Chapitre 2 - Le goût de la mort (2/2)
Julius Luis chantonnait tout en nettoyant ses ustensiles. Il aimait l’ordre et rangeait chaque chose à sa place, ne supportant pas de devoir chercher ses objets de prédilections aux quatre coins dans la pièce. Ces derniers temps, il n’était pas rare qu’il ait besoin de les utiliser. Voyous de bas étages, renégats, sorcières, démons, hommes, femmes, vieillards… Il avait vu beaucoup de monde passer dans cette salle. Et y trépasser par la même occasion. Un bruit à la porte l’avait sortit de ces occupations habituelles, et Julius s’y précipita pour l’ouvrir, et lança avec un large sourire accueillant aux lèvres :
— Bienvenue dans mon antre ! Entrez, entrez !
Lucian avait de nouveau avaler sa salive, sentant à présent une boule d’angoisse remonter le long de sa gorge. Au premier abord, Julius avait l’air d’être un bon gars, jovial. Ce dernier s’était même précipité vers Luca pour le saluer d’une accolade amicale. Mais ce n’était qu’une façade… En vérité, Julius Luis était le bourreau le plus cruel que Arx ait connu. Alors que Luca expliquait la situation à son camarade, Lucian observait la pièce avec un haut le coeur. La simple vue de cette lugubre cellule aurait fait s’enfuir n’importe quelle personne. Il y avait un nombre impressionnant d’instruments de torture, allant du plus simple au plus original. Des cordes, des lames, des torches, des pinces, des cisailles… Du plafond pendaient des chaînes solide qui avaient été utilisées de nombreuses fois. Le sol, qui aurait dû avoir la même couleur que celui du couloir, avait pris celle, marron, du sang séché. Lucian se demandait pendant combien de temps il tiendrait avant de vider son estomac.
Un bruit sourd arracha le chevalier de ses pensées. Nicolas venait d’être jeté avec violence sur la table au milieu de la pièce et solidement attaché. Pieds et poings liés, il ne pouvait désormais plus espérer échapper au sort qui l’attendait, à la question extraordinaire. La voix sépulcrale du général résonna alors dans la pièce, alors que jusqu’ici il n’avait dit mot.
— Nicolas Konrad. Agé de vingt-quatre ans. Chevalier de l’Ordre. Apostat.
Il avait marqué une légère pause, fixant le prisonnier, avant de continuer sur le même ton.
— Vous êtes accusé d’avoir aidé des personnes soupçonnées d’être de “mauvaises graines”.
Il avait insisté sur ce dernier terme, sa voix vibrant au fond de sa gorge.
— Vous êtes accusé de les avoir aidé à sortir discrètement de la cité. A cause de vous, des sorcières et autres créatures démoniaque se sont enfuis au delà des murs de notre grande cité. C’est un crime terrible dont vous vous êtes illustré. Qu’avez vous à dire pour votre défense ?
L’homme allongé sur la table n’avait rien dit. Dagan laissa quelques longues minutes s'écouler, puis se tourna vers le bourreau ordonnant sèchement :
— Faites votre office.
Julius avait du mal à cacher sa joie. Se rapprochant de la table où se trouvait sa victime, il fourra un chiffon dégoutant au fond de son gosier, avant de sortir de son tablier des clous, noirs et plus long que la moyenne. Il attrapa le marteau qui pendait à sa ceinture et se mit alors au travail, s’attaquant aux cuisses de son patient. Lucian pouvait entendre les cris de Nicolas, étouffés en grande partie par le tissu. Un second clou avait rapidement rejoint le premier, et d’autres suivirent. Au bout d’un moment qui paraissait une éternité, le tortionnaire cessa enfin, et retira le linge qui l’empêchait de parler. Les premiers sons qui étaient sorti des lèvres du souffre douleurs étaient des sanglots, rapidement recouvert par les questions du général.
— Qui t’as aidé dans ton entreprise ?
— Personne.
— Parle !
— Je veux mourir…
— Tu mourras quand je t’en donnerais l’ordre. Parle ! Qui t’a aidé ?
— Puisque je vous dis que personne ne m’a aidé…
— Tes accusateurs t’ont vu avec quelqu’un d’autre hier soir. Quelqu’un qui a eut le temps de prendre la fuite. Qui était-ce ?
— Je ne sais pas de quoi vous parler.
— Et je penses que tu sais très bien de qui je veux parler.
— Tuez-moi… Pitié...
— Pas avant d’avoir obtenu des réponses ! Parle !
— Je veux mourir…
Le visage de Dagan était resté de marbre. Il était temps de passer à la suite des hostilités. Le général lança un regard à Julius et hocha la tête, lui intimant silencieusement l’ordre de continuer sur sa lancée. Le tourmenteur s’était alors emparé d’une corne trouée qui allait lui servir d’entonnoir. Il rapprocha le seau d’eau croupie de la table de jeu, demandant alors assistance pour ce qui allait suivre. Heureusement pour Lucian, ce fut son frère qui s’était avancé pour aider, maintenant la corne entre les lèvres de Nicolas et lui pinçant le nez. Julius souleva le récipient et commença à le vider lentement dans la corne, étouffant petit à petit sa victime. Les yeux de Lucian ne pouvaient quitter ce spectacle injuste et macabre. Son coeur battait à tout rompre dans sa poitrine, et il avait sentit son estomac se tordre de douleur. La tête lui tournait, et c’est avec l’impression que tout s’écroulait autour de lui qu’il sombra dans l’inconscience.
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