Prologue (2/2)

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C’était le signal qu’elle attendait. La femme s’était élancée, courant à toute vitesse vers le fond de la rue. Si elle était assez rapide, alors elle pourrait peut-être les semer. Elle pourrait continuer à vivre. Luca comptait lentement les secondes, tout en préparant un carreau qu’il encocha à son arbalète. Un sourire ravi au visage, il leva le bras armé en direction de sa cible.

—Six… Sept…

Son index appuya sur l’arbrier, libérant le trait qui partit se ficher en moins de temps qu’il ne faut pour le dire dans l’épaule de la femme. Cette dernière hurla de douleur, mais continuait tout de même sa course pour vivre.

Horrifié, Lucian lança à son frère qui chargeait un autre projectile :

—Mais tu avais dis que tu lui laissais une quinzaine de secondes !

—Je sais… Mais tu me connais, je ne suis pas très patient.

Derrière eux, les autres chevaliers de l’Ordre riaient aux éclats. Le second dard fila dans l’air, traversant la cuisse de la pauvre femme qui tituba avant de se retrouver à terre, se mordant les lèvres pour ne pas hurler de douleur. A présent, elle boitait, mais elle n’abandonnait pas. Même si les chances pour elle de s’en sortir étaient infimes. La troisième pointe de fer la manqua alors qu’elle allait tourner dans une autre rue, puis elle s’affala de nouveau à terre avant de se relever avec peine. Des plaintes douloureuse sortaient de ses lèvres, et les larmes coulaient le long de ses joues. Elle ne laisserait pas tomber. La jeune femme eut le temps de faire quelques pas avant qu’une autre flèche ne se plante dans son autre jambe, la précipitant au sol. N’entendant pas les bruits de pas metalliques derrière elle, elle tentait de se relever à nouveau. Elle ne voulait pas abandonner. Un coup de pied donné avec violence la fit rouler sur le côté. Un autre carreau se planta dans son bras droit cette fois-ci, et elle ne pu s’empêcher de hurler. Tremblante, l’effroi rattrape sa conscience dans le contrôle d'un corps qui n'était que douleur, et elle implorait ses bourreaux de lui laisser la vie sauve.

—Je n’ai rien fait… Je ne suis pas une sorcière… Je veux juste rentrer chez moi… Par pitié…

Elle eut des rires moqueurs pour seule réponse. Et les hommes en armure l’entouraient à présent, ne lui laissant plus aucune chance de pouvoir prendre la fuite. Dans l’état dans lequel elle se trouvait, c’était peine perdue… La pauvre femme n’entendit pas les lames que l’on sortait des fourreaux, elle se contentait d’implorer la pitié de ses tortionnaires. Le fer froid lui transperca la poitrine, manquant de peu son coeur. Elle hurla à nouveau, et son cri fut interrompu par un coup de pied donné en plein visage. Elle put sentir à nouveau le métal glacial s’enfoncer dans l’une de ses cuisses, puis entre ses côtes. A chaque fois qu’elle hurlait, un coup la faisait taire.

A l’écart, Lucian observait ses camarades. Il ne voulait pas participer à ce spectacle macabre. Il ne voulait pas être là. S’il le pouvait, il serait partit. Il aurait pris ses jambes à son cou et se serait éloigner le plus loin possible pour échapper à ce divertissement lugubre. Sentant alors la main de son frère saisir son bras avec force, ce dernier l’entraîna au plus près de cette représentation.

—C’est le moment de s’amuser un peu, mon frère ! Il suffit de bien viser… Montre moi donc ce dont tu es capable !

Luca avait étouffé un rire en prononçant ses paroles, et son frère avait pâlit. Lui qui avait pensé pouvoir échapper à la participation de ce meurtre gratuit… Sa main tremblait légèrement, et il attrapa la poignée de son épée avant de la sortir de son fourreau. Autour de lui, ses camarades prenaient la chose à coeur, et lui lançait entre deux rires :

—Vise le coeur !

—Non, pas le coeur ! Si elle meurt trop vite, ce ne sera pas amusant !

—Tu devrais lui couper les jambes ! Comme ça, aucune chance que cette sorcière ne les prennent à son cou !

—Et si tu lui arrachait les yeux ? D’un coup sec !

—J’ai une meilleure idée : lui ouvrir le ventre et le vider de ses entrailles.

—Mais elle va mourir rapidement si tu fais ça…

Les yeux de Lucian ne quittaient pas ceux de sa victime. Car elle serait sa victime, il n’avait pas le choix. Il serra son épée entre ses mains, se demandant où frapper. Et la jeune femme le regardait, tout en le suppliant de lui laisser la vie sauve, en implorant sa pitié. Le coeur du chevalier se gonflait de nouveau de honte. De honte et de haine. Il ne pouvait rien faire pour empêcher ça. Il avait envie de dire à cette pauvre femme allongée sur le sol qu’il était désolé, mais aucun son ne sortit de ses lèvres. Autour de lui, ses compagnons d’armes continuaient de rire, tout en le pressant de frapper. Lucian leva son arme, murmura une prière à la déesse, puis donna un coup rapide qui fendit l’air. La gorge de la jeune femme était désormais ouverte, et le flux de sa vie s’écoulait avec abondance alors qu’elle quittait ce monde dans d’horribles gargouillis.

Les chevaliers de l’Ordre poussèrent des grognements de mécontentements. Luca s’était penché sur la femme sans vie, un léger sourire aux lèvres. Lui aussi avait été déçu par la rapidité de l’acte, mais la précision avec laquelle il avait été commis le laissait stupéfait. Vérifiant que le corps ne se relèverait pas en lui donnant quelques coups de pieds gratuit, il se releva puis se tourna en direction de son frère pour le féliciter.

—Joli coup. Précis et sans fioritures. Au moins, on ne peut pas te reprocher de ne pas être adroit…

Les autres commençaient déjà à prendre le chemin inverse, laissant les deux frères seuls. Lucian planta son regard dans celui de Luca, lui demandant d’une voix blanche :

—Pourquoi s’amuser à les faire souffrir alors qu’on peut les tuer rapidement ?

—Parce que ce sont des démons. Des sorciers. Des monstres. Des créatures qu’excècre la grand déesse.

—Cette femme n’était pas une sorcière.

—Parce qu’elle n’a pas utilisé ses pouvoirs ? Oh, Lucian, que tu es naïf. Un jour, tu te laissera ensorceler bêtement.

Le chevalier marqua une courte pause avant de continuer sur le même ton.

—Bien entendu qu’elle n’a pas usé de ses pouvoirs. Elle ne voulait pas que nous découvrions sa vraie nature. Elle voulait garder ses chances de pouvoir nous échapper jusqu’à la dernière seconde…

La main gantée de fer se posa sur l’épaule de Lucian.

—Rentrons Lucian. Le repos te fera du bien, et les prières t'aideront à y voir plus clair.

Les yeux de Lucian se posèrent de nouveau sur le cadavre de la femme. Elle resterait ici jusqu’à ce que quelqu’un la récupère. Ses biens seraient récupérés, et le corps anonyme jeté dans une fosse commune. Personne ne venait s’enquérir des cadavres de ceux que les chevaliers de l’Ordre avaient tués. La crainte d’être à son tour soupçonné de sorcellerie ou de pacte démoniaque… Sans rien dire de plus, laissant un silence pesant s’emparer de cet endroit, il suivit alors son frère. Il n’avait plus rien à faire ici, il était venu donner la mort et l’avait offerte sur un plateau d’argent.

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