J’ouvre les yeux. Il ne faut pas que j’oublie mon histoire. Le Réseau C. La mort de mon frère liquidé par les Chevaliers de l’Apocalypse pour m’atteindre. Aurélie qui me permet d’avoir des informations en me donnant Marielle. Aurélie qui me permet de liquider le coupable. Aurélie. Et Greta qui m’adoube. J’ai voulu disparaître aussi. J’aurais pu ne pas revenir. Mais me voilà, quelqu’un avec un destin. J’apparais dans sa chambre, je suis toute en bleue. Marielle est en train de se coiffer, elle me voit dans son miroir, sursaute et se lève, s’approche mais s’arrête :

• Je comprends ma Nola. Que le tennis c’est terminé. Que tu ne garderas plus Pierrick. Que je ne fais plus partie de ta vie.
• Je maîtrise l’espace-temps, ma Rielle. Notre histoire je peux la revivre.
• Et sauver ton frère ?
• Je ne peux pas changer le passé, pas encore. Si je le fais je disparais dans une autre réalité alternative.

Aurélie. Marielle. Greta. Adélaïde. Toutes des terriennes. Elles ne sont pas mienne. Pas encore. Je ne suis pas leur déesse. Pas encore. Je suis du côté de ma Reine, Clémence, de ma Maire, Rachel. Rachel. Je me retrouve dans son bureau et je lui demande :

• Quelles sont tes motivations, Rachel ?
• Je veux redonner du prestige à la ville. Et toi, quelles sont les tiennes ?
• Je veux redonner de la spiritualité à ta ville.
• Seulement ma ville ? Énola, nous avons une alliée à l’Ouest. Alice.

J’apparais dans le bureau d’Alice. Elle ne me voit pas. Son regard est perdu dans le paysage de sa baie vitrée. Je sens sa solitude du pouvoir. Mais elle est digne et responsable. La fusion avec Aline ne l’a pas laissée indemne. Elle a perdu son Victor, volé par Greta. Elle inspire lentement et lorsqu’elle expire elle me voit :

• Énola, je t’attendais. Jolie robe, ce bleu est… hypnotique. Énola, la mission se déroule, elle est presque terminée. Au début je n’en connaissais pas le but. Je n’étais que pilote de la mission de 2003. Et puis j’ai eu accès aux dossiers. À tous les dossiers. Et je connais la suite. Mais j’ai décidé de ne pas décider, de te laisser décider. Il s’agit de ramener quelqu’un à la vie. Sans aucune incidence sur l’espace-temps. Tu peux faire ça. Et si tu y arrives, tu pourras aussi le faire, pour ton frère. Il s’agit de ramener un disparu du passé à notre époque. C’était le but de cette mission de 2003. Notre science a ses limites. Et sur Terre il y avait des élus qui avaient le potentiel pour aller au-delà. Mais notre savoir-faire occulte est empirique. Il n’y a qu’avec Greta que ça a marché. Et je l’ai ramenée en acceptant toutes ses conditions. À tout prix, pour la mission. Il n’y a que Greta qui pouvait découvrir l’Invisible en nous. Il n’y a qu’elle qui pouvait nous y connecter. Et elle t’a trouvée. Et la mission peut se poursuivre. Ramener l’instigateur de tout ça. Ramener Vivien Virein Volta.
• Alice, ce n’est pas à moi de décider. Je vais aller demander à Émilie.

J’attends qu’elle soit réceptive. Je ne peux pas débarquer à n’importe quel moment. Je dois être attendue. Et j’apparais sur sa terrasse. Elle est appuyée à la balustrade, enveloppée dans une couverture en se chauffant les mains sur un mug. Sans se retourner elle me parle :

• Alors ça y est ? Je vais sauter. C’est dans ces moments là qu’on voit Dieu. Patrice me trompe. Et il se débarrasse de moi. C’est pour ça que tu es là ?
• Non Émilie, c’est Alice qui m’envoie. C’est à toi de prendre la décision.

Je crois qu’elle a compris. Je lui envoie des images mentales, au cas où. Elle se retourne lentement et déclare :

• Sans aucune hésitation. Tu as mon autorisation.

Elle pose le mug sur la balustrade, ouvre sa couverture et viens m’enlacer avec. Je ressens sa chaleur, elle sent bon. La peau de son visage est très douce. Je la sens très réceptive, à l’Invisible. Elle a du potentiel en elle. Ça explique bien des choses, sur son isolement, sur ses fréquentations, sur sa descendance.

Je rentre à la maison, en navette. Quand elle m’ouvre la porte elle est en pleurs.

• Marielle tu as raison. J’arrête le tennis. J’arrête d’être nounou. Mais tu fais toujours partie de ma vie. J’ai besoin de toi, ma jolie poupée.

Et elle me saute au cou.

• Merci d’être rentrée. Je sais bien que notre situation n’est pas éternelle et qu’elle est en train de changer. Je vais devoir te partager. Mais j’ai besoin de toi. Jusqu’à la conversion. Je ne vais pas pouvoir faire ça seule. Et je ne veux pas le faire avec quelqu’un d’autre que toi. Ma petite pute.

Elle sait que je ne peux pas résister à ses mots, ses trois derniers mots, alors je la pousse à l’intérieur, j’enlève délicatement ma robe bleue et je me glisse en elle pour lui donner le plaisir rassurant qu’elle attend de moi.

*

Mais personne ne m’a donné la notice d’emploi de l’Invisible. Alors je vais voir Greta.

• Méditation transcendantale. Il doit être là, quelque part.

On s’installe confortablement dans une tente de secours sur le toit de la Caserne. Greta me fait boire une boisson mystérieuse et je me mets nue, assise dans un grand pouf. Elle se déshabille aussi et vient s’asseoir contre moi et elle place mes mains sur ventre.

• On doit faire ça en peau à peau. Tu vas te sentir partir et je vais te guider dans les limbes. Tu ne me verras pas mais je serai toujours là.

Je me retrouve dans la Cathédrale. Il y a des fantômes partout. C’est une messe. D’enterrement. Je m’approche du cercueil et il s’ouvre. Je regarde dedans. Il ouvre les yeux :

• Maman ?
• Non, je suis Énola, ta déesse spirituelle.
• Tu lui ressembles. Mais elle est morte. Nos aïeux n’étaient pas immortels.
• Tu es mort aussi, Vivien.
• Je sais.

Il ferme les yeux et le cercueil se referme. C’est tout ? Je fais toc toc toc. Le cercueil se rouvre et il ouvre les yeux :

• Énola ?
• Je suis là pour te ramener, à la vie, éternelle.
• Il s’est passé combien de temps ?
• Pratiquement 60 ans. Les terriens ont débarqué, avec l’Invisible et ils nous l’ont donné, c’est comme ça que je suis là.

Il se redresse dans son cercueil.

• Intéressant. Et comment on procède ?
• J’avais pensé à une énorme cérémonie occulte avec des éclairs et des cris de monstres horribles mais en fait j’ai pensé à plus simple.

Je lui tend ma main droite. Je joins le pouce et le majeur et je claque des doigts. Je me réveille avec Greta sur moi. J’ai toujours mes mains sur son ventre. Je lui embrasse la nuque et elle gémit de plaisir.

• Nola ?
• Oui, je suis là. C’est fini.
• Ça a marché ?
• Je ne sais pas. Il faut prévenir Émilie. Je crois qu’il est revenu, chez elle, près du Village, sur sa terrasse.
• Très bien, on va envoyer Adé et ses Sœurs. Mais pas tout de suite. Laissons-les se retrouver. Je suis bien dans tes bras Énola. On est bien, Mona-Lisa et moi, en toi.
• Moi aussi Greta, je me sens pleine d’Amour.

Et je baisse mes mains plus bas. Je lui masse doucement le bas ventre. Elle se cambre, elle retient sa respiration pour garder le plaisir en elle, pour que sa Mona en profite. Je lui lèche le lobe de son oreille, je l’embrasse sur la joue, elle tourne son visage et nos bouchent se cherchent. Je m’active, de plus en plus fort, elle tressaille, elle expire et elle s’endort de plaisir, sur moi.

*

Je peux le faire toute seule. Je dois le faire toute seule. En méditation transcendantale. Seule et nue dans mon lit dans la vieille maison abandonnée de nos parents, je pars dans les limbes le rejoindre et si j’en reviens ce ne sera pas seule. Je le retrouve toute de suite, c’est beaucoup plus en surface que Vivien. Il me voit et il crie :

• Pardonne moi ! Pardonne moi !

Et quand je me réveille j’ai un poids sur moi, tout nu, tout froid et je le réchauffe de tout mon être pour qu’il se réveille à son tour.

• Gustavo.
• Énola.

Et il entre en moi. Et je le ressource. Ça marche donc vraiment. Ce n’est pas un rêve ou une illusion. Je n’ai pas eu confirmation pour Vivien. Mais pour Gustavo, je le sens bien là, dans la réalité, contre moi. C’est tellement facile. Ça ne demande aucun effort. Juste un peu de concentration. Je n’ose imaginer ce qu’il pourrait se passer si je forçais un peu. Je vérifie mon monolithe pour voir si tout est normal et si on n’a pas basculé dans une réalité parallèle. J’ai un message de confirmation pour Vivien sur le réseau. Il est codé. L’information n’est pas rendue publique. Pour Gustavo on doit donc rester discrets aussi. J’appelle Adé. Elle va gérer :

• Super ! Un ressuscité rien que pour nous. Les sœurettes vont bien s’en occuper. Mes Sœurs, elles, elles sont sur Vivien chez Émilie au Village.

Et Gustavo se réveille. Il m’embrasse dans le cou et se retire de mon ventre. Je n’ai rien besoin de lui expliquer. Ses premiers mots sont :

• K.C ?
• Je ne l’ai pas vue. J’ai pourtant vu tous les autres, même lui.
• Elle a survécu.
• Peut-être. Il n’y a pas eu de procès. On n’a pas les détails. Ton gourou a été éliminé par le réseau. Gustavo, c’est elle qui t’a entraîné là-dedans ?
• C’est ce qu’il fait croire à tous, on est six couples : c’est la faute de l’autre, pas de lui.

Toutes ses illusions ont été nettoyées dans les limbes. On doit retrouver son amoureuse maintenant. J’envoie un message à Alice. Gustavo va dans sa chambre pour s’habiller. Je remets ma robe bleue. Je ne retrouve plus ma culotte. Heureusement, il en reste une dans mon armoire. Mais je passe à la salle de bain avant. Je dois me laver. Je ne veux rien tacher. Je me regarde dans le miroir et je me sens tout sauf une déesse. Juste vivante et heureuse d’avoir retrouvé mon frère.

*

Je prends une navette et je vais voir Alice pour lui rendre compte, de tout. Elle me pose quelques questions pour compléter son rapport et elle note tout dans son dossier. Silence.

• Alice ? Jusqu’où ça peut aller ? Tu crois que je pourrais ramener la Terre ?
• Non Énola. Tu ne peux pas parce que tu ne l’as pas connue.
• Et si je redonne mon pouvoir à Greta.

Elle pose son stylo et réfléchit.

• Et bien ce sera à elle de décider. C’est sa planète. Elle voulait la sauver. Mais elle ne pourra ramener que les âmes qu’elle a côtoyées. Sa sœur par exemple. Je sais qu’elle l’aimait beaucoup. Et c’était une élue aussi, mission de 2005, Beata. Ça n’a pas marché.
• Et votre Vivien alors, votre dictateur suprême, que va-t-il se passer ?
• Il faut que je vois ça avec la Law House, certainement à l’isolement, comme Émilie, au Village. Pour Gustavo il y a un centre médical de convalescence à Laguna Beach.
• Convalescence ?
• C’est là qu’est Cassandre. Cassy ? K.C. Mais heureusement qu’il n’y a pas eu de procès car malheureusement elle ne se souvient plus de rien, même pas de sa vie. Mais elle va bien, elle a été bien réparée. Ils vont refaire connaissance. Si ça marche pas, tu pourras peut-être intervenir, sur sa mémoire, je ne sais pas jusqu’où vont tes pouvoirs.

Je contourne le bureau pour aller la serrer dans mes bras.

• Merci Alice.
• Maintenant rentre à la maison Nola. Va retrouver ta Rielle. Accroche-toi à une vie normale. Ne te laisse pas submerger par tout ça. Prends soin de toi, protège toi.
• C’est une devise secrète du réseau C. On est démasqués ?
• Non, Nola. C’est moi qui l’ai écrite.

Je la regarde droit dans les yeux. Elle dit vrai. Je l’embrasse et je pars. Je me retourne pour lui dire au revoir. Un simple signe d’affection. Je lui envoie un bisou.

*

La porte s’ouvre sur ma Rielle, elle est jolie ma poupée.

• Tu sonnes pour rentrer maintenant ?
• Je n’étais pas sûre que tu veuilles bien que je rentre.

Je lui ai dit pour mon frère. Elle me prend dans ses bras.

• Je t’aime ma Nola. Vire moi cette robe bleue.

Et elle ne me laisse rien remettre. Elle montre du doigt mon ventre.

• C’est pas ta culotte.
• Si, je ne retrouvais pas l’autre, j’en ai pris une dans mon armoire chez mes parents.

Je viens de comprendre. Ma culotte. Il l’a gardée. Pour quoi faire ?

• Va te laver de tes péchés et reviens-moi toute propre.
• Mais je ne peux pas aller à la Basilique comme ça.
• Sous la douche Nola.
• Ah, d’accord.

Je m’approche pour lui faire un bisou, en toute soumission. Elle accepte d’un air hautain en me tendant sa joue. Quand je repars je reçois une claque sur ma fesse de déesse.