Chapitre 27 : Fantôme du passé.

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Deux garçons se battaient à l’entrée du bureau du directeur :

  • Tu te fous de ma gueule ?! s’écria Sky en empoignant son adversaire.

Le blondinet se retrouva écraser contre le mur et attrapa d’une main l’appareil photo qui pendouillait autour de son cou. Il ne voulait surtout pas que son bijou le plus précieux soit abîmé. Les trois personnes à l’intérieur du bureau se retournèrent vivement pour observer la bagarre, sans agir pour autant. Le directeur trônait sur son siège, Kimi et Laure de part et d’autre de la pièce.

  • Tu as dit que j’avais droit à un service, dit-il tout bas d’un ton énervé. Alors aide-moi sur ce coup-là parce que je n’ai aucune envie d’avoir des jours de renvois !
  • Voyons…
  • Arrête ton numéro ! le coupa-t-il en resserrant sa prise.
  • C’est pour toi que je dis ça, commença Kyle, tu as droit à un service, garde le bien au chaud pour quelque chose de plus important…
  • Parce que tu penses que ça ne l’est pas ici ?
  • Oh, ça suffit ! le repoussa-t-il, tout ce que ça risque, c’est que ça apparaitra dans ton dossier. Et alors ? Avec ta position, tout ce qu’on retiendra c’est que tu as défendu des jeunes filles d’un pervers, tu ne crois pas que ça te donne encore plus de cachet ?
  • Ce n’est pas le problème, je n’ai pas envie que… Fais ce que je te dis c’est tout !
  • Sky ! C’est mort ! s’écria-t-il à son tour
  • Et pourquoi ça ? C’est encore une de tes combines, c’est ça ? Tu m’octroies un service, mais tu ne me le donneras jamais…
  • Non, dit-il d’un ton catégorique. Je ne peux rien faire pour toi parce que Monsieur Xavier est clean. Je n’ai rien contre lui, fit-il en jetant un regard au vieux à son bureau.

Sky se retourna par la même occasion pour mieux observer le directeur qui affichait un sourire angélique, les mains croisées et déposé sur sa table en bois. Alors finalement il y avait quelqu’un qui n’était pas à la portée de Kyle ? Ce bougre n’avait aucun secret de famille ? Aucun scandale derrière ses cinquante-huit ans de vie ? Il le blâma de tout son soûl pour être un homme si bon. Ce dernier prit les devants :

  • Je ne pense pas qu’utiliser la violence contre ton ami…
  • Ce n’est PAS mon ami, s’énerva-t-il.
  • On est amants, lâcha Kyle mort de rire.
  • Ferme-là !
  • Que grand bien vous fasse, rit Monsieur Xavier en partageant un regard complice avec la demoiselle Ibiss. Mais j’insiste, davantage de violence n’arrangera pas ta situation. Si tu es prêt à discuter calmement, entre, je t’en prie, fit-il d’un geste accueillant.

Sur ses gardes, Sky fronça les sourcils et envoya paitre Kyle. Celui-ci eut bien vite fait de déguerpir. Au moment de rentrer dans le bureau, il sentit la porte qui s’apprêtait à fermer opposé une résistance. La tête de Dossan apparut soudainement, mort d’inquiétude.

  • Oh, Sky, lâcha-t-il, surpris.
  • Monsieur Dan’s, nous nous apprêtions à commencer, je vous en prie venez, l’accueillit-il à son tour.

***

  • Voilà donc les faits, résuma le directeur face au trois jeunes et à Dossan qui tenait Kimi par l’épaule.
  • Qu’est-ce qui sera mis en place contre ce professeur ? demanda-t-il alors.
  • Comme vous vous en doutez, Monsieur Sacré ne sera plus dans la capacité d’exercer dans notre école…
  • Il ne devrait plus exercer du tout, intervint Laure.

Dossan n’avait pas été très surpris lorsqu’il avait été prévenu par l’école qu’un accident s'était produit. Kimi n’avait jamais eu sa langue dans sa poche, si bien qu’il se doutait qu’un tel événement puisse arriver. Cela dit que Sky soit impliqué fut étonnant et d’autant plus quand il découvrit la jeune Ibiss à leurs côtés. Elle restait droite, les bras croisés en offrant son regard le plus convaincant à Monsieur Xavier. Dossan parcourait sa longue chevelure mauve discrètement, pensant qu’elle ressemblait beaucoup à son père. Quel était leur lien cela dit ? Il revint sur terre en entendant le mot “procès”. Lui, n’avait pas les moyens et le temps d’aller en justice.

  • Je pense que ce ne sera pas nécessaire, j’ai reçu d’autres parents et leurs filles, plusieurs d’entre elles vont porter plainte contre ce professeur. Vous pouvez cependant écrire une lettre en recommandé pour appuyer leurs dires, à moins que vous vouliez le trainer en justice par vous-même ?
  • Non, dit Dossan dans un premier temps avant de regarder Kimi qui semblait d’accord avec sa décision. Non, je pense que nous préférons rester en arrière-plan et reprendre un cours de vie normale.
  • J’espère qu’il aura ce qu’il mérite, ronchonna Sky, assis devant le bureau.
  • Tant que nous y sommes, commença Monsieur Xavier, que vais-je faire de toi ? soupira-t-il en le regardant. Je sais que l’idée d’être puni puisse te paraitre injuste…
  • C’est injuste…
  • Mais nous ne tolérons pas la violence dans cette école, continua-t-il d’un ton plus ferme.

Kimi et Dossan partagèrent un regard inquiet, ce dernier resserrant ses doigts sur son épaule d’un air grave.

  • Tu as été brave et tu as fait preuve de courage pour remettre l’autorité de ton professeur en question.
  • Ça n’a pas été difficile, je suis plus important que lui, marmonna-t-il en se donnant un air détaché.
  • Sky ! N’aggrave pas ton cas ! J’aimerais pouvoir régler cette affaire dans les plus brefs délais, reprit-il son calme. Tu ne seras pas puni pour avoir défendu l’intérêt des filles, mais pour avoir frappé ton professeur. Je comprends qu’une telle situation ai pu te mettre hors de toi, mais ce n’est pas un comportement que nous souhaitons dans notre école. Que cet évènement t’apportes expérience et réflexion pour que tu agisses avec plus d’intelligence la prochaine fois !
  • Ne le punissez pas trop sévèrement, intervint Dossan qui serrait maintenant le poing de Kimi qui semblait pouvoir perdre le contrôle à tout moment.
  • Dossan, cette gentillesse a toujours été une merveilleuse qualité, mais également l’une de tes plus grandes faiblesses, répondit-il gentiment d’une aura paternelle. Puisque tu as agi dans le but de défendre tes camarades, je réduis ta punition à deux jours d’expulsions. Ils prendront cours lundi et mardi prochain, et tu auras un travail à fournir pour le jour suivant. Je pense que je te l’enverrais par mail, il faut encore que je décide…
  • Chez moi ? le coupa Sky.
  • Ce sera à effectuer chez toi, en effet. L’internat est un endroit bien trop confortable pour que l’expulsion soit considérée comme une punition…
  • Super… Comment je vais leur dire ça ? murmura-t-il.
  • Si tu parles de tes parents, je les ai déjà prévenus. J’ai eu ta mère au téléphone, elle devrait d’ailleurs arriver sous peu, dit-il en lançant un regard amusé à Dossan.

Les yeux de celui-ci s’étaient arrondis, soudain agité. Il montra un air sévère au directeur, lui faisant une grimace sans que Kimi l’aperçoive. Laure se mit, quant à elle, un peu plus en avant.

  • Dans ce cas, je pense qu’il est temps pour moi de vous laisser, annonça-t-elle.
  • En effet, j’aimerais éviter un rassemblement de Richess dans la même pièce, à très bientôt Laure, lui sourit-il.

Mais des coups à la porte se firent entendre au moment où Laure l’ouvrait. Dossan prit une grande inspiration, manquant d’air et leva les yeux au ciel comme si ça lui permettait d’échapper à la réalité. Kimi sentit sa tension et celle de Sky qui semblait tout aussi stressé. Pourtant, à la vue de la personne qui se trouvait au pas de la porte, celui-ci soupira, presque soulagé. Laure adressa une petite courbette au grand homme en costume, et se faufila en dehors du bureau. Il était intimidant, posant immédiatement ses yeux verts sur son fils, puis sur la jeune fille à côté. Le directeur affichait un petit sourire satisfait à la surprise dans son regard quand il découvrit successivement Kimi, puis Dossan.

  • Évidemment, souffla Sky en faisant rouler ses yeux de la même couleur que son père dans leurs orbites.
  • Monsieur le directeur, fit-il en réajustant son costume, puis en adressant également un bonjour à Dossan qui lui rendit la pareille. Ma femme, prononça-t-il avec un couteau à la place de la langue, ne pouvait se déplacer…
  • C’est étonnant ?

Il n’eut besoin de dire un mot pour que Sky se taise.

  • John-Eric, cela faisait longtemps que je ne vous avais plus vu ! s’exclama Monsieur Xavier. Ou dois-je vous appeler Monsieur Makes, maintenant ? plaisanta-t-il.
  • Non, bien sûr que non, lui sourit-il en guise de réponse.
  • Parfait ! Je vous présente Monsieur Dan’s et sa fille, Kimi…

John-Eric dévisagea longuement les deux personnes face à lui. D’abord la fille qui se dotait de grands yeux bleus et d’un blond qu’il reconnaissait. Son visage la troublait, son prénom d’autant plus… Il prit le temps de l’analyser de haut en bas, sans que ces regards insistants soient malpolis. Tandis qu’il écoutait le directeur d’une oreille, il observait avec minutie les réactions de l’homme devant lui. Dossan, mal à l’aise dans un premier temps, se dotait maintenant d’une droiture exceptionnelle.

Le temps avait passé depuis la dernière fois qu’ils ne s’étaient pas vus. Malgré tout, ils semblaient parfaitement se comprendre, jugeant que garder le silence restait la meilleure option.

  • Est-ce que vous trouvez cette punition appropriée ?
  • Non, répondit Dossan d’un ton catégorique.
  • Je pense que cette question m’était destiné, rétorqua John quand il vit Sky et son ennemi de toujours partager un regard de confiance. Je ne pense pas qu’elle soit méritée, mais nécessaire.
  • Donc, je n’aurais pas dû prendre la défense…
  • Ce n’est pas ce que je dis, le coupa-t-il fermement. Nous en parlerons à la maison, et à ce propos, j’aimerais que Sky rentre dès aujourd’hui…
  • Quoi ?! Pourquoi ?
  • Nous devons nous entretenir en famille, pourriez-vous l’excuser de son absence ? J’ai conscience que c’est beaucoup demander, mais il ne s’agit que d’un jour avant le week-end…
  • Il n’y a pas de problème, j’en informerais le secrétariat, répondit le directeur. Sur ce, Messieurs, Kimi, je vous libère de ces formalités, dit-il d’un ton rieur.

Tour à tour, chacun sortit du bureau qui se ferma cordialement derrière eux. Sky et son père s’éloignait déjà dans le couloir, quand Dossan attrapa Kimi par ses épaules.

  • Sors déjà, dit-il en montrant l’autre sortie d’un mouvement de tête. J’aimerais remercier Monsieur Makes, ajouta-t-il en se mettant à trottiner jusque John-Eric. Excusez-moi, Monsieur, insista-t-il, est-ce que je peux vous parler deux minutes ? En privé, si possible, fit-il en regardant Sky.
  • Très bien, répondit-il après un temps, tu peux m’attendre devant le portail, indiqua-t-il à son fils dont l’humeur faisait des ravages.

Maintenant seuls, les deux hommes se regardèrent en chien de faïence, comme à la “belle” époque. Il y eut un temps de latence, puis des froncements de sourcils de la part de John-Eric.

  • Finalement, soupira-t-il, après quinze ans nous revoilà dans ces couloirs et avec d’autant plus de surprise, rit-il amèrement. Qu’est-ce que ça signifie ? N’est-ce pas la fille d’Alicia et de Louis ? Je ne comprends pas, et je ne suis pas certain de vouloir comprendre, à vrai dire...
  • Elle est à ma charge, répondit-il évasivement, c’est ma fille maintenant. Et j’aimerais que cela reste un secret… J’aimerais qu’elle ne sache pas…
  • Penses-tu que je vais me précipiter de raconter à ma femme cette découverte ? Que je vais accourir à ses côtés pour lui dire ? Non, je ne veux pas la faire souffrir davantage. Moins elle en sera à propos de toi, mieux nous nous porterons… Tu peux garder tes secrets, et ta fille, loin de ma famille.
  • John, rien ne nous oblige à être en mauvais termes…
  • Je crois que si, il y a plus d’une raison. Sur ce, je vous souhaite une bonne journée Monsieur Dan’s.

Dossan le regarda s’éloigner d’un air nostalgique, soupirant à plusieurs reprises. Il pensa que John-Eric avait toujours autant l’air d’un gentleman, mais qu’il était devenu plus féroce qu’autre fois. Bien qu’il n’y ait rien eut d’amical dans cette confrontation, il s’étonna d’avoir apprécié le revoir.

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