Chapitre 6 - Triomphe caché

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À la sortie des cours, Caleb proposa à Aël:

«Demain, c'est le premier jour des vacances après il faudra aller en stage. Dommage que nous soyons pas dans la même entreprise. Tu viendras avec moi faire un footing?

  • OK!
  • Rendez-vous à 9 heures en bas de chez toi.
  • D'accord.
  • Après on va chez toi. On doit discuter de tout ce qu'il s'est passé ces derniers jours.» lui intima Caleb.

Ils se séparèrent au bas de l'immeuble d'Aël. Ils n'avaient pas encore osé reparler des évènements de la journée: il fallait un temps pour les digérer. Ils s'étaient rapprochés, mais ils étaient encore maladroits, intimidés et plein d'appréhension. Aël n'osait pas aller au-delà du bisou et Caleb ne savait pas vraiment ce qu'attendait Aël. Il ne voulait pas se tromper, pousser Aël dans ses retranchements ou lui imposer des gestes qui pourraient l'effrayer. Et puis comment se comporter avec un autre garçon? Alors en guise de salut, ils se firent un petit geste de la main.

En arrivant dans sa chambre, Caleb ouvrit illico presto son ordinateur portable. Rien ne valait internet pour avoir des réponses, Aël qui n'avait ni téléphone portable ni ordinateur, tout étant resté chez son père, lui disait qu'il n'y avait pas que de bonnes réponses. C'était un premier pas vers l'inconnu. On ne vous apprend rien du sexe en cours, l'homosexualité on en parle en une phrase, on sait juste que ça existe. Caleb supposait : "Sûr qu'Aël est vierge! mais v'là coup que je me goure!" Lui aussi n'avait jamais sodomisé aucune fille. Il se demandait si chaque partenaire avait une place attitrée? Si on changeait selon les circonstances? Comment on s'y prenait? Tant de questions. Aël avait-il les mêmes?

Déjà il avait le souvenir qu'avec les filles c'était assez compliqué l'air de rien. Au départ il y allait en gros bourrin, il s'était vite rendu compte que ce n'était pas si simple. Bon, il était vrai qu'il ne s'était pas trop fait de nœuds au cerveau parce qu'il n'attendait rien de ces filles, alors que là, c'était une autre histoire. Tout était nouveau pour lui. C'était la première fois qu'il avait envie de serrer quelqu'un dans ses bras, de l'embrasser, de le protéger, de lui tenir la main, de le renifler et surtout d'être avec lui tout le temps. Pour Caleb, tout était une première fois, sa première fois pour beaucoup de choses. Il ne fallait pas qu'il se rate.

Caleb rêvassait. Il se souvenait d'avoir regardé Aël en pensant qu'il aurait aimé pouvoir avoir le temps de compter chacune de ses taches de rousseur, d'embrasser chaque parcelle de son cou. Là maintenant, dans la minute, Aël lui manquait atrocement, c'était comme s'il avait été amputé. Il venait de découvrir que l'amour était douloureux. Il espérait que lorsqu'ils seraient tous les deux dans le même état d'esprit, l'amour pourrait être doux.

Pour le moment il fallait qu'il s'instruise, alors il frotta énergiquement ses boucles folles et se replongea dans sa lecture. C'était bien la première fois qu'il prenait des notes en lisant des pages du WEB et en écoutant des vidéos. Sur un site très connu qui ne parlait que des questions LGBTQIA+, il était clairement écrit qu'il pouvait aimer Aël sans s'inquiéter du sexe et de ses aléas. Qu'il pouvait l'aimer autrement que ce que montre le porno et tant qu'ils étaient d'accord et totalement consentants, tout était possible. Pour Caleb, l'amour s'était le sexe et ses variantes. Il venait de faire une découverte. Il se sentait ridicule, inculte et honteux. On pouvait aimer au-delà des relations sexuelles. Il y avait des personnes asexuelles qui étaient très amoureuses d'une ou d'autres personnes. Jusqu'à présent, il savait qu'il avait été aromantique puisqu'il n'avait jamais aimé qui que ce soit. Il découvrait les univers d'autres personnes tout aussi intéressants et honorables que le monde cis dominant des hétérosexuel-le-s. De nouvelles portes s'ouvraient, pour lui, la clef de son ouverture d'esprit était Aël. Il était sûr que sans lui, rien n'aurait été possible.

De son côté, Aël ne se sentait plus de joie. Il avait envie de crier au monde entier son amour partagé. Il avait envie de tout vivre avec Caleb. Il lui avait ouvert un champ des possibles qu'il ne croyait au départ qu'utopique. Tout devenait réel. Il fermait les yeux et s'imaginait en train de toucher le corps tant désiré. Il voulait embrasser et être embrassé. Tenir la longue et grande main de Caleb dans la sienne.

Il se voyait dans les plus scabreuses positions érotiques possibles, tout en appréhendant de le faire. Il en avait envie tout en espérant pouvoir le faire dans quelques semaines ou peut-être quelques mois. Il était entre vouloir faire ces choses inconnues ou d'attendre d'avoir le courage de se jeter à l'eau. Il voulait sentir l'odeur de Caleb et toucher toute la surface de sa peau mate, pouvoir passer ses doigts dans les boucles brunes de ses cheveux ou juste lui tenir la main. Il se demandait si Caleb pourrait supporter la maladresse de ses baisers et de ses caresses? Était-il poilu de partout? Comment était son sexe? Aimerait-il son corps sec d'athlète? Mille et une questions lui trottaient dans la tête. Il ne savait rien du sexe et de ses pratiques, mais il se disait que Caleb lui apprendrait tout, car il avait eu tellement d'expérience, il devait être si compétent!

Aël se caressait en pensant à Caleb, son sourire, sa stature et sa voix de basse. Il était amoureux et bien plus qu'avec Gurvan, car il y avait une nouvelle dimension: le désir sensuel de l'autre. Cet autre n'était plus si inaccessible. Cet autre était vraiment beau. Cet autre, il l'avait embrassé. Cet autre, c'était Caleb. Il aimait dire à haute voix son prénom. Il était doux, simple, tendre et rare. Caleb! Caleb! Caleb!

Sa mère lui avait dit que Caleb était un personnage biblique de la tribu israélite de Juda et l'un des douze éclaireurs envoyés par Moïse pour reconnaître le pays de Canaan. Pour Aël, Caleb pouvait être aussi un meneur d'hommes comme le Caleb de la Bible. Il était l'éclaireur vers une nouvelle vie et vers de nouvelles terres jamais explorées. Comme toute personne follement amoureuse, Aël l'encensait, voyait en lui toutes les qualités imaginables. Il avait déjà occulté la face sombre de son amoureux.

Le lendemain après leur footing matinal, ils allèrent chez Aël. Sa mère était au travail. Il y vit la possibilité d'embrasser Caleb, mais il n'osa pas. Après la douche, ils s'installèrent chacun sur un futon. Caleb se jeta à l'eau :

« Je me sens vraiment maladroit en ce moment. Je voulais te dire que j'ai aimé ton petit béquot et que dans ma lettre, j'aurais dû aller plus loin mais c'est difficile de dire certaines choses. J'suis plus à l'aise pour dire des conneries que dire des gentillesses. Faut pas m'en vouloir.

--- j'suis pareil. J'ai peur que tu t'enfuis si j'te dis ou si j'fais des trucs. Et puis je n'ai jamais été honnête avec toi. Je ne t'ai jamais dit ouvertement qui j'étais vraiment : je suis gay. Du plus loin que j'm'en souvienne, j'ai toujours été attiré par les garçons.

--- Ben mec, ça, j'm'en doutais. Merci de me le dire. Moi aussi j'ai pas été totalement honnête avec toi. Depuis très longtemps j'suis aussi attiré par les garçons, ça même était ma première attirance. J'ai tellement eu peur du regard des autres et surtout j'étais sûr que mon père et ma mère ne l'accepteraient jamais, que j'ai tout ravalé et j'ai vécu comme c'était bien pour un mec. Être un mec ordinaire, c'est facile à vivre.

--- J'comprends. Moi, j'ai fait mon coming-out et mes parents ont divorcé. Ça a été le déclencheur. Parfois j'me dis qu'à cause de moi, ma mère a tout perdu, j'aurais mieux fait de fermer ma gueule. Mais d'un autre côté, j'ai vu où étaient mes amis et sur qui j'pouvais compter. En tout cas, j'te remercie de ne pas en faire toute une histoire de ce baiser.

--- Eh mec! T'appelles ça un baiser?! Tu te fous de moi! Ton truc c'était un bisou, un béquot ! Je vais te montrer ce que c'est un vrai baiser! déclara Caleb en fonçant sur Aël et en l'allongeant sur son futon. Il l'embrassa à pleine bouche. Aël le repoussa :

« J'peux plus respirer!

--- J'ai encore merdé! J'suis passé à côté du consentement.

--- Non ça va. C'est pas ça. C'est juste que je n'arrive pas à respirer! Je veux bien le faire, répondit Aël avec une petite voix.

--- Pour le faire, il faut que t'apprennes à respirer par le nez.»

Comme pour ne pas le mettre dans l'embarras, Caleb arrêta ce type de baiser et déposa doucement sur l'ensemble du visage et du cou d'Aël de petits bisous tendres et appuyés. Aël se laissa faire et se détendit au fur et à mesure. Au bout d'un long moment, il rendit ses tendresses à Caleb qui, lui aussi, se laissa aller au bonheur d'être câliné. Ils eurent les mains baladeuses. Les tee-shirts se soulevèrent. Des doigts se croisèrent et s'entrecroisèrent. Les bouches se rencontrèrent à nouveau. Les langues reprirent leur danse langoureuse. Caleb entendit de petits bruits, de petits couinements alors qu'il léchait et suçotait avidement les tétons roses d'Aël. Ce n'était plus une demie molle qu'il avait dans son boxer, mais une belle gaule bien raide. Le plaisir émis par Aël décuplait son désir. Par imitation, Aël entreprit la même caresse buccale : elle eut autant de réussite. C'était la première fois que quelqu'un suçait ses tétons bruns. C'était donc la première fois que Caleb se rendait compte du plaisir qu'il pouvait en tirer. Toutes ses gentilles frivolités eurent un effet merveilleux sur la libido d'Aël. Il s'allongea sur le corps de Caleb et se frotta à lui :

« Fais gaffe Aël, si on se jouit dessus, ça va pas le faire! déclara Caleb.

  • On a qu'à retirer nos frocs.
  • OK!»

Ni une ni deux, ils étaient en boxer. Sans attendre, Caleb prit en main le sexe d'Aël. Il fut étonné de la grandeur et de la grosseur de l'engin : il n'avait rien à envier au sien qui était déjà d'un beau gabarit. Il venait d'apprendre une nouvelle chose : la taille du sexe n'était pas proportionnelle à la taille de l'homme. Gênés par leurs sous-vêtements, ils les retirèrent aussi. Caleb se mit à cheval sur Aël et frotta ensemble leurs deux intimités turgescentes. Aël fermait les yeux et émettait de petits bruits si charmants et si érotiques que Caleb ne mit pas longtemps à rendre les armes, suivi à quelques secondes d'Aël. Ils restèrent un moment sans faire un mouvement. Aël tendit une main pour attraper des mouchoirs en papier et nettoya avec précaution leurs sexes qui se ramollissaient doucement:

«Ça va? Demanda Caleb à Aël tout en s'allongeant à ses côtés.

  • Oui, oui, ça va. Et toi?
  • T'inquiètes, c'était génial. Elle est sacrément belle, mec! dit-il en s'esclaffant.
  • Ah bon? Elle est normale, non?
  • Je sais pas trop. J'en ai vu pas mal dans des pornos mais les mecs sont choisis pour la grandeur et la grosseur de leur bite alors c'est pas une référence. Et pis moi je trouve la tienne très belle.
  • Merci. La tienne aussi est belle. Elle est plus foncée et plus grosse..
  • Non, non, non, elle n'est pas plus grosse. Je peux te le dire car c'est moi qui les ai eues en main. J'ai pu comparer. On est jumeaux d'en bas!
  • T'es trop marrant! s'exclama Aël en riant. Tu sais je croyais que j'étais pas prêt à faire des trucs avec toi. J'appréhendais vachement. Et puis là, d'un seul coup au premier baiser, on l'a fait.
  • Tu trouves qu'on a été trop vite?
  • Ah non, pas du tout. C'est juste que je m'étais imaginé que les choses allaient se dérouler autrement.
  • T'imaginais quoi au juste alors? Qu'on sorte ensemble sans sexe pendant quelques temps et puis, un jour on se serait lancé?
  • Oui un peu ça.
  • Tu regrettes alors?
  • Ah non alors! Non, c'est vraiment bien qu'on ait fait ça comme ça sans se poser de questions, naturellement. J'ai un peu l'impression de mettre jeté dans un sombre étang inconnu. J'ai même pas eu le temps d'avoir peur. C'est génial.
  • Moi aussi, j'appréhendais qu'on le fasse. J'suis jamais allé avec un mec. Et j'suis content que ma première fois soit avec toi. J'ai encore le cœur qui bat fort! dit-il en embrassant Aël.
  • Caleb?
  • Oui?
  • J'suis désolé de casser l'ambiance, mais faut qu'on se rhabille ma mère va bientôt rentrer.
  • D'acc, t'en fais pas. N'empêche que j'ai déjà hâte qu'on recommence. Merde, j'aurais pas dû dire ça, tu vas me prendre pour un obsédé.
  • Mais, tu es un obsédé! Mais t'inquiètes, moi aussi j'ai hâte. J'ai vraiment aimé. Je peux encore t'embrasser?
  • Bien sûr!» répondit Caleb en joignant le geste au propos.

Jusqu'au retour de la mère d'Aël, ils ne firent que s'embrasser et se dire quelques amabilités tendres. Caleb ne se sentait plus de joie. C'était la première fois qu'il restait après avoir joui. Cela le rendait aussi heureux que de l'avoir fait. Encore un truc nouveau. Un truc merveilleux. Un truc qui partageait avec Aël.

Aël était encore sur son petit nuage. Parfois son cœur s'emballait, parfois ses joues s'enflammaient. C'était comme un feu d'artifices dans son cerveau. Il y avait des moments où il voulait prendre Caleb dans ses bras et le serrer jusqu'à l'étouffer et d'autres où il voulait être étouffé par Caleb. Ils se roulaient sur les futons en se chamaillant et se chatouillant. Et parfois, ils ne formaient qu'un seul corps, s'écrasant l'un l'autre dans un même élan amoureux. Leurs corps s'étaient reconnus comme si leur rencontre était une évidence. Il n'y avait pas que leurs sexes qui étaient jumeaux! Ce jour-là commença une réelle et belle histoire d'amour entre eux.

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