Chapitre 4 :
Amanda ne s'effondra pas. La scientifique ne s'effondrait jamais. Même en Thuath elle avait tenu bon alors que cela n'avait pas été facile. L'envie de se reposer était pourtant forte quelques fois, mais elle luttait toujours car les choses ne faisaient que de se compliquer. Le monde ne pouvait pas accueillir beaucoup de personnes qui ne savaient pas tenir le coup, la femme n'avait donc pas le droit à laisser ses moments de faiblesse s'imposer durablement. Elle fixait ses mains parsemées de sang. Ce n'était pas le sien mais celui de Mme. Keys. L'adulte avait aidé ses collègues à récupérer le cadavre de la cheffe de l'association. La vieille dame était morte sur le coup, ils en avaient pris le plus grand soin pour s'en assurer et pour éviter une agonie horrible. Désormais, elle savait ce qui allait se passer : c'est elle qui allait reprendre la place de Mme. Keys. Cela faisait plusieurs semaines que la vieille dame s'était décidée à lui annoncer et cela faisait sûrement depuis très longtemps qu'elle avait pris la décision. Cela faisait aussi plusieurs semaines qu'elle était en train de faire n'importe quoi et que tout le monde en déplorait les conséquences à venir. Tout le monde avait eu peur, Amanda y comprit.
Et pour prouver qu'elle était digne de ce poste, elle devait montrer qu'elle allait bien. Elle ouvrit le lavabo avec son coude et passa ses mains sous l'eau. Quelques particules de sangs s'accrochèrent quand même à ses mains et elle utilisa du savon. Elle n'en fut pas moins contrariée. Ses mains tenaient un fardeau tel qu'elle espérait que cela le lui enlève. Elle n'utilisa rien pour sécher ses mains et s'assit sur le siège. Elle fixa l'arme devant elle. Amanda savait qu'elle devait le cacher. Elle n'eut juste pas le courage de le faire tout de suite. Elle passa ses mains dans ses cheveux et mêla ses doigts dans sa chevelure pour reposer ses coudes contre le bureau. Elle fixa l'arme d'un regard dépité. Cette arme avait servi à porter la balle qui avait assassiné Mme. Keys, Amanda avait juste appuyé sur la détende.
Pleins de questions fusaient dans la tête de la jeune femme. Est-ce que Kilian et Iris seraient au courant lorsqu'elle les accueillerait ? Comment était leur état ? En plus de cela, la scientifique était directement projetée à son nouveau statut et allait devoir prendre de grandes décisions, ici sous peu. Tuer Mme. Keys se trouvait être une décision radicale et irrévocable totalement effrayante et dépourvue de sens, malgré tout Amanda savait que la vieille dame n'aurait pas supporté d'être forcée à être reléguée au dernier plan, voire enfermée chez elle ou auprès des médecins de l'association. Par ailleurs, elle aurait trouvé un moyen pour garder sa place de leader.
Elle se redressa lorsque l'on toqua à la porte et ne répondit pas immédiatement alors qu'elle enfilait des gants en plastique pour ranger le pistolet dans le tiroir de droite. D'une voix qui se voulait assurée, elle ordonna aux individus d'entrer et de refermer la porte derrière eux. Elle décompressa lorsqu'elle vit une jeune fille aux cheveux noirs aux deux mèches bleues sur les côtés et un garçon plus grand aux visages ornés de plusieurs boutons d'acné. Margot et Axel, la sœur et le frère qui étaient partis de la Thuath grâce à l'association. Plus rien ne les retenait là-bas, leurs parents étant décédés. Amanda se demandait si parfois cela leur arrivait de penser à leur pays qui était encore plus en dessus-dessous maintenant que la reine était morte de la maladie. La Thuath commençait sérieusement à être gravement impactée mais surtout à être éradiquée.
— Amanda, regarde les informations de dernière minutes, interpella Axel en contournant le bureau pour pianoter sur le clavier d'ordinateur pour le montrer quelques choses.
Margot les rejoignit sans rien dire, la mine inquiète. Elle comprit que le frère et la sœur allaient lui annoncer quelque chose qui bouleversait déjà beaucoup de choses à l'heure actuelle. Elle ne laissa pas paraître son inquiétude et reporta son attention sur l'écran. Axel venait de sélectionner le site d'une chaîne d'information en direct et plus précisément une vidéo qui avait été nommée "flash expresse", Amanda craignait le pire, et elle n'imaginait même pas l'ampleur de ce qu'elle allait voir et des conséquences. Axel mit en pause la vidéo avant de lancer pour être certain que Amanda restait bien concentrée et il la démarra. C'était la même journaliste qui avait annoncé les nouvelles mesures prises par les conseillers lorsque les enfants allaient partir dans le désert. La même, sauf qu'elle annonçait une autre nouvelle tout aussi particulière :
— Mesdames et messieurs, voici un flash spécial important, déclara la journaliste qui parlait très vite comme si le temps en dépendait. D'après les envoyés spéciaux qui parcourent le monde, une catastrophe à conséquence mondiale vient de se produire en Thuath. Le pays tout entier se retrouve bombardé par les bombes du dictateur de Siar et se retrouve pratiquement rasé.
— Elle a précisé plus tard que c'était une supposition quand elle disait que les bombes venaient du dictateur de Siar. Mais nous ne sommes pas dupes. Il y a déjà eu des bombardements en Thuath auparavant, et cela venait de la Siar quand il y avait des mésententes. Axel et moi pouvons garantir que ses bombes viennent vraiment de la Siar, exposa Margot alors que la journaliste disait qu'ils allaient bientôt avoir accès aux images.
Amanda venait tout juste d'assimiler ce que la jeune fille avait énoncé lorsque le premier flot d'images débarqua à la télévision. Une photo de plusieurs bombes, des courtes vidéos sur les bombes qui filaient à toute vitesse au sol, des photos et des vidéos sur les explosions. Le bruit avait de quoi horrifier et les images semblaient insupportables. Des villes s'étaient faites rasées, et cela ne laissait aucune chance aux personnes qui y résidaient. Malgré tout, il devait sûrement y avoir des rescapés, mais un nombre incalculable de personnes avaient sûrement perdu la vie. Cette violence demeurait aussi déplorable que triste, et personne ne pouvait y faire grand-chose. Pas même l'association. Amanda savait que la population de Thuath regroupait surtout des adultes ou des enfants et bébés malades –Margot et Axel comptaient parmi une minorité d'enfants sains– et que seuls les adultes avaient dû souffrir ou tenté de s'échapper. Cet événement restait tout de même insupportable. Pendant presque une minute, pleins de photos passèrent au ralenti pour que le public ait le temps de voir. Amanda trouvait cela surprenant pour un flash spécial.
— Avez-vous des nouvelles du quartier général de Thuath ? s'enquit la jeune nouvelle cheffe.
— Dès que l'on a vu cela, nous avons immédiatement cherché à les contacter. Cela a mis du temps car des signaux auraient pu révéler leur emplacement, mais leur ville n'a pas été rasée heureusement. Nous n'avons que trois pertes car Mme. Keys les a envoyés dans d'autres villes qui ont été victimes des bombardements.
— D'accord... il va falloir que les familles soient prévenues et que l'on essaye un peu de chercher les corps pour leur famille. Elles ont le mérite et le respect que l'on tente des recherches pour retrouver leur proche car tout le monde le mérite.
— Nous signalerons cela au chef du quartier général de Thuath, acquiesça Margot le visage fermé.
La jeune fille se plaça sur la pointe des pieds pour se soulever avec ses mains et s'asseoir sur une petite partie du bureau qui n'était pas remplie de dossiers. Axel passa derrière Amanda pour se mettre derrière sa sœur et posa son bras d'une manière fraternelle autour des épaules de Margot. Visiblement, ils essayaient de lui faire comprendre qu'ils ne voulaient pas retourner en Thuath mais Amanda ne comptait même pas les y renvoyer de force s'ils ne voulaient pas. Ces adolescents avaient déjà eu un passé assez douloureux comme cela, et elle savait que la Thuath les rattachait à de très mauvais souvenirs qu'ils s'efforçaient d'oublier, en parti grâce en partant de leur pays natal. Amanda avait beaucoup d'affection pour eux, et elle ne pouvait pas imaginer de leur faire autant de mal et de peine. C'était inconcevable. Axel fixait les mains gantées d'Amanda. Le frère et la sœur savaient parfaitement ce qu'Amanda, Marianne et d'autres personnes influentes avaient effectué aujourd'hui. Ils ne prenaient pas parti, mais ils comprenaient parfaitement cet acte.
La scientifique savait que c'était un crime et une trahison ce qu'elle avait fait, mais personne ne savait régler ce problème, autrement que par le meurtre. La jeune femme s'était juste dévouée pour l'effectuer, elle n'était pas la seule à l'organiser. Elle n'était pas la seule coupable, mais elle était la seule à avoir un poids lourd sur la conscience.
— C'était comment ? murmura Margot.
— Quoi qui était comment ?
— De tuer quelqu'un. Comment cela se passe exactement ? Qu'est-ce que l'on ressent ?
Amanda réprima un hoquet de surprise et essaya de ne pas montrer son inquiétude alors qu'elle résistait pour ne pas rendre son dernier repas. Le fait d'avoir déplacé le corps de la personne qu'elle avait tuée dans une mare de sang avait déjà mis son estomac à l'épreuve. Elle ne souhaitait pas vraiment revenir sur cela mais elle ne voulait pas non plus rembarrer les deux adolescents.
— Disons que... Cela se passe vite quand tu appuies sur la détente, puis tout devient lent. Tu réalises que tu as tué quelqu'un, et c'est directement un poids sur la conscience et tu sais qu'il restera toujours là mais que tu devras vivre avec ta culpabilité mais tu n'as de toute manière pas le choix car c'est impossible de s'en débarrasser. Il restera toujours, jusqu'à ta propre mort ensuite. Puis tout est lent mais tu sais que tu dois réagir et tu as la peur de te faire découvert, tu as l'impression que tout le monde sait et te regarde bizarrement. Tu sais que tu dois être puni et que ta place est en prison. Et dans mon cas, je ne sais pas vraiment comment cela va se passer quand tout sera finis.
— Tu ne seras jamais jugée et punie, déclara Margot comme si cela pouvait la rassurer sauf que c'était tout le contraire. Les conseillers refuseront sûrement qu'il y ait une procédure judiciaire ainsi qu'une enquête. Et les membres les plus hauts de l'association ont tout prévu aussi. Tu vas réussir à avancer, j'en suis sûre.
Amanda ignora ce que la jeune Thuathienne venait de dire et fut parcourue d'un frisson. La nouvelle cheffe de l'association se demandait pourquoi l'adolescente posait toutes ses questions. Mais la perspective de réponse la faisait redouter et elle préférait donc ne pas lui poser la question en face.
— Il va aussi falloir annoncer aux autres quartiers généraux la mort d'Andréa... Je compte sur vous pour transmettre le message... mais avant, j'ai une requête à vous demander, commença Amanda.
— On peut faire tout ce que tu veux, affirma Axel.
— Prenez des gants en latex avant, conseilla Amanda en leur tendant la boîte.
Le frère et la sœur s'échangèrent un regard sans un mot et s'emparèrent de gants en latex et les enfilèrent. Axel avait dit qu'ils pouvaient faire tout ce qu'elle voulait. Ils n'avaient donc pas vraiment le choix. Amanda ne voulait pas leur causer plus de tort que cela, mais ils étaient déjà au courant de l'envers du décor. Amanda sortit l'arme et la leur tendit avec une expression facile très sérieuse. Elle ne tremblait même pas. Si Axel eut un mouvement de recul et tentait de dissimuler son expression effarée, Margot s'empara de l'arme après avoir enfilé ses gants. Elle grimaça en prenant l'arme et jaugea son poids avant de passer ses doigts pour former le périmètre de l'arme. Amanda songea qu'elle allait devoir un peu parler à Margot. Son frère qui avait repris son sang-froid lui reprit l'arme des mains comme si à tout moment elle pouvait faire une maladresse. Sa petite sœur lui jeta un regard sombre.
— J'aimerais que vous vous rendiez dans ma chambre. Sous mon lit, il y aura un petit coffre, le code est 17470. Vous déposez cette arme dedans et vous refermez le coffre avec le même code. Il vous faudra aussi une clé que je vais vous donner.
— C'est... l'arme que tu as utilisée pour tuer Mme. Keys ? se renseigna Axel.
— Oui, confirma simplement Amanda en ne le regardant pas dans les yeux.
Elle remit à Margot une clé et les laissa sans aller sans un mot de plus. Elle n'avait plus rien à leur dire pour le moment, si ce n'était que de demander à Margot quand est-ce-qu'elle pouvait lui parler. Elle ne se tracassait pas énormément non plus pour elle, la scientifique savait pertinemment que son frère veillait beaucoup sur elle. Puis, c'était normal, cela ne faisait pas si longtemps qu'ils étaient partis de la Thuath. Ils avaient assisté à des choses atroces et ils découvraient en même temps le monde tout en se rendant compte que leur pays était de plus en plus ravagé.
Amanda ferma les yeux et enleva rapidement ses gants et les jeta négligemment dans la petite poubelle de table. Cela faisait longtemps que plus rien n'allait partout dans le monde. La plupart des gens en étaient conscients et tout le monde supportait cette situation pas simple. Alors elle aussi, elle pouvait surmonter l'assassinat qu'elle venait de commettre. C'était juste une petite goutte d'eau en plus dans le vase. On toqua à la porte et cette fois elle reconnut Marianne dans sa manière de taper. La nouvelle cheffe respira un bon coup et savait qu'elle n'avait pas à feindre l'inquiétude puisqu'elle en était déjà en proie. Elle devait juste jouer la surprise. Peut-être que Samuel et Marianne leur avaient expliqué, mais elle en doutait. La jeune femme devait aussi bien agir car Kilian était désormais conseiller. Elle ne le connaissait pas très bien et s'en méfiait même si Iris lui faisait confiance car elle ne savait pas de quoi il était capable. Marianne retoqua encore et elle se leva rapidement.
— Entrez !
Marianne débarqua et son amie ressentit exactement la tension qu'elle et Samuel ressentaient. Iris et Kilian pénétrèrent les derniers dans la salle. Ils ne devaient sûrement pas savoir que c'était elle qui avait tué Andréa sinon ils n'auraient pas eu le même comportement, surtout Iris. Amanda s'était préparée à ce moment, et elle savait qu'elle allait devoir tenir car la jeune fille n'allait pas se contenir. Si Iris paraissait encore toute bouleversée, Kilian semblait plus être alerte et dans la réalité. Marianne lui confirma du regard ce qu'elle pensait. Ils allaient devoir y aller avec des pincettes. Elle examina la jeune surdouée qui avait encore plein de sangs sur elle et sur ses vêtements. Amanda comprenait parfaitement sa peine. Elle sortit de son tiroir un paquet de lingette et lui en tendit une pour qu'elle se nettoie le visage, elle en offrit aussi à Kilian qui avait encore du sang sur le visage. Elle s'étonnait de voir que le jeune homme pouvait être aussi élégant avec quelque chose d'aussi peu conforme à sa norme. Elle reposa le paquet et s'approcha d'Iris qui frottait frénétiquement son visage avec la lingette. Amanda posa une main sur son épaule pour la calmer. Iris était comme une petite sœur pour elle, et elle savait que la surdouée la considérait comme sa grande sœur, néanmoins, elle se demandait si cela allait être toujours le cas lorsqu'elle apprendrait ce qu'elle avait fait.
— Si tu veux, tu peux te changer, souffla-t-elle.
— Cela va aller, répondit-elle d'une voix étranglée. Je peux attendre un peu. J'aurais tout le temps après.
Amanda lui fit un sourire triste et la prise dans ses bras. Malgré tout, elle ne réussit pas à apaiser la culpabilité et la sensation de mal-être qui tourbillonnait en elle. La nouvelle cheffe savait qu'elle était en train de détruire certaines de ses relations, malheureusement, elle n'avait pas le choix. Mais elle se demandait si elle allait finir comme Andréa Keys : folle puis morte. Elle doutait de sa capacité à rester apte au bout de quelque temps. Marianne lui avait assuré qu'elle serait parfaite et qu'elle était un élément essentiel pour que l'association puisque regagner en efficacité. D'après elle, Amanda méritait ce poste, et pouvait sauver tout le monde. Amanda savait que son amie ne se trompait pratiquement jamais. La scientifique se détacha d'Iris et passa ses mains sur les joues de la jeune fille pour les sécher et lui fit un petit sourire triste.
— Sam, faut que je te voie d'ailleurs après, déclara-t-elle.
Le brun lui répondit par un hochement de tête et tapota sa poche de la veste, sûrement pour signifier que la lettre dont il lui avait parlée s'y trouvait. Elle n'avait pas eu le temps d'en parler à Samuel avant le discours, mais au vu de l'expression qu'il faisait, la lettre semblait plus importante que tout. Amanda avait peur que cela ait un quelconque rapport avec sa famille, si elle était en danger ou non. Si elle s'était éloignée de ses parents, c'était justement pour ne pas leur causer des problèmes. Cela ne pouvait pas être possible que la justice et l'État leur aient fait quelque chose. Ils ne connaissaient strictement rien de l'association, elle avait toujours pris soin de ne rien leur révéler. Malgré tout, après ce qu'il avait fait aux parents de Maryline, à Marin et sa famille. Plus rien ne l'étonnait de leur part, et cela lui glaçait le sang, et cela devait changer. Elle repensa à Marin. Elle avait vraiment été proche de lui avant son enlèvement et sa mort, très proche même. Plus proche que tout ce que la plupart des gens pouvaient imaginer. Et cela lui faisait mal de le savoir mort, sans enterrement, le corps écrabouillé. Elle chassa des larmes invisibles qui restèrent dans ses yeux et se redressa et se retourna vers Kilian qui chiffonnait la lingette en boule pour la lancer. Elle atteignit la poubelle sans hésiter à tomber à côté.
— Cela vaut trois points, commenta Samuel en enfermant Iris dans ses bras.
— Une belle réussite, rigola nerveuse Kilian en lui adressant un sourire.
La proximité des trois adolescents la surprenait. De plus Kilian et Samuel ne se connaissaient pas depuis très longtemps, et ils n'avaient pas vraiment l'occasion de se voir. Les querelles d'amitiés semblaient donc s'être arrangées. Ce n'était pas plus mal comme cela d'ailleurs. Le jeune conseiller ne paraissait pas dans son élément ici, mais Amanda ne comptait pas l'embêter plus que cela.
— Bien, avant de partir pour voir... vous voyez. Je dois m'entretenir un moment avec le nouveau conseiller. J'ai quelques petites choses à lui dire.
Iris fronça les sourcils mais le concerné ne sembla pas très étonné. Il devait sûrement s'en douter, c'était logique. Iris faillit lâcher un pourquoi mais Kilian lui assura qu'il n'y avait aucun problème et qu'il n'y voyait pas d'inconvénients. Marianne, Iris et Samuel sortirent donc du bureau laissant Amanda en face à face avec Kilian. Le silence ne dura guère longtemps.
— Je vous écoute, déclama Kilian en croisant les bras contre son torse.
— Tu es conseiller, et même si tu es jeune et que tu as encore des comptes à rendre à tes collègues jusqu'à une certaine durée. Toutefois, j'aimerais que tu gardes l'existence de cet endroit et de ce que tu vas y apprendre, pour toi.
— Bien sûr, cela me paraissait évident. Je ne gagne rien non plus dans cette histoire s'ils savent où je suis. Vous pourrez compter sur moi si vous voulez que je ne dise rien. Mais n'en profiter pas pour essayer de me soutirer des informations. Cela ne marchera pas.
— Comment tu voudras, mais sache que nous sommes disposés à recevoir des informations si un jour tu as envie de nous aider dans nos objectifs. Je compte tout de même sur toi pour respecter ta part du marché, car je préfère être franche, nous n'avons aucun moyen de vérifier si tu tiendras parole.
— N'avez-vous pas de personnes qui ont infiltré l'État ? se méfia Kilian.
— Non, les sélections sont très minutieuses et longues et vous faites étrangement bien attention. Nous n'avons aucune personne qui infiltre l'État.
— J'ai du mal à le croire, confessa Kilian.
— Eh bien il va falloir, car je n'ai pas plus d'argument, mais je suis sincère. Puis tu es un jeune homme intelligent, toi et ton acolyte... Fred c'est cela ? Vous remarquerez sûrement s'il y aurait des taupes à vos côtés.
— Vous espérez me faire avaler cela en me flattant ? Et Fred est mon petit-ami, insista Kilian. Je travaille presque seul, je ne laisse que mes proches m'aider, mais je ne me sers pas de secrétaire ou je ne sais quoi d'autre. Ce sont aux autres conseillers de se méfier.
— Bon, de toute manière nous ne sommes pas ici pour parler de cela. Je voulais juste m'assurer que tu ne dirais rien à tes collègues.
— Vous pouvez compter sur moi, assura Kilian en lui tendant sa main.
Amanda réfléchissait si elle avait quelque chose à lui mais elle ne trouva rien d’autre. Amanda la main du jeune homme serra cordialement puis il s’arrêta en se levant comme s’il venait de se rappeler de quelque chose.
—J’ai vu Marin avant sa mort, confessa le nouveau conseiller en reportant son regard sur la scientifique. Avant que je parte, il m’a fait promettre de vous dire une chose de sa part : que vous lui manquiez.
Amanda acquiesça douloureusement, sans un mot, tant de ne pas montrer ce qu’elle ressentait vis-à-vis de cela. Puis ils sortirent du bureau. Iris semblait avoir repris ses esprits même si elle avait l'air encore assez choquée. Marianne se détendait et pensait sûrement à sa mission. Samuel, quant à lui, observait sa petite-amie, soucieux. Amanda prit la tête du groupe et les mena à l'autre bout du couloir. Elle toqua à la porte et leur médecin légiste leur ouvrit et les fit tous entrer. Cette dernière faillit protester lorsqu'elle reconnut Kilian mais ne laissa rien échapper. Elle le regarda mal, et le jeune homme l'ignora tout bonnement. Amanda était la plus proche de la table, et le corps de Mme. Keys reposait là. Elle jeta un coup d'œil aux autres : Marianne ne laissait rien transparaître comme à son habitude, Samuel prenait une expression fermée, Iris la fixait sans ciller et Kilian blêmit d'un seul coup. Amanda devait reconnaître que la vue n'était pas magnifique.
— Elle est morte d'une balle en pleine tête. Cela a suffi, déclara la médecin de l'association.
— Je crois qu'on l'avait tous remarqué, répliqua sarcastiquement Marianne en se rongeant les ongles.
— Il n'y a pas grand-chose d'autre à dire. En tout cas elle est morte sur le coup et elle n'a pas dû avoir le temps de comprendre.
Cela c'était certain, la vieille dame n'avait pas dû s'en douter. Il n'y avait pas grand-chose à dire sur sa mort, par contre, il y avait plein de choses à dire sur sa vie qui en avait croisé plein d'autres, que ce soit temporairement ou toujours. Amanda le savait, notamment les impactes qu'elle avait pu avoir.
*** Une semaine après l'annonce de l'entrée en guerre à la télévision ***
Amanda venait de finir son petit déjeuner. Ses parents dormaient encore et son frère était reparti de sa permission. La jeune femme ne comprenait pas comment il pouvait persévérer à vouloir servir la nation. D'accord, l'idée était belle et honorable, mais aussi stupide car cela voulait dire que les conseillers avaient eu raison de revenir dans la guerre. Mais c'était faux. Ils avaient tort, et Amanda en était profondément convaincue. Le jour même de l'annonce, juste avant, elle avait prédit haut et fort ce que les conseillers allaient faire. Le jour d'après elle avait fait un scandale et était passée dans les journaux. La jeune femme se doutait qu'elle devait sûrement se faire surveiller depuis qu'elle avait tagué l'emblème d'Opartisk. Tout le monde était certain que s'était-elle, et elle ne voulait pas en rester là. Son frère et ses parents la suppliaient d'arrêter de s'exposer, mais elle ne faisait pas cela pour se montrer, elle faisait cela pour faire comprendre aux conseillers leur erreur. Et demain, elle brûlerait leur imprimerie. La jeune femme ne se sentait pas spécialement fière d'elle de faire la rebelle mais elle ressentait comme un sentiment de délivrance. Elle fixa le bracelet qu'elle portait : Edma Klimb. Elle détestait son prénom et se faisait appeler de partout Amanda, malgré tout, elle gardait ce précieux bracelet à son poignet comme si cela lui permettait de toujours garder son identité.
La jeune scientifique, fraîchement diplômée se leva. Elle était très énergique aujourd'hui, et était ravie de le constater de l'être. Elle retourna dans sa chambre et rassembla les grands posters qu'elle avait imprimés la veille pour les coller aujourd'hui. Elle mentait à ses parents lorsqu'elle disait qu'elle passait des entretiens pour sa thèse de fin de cursus. Elle le ferait plus tard, après ses affiches qu'elle jugeait beaucoup plus importantes pour le moment. Son esprit rebelle et déterminé remportait. Amanda prit un sac avec un grand rouleau de scotch transparent et un ciseau qu'elle plaça dans le sac à dos et enfila une veste avant de partir. Elle n'écrivit pas de mots à ses parents. Ils n'étaient pas dupes, même si elle leur mentait, ils savaient de qui provenaient les affiches placardées partout et qui se faisait arracher par les membres de l'État. Ils en étaient désespérés, pas elle. Amanda avait toujours voulu remettre les conseillers à leur place, elle savait que le jour arrivait bientôt où ils allaient faire la plus grosse bêtise de leur vie, et elle ne s'était pas trompée. Elle ne pouvait pas agir pour régler tout cela elle-même, sinon elle aurait tenté. Néanmoins, elle pouvait tout faire pour les faire réagir et revenir à la réalité.Elle ferait tout.
Amanda pensa aux enfants et adolescents qui allaient devoir être loin de leur parent, elle trouvait cela particulièrement horrible pour les petits enfants qu'elle jugeait beaucoup trop jeunes pour les séparer de leurs parents. Elle trouvait cela vraiment cruel. C'était sur ses pensées que la jeune femme traversait les rues. Elle s'arrêta à une place. Il était tôt et il n'y avait encore personne. Elle avait dû surprendre les personnes qui la surveillaient puisqu'ils ne la suivaient pas et que d'ordinaire, elle les remarquait. Elle posa sa pile d'affiches sur le banc et en prit une qu'elle commença à coller contre le mur des toilettes publiques.
— Edma Klimb, appela-t-on.
La jeune fille faillit lâcher son affiche et frissonna en continuant. Elle ne connaissait pas cette voix mais ce qui l'inquiétait plus, c'était qu'une personne étrangère savait son vrai prénom ou son nom entier. Elle se fit violence pour finir de coller son affiche et se retourna en trahissant son anxiété. Peut-être que son frère et ses parents avaient raison finalement : elle allait finir arrêtée et emprisonnée par l'État. Pourtant, elle ne voyait pas comment une vieille dame pouvait faire cela. En effet, son anxiété fit place à la surprise et elle fixa la vieille dame qui fit quelques pas vers elle.
— Ou peut-être préfériez-vous Amanda Klimb ? Si vous y tenez...
— Comment connaissez-vous mon vrai prénom ? Je sais que j'ai fait l'affiche des journaux dernièrement, mais aucun des médias n'a cité mon vrai prénom tellement que je ne l'utilise pas et que rare sont les personnes qui le font.
Elle n'allait quand même pas se démonter face à une grand-mère tout de même ! Même si cette inconnue semblait étrangement la connaître alors qu'elle ne faisait pas partie de ses proches, et qu'elle ne l'avait même jamais vue auparavant. Pourquoi une vieille dame venait lui parler d'ailleurs ? C'était étrange. Finalement, elle devait peut-être se méfier, les conseillers voulaient peut-être la surprendre en envoyant une honnête vieille dame à leur place. Pouvaient-ils vraiment disposer de leurs citoyens à leur guise ? Avec de l'argent bien placé... peut-être bien, en cette période, personne ne cracherait dessus, à part elle.
— Disons, que je suis une personne qui a de nombreux contacts, voire tout un réseau, et que j'aime savoir tout des personnes auxquels je viens parler, affirma la vieille dame.
— Vous êtes ? s'informa Amanda.
— Je suis Andréa Keys, ma chère.
Elle lui tendit sa main, et même si elle restait intriguée par ce personnage farfelu, elle la prit en retour et l'étreignit brièvement. La jeune femme fronça les sourcils lorsqu'elle ne lui dit plus rien mais ne chercha pas pour autant à comprendre même si la vieille dame avait piqué sa curiosité. Elle fit donc, comme si de rien n'était et partie rechercher une affiche. Malgré tout, la vieille dame la devança et s'en empara. Amanda afficha son agacement et lui demanda de lui rendre le papier. La vieillarde l'ignora et scruta l'affiche minutieusement. Ce que Amanda ne comprenait pas puisqu'il suffisait juste de lire et d'analyser pour comprendre l'importance.
— Qu'elle est la suite de vos actions jeune femme ? se renseigna la vieille dame en reposant l'affiche.
— Incendier une imprimerie qui imprime la tête des conseillers, lança-t-elle banalement sans toutefois la regarder.
— C'est une bonne idée, même s'ils finiront par en reconstruire.
— Qu'est-ce que vous me voulez ?
— J'ai une proposition à vous faire.
— Quel genre de proposition ?
— Suivez-moi.
Amanda ne resta pas longtemps interloquée. Elle rangea ses affaires et suivit la vieille dame qui partait déjà, ne lui laissant pas le temps de réfléchir. La scientifique n'avait jamais croisé une vieille dame qui lui ressemblait et qui abordait les inconnus sans problème. La vieille dame emprunta des rues sinueuses avant d'ouvrir un bâtiment qui était réputé pour être déplorable et abandonné. La jeune femme ne voyait pas vraiment ce qu’une personne dans son genre trafiquait là, néanmoins, elle entra à sa suite. À son grand étonnement, la pièce dans laquelle elle se trouvait n'était pas dans un état pitoyable. Le sol était refait, le mobilier renouvelé et les murs repeints dans un gris clair. Amanda se demandait bien ce que la vieille dame voulait faire de ce bâtiment, et encore plus comment elle avait fait pour avoir assez d'argent pour l'obtenir. La vieille dame prit une chaise et l'invita à s'asseoir. Amanda préférait rester debout, elle se préparait à toute éventualité.
— Je ne sais pas ce que vous vouliez me dire, mais je ne suis pas encore sur écoute, mais il y a des personnes qui me suivent et même s'ils n'étaient pas là ce matin, il y a toujours les caméras de surveillance dans la place donc ne vous étonnez pas si des policiers viennent vous parler.
— Mon cercle a débranché les caméras et s’est occupé de vos surveillants. Vous devriez les remarquer demain.
— Mais qui êtes-vous ? Et que faites-vous ici ? s'enquit Amanda en prenant une chaise, cette fois-là.
— Je vous l'ai dit. Je m'appelle Andréa Keys, et je pense que j'ai une idée qui pourrait vous intéresser fortement.
— Une idée qui pourrait beaucoup m’intéresser ?
— Je suis venue spécialement pour vous voir ! affirma Mme. Keys.
— Me voir... moi ? s'étonna la jeune diplômée.
Cette vieille femme était-elle folle ? Amanda en avait la nette impression. Qui d'autre à part une folle pouvait bien la guetter pour lui parler ? C'était juste absurde mais elle ne fit aucun commentaire sur sa venue et ses raisons. Elle attendait patiemment que la vieille dame déroule ce qu'elle souhaitait lui dire.
— Vous êtes une des militantes les plus connues et les plus déterminées contre les conseillers, constata la vieille dame en croisant les jambes. Je trouve cela vraiment courageux et remarquable de votre part et du haut de votre jeune âge.
— Et quel est votre rapport entre vos idées et moi ? continua Amanda en se rongeant les ongles.
— Moi non plus je ne suis pas d'accord avec les conseillers. Et j'ai des idées que je compte bien mettre en place et que cela reste durable.
Une étincelle s'alluma dans les yeux de la jeune scientifique qui se concentra sur les dires de la vieille dame. Finalement, elle était peut-être plus prête à l'écouter partager ses idées dans le but de l'approuver. La jeune femme n'avait encore jamais rencontré une personne qui avait les mêmes idées qu'elle en dehors de ses amis, et elle avait plus l'habitude de se faire sermonner par ses parents qui la jugeaient immature et beaucoup trop engagée. Sauf qu'une vieille dame qui devait avoir mille fois plus de maturité qu'elle, pensait la même chose qu'elle ! La jeune femme ne voulait pas sauter de joie immédiatement, mais c'était un bon début. Si elle continuait dans sa lancée, elle allait finir par gagner un peu sa confiance.
— J'ai investi beaucoup d'argent pour ce projet, et j'ai des amis qui sont de la partie riche qui prennent la cause à cœur et ont investi eux aussi. Je ne vous demande pas de faire de même, vous avez votre vie à construire, mais vous êtes sans conteste un bon élément que je veux recruter.
— Recruter dans quoi ? Pour faire quoi ? Et aider qui ? Découvrir quoi ? Qu'est-ce que vous voulez faire exactement ?
— Cela s'appellerait l'association. Cela serait une organisation qui viserait à découvrir ce qu'ils feront aux enfants, et ce que les conseillers nous cachent en infiltrant un peu partout dans le gouvernement. Et je vous propose de nous rejoindre. Bien évidemment, il y a un risque de danger mais tout de même de réussite. Si vous avez d'autres idées, je serais ravie de les recevoir.
Amanda réfléchit pendant un court instant. Rentrer dans un réseau pareil était pour sûre devenir hors la loi, et malgré tout, elle n'avait encore pas été arrêtée ou reçu des lettres alors qu'elle était surveillée. Elle n'était pas totalement certaine, mais elle voulait vraiment changer les choses. Et elle ne prit que quelques secondes pour prendre une décision qui allaient bouleverser sa vie, son identité et son entourage :
— Cela pourrait être intéressant d'observer les autres pays, j'ai un ami qui participe aux transports illégaux. Je pense que cela serait un atout d'envoyer des personnes là-bas lorsque l'on sera plus.
—Eh bien ! Votre idée est forte intéressante. Bienvenue à l'association ! Et nous nous rejoindrons demain là où je vous ai trouvé pour vous faire rencontrer des amis à moi qui participent au projet.
— J'en suis ravie.
***
— Amanda ! appela Iris alors qu'elle sortait de ses pensées.
— Excusez-moi ! bredouilla-t-elle en se retournant vers l'assemblée. Bon, je pense que nous avions vu tout ce qu'il y avait à voir. Samuel ? On va parler dans mon bureau.
— Moi je vais y aller ! Je ne crois pas que Fred ait trouvé beaucoup plus d'idée pour excuser mon absent. Le pauvre qu'est-ce que je lui fais subir !
— Je ne doute pas que tu te feras pardonner, affirma Iris en le serrant dans ses bras. Donne-moi des nouvelles de Cassandra, d'accord ?
Kilian hocha la tête et salua les autres personnes de la salle avant de se faire raccompagner à la sortie par Iris et Marianne qui, visiblement, commençait à redouter sa mission. La médecin légiste la regarda bizarrement et Amanda restait mal face au souvenir de sa rencontre avec Mme. Keys : cela signait aussi le jour où elle avait accepté de rentrer dans l'association et de s'y donner corps et âme. Elle reconnaissait humblement qu'elle avait fait du chemin depuis : elle était devenue plus réfléchit, plus consciente de ses actes, plus mature et posée aussi. Elle se demandait comment ses parents la trouveraient s'ils la contemplaient en ce moment. C'était beaucoup trop risqué d'aller les voir même si elle se trouvait sur place et qu'elle ne pouvait plus sortir de l'Opartisk désormais. Diriger avait ses contraintes, ne plus aller nulle part.
Ils ne mirent pas longtemps à atteindre le bureau, et à parler aussi.
— Tu n'as pas encore mis Iris au courant ?
— Manque de temps, avoua Samuel. J'ai bien failli avant la cérémonie mais Marianne nous a interrompus pendant la discussion. Elle est intelligente, elle va vite comprendre et nous tomber dessus.
— Tu n'as pas tort...
— Je pense que tu veux lire la lettre, devina Samuel en la sortant de sa poche.
Amanda la déplia et la lue rapidement mais attentivement. C'était bien l'écriture de son frère, petit et carré, cependant elle avait du mal à croire ce qu'elle lisait car cela ne lui ressemblait pas du tout telle qu'elle le connaissait. Elle demeurait perplexe. Rien n'était contestable pourtant : l'écriture de son frère. Et même si ce n'était pas signer, son instinct lui disait que c'était bien lui. À moins que ce soit l'espoir.
— C'est bien lui, n'est-ce pas ?
— C'est son écriture.
— Donc c'est lui. C'est simple d'imiter une signature, mais beaucoup moins une écriture, encore moins avec tout ce qu'il y a écrit sur cette lettre. Si tu l'as reconnu, on ne peut plus douter.
L'argument de Samuel était logique, néanmoins, la nouvelle cheffe ne savait pas si c'était une bonne idée de les rencontrer. Elle doutait des intentions de son frère, et pour cause : il avait toujours été pour son pays et les conseillers jusqu'à présent. Pourquoi changerait-il de camp ? Elle devait réfléchir, et demander des avis aux personnes auxquelles elle avait une grande confiance. C'était important.
— Qu'en penses-tu ?
— Eh bien... je ne connais pas ton frère, mais cela vaut quand même le coup d'organiser un rendez-vous, ne penses-tu pas ? Cela pourrait donner un nouveau sens à l'organisation et peut-être réussir à infiltrer l'État puisqu'il fait quand même partie de l'armée.
— Je vais y réfléchir... je poserais la question à Marianne. Mais comment le prévenir si on choisit de le rencontrer ?
— Kilian. On pourrait demander à Iris de demander à Kilian de trouver un moyen pour parler à ton frère. En tant que conseiller, il le connaît sûrement, ou du moins, il le connaîtra.
— Tu crois qu’Iris acceptera après avoir compris ce que j'ai fait ?
— Je compte sur elle pour comprendre, soupira Samuel. Je pense qu'un jour elle finira par comprendre et que sa colère retombera. J'espère aussi que cela ne va pas détruire notre couple...
— Je ne pense pas Sam. Elle comprendra pourquoi tu as décidé de passer ce marché. Elle aussi connaît le deuil désormais. C'est malheureux mais c'est comme cela la vie, puis, elle t'aime plus que tout. Elle t'en voudra, mais vous resterez toujours ensemble.
— Je ne suis pas doué... C'est l'amour de ma vie, je n'ai jamais ressenti aussi fort pour quelqu'un, qu’envers elle.
— Je pense que de son côté, c'est aussi la même chose. Le temps passera et tout ira mieux, j'en suis certaine. Tu as essayé de la prévenir avant, et cela sera à cause de cela qu'elle comprendra. Elle sera plus en colère envers moi qu'envers toi et Marianne.
— Je la convaincrais de prévenir Kilian, sinon je chiperais son numéro, je devrais réussir à faire cela sans problème, affirma Samuel.
— Je vais prévenir quelques personnes hautes-placées et Marianne pour recevoir leur avis, mais prépare-toi à l'optique de convaincre Iris. Cela risque d'être très intéressant de rencontrer une autre organisation secrète qui l'est vraiment et qui est plus proche que nous de l'État et des conseillers.
Samuel hocha la tête et Amanda retrouvait peu à peu de sourire. Peut-être reverrait-elle son frère après un long moment.
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