45. La chevauchée de Paris
Jonas
Le dîner préparé par ma mère avant mon départ a un peu de mal à passer, elle a encore fait dans le léger avec cette tarte au camembert en entrée, les tripes à la mode de Caen en plat et la tarte aux pommes en dessert. Pénélope ne semble pas en meilleur état que moi et je souris en la regardant, à côté de moi dans la voiture, une main posée sur son ventre.
— Alors, c’était quoi ton menu ? lancé-je en jetant un nouveau coup d’œil vers elle en m’engageant sur l’autoroute. Tu as été gâtée comme moi et tu as plein de boites dans tes sacs aussi ?
Elle m’adresse un sourire qui éclaire tout son visage et, une fois encore, je la trouve tout simplement belle. Franchement, j’ai parfois un peu le blues du dimanche soir quand je rentre de chez mes parents, mais là, ce n’est pas du tout le cas. Je suis content de prolonger un peu ce weekend en sa compagnie, surtout après l’accord que nous avons trouvé. Vu les circonstances, je ne pouvais vraiment pas espérer plus, même si je suis frustré à l’idée de me dire que tout ce qu’on va partager, c’est du sexe. Du très bon sexe, mais rien d’autre… Pas d’engagement…
— J’ai eu droit aux escalopes à la crème et au cidre avec des frites… Mes parents en ont fait pour un régiment et il paraît que j’ai maigri, ma mère m’a resservie pour que je ne finisse pas avec la peau sur les os, rit-elle. J’ai de la marge !
— Non, elle a raison ! Ce serait dommage que tu perdes ces magnifiques courbes que tu m’as laissé caresser la nuit dernière, ris-je en la matant à nouveau alors que la nuit commence à tomber.
— Mouais, tu es sûr qu’elles te plaisent ? De ce que j’ai compris et pu voir, tes conquêtes semblent ne manger que de la salade et ne pas avoir des parents prêts à les gaver comme des oies.
— Pour moi, côté courbes, tu es la perfection, impossible de trouver mieux. Je me suis dit qu’il fallait aller voir de l’autre côté du spectre des formes pour voir si la perfection existait aussi, avoué-je sincèrement sans oser la regarder cette fois.
— Donc tu es allé à la pêche à tout le contraire de moi ? C’est mignon !
Je dois rougir jusqu’en haut de mes oreilles car elle éclate de rire et vient déposer un bisou tout doux sur ma joue barbue. Je ne sais plus où me mettre et fais mine de me concentrer sur le dépassement que je suis en train d’effectuer alors que ce camion ne présente aucun danger.
— Tu vas me faire des bisous comme ça aussi à Swan ? Pas sûr que le big boss apprécie ce rapprochement…
— Ah non, pas au boulot. On reste pros, autant pour toi que pour moi. Je refuse d’être fichée comme l’une de tes conquêtes et que ça s’ébruite au taf…
— D’accord, il va donc falloir qu’on continue à se piocher le nez ou on peut dire qu’on a fait une paix normande ? Ils peuvent y croire, à ça. Surtout si on dit qu’on prépare mon départ et ma succession…
— Parce que tu crois qu’on va vraiment arrêter de se piocher le nez ? rit-elle. J’ai un doute…
Ah, on dirait que pour elle, rien n’a vraiment changé et que tout est comme avant, malgré cet accord négocié alors que nous étions nus tous les deux et repus d’amour… Non, de sexe, devrais-je dire.
— Tu as raison, avec ton caractère de cochon, je ne serai pas parti assez vite et tu vas encore essayer de me voler des clients alors que tu vas tous les récupérer dans quelques mois. Ça promet, dis donc ! Mais c’est clair que si tu agis comme ça, ça va m’énerver, je me connais. Et tu me connais aussi bien, d’ailleurs.
— Je n’ai rien fait pour t’énerver, je te signale, c’est toi qui as attaqué en m’offrant un pan de mur du bureau. D’ailleurs, tu devrais te faire pardonner à coup d’orgasmes à la pelle !
— C’est pas ce que j’ai commencé à faire ? souris-je en coin. Il me semble bien que la morsure que j’ai sur l’épaule, ça vient d’un de ces orgasmes que tu as voulu étouffer, non ?
— Il va en falloir bien plus pour que je te pardonne ton accueil très mitigé, Jo. Je ne saurais même pas dire combien, d’ailleurs, rit-elle.
— Et pour ça, alors, tu vas me laisser venir te voir tous les combien ? Parce qu'une fois par semaine, ça ne me suffira pas, je te préviens. Je tiens vraiment à payer toute ma dette avant mon départ !
Même si je le fais sur le ton de l’humour, je me livre peut-être un peu trop dans cet habitacle confiné qui semble nous isoler du reste du monde, mais j’avoue que je reste un peu sur ma faim avec cet accord que nous avons scellé d’un baiser. Je suis bête car c’est moi qui nous mets dans une situation où l’on ne peut pas vraiment espérer autre chose.
— On verra en fonction de nos envies, j’imagine. Pas de pression et aucune obligation, juste du plaisir.
— Oui, tu as raison, juste du plaisir, ce sera simple comme ça.
Je souris et fais mine de me concentrer à nouveau sur les kilomètres qui défilent. A mes côtés, elle semble loin de mes préoccupations et chantonne avec la radio. A plusieurs reprises, je baisse le son, ce qui la surprend, mais je lui explique que c’est pour mieux l’entendre, la faisant sourire. Bientôt, les contours de la région parisienne se dessinent et les tours commencent à apparaître, bien loin des vaches qui ont accompagné notre début de voyage. Pénélope respecte le silence qui s’est installé jusqu’à ce qu’on arrive près de chez elle. J’ai de la chance car je trouve une place pour me garer et je descends pour récupérer dans le coffre ses sacs que je lui tends en souriant.
— Tu vois, je suis un vrai gentleman maintenant. Cela vaut peut-être un dernier bisou ?
— Tu ne veux pas monter ? Tu as une dette à écumer, chuchote-t-elle en se collant contre moi.
Comment résister à cet appel ? La coquine sait comment faire grimper la température et ses lèvres qui s’emparent des miennes avec gourmandise sont un véritable appel au péché. Surtout qu’elle sait aussi comment coller vraiment tout son corps contre le mien d’une façon si sensuelle que je perds toute capacité de m’opposer à elle. Ce n’est pas raisonnable mais finalement, vu que c’est ce que je souhaite aussi, pourquoi résister ?
— Je te suis, Nono. Si je dois écumer toutes tes courbes, il faut que je m’y mette au plus vite. Il ne sera pas dit que je suis un mauvais payeur ! Ni un mauvais baiseur, pouffé-je alors qu’elle éclate de rire.
Elle m’embrasse à nouveau avant de sortir ses clés et je la suis dans l’ascenseur. A peine la porte refermée sur nous, le pouvoir érotique de ce lieu se confirme car je la plaque contre le miroir et elle s’agrippe à mon cou sans se lasser des caresses et baisers que je lui prodigue à profusion. Malheureusement, la montée est trop courte et c’est le souffle court que nous sortons.
— Madame est bien débraillée. Ce serait bien d’avoir un peu de tenue, ma chère, m’amusé-je à la provoquer en portant ma main à ses hanches dénudées.
— Vu la trique que tu te promènes, je me garderais bien de tout commentaire à ta place, glousse-t-elle en m’attirant jusqu’à la porte qu’elle se dépêche d’ouvrir.
Je préfère ne pas répondre et m’attaquer à son haut que je lui retire pour pouvoir à nouveau admirer cette poitrine qui me rend dingue. Pénélope semble être autant en feu que moi car sans que sache comment elle a fait, je suis nu devant elle et sa bouche est en train d’englober ma virilité dressée. C’est divin et je ne peux que gémir en posant mes mains sur sa magnifique chevelure rousse alors qu’elle se délecte de mon sexe.
— C’est moi qui dois payer, pas toi, finis-je par réussir à articuler alors qu’elle reprend son souffle. Au lit, Madame, c’est un ordre !
— C’est un ordre ? C’est bien parce que j’ai envie de passer à l’étape supérieure que je te laisse penser que j’obéis. Mezzanine, Johnny, ne traîne pas trop ! rit-elle en se dirigeant vers les escaliers.
Et les marches, je les gravis à mon tour sans ralentir. Je saute sur la rousse qui s’est agenouillée sur son lit devant moi et se cambre pour me faciliter l’accès. Notre union est sauvage et c’est presque un combat entre nos deux corps passionnés qu’aucun de nous ne remporte ou que tous les deux nous gagnons. Ici, sans la présence de ses parents à proximité, nous nous lâchons et nos gémissements retentissent dans son appartement alors que la passion nous submerge. Elle est déchaînée et je me félicite quand elle connaît un premier orgasme alors que je la chevauche avec passion. Et ma dette continue à être réduite lorsque nous continuons de manière plus sensuelle et que c’est elle qui prend le dessus. J’adore faire l’amour avec elle car tout est possible, nous ne nous interdisons rien et aucun ne domine l’autre. Ou pas tout le temps. Et cette étreinte s’achève alors qu’elle jouit à nouveau après m’avoir senti orgasmer en elle. C’est tellement puissant que j’en reste complètement envahi d’émotions toutes plus fortes les unes que les autres. Heureusement qu’elle semble moins affectée et qu’elle a la présence d’esprit de me retirer le préservatif avant de venir se lover à nouveau dans mes bras.
— Notre accord a vraiment du bon, soupiré-je en la caressant avec tendresse. C’était… encore wow, quoi.
— On ne peut pas nous enlever ça… Malgré les années, c’est toujours wow.
— Oui, et pour moi, c’était encore mieux que dans la cabane. On doit se faire vieux, hein ? Un bon lit, c’est quand même plus confortable.
— On ne rajeunit pas, pouffe-t-elle, et je crois bien que tu as raison, il faudra rendre la cabane un peu plus confortable si des fois on remet le couvert là-bas.
Je souris et nous nous câlinons pendant de longues minutes, le temps de reprendre nos esprits. Je finis par la repousser et me lève alors qu’elle cherche à me retenir, s’accrochant à ma jambe nue.
— Je vais te laisser, il faut que j’aille me préparer un petit dîner avant d’aller me coucher pas trop tard. Demain, on bosse tôt et je sais qu’il y a une furie prête à tout pour prendre ma place, il faut que je me prépare. Tu me libères ?
— Je devrais peut-être te garder enfermé ici et aller bosser tranquillement, tiens. Rentrer et profiter de ton corps, te nourrir de temps en temps… T’en penses quoi ?
— Madame la Succube, j’ai l’honneur de rejeter votre proposition qui, bien qu’alléchante, me réduirait trop à un simple jouet sexuel. Mais je ne suis pas qu’un sexe, Madame, j’ai aussi un cerveau ! ris-je en me rhabillant.
— Hum… Aucun sens du sacrifice, Johnny, tes parents ne seraient pas très fiers !
— Tu rigoles ? Comme tes parents, s’ils savaient ce qu’on vient de faire, ils seraient déjà en train de prier pour qu’on leur annonce une date de mariage ! Ça va aller ? Tu vas retrouver tes esprits ? Je peux t’abandonner jusqu’à demain ?
— Pas sûre ! Bon retour, Johnny. A demain, et compte sur moi pour t’en faire baver au bureau.
Je ne sais pas comment je fais pour m’écarter de la vision divine et féérique qu’elle m’offre, mais je parviens à sortir de sa chambre alors qu’elle s’étire dans ce bonheur post-orgasmique qui lui va si bien et qui la fait rayonner encore plus. Il n’y a pas à dire, le deal a du bon. Mais j’ai déjà bien replongé, en fait. Je ne contrôle plus rien et je ne sais pas si je vais survivre à mon départ à Dubaï qui s’annonce encore plus difficile à vivre que celui pour les Etats-Unis. Quel con je fais de toujours partir au moment où les choses sont les plus passionnantes avec Pénélope…
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