une montagne russe
C’est comme un carrousel, une montagne russe ( ! ) avec ses hauts sommets, ses descentes vertigineuses, la lourde toile qui se plaque sur votre nuque - on en profitait pour s’embrasser à l’abri des regards ! -, puis se déplie et vous recevez en plein visage les éclaboussures de la lumière, vous apercevez les barres de néon qui clignotent, peignent vos vêtement des teintes de l’arc-en-ciel, vous entendez les flonflons de la fête, les bruits de cymbale, le cuivre des trompettes, le tournoiement incessant de la Grande Roue - est-ce la métaphore du Destin ? - vous descendez, Nikolaï, Olga, main dans la main des Montagnes Russes, vous titubez un peu, comme grisés par les mouvements, les taches de couleur, vous jouez à la Tombola - une fois vous gagnez, une fois vous perdez et vous vous réjouissez pareillement du gain, de la perte -, vous allez en courant, vous faufilant parmi la foule joyeuse, jusqu’à la Confiserie emplie de mille merveilles, vous sautez comme des cabris, vous êtes un peu fous, c’est une telle ambroisie la jeunesse et puis, elle est inépuisable, toujours un jour vient après l’autre, une joie enchaîne l’autre, une surprise pousse une surprise qui précède un événement clair, lumineux, il y a tant de choses à voir, prendre, connaître, éprouver, archiver dans le musée vivant de la tête, ça fait des tintements, des pliures vives, des allers et retours des sauts de carpe, des saltos, des tonneaux, des boucles, des vrilles, des chandelles, des nœuds de Savoie, vous en avez le corps tout chaviré, Olga, Nikolaï, vos mains s’étreignent, il ne faut pas se perdre, vos doigts sont moites, d’amour et d’impatience mêlés, vous voudriez manger toutes ces belles choses que la vie vous tend à profusion, dans une manière d’intarissable corne d’abondance, oh, oui, ça éblouit, oui ça aveugle, oui ça fait son tintamarre jusque dans le moindre repli de peau, vous sentez le fourmillement au creux de vos reins Olga, vous sentez la vigueur dans la graine de votre ombilic et, Olga-Nikolaï, Nikolaï-Olga vous êtes cette figure immensément réversible, ce miracle hauturier qui cingle vers l’horizon de l’existence sans même sentir la houle, sans éprouver le moindre haut-le cœur, sans ressentir en quelque endroit de vos singulières personnes l’attaque sournoise d’une maladie, le canif d’un chagrin, le frein qui ralentirait votre progression, les obstacles n’existent pas, vous vous en moquez Olga-Nikolaï et vous avez bien raison, croquez dans la vie à belle dents, dites comme Ferré, (si vous l’aviez connu ), : « Moi j' vois s' faner la fleur de l'âg' / Merd' à Vauban » et n’oubliez pas, la fête, ça court autour de vous, ça plaisante, ça se bouscule, vous savez comme à l’entrée du cinéma dans les années d’autrefois, on n’avait que ça, mais quel bonheur alors de voir s’agiter sur l’écran avec plein de brindilles qui sautaient, Gabin, Michèle Morgan et puis « Quai des brumes », imaginez seulement et faites un peu les acteurs :
Nikolaï : « T'as d'beaux yeux, tu sais. »
Olga : « Embrassez-moi. » (Vous l’embrassez)
Nikolaï : « Olga ! »
Olga : « Embrasse-moi encore. »
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