Chapitre quatre

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— J’arrive toujours pas à croire que Kai Murphy t’ait touché, lance Rita tandis qu’elle feuillette un nouveau magazine people.

Comme à son habitude dans ces moments-là, elle est assise dans le canapé, la revue sur les genoux. Moi, je suis installée sur la table avec mon ordinateur pour retoucher des photos de la veille.

Je roule des yeux.

— Il m’a surtout tiré une balle en pleine face, je rappelle.

J’ai encore mal quand j’appuie sur mon crâne alors je ne risque pas d’oublier de sitôt ma rencontre avec le grand attaquant Kai Murphy.

— Je veux bien me prendre une balle pour lui, moi, assure-t-elle.

— T’es grave avec lui.

Je secoue doucement la tête et me retourne vers elle.

Et si je sais que si elle m’en reparle, c’est qu’elle vient de voir son nom écrit quelque part, je me retourne, m’accoudant contre le dossier de ma chaise, et je ne peux m’empêcher de lui dire :

— Tu sais que c’est chelou d’autant stalker la vie de quelqu’un ?

— Si c’est dans le journal, c’est pas du stalk.

— Ok, sa couleur préférée ?

Elle répond du tac-au-tac.

— Bleu, parce que c’est la couleur de Porto, son club de cœur.

Je hausse un sourcil et voyant que je ne parle plus, elle relève la tête vers moi.

— Quoi ? Il l’a dit en interview, se défend-t-elle devant mon air ahuri.

— Ça ne change rien, on dirait une groupie.

— Toi-même, la groupie.

Si sa réponse n’a aucun foutu sens, c’est que j’ai gagné.

Je guette l’heure, il est presque quinze heures. Je dois aller à l’entraînement, alors je range mes affaires. Environ dix minutes plus tard, je suis dans l’entrée avec ma veste et mon sac sur le dos.

— J’y vais, bisous.

— Bisous, répond-elle sans même me regarder.

J’ouvre la porte et lorsque je suis sur le point de la refermer derrière moi, je passe ma tête dans l’encadrement.

— Et va réviser au lieu de lire tes trucs.

Je n’entends pas sa réponse lorsque je ferme finalement la porte.

Le stade est calme lorsque j’arrive. Maintenant, je n’ai plus à attendre Pedro pour rentrer, il m’a trouvé une accréditation que je porte fièrement autour de mon cou. Je marche alors dans le hall, la tête haute lorsque j’entends mon nom.

La voix semble hésitante. Je me retourne, les sourcils légèrement froncés, vers une des hôtesses d’accueil que je viens de saluer.

— Mademoiselle Sofia Sampaio Silva ? répète-t-elle lorsqu’elle attire mon attention.

Ma mine se desserre et j’esquisse un sourire en m’approchant. Au comptoir, je pose mes avant-bras dessus.

— Oui, c’est moi.

Elle ouvre un tiroir, fouille dedans un moment et sort un paquet emballé d’un papier cadeau argenté en souriant.

— On m’a demandé de vous confier ça.

Je fronce de nouveau les sourcils. Je ne comprends pas.

— Qu’est-ce que c’est ? je la questionne.

Elle hausse les épaules, gênée.

— On nous a déposé ça ce matin.

Je la remercie et prends le cadeau entre mes doigts. Je m’éloigne finalement, la tête baissée sur ce surprenant présent. Mais qu’est-ce que ça peut être ?

Je marche jusqu’à la pelouse où l’entraînement n’a pas commencé. D’ailleurs Pedro n’est toujours pas là non plus. J’en profite pour m’asseoir en tailleur à même le sol et ouvrir le cadeau.

J’arrache le papier sans ménagement et trouve l’emballage d’une marque de téléphone très cher. Dessus est scotché un mot écrit à la main.

«Le dernier modèle pour remplacer l’ancien. »

J’aurais dû me douter que Kai était derrière ça.

Instinctivement, je lève la tête pour le chercher et le lui rendre. Mais pour le moment, il est introuvable. Je range la boite dans mon sac avec la ferme intention de le redonner à la fin de l’entraînement.

Presque deux heures plus tard, Kai trottine vers moi en souriant. Je suis accroupie près de la barrière, en train de ranger mon matériel. Il s’arrête de l’autre côté de celle-ci et s’y accoude.

— Alors, tu as bien reçu ton nouveau téléphone ?

Je lève les yeux vers lui avant de me mettre à fouiller dans mon sac pour le ressortir. Je me relève et lui tends.

— Oui, je l’ai reçu. Merci beaucoup mais je ne peux pas accepter, j’explique.

Je mentirais si je disais ne pas être un minimum intimidée par la carrure et le statut de Kai Murphy mais je me force à agir de la manière la plus naturelle possible. Je me dis que c’est ce qu’il préfère, être traité comme n’importe qui. Ou peut-être que c’est l’inverse, j’en sais rien.

ll souffle du nez sans même lever la main pour récupérer son bien puis m’observe un instant. Il s’attarde sur mes yeux et ma bouche, qu’il regarde bien cinq longues secondes sans parler avant de revenir à la réalité.

— Bien sûr que tu peux. Mieux que ça, tu vas accepter, assure-t-il.

Le sourire qu’il m’offre ensuite dévoile une rangée de dents blanches et alignées.

— C’est beaucoup trop. Je t’ai déjà dit que c’était pas grave.

Il passe une main sur son visage tandis que je regarde autour de moi, juste pour vérifier ne pas être le centre d’attention comme au dernier entraînement.

Sa langue pourlèche sa lèvre inférieure pleine et rose tandis qu’il semble réfléchir.

— Rends moi le téléphone et je t’invite au restaurant. Alors tu préfères quoi ? Le téléphone ou le restaurant ?

Et soudain, je repense à ce que m’a dit Rita. Tu sais, celui qui est avec une fille différente chaque soir. Je repense à sa réputation de playboy.

C’est à mon tour de me lècher la lèvre, les sourcils haussés. Finalement, je ne suis pas sûre d’avoir bien entendu.

— Pardon ?

— Tu m’as bien entendu, Sofia. Ou tu acceptes ce téléphone ou je t’invite au restaurant, le soir qui t’arrange.

— Pourquoi tu ferais ça ?

Il ne prend pas la peine de répondre à ma question.

— Alors ?

Un sourcil intéressé se hausse haut sur son front tandis qu’il me dévisage.

Je prends le temps de réfléchir aux deux propositions. D’un côté, un smartphone hors-de-prix. De l’autre, un rendez-vous au restaurant avec l’un des partis les plus demandés de la ville. Qu’est-ce que je raconte ? Du pays.

Ma mère tomberait à la renverse si elle apprenait que j’avais accepté un cadeau aussi onéreux de la part d’un inconnu. Mais je ne me vois pas du tout aller dîner avec Kai et ce, même si, beaucoup de filles tueraient pour être à ma place.

— Tu ne t’es pas remis avec ton ex-copine ?

Le rouge me monte aux joues. Mais de quoi je me mêle ?

Kai n’est pas vexé, je le sais au rictus qui creuse la commissure de ses lèvres.

— Je ne pensais pas que tu étais du genre à lire ce genre de trucs, Sofia.

— C’est pas mon genre, c’est celui de ma meilleure amie.

— Ah bah si c’est la meilleure amie, se moque-t-il gentiment.

Je secoue la tête doucement. Je prends encore quelques secondes pour réfléchir mais l’évidence s’impose à moi. Hors de question d’être une fille de plus sur le tableau de chasse d’un Don Juan comme lui. Alors le plus poliment du monde, je refuse son invitation :

— Puisque tu insistes, je vais garder le téléphone.

Kai porte dramatiquement sa main contre son cœur.

— Et moi qui me voyait déjà en tête à tête avec toi, comment vais-je faire ?

— Oh, je suis certaine que tu t’en remettras vite.

— Tu n’as même pas beaucoup hésité en plus, je suis vexé.

Je décide de jouer carte du table.

— Merci pour l’invitation mais je connais ta réputation et jamais ça ne m’intéressera.

— Jamais ?

— Jamais.

Il sourit, penche la tête sur le côté.

— Même pas dans mes rêves ?

— Même pas da– Attend. Si, peut-être dans tes rêves.

Son sourire s'agrandit encore je serais presque ébloui par la blancheur de ses dents.

— Quand j’étais petit, je rêvais d’être footballeur pro. Comme tu peux le voir, j’aime faire de mes rêves une réalité.

Sur ces mots, il repousse la barrière de ses deux bras et se dirige vers les vestiaires en trottinant, me laissant seule avec ses paroles qui résonnent dans mon crâne. Je secoue doucement la tête, amusée par son audace.

Par contre, pourquoi je me sens flatté de l’intérêt qu’il semble me porter ?

——————————

De retour à la maison, je m’enferme dans ma chambre pour ouvrir mon nouveau téléphone, un des plus chers du marché. La boite n’est plus sous blister mais je ne m’en formalise pas. Je sors le portable neuf, mets ma carte SIM à l’intérieur et l’allume. La petite pomme apparaît à l’écran. Je n’arrive toujours pas à y croire.

Le téléphone s’allume, et en fouillant dedans, je tombe rapidement sur un numéro déjà pré-enregistré : celui de Kai.

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