différentes classes étaient séparées. Rafirin n'était donc pas présent, seulement Falibi. Hiloy revint à la carte. Elle ne vit pas la flèche bleue supposée représenter son amie. Elle est trop loin.

A présent qu'elle maîtrisait l'objet, la Cinquième jeta un œil dans son sac pour vérifier ce qu'elle avait à disposition, puis se mit en route. Sa cible ne semblait pas très loin. La croix verte, sur sa carte, se situait derrière elle. En se retournant et avançant de quelques pas, Hiloy se retrouva bloquée par la végétation. Hiloy vérifia que son but se trouvait bien là et soupira :

-Bon, évidemment, ça ne pouvait pas être facile, non plus.

Elle commença à progresser lentement. Levant les jambes assez haut pour écraser les ronces, écartant le lierre qui tombait des arbres, leur fines branches s’accrochant aux épines. L’adolescente s'évertua un bon moment avant de réaliser qu'elle avançait à peine. Je me fatigue pour rien là. Hiloy observa le fatras de végétation qui ne voulait pas se démêler et décida de changer de tactique. Tournant les talons, elle se mit à pousser de toutes ses forces. Grondant sous l'effort, la Cinquième réussit à progresser plus rapidement. Des ronces qui tombaient des arbres s'accrochaient à ses cheveux, la faisant grimacer. Elle continua néanmoins, poussant sur ses jambes, écrasant les ronces, en espérant que son sac tiendrait le coup. En même temps, s'il en faut si peu pour le foutre en l'air, c'est que c'est vraiment de la merde. Hiloy continua un bon moment avant de prendre le temps de respirer. L'adolescente jeta un regard à sa carte. J'y suis bientôt. Plus qu'un petit effort.

La Cinquième vérifia l'état de son sac, avant de se remettre en action. Il lui fallut tout de même une bonne heure avant d'apercevoir un poteau de métal. Elle s'arrêta pour reprendre son souffle, suant à grosses gouttes, les mollets égratignés.

-Je devrais y arriver de là.

Hiloy laissa tomber son sac et avança avec précaution. Dès qu'elle se jugea assez près, la Cinquième tendit le bras à travers le lierre et les ronces pour atteindre le poteau. Tâtonnant le sommet de celui-ci, elle sentit un interrupteur qu'elle tourna et un bip lui parvint de sa tablette. Se redressant pour dégager son bras, Hiloy vit que la carte s'était agrandie à une nouvelle zone. Une flèche rouge lui indiquait comment l'atteindre.

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