Chapitre 5 : La réunion décisive (1/2)
GURTHIS
Maintenant ou jamais. Je n’allais pas jeter l’infamie sur moi, ça contredirait tout ce pourquoi je me battais. Un vrai duel m’attendait, mon premier depuis des années, et l’adversaire avec. Mon combat… La lutte de ma vie.
Ils avaient tort, tous autant qu’ils étaient. Je n’étais pas le vieillard aigri qu’ils croyaient. Je n’étais pas le meurtrier vengeur qu’ils s’imaginaient. J’étais juste un pauvre soldat prêt à crever pour sa patrie. Des années d’attente, de fausse paix, avant de retrouver une cause. L’Ertinie méritait que je sue, que je trime pour elle. Et son peuple dans tout ça ? Il y aurait toujours des félons et des bâtards. Mais je connaissais aussi des gaillards qui valaient tout ce sang déversé. Mes motivations resteraient admissibles tant qu’ils ne clamsaient pas.
— Reste concentré, Gurthis ! me lança mon pote.
Il avait raison, comme toujours. Me concentrer du mieux que je pouvais. Je gardais une posture offensive, l’attaque surpassait la défense, aucun doute là-dessus. Ma poignée fuselée glissa de mes mains alors que je reprenais ma lame. Plus de faux mouvemenst, pas de gestes superflus, se déplacer trop vite ne servait à rien. Pas question de le laisser gagner. Mon compagnon me zieutait sans relâche et se fatiguait peu sous mes impacts. Sans vergogne, nous laissions les armes s’exprimer à notre place. L’essentiel était de ne jamais faillir. Nous frappions continûment, cherchant à rompre les défenses de notre opposant. On respirait un bon coup entre deux attaques avant de reprendre. En parades ou en estocades, mes anciens réflexes renaissaient.
J’avais attendu ce moment depuis si longtemps ! Me revoilà dans l’action, paré à dégommer les ennemis de mon royaume, les parjures et les traîtres. J’avais survécu jusque-là et ça continuerait. Mon armure de plates avait résisté à toutes les batailles antérieures, seules mes spallières, cubitières et grèves s’étaient esquintées avec le temps. Un équipement imparfait ? Pas grave, c’était la preuve que j’avais fréquenté le terrain durant des décennies. Ce solide plastron prouvait mon adhésion à l’armée Ertinoise, ma plus grande fierté. Aucun armet, par contre, les affrontements perdraient leur intérêt sinon. Le bouillonnement de mon sang, le souffle du vent, le cliquetis des armes… Là je vivais réellement. Là je ressentais le poids de ma carrière. Là je me battais comme un véritable soldat.
— Alors, où est passée ta vigueur d’antan ? provoqua mon adversaire. Si tu veux quitter ce pays, faire partie d’un groupe de gens que tu ne connais pas pour la plus grande mission depuis des lustres, il va falloir être plus fort et rapide !
Fidèle à lui-même, ce brave gars. Le genre de gaillard aux cheveux très courts et sans distinction physique. Un briscard loyal endurci par la protection de notre patrie. Contrairement à moi, il n’était pas très grand ni costaud, ma force surpassait de loin la sienne, mais il compensait ses défauts par d’autres qualités. Raker avait survécu tout ce temps. Je ne pouvais pas en dire autant de l’ensemble de mes frères et sœurs d’armes…
La période de vide était terminée. Que mes muscles me répondent, que mes bras soulèvent la pression qui m’accablait ! Des mèches grises avaient beau parsemer mes longs cheveux noirs, des rides avaient beau frapper mon visage en plus de ma balafre, je n’en avais que faire ! Raker bougeait dans tous les sens, esquivait mes attaques, sautait parfois, se tournait et ne s’épuisait pourtant pas. Peut-être qu’il aurait dû se porter volontaire. Encore qu’il aspirait à autre chose.
Nos espadons se cognèrent une dernière fois, puis nous reculâmes et reprîmes notre souffle.
— Tu es prêt, assura Raker en haletant. Tu frappes fort, tu ne faiblis jamais. Tes yeux brillent d’une volonté de fer. Cette quête est faite pour toi.
Nous aurions pu poursuivre encore plusieurs minutes. Nous en étions capables. Mais Raker transpirait de partout, son arme tenait à peine dans ses mains. Inutile d’insister, de le pousser à dépasser ses limites dans un foutu entraînement. Me délasser juste le temps nécessaire avant le départ serait mon dernier préparatif. Il fallait me présenter tel que j’étais. Mes mains moites constituaient une preuve en plus de ma valeur.
La soif asséchait ma gorge. Je bus le contenu de ma gourde tout en regardant l’unique fenêtre de cette salle vide. La journée était bien avancée, je ne devais plus lambiner dans les parages. Mon pote me reverrait un jour, on se l’était promis, et bigre, je ne faisais pas mes serments en l’air.
— Alors, tu t’en vas vraiment ? s’enquit Raker.
— Pas le choix, répondis-je en me grattant la barbe. Je me suis porté volontaire pour cette mission. Je dois assumer.
— Je te reconnais bien là ! Quarante-quatre ans et toujours en forme ! Je t’en donne ma parole, et tu sais ce qu’elle vaut. Je ne suis pas bien informé sur cette expédition, mais tu es l’un des meilleurs soldats de l’Ertinie. Tu es né pour protéger notre pays.
— N’exagère pas, Raker. Je n’étais pas destiné à être soldat. Ça remonte à loin maintenant… Je me suis opposé à la volonté de ma famille pour tracer ma voie. Je suis content de toujours savoir me battre. Est-ce que c’est suffisant ? Je ne pense pas. Tu connais la vraie raison qui m’a poussé à me joindre à eux.
Je m’apprêtais à saisir la poignée de la porte. Fuir un sujet comme celui-là serait lâche, il le savait et il en profitait pour me le rappeler. Comme si je ne doutais pas moi-même des intentions de notre souverain.
— Vous pouvez atteindre la Nillie sans elle ! protesta Raker. Elle sera un danger dans votre groupe.
— Pas si je suis là. Je l’empêcherais de nuire à qui que ce soit. Cette idée ne m’enchante pas, mais je suis qui pour me plaindre face au pouvoir ? J’obéis aux ordres. Je dois surveiller Elmaril oc Nilam parce que je connais son clan mieux que personne.
Et je l’abandonnais là. Pas d’adieu de vieux frères, pas de pleurnicherie niaise, je me contentais de fermer la porte. Désolé, Raker, je ne trouvais plus rien à ajouter. Contester des décisions était acceptable quand elles ne provenaient pas du roi. Nous n’étions que des soldats sans grade, des fantassins qui avaient rejeté toute promotion pour rester en première ligne. Mon autorité, je l’avais gagnée dans les mêlées auxquelles j’avais participées. J’étais maintenant l’une des recrues potentielles pour servir mon royaume. Enfin mes erreurs pouvaient être rattrapées. Mon honneur d’autrefois… Où était-il à présent ? Parce que j’en avais besoin. Tout de suite.
— Bonjour, camarade ! me salua une soldate.
Je ne la connaissais même pas. Que répondre sinon un modeste signe avant de tracer ma route ? Au cœur de la caserne militaire, au nord de Telrae, je me baladais dans cet institut large et imposant à défaut d’être haut. Un témoin incontestable de l’histoire de notre nation, héritier de plusieurs siècles d’existence. Fatalement, ses structures accusaient un début de détérioration. Mais nous étions habitués à marcher dans cet empilement robuste de briques noires. C’était un lieu assez laid, froid, austère même, mais quelle importance ? Son but se situait ailleurs.
Des troupes soldats marchèrent en file droite. Courage, ténacité, ordre, ces mots symbolisaient la puissance de notre armée : toute erreur était sévèrement punie, c’était notre réputation qui était en jeu ! Mais nous en commettions tous, moi y compris. Dur souvenir... Ces soldats qui avaient claqué à tous mes affrontements, surtout le dernier, je ne les reverrais jamais. En fait, j’avais même l’impression de salir leur mémoire.
Des guerrières barbares avaient attaqué l’avant-poste d’Urness, d’où l’angoisse qui s’était emparée de mes associés. J’aurais dû être là, les pourfendre quand j’en avais l’occasion, livrer vengeance ! D’autres gardes avaient donné leur fichue vie alors que cette Elmaril respirait encore. Écœurant. Le pouvoir avait eu la décence d’exécuter deux des prisonnières. Ça ne suffirait pas à apaiser le peuple, ils savaient déjà qu’elles méritaient ce sort, maintenant ils auraient peur, plus encore qu’avant. Les clans Nyleï et Dunac étaient à nos portes. Ils ne valaient pas mieux l’un que l’autre, à commettre meurtres de masse, rapines, et viols au nom d’une idéologie répugnante.
J’atteignis un croisement vers une allé illuminée par une torche. Seule Elmaril y était enfermée, pourtant j’entendais du bruit. Nos deux geôliers s’en donnaient à cœur joie, tant mieux pour eux, tant pis pour la scélérate. Elle était une offre précieuse, pas un être humain. Alors pourquoi on lui laissait tant d’affaires ? Son équipement reposait dans un coffre laissé ouvert pour je ne savais quelle foutue raison. Son armure en cuir souple indiquait sans conteste l’origine de la captive. Pas mal, pour une tenue de sauvage : des pointes surmontaient ses épaulières tandis qu’une boucle à anneau serrait le ceinturon. Trois bandes de cuir semées de dents étaient nouées sur la cuirasse. Le reste était du même acabit. Ce qui me répugnait le plus, c’était sa lance en fer. Du sang y séchait encore… Le sang de mes amis.
Elmaril ramassait beaucoup aux abords de sa cage. Surys retenait la prisonnière pendant que Jisata la martelait de coups de poing. Ceux-là, j’aurais préféré ne pas les voir. Des crasses débordant de leur broigne en cuir cloutée, leurs longs cheveux dégueulasses, un sourire sadique dévoilant leurs dents jaunies, ils n’avaient rien à envier à la sauvage. Même pas très robuste en plus, la détenue pourrait facilement les écraser si elle n’était pas menottée. Peu de prisonniers de guerre peuplaient nos cellules : à eux deux, Surys et Jisata savaient s’occuper de tout.
Bigler une guerrière de clan Nyleï d’aussi près n’était pas donné à n’importe qui. On ne les observait pas d’ordinaire, on les massacrait. Vu comment elle me dévisageait, je ne le regrettais pas. Son visage maculé de poussière mettait en évidence son appartenance. Et bon sang, ces deux traces noires obliques marquées sur ses joues, son tatouage sur son poignet droit… Elmaril était jeune et déjà vétérane. On avait beau l’avoir vêtue de haillons, elle en imposait toujours. Des années de pillage avaient bâti sa carrure musclée et son grand gabarit l’avantageait. Puis ses deux tresses d’un roux profond, elles se prêtaient à son visage rond et à ses yeux bruns saillants. Elmaril aurait été une femme respectable si elle ne faisait pas partie de ce clan.
Jisata la frappait encore et encore, pétrie de rage, et elle ne sourcillait en aucune façon.
— Vas-tu crier de douleur ? s’impatienta la geôlière. C’est tout ce que tu mérites ! Combien de nos gardes et soldats as-tu tué, hein ?
— Lâchez-la ! tonnai-je. Elle n’est plus votre prisonnière. Je l’emmène pour une raison qui ne vous concerne pas.
Jisata et Surys écarquillèrent des yeux. Hein, personne ne les avait prévenus ? Ils comptaient probablement s’amuser jusqu’à la fin de la journée. Je les entendis grogner, mais ils me rendirent Elmaril. La guerrière, quant à elle, murmura dans sa langue natale. Elle semblait un minimum informée du destin qui l’attendait. D’un signe de la main, je lui ordonnai de me suivre et elle obéit sans discuter. La soumission préférable à la mort ? Elle aussi trahissait la mémoire des siennes. Ou alors elle se pliait à mes instructions parce qu’elle en tirait des avantages.
Impossible de rester discret avec Elmaril. En tant qu’escorteur, j’interdis toute action insensée de la part de mes camarades. Des regards noirs, des râles de protestation, quelques bousculades, tous des signes capables de me déranger si je n’étais pas préparé. Les jeunes recrues avaient encore besoin de discipline. Ils jouaient avec ma patience. Mais j’avais attendu ce moment. C’était pour le mieux, j’en étais persuadé ! On ne s’entourait pas d’une meurtrière et violeuse pour rien. Elle souriait, secouait la tête, explorait notre base avec moi, tout ce qui favorisait son groupuscule. Camarades, ma parole était solennelle : jamais elle ne reviendrait ici.
Nous contournâmes l’écurie et passâmes près de la cour. Un entraînement en plein jour, idéal pour progresser. Les uns tiraient sur des cibles à l’arc, les autres suivaient les instructions de Kolob Blaithor. Il n’avait pas changé, ce vaillant moniteur ! Une veste dégarnie en guise d’armure, une épée rouillée comme arme, il pulvérisait plus ses opposants que la plupart des collègues. Seul son crâne dégarni témoignait de sa vieillesse. Un demi-siècle au total et sa voix portait sur toute la pelouse. De jeunes hommes et femmes, recrues récentes, se tenaient raides, la tête dressée, toute expression absente de leur visage. Voilà comment on devenait des soldats, des vrais ! En se bousillant jusqu’à être méconnaissables, en apprenant l’obéissance et la coopération ensemble, en maîtrisant les armes comme dans les authentiques champs de bataille. Ils chialaient peut-être aujourd’hui, mais quand ils se retrouveraient face à des hordes de sauvages, ils le remercieraient. Ils avaient déjà un aperçu avec moi. Quelle insulte de traîner Elmaril.
Nous venions de quitter la caserne pour aller à la bicoque de la conseillère, si encore j’arrivais à la retrouver. Au quartier Kurona d’après ses indications, là où les bourges se clapissaient. Bien vite les demeures s’étalèrent d’une rue à l’autre, les allées s’élargirent et les bâtiments gagnèrent en hauteur comme en relief. Donc les riches dépensaient leur fortune pour leurs larges façades. Ils claquaient tout leur fric des murs bâtis de pierres polies ou briques rouges au lieu de les user avec bon sens. Par exemple, au hasard, en renforçant nos effectifs ? La dernière attaque aurait dû leur servir de leçon. Nous n’étions en sécurité nulle part.
J’exposais la ville à une barbare qui risquait d’en profiter. Ma première trahison. Je traînais la preuve que le pouvoir avait berné le peuple. Cacher sa détention avait été un mensonge nécessaire bien que temporaire. Personne ne ratait la prisonnière marchant à l’intérieur de nos murs, victime de mépris et d’étonnement. Le peuple découvrait les clans au-delà des rumeurs, Elmaril en était la parfaite représentante. Tous se sentaient dupés… Qu’ils soient rassurés, elle se tenait tranquille et ne résistait pas, tel était mon devoir. Tout juste osait-elle toiser des citadins apeurés. Le choc de deux cultures opposées. C’était déjà une honte de qualifier leur troupe aussi positivement.
La place Holani. Rien d’exceptionnel hormis sa fontaine de marbre en son centre. Cette agora regorgeait de citoyens qui allaient et venaient tout en jacassant. Soudain ils nous dévisagèrent, nous devînmes le centre de l’attention. Pour qui ils se prenaient, à nous pointer de la sorte ? Je ne voulais pas savoir ce qu’ils chuchotaient, ça ne regardait qu’eux. Mais leur lamentable journée n’avait pas à être chamboulée pour si peu.
Ils s’étaient à peine habitués qu’Elmaril s’arrêta sans raison. Elle se croyait intimidante en plissant les yeux, elle se trompait. J’affrontai son regard farouche.
— Vous auriez dû m’emmener sur l’échafaud, dit-elle.
Elle parlait notre langue ! Correctement, par-dessus le marché, malgré son accent rauque ! Elle massacrait notre langue devrais-je dire, elle crachait ses mots plus qu’elle les articulait. Elle l’avait apprise où, d’abord ? Qu’importe. Je me fis une joie de la contredire :
— Estime-toi honorée. Aucune guerrière de ton clan ne s’est alliée à nous par le passé. C’est un privilège que nous t’accordons.
— Un privilège ? répéta la rebelle à haute voix. Je suis la seule survivante de mon groupe, condamnée à voir votre société dégénérée de l’intérieur. Vous avez tué mes amies, mes geôliers m’ont bien nargué en me montrant leur tête. Et après ça, je dois servir vos intérêts ?
Cette maudite guerrière finassait pour nous faire remarquer. Futée en dépit des apparences. Elle savait que notre expédition ne devait pas s’ébruiter. Je la fixai sévèrement, tentant d’estomper ses fourberies.
— Si ça ne tenait qu’à moi, déclarai-je, tu serais déjà morte. Mais je dois obéir à une hiérarchie stricte. Mes supérieurs t’ont sélectionnée pour cette mission, j’espère que tu seras utile. Compte sur moi pour t’empêcher de nuire.
— Tu n’es donc qu’un larbin parmi d’autres, se moqua-t-elle. Dans notre clan, au moins, c’est le groupe entier qui décide. Personne ne se prétend supérieur aux autres pour des raisons stupides.
Ignoble, juste ignoble ! Elle maîtrisait plus de mots que certains gens d’ici et s’en servait pour nous insulter aux yeux de tous ! Rien ne lui flanquait la frousse et elle en profitait pour me jeter la honte sur nous. Et ces nantis qui nous lorgnaient comme des bêtes de foire… Je n’avais pas prévu ça.
— Tu insinues quoi ? répliquai-je en la foudroyant du regard. Je connais bien votre clan, vos coutumes, votre mode de vie. Je vous ai affrontés pendant de nombreuses années. Vous n’avez rien d’honorable.
— Vous êtes honorables, peut-être ? Vous vous enfermez dans des murs épais en méprisant la nature qui vous a vu naître. Vous parlez une langue abjecte qui n’est même pas la vôtre. Vous menez des vies monotones et répétitives, détachées des valeurs traditionnelles. En plus, vous êtes très hypocrites sur la violence. Vous en répandez souvent plus que nous.
— Eh bien, tu peux être bavarde, quand tu veux. Quelle perte de temps ! Tu nous juges sans savoir. Laisse-moi te dire quelque chose : nous avons aussi des valeurs et tu ne les connais pas. Il existe une différence majeure entre nous : votre rôle vous est imposé à la naissance. Très ironique, sachant que vous prétendez reconquérir votre liberté.
— Au moins, nous sommes conscients de nos actes. Vous pensez avoir le choix de mener la vie que vous voulez. C’est faux. Des traîtres, voilà tout ce que vous êtes.
— Les nations évoluent avec le temps. Sous prétexte que vous défendez certaines valeurs, vos actes infâmes en deviendraient justifiés ? Non, ça ne fonctionne pas ainsi. On ne justifie pas le mal par les actions de nos ancêtres. Nos lois, notre éthique, nos coutumes forment nos valeurs actuelles et je les défends hardiment. Regardez-vous, vous êtes nos principaux détracteurs. Des sauvages meurtriers et violeurs, ce n’est pas la preuve que notre mentalité est la plus vénérable ? Il serait temps de vous remettre en question !
— Vous devriez aussi vous remettre en question. Prenez du recul, ça vous fera du bien.
Je me retins de la frapper pour qu’elle se taise. J’agissais exactement comme elle le voulait ! Son sourire en coin de visage donnait envie de la décapiter sur-le-champ. À qui elle manquerait ? Des cris de joie et des acclamations glorifieraient cet acte ! Mais ça m’était interdit, Elmaril subsisterait. Trop précieuse pour mourir, trop infâme pour vivre.
Nous avions traîné ici trop longtemps. S’éterniser sur cette place continuerait d’attirer l’attention sur nous. Alors j’agrippai la prisonnière par l’épaule et l’emmenai vers la demeure. J’étais prêt à ignorer ses remarques suivantes, mais elle s’exprima encore dans sa langue natale. Tant mieux si je ne comprenais rien. Je n’aurais plus d’excuse pour m’énerver.
Hors de mon chemin, passants ! Ouais, c’était bien moi, le vieux Gurthis, ancien défenseur de l’Ertinie, maintenant réduit à escorter une envahisseuse. Je pressai le pas, incapable de supporter cette condition plus longtemps.
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