19.

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Il avait essuyé de drôles de regards en s’avançant d’un pas décidé dans les couloirs de la Section Recherche. Il sortait du bureau du Commandant de Brigade et en était tout retourné. Aucune charge n’avait été retenue contre lui, absolument rien. C’est comme s’il ne s’était rien passée. Il avait compris que Malika n’avait déposé aucune plainte contre lui mais il ne se doutait pas que le Commandant ne lui en tiendrait pas rigueur. C’était un homme intransigeant au possible avec qui les erreurs et les écarts de conduites étaient intolérables. Mais là il lui avait juste lancé un avertissement. Au final Abdoulaye s’en sortait avec une tape sur les doigts. « Ça ne sait pas si mal passé que ça » pensa-t-il. Il avait passé sa main sur sa joue et se rappeler de l’accueil brutal mais néanmoins chaleureux qu’il avait eu en rentrant chez lui la veille. Absa l’avait grondé, cela n’était pas arrivé depuis des années, il s’était sentit revenir en enfance face à sa sœur qui était presque au bord des larmes en le revoyant passer la porte de leur petit appartement. Ce qu’il avait fait était irresponsable. Il n’avait pas pensé à elle un seul moment et il s’en voulait. En réponse à tout ce qu’elle lui disait il l’avait prise dans ses bras et lui avait juste demandé pardon.

Il était maintenant en face d’une porte qu’il connaissait trop bien, celle de son bureau. Il hésitait. Il réfléchissait à ce qu’il pouvait bien dire à son collègue qui devait surement à cette heure ci lire le journal affalé sur la chaise de son bureau. Il ne pouvait pas non plus rester éternellement resté devant cette porte il fallait la franchir à un moment donné. Il posa sa main sur la poignée et la baissa d’un geste naturel. La porte s’ouvrit sur une scène qu’il connaissait bien. Mansour, comme le jeune détective aurait pu le penser, n’était pas en train de siroter un café en lisant le journal. Il était penché sur un tas de fiche qu’il examinait d’un œil attentif comme pour souligné un détail qu’il aurait pu lui échapper. La dernière fois qu’il était ainsi remonte à ces débuts dans la section recherche. Mansour leva les yeux pour considérer la personne qui venait de faire irruption dans la pièce. Le jeune enquêteur était resté sans rien dire comme s’il attendait un quelconque signal quand leur regard s’était croisé. Mansour redirigea son attention quand il comprit qui était venu. Un long silence se fit sentir avant que le grand policier ne se dirigea vers lui comme pour sortir du bureau. Abdoulaye ne savait pas s’il devait s’excuser ou juste se taire.

- T’es en retard Abdoulaye, dit-il sur un ton amical

Mansour faisait comme si rien ne s’était passé. Et peut-être le jeune enquêteur devait lui aussi adopter la même attitude ?

- Aujourd’hui on a beaucoup de travail alors reste pas là et aide moi plutôt.

Il ne savait pas pourquoi mais il sentait qu’il devait le suivre

Ils avaient traversés plusieurs couloirs avant d’arriver une porte où était posté un gendarme en tenue qui montait la garde. Durant leur petit trajet Mansour avait fait remarquer à son collègue qu’il était content de le voir en forme. En effet Abdoulaye se sentait et cela se voyait sur visage. Il était rasé de près et n’avait plus aucun signe de fatigue. L’insomnie n’était maintenant plus qu’un mauvais souvenir comme tout ce qui s’était passé durant la semaine qui s’était écoulé. Mansour salua le gendarme avant de rentrer suivit par le jeune enquêteur. Un homme était installé sur une chaise, ces mains étaient menottés et deux hommes de tenue – des douaniers au vue de la couleur de ces dernières- qui les attendaient. Cet homme c’était Khadim, honnête propriétaire d’un petit salon de massage et dealer à ses heures perdus. Il avait l’air perdu et presque désespéré et essayé de se raccrocher à un semblant d’espoir qu’il voyait en Mansour et son collègue. Il avait fait une erreur, c’était évident et maintenant il avait besoin d’aide. Après avoir discutaient avec les douaniers, Mansour et Abdoulaye s’était retourné vers leur invité qui les attendait avec impatience.

- Khadim, fit Mansour, tu es bien la dernière personne que j’espérais voire si tu es là …

- Arrêtes, dit-il sur un ton énervé, tu sais pertinemment pourquoi je suis là. J’avais ta parole que toi et ton ami vous ne me foutriez pas dans les ennuis.

- T’était plus discret d’habitude, là tu vois je ne trouve même pas drôle le fait que tu sois assis ici.

Abdoulaye de son côté observait la scène il préférait se faire petit pour l’instant et s’était juste contenté d’échanger avec les douaniers. Apparemment Mansour aurait chargé à un de ses amis qui était à la douane de surveiller en lui assurant que cet homme serait une vraie mine d’or. Et il n’avait pas tort. Ils s’attendaient à découvrir un chargement de chanvre indien mais à la place il n’y avait à la fin que des produits de contrebandes. Abdoulaye avait aussi appris d’eux que c’est un coup de fil anonyme qui la douane avait sur l’endroit où la contrebande allait passer.

- Bon assez rigolé, fit Mansour, on est encore en plaine enquête et j’ai d’autres choses à faire alors parle ou je m’en vais.

- Je veux négocier c’est pour cela que je suis là.

D’après les deux douaniers qui l’avaient conduit ici il avait fait toute une scène pour parler à Mansour.

- Négocier ? Je ne pense pas. Normalement c’est pas avec moi que tu peux négocier quoi que ce soit Khadim. T’es pas tombé pour de la drogue mais juste de la contrebande. Si tu veux mon avis ce n’est pas très grave, discute un peu avec les douaniers et c’est réglé.

- Tu crois que je n’ai pas essayé, je suis presque fauché j’ai plus de quoi les payer, merde ! Je faisais rentrer des produits pour mes différentes affaires. La situation dans laquelle je suis c’est complètement de votre faute.

Il avait dit ça à en regardant Abdoulaye dans les yeux. Il savait qu’il essayé de les faire culpabiliser en employant l’excuse de la fin justifie les moyens et qu’au final il essayait juste de gagner sa vie comme tout le monde. Mais ce n’était pas la première fois qu’Abdoulaye était confronté à ce genre de regard.

- Après votre visite dans mon salon mes gros clients ont commencé à le fuir comment tu veux que je fasse tourner mes affaires dans ces conditions. Vous vous comporter comme des idiots tout simplement parce que vous avez du pouvoir et vous ne voyez pas tout le mal que vous faites autour de vous. Et nous les gens qui subissent vos conneries si on commence à parler vous vous ramenez en nous disant que c’est dans notre intérêt. Je vais peut-être devoir fermé à cause de vous si ça se trouve. Est-ce que vous savez de combien de personnes ont s’occupé chaque jour ? Non. Vous valez rien, c’est pour ça que dans ce pays tout le monde vous déteste.

On voyait sur son visage qu’il était au bout et qu’il n’en pouvait plus. Il était fatigué de voir que toutes ses affaires, depuis le moment où il était rentré dans la vie active, avait coulé une par une. Il n’avait pas eu beaucoup de chance.

- Alors aidez-moi, je vous en prie. Je suis fatigué d’aller en taule pour rien.

- Bon d’accord, c’est vrai que si tu es ici c’est clairement de ma faute, dit-il sur un ton faussement coupable, alors je vais essayer de voir ce qu’on peut faire pour te sortir de là. Le problème c’est que je veux savoir ce que j’y gagne moi.

Khadim souffla comme si un poids immense tombait de ses épaules.

- J’ai des informations par rapport à votre enquête, une histoire de chantage

A ces mots les deux gendarmes froncèrent les sourcils. Mansour regarda avec attention son interlocuteur.

- Attend, quoi ?

- Tu m’as bien entendu.

- Khadim ! je t’avais de me dire tout ce que tu savais. Tu vois là j’ai même plus envie de t’aider

- Fais pas ça ! j’en savais rien de cette histoire de chantage quand vous avez fait irruption comme des tarés dans mon salon. Je ne l’ai su que bien plus tard. Ecoute. Le gamin qui faisait les livraisons pour Abdou Karim il venait de moins en moins travaillait au salon ces derniers temps et à chaque fois qu’il venait il était claqué. Alors j’ai commencé à faire attention à lui. J’ai compris qu’il avait réussi à amasser de l’argent et qu’il le gaspillait dans des soirées avec ses amis la nuit. Même la fille de l’accueil en a profité. Alors je l’ai appelé dans un coin, histoire de savoir d’où venait cet argent. Il n’a pas mis longtemps avant de craquer et de me raconter toute son histoire. En fait …

- Non, on connait déjà l’histoire, abrège, lança Mansour impatient, il t’a dit un nom

- D’abord je veux que l’on parle de notre arrangement

Mansour exaspéré, sortit de sa poche son téléphone et l’agita devant son prisonnier.

- D’un seul coup de téléphone dans quelques heures tu pourras retourner dans ton salon à la con et sauver ce qu’il en reste. Cependant si tu continues à nous faire perdre notre temps …

- D’accord. En fait le gamin ne m’a donné aucun nom, le gars ne se présentait pas quand ils se rencontraient tout ce qu’il a pu faire c’est de me le décrire.

Abdoulaye sursauta. Il se rappelait d’une chose essentielle concernant le maître chanteur, il ne s’était jamais lui-même pour récupérer ce qu’il demandait

- Attend, fit Abdoulaye qui avait soudainement décidé d’intervenir, il nous avait dit que le maître chanteur communiqué avec lui via quelqu’un d’autre

- Il vous a mentit, d’après ce qu’il m’a dit c’est lui qui le lui a demandé

Donc depuis le début le meurtrier les avait conduits sur une fausse route. Il les avait complétement manipulé. Depuis le début la personne qui était derrière tout cela avait une longueur d’avance sur eux, il avait prévu qu’ils interrogeraient le jeune livreur et il l’avait surement payé en plus pour leur mentir. Cependant il y avait une question qui obsédait Abdoulaye et il se sentait obligé de la lui poser.

- La personne qui a payé ton livreur, le maître chanteur, était-ce une femme ?

Le détenu fut surpris par l’originalité de la question et Mansour se tourna vers son collègue et comprit immédiatement pourquoi il avait posé cette question. Il n’en avait pas fini avec cette histoire, il essayait encore de prouver la culpabilité de Malika. C’est ce qu’il pensa sur le coup mais envoyant l’expression sur le visage du jeune enquêteur passant de grave à soulagé en un instant quand Khadim répondit négativement, Mansour était content de voir que la situation avait changé pour son ami. Enthousiaste car voyant le bout de cette affaire il se retourna vers son interlocuteur et dit.

- J’espère que tu as une bonne mémoire car je veux que tu me le décrives aussi parfaitement que possible. Si c’est concluant d’ici quelques minutes tu seras dehors …

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