Vendredi 29 novembre 2024

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 L'année dernière, j'ai intégré un double-diplôme exigeant et chronophage. Je me suis installée dans la capitale, ville lumière où les opportunités abondent et le temps file à toute vitesse. J'ai arrêté d'écrire. Il fallait voir la fatigue extrême qui me clouait au lit dès le seuil de la porte franchi. Durant les quatre premiers mois de mes études supérieures, j'ai perdu cinq kilos et mon assiduité. Si vous êtes perfectionniste, anxieux, ou si vous avez, en somme, un balai dans le cul, n'hésitez pas à vous mettre en difficulté : échouer vous permettra de lâcher prise et de renouer avec votre ado rebelle intérieur. En toute honnêteté, cette année turbulente m'a fait grandir.

 Il y a un mois environ, j'ai quitté une relation qui a duré plus d'un an et demi. C'est peut-être de la gnognote pour vous, mais à dix-neuf ans, ça paraît très (très) long. J'ai pris cette décision à contrecoeur, cela n'a pas été facile et, aussi cliché que cela puisse paraître, cela a marqué un véritable tournant dans ma vie de jeune adulte. Le célibat est une terre neuve où tout est possible.

 Alors j'ai dit à mes copines que j'allais profiter de cette occasion pour prendre du temps pour moi, pour réfléchir, prendre du recul. J'ai menti. Elles le savaient. Je pense avec ma chatte et ma chatte est une pétasse capricieuse qui veut toujours se faire remarquer. Non, non, je n'ai pas cédé à l'exhibitionnisme, c'est pire encore : j'ai voulu oublier mon ex.

 Mais si la perspective d'être seule et d'affronter le vide me terrifie, celle de me remettre en couple me donne carrément la gerbe. Comme de nombreuses femmes embourbées dans une conjugalité hétérosexuelle défaillante, je me suis perdue dans une relation insatisfaisante, où j'ai mendié l'amour d'un homme passif et peu investi émotionnellement. Loin d'être désagréable, méprisant, ou violent, il était simplement figé d'une nonchalance impénétrable, dénué de toute poésie, désintéressé, et je n'ai pas réussi à l'extirper de cette inertie. Aujourd'hui, je regarde mes efforts passés avec l'envie puissante de me défenestrer : j'ai tenté tellement de fois d'attirer son attention, de tirer de lui une réaction, un engagement quel qu'il soit, un mot sincère, une confidence, une once de vulnérabilité, une preuve d'amour. J'ai été si seule, à chercher dans ses bras ce que je voulais voir dans ses yeux, à attendre dans le silence des mots qu'il ne dira jamais, à sentir dans le lit, entre nos corps enlacés, l'absence insupportable qui me vidait le coeur.

 Sans doute étais-je moi aussi responsable de ce mal-être. Nous avons vécu par ailleurs de beaux moments de tendresse desquels, pour préserver ma santé mentale actuelle, je préfère ne pas parler ici. Il me manque par moment, mais c'est fini. Le sexe surtout me manque.

 On réatterrit donc sur nos pattes : mon temple sacré miaule frénétiquement pour un peu d'attention. Il y a deux semaines donc, avec une bouteille de vin blanc dans le nez, j'ai contacté un garçon rencontré à la piscine en lui proposant de se voir, chose qu'il a tout de suite acceptée. Nous avions eu une discussion très agréable lors de notre rencontre, et malgré les bonnets de bain et les lunettes, j'avais senti son attirance pour moi. Je me suis dit qu'un rendez-vous galant me ferait du bien et que cela nous amènerait peut-être, si l'occasion s'y prêtait, à coucher ensemble. Il m'est pourtant rapidement apparu qu'il ne m'attirait pas et que nous avions peu d'atomes crochus. Tant pis pour mon minou.

 Mes affaires se corsent une semaine plus tard : je me rends à une soirée organisée par mon école, avec l'ambition affichée d'y faire une rencontre. Je m'apprête, je veux plaire et je plais. Houra. Alors que la soirée touche à sa fin, je tombe nez-à-nez avec un type à qui j'avais longuement parlé par message quelques semaines auparavant. On discute, il me paie un verre, je l'emmène danser avec mes amis. Physiquement, ce n'est pas mon style, mais il a de la conversation, il me fait rire et surtout, il est extrêmement différent de mon ex, très expressif et assez sensible. Avec son groupe de potes, on prolonge la soirée en after chez lui. Pour la faire courte, une fois que tout le monde est parti, on couche ensemble. Du fait de la nullité extrême de l'acte en question, j'ai tout de même du mal à qualifier cet instant de gêne de relation sexuelle : j'associe généralement sexe et plaisir. Forte de cette expérience désastreuse, je me réveille avec la gueule de bois et aussi la gueule de quelqu'un qui a beaucoup de regrets. J'envoie un message à mes copines. Je comprends maintenant la gêne dont elles me parlent si souvent, confrontées à la maladresse d'un homme qui ne sait pas ce qu'il fait et, pire que cela, qui se soucie seulement de vous la mettre. Quel étrange concept de n'être qu'un trou où fourrer sa bite. Le fait est que j'ai fermé les cuisses, et n'ai pas poursuivi ce qui s'annonçait déjà si mal, résistant au nom de toutes les malbaisées. De rien les filles.

 L'histoire, évidemment, ne s'arrête pas là. J'ai omis un détail très important concernant l'after... En arrivant chez ce garçon maladroit et phallocentré, pressée de soulager ma vessie, je pousse la porte de la salle de bain et tombe nez-à-nez avec Clara.

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