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Ils firent volte-face et découvrirent Sevastian. L’homme avait opté pour une combinaison militaire mettant en valeur son corps encore athlétique pour son âge. Son visage n’avait jamais paru aussi hostile et froid qu’à cet instant.
« On ne peut pas vous laisser seuls deux secondes … », soupira-t-il.
Asbel se recula, les joues rouges de honte. Il balbutia des explications incompréhensibles avant d’être interrompu :
« Je viens », s’entendit dire Eliah.
Il se releva et essuya ses larmes. Ses propres mots le choquaient. Il fut incapable d’ajouter autre chose, tétanisé par la peur, l’incompréhension et par son intervention. Pourtant, il savait au fond de lui qu’il désirait accompagner l’expédition. Il serra les poings, jusqu’à sentir ses ongles s’enfoncer une nouvelle fois dans sa peau.
Depuis des mois, le jeune homme essayait de se convaincre que la vie ici pouvait lui convenir. Il n’avait fait que se leurrer. Le mal gangrénait Rianon et ses citoyens. Les insulaires l’avaient certes déçu, mais il ne pouvait pas tous les condamner à cause de son égoïsme et de sa colère. Peut-être que l’Île ne valait pas mieux, toutefois il préférait son pays natal. Et il l’avait trahi.
« Parfait. Je préfère un collaborateur plutôt qu’un otage réticent », ricana Sevastian.
Asbel parut tout aussi étonné que le Novichki. Ce dernier pensait débattre et argumenter pendant des heures pour monter à bord.
« Ce n’était pas notre marché ! s’exclama son fils. Il devait rester ici, en sécurité.
- J’ai un Îlien sous la main, tu pensais vraiment que je n’allais pas en profiter ? »
Il requérait encore les connaissances du natif. Il lui fallait un guide. Les réclamations de son enfant importaient peu. Le militaire se jouait même de lui, tant qu’il parvenait à ses fins.
Eliah devait à tout prix participer à cette expédition. Il garda pour lui son ignorance concernant sa terre d’origine. Un sourire de satisfaction étira les traits. Il jubila intérieurement d’avoir raconté tous ses mensonges au gosse de riche. Lui aussi se faisait berner par son père.
Il se fit la promesse de s’enfuir dès que l’occasion se présenterait. À la seconde où ils traverseraient l’atmosphère de l’Île, il chercherait un moyen de s’échapper. Jamais il ne leur donnerait un renseignement de plus.
La réalité le frappa de plein fouet et un poids lui tomba sur la poitrine. Il chancela. Asbel n’osa pas s’approcher, sûrement à cause de la présence de leur aîné.
Plus question de se fier à l’ennemi, de sympathiser avec lui. Son ami s’était joué[MR2] [MR3] de lui et de ses sentiments, avait abusé de sa confiance alors qu’il était en deuil. Malgré la douleur que cela lui causait, Eliah devait le rayer de son esprit.
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