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Sous les rires des mouettes, ton corps de sable qui s'ébroue, tes doigts courent sur mes cuisses.
Tombeau : "Je réalise qu'on ne passe pas sa vie entière dans des petits lacs, Abysse. Regarde, il faut qu'on vise l'océan, même si j'en ai toujours eu peur".
Abysse : "Peur ? Pourquoi ?"
Tombeau : "Parce que j'abrite une tempête..."
Abysse : "Une tempête ?"
Ton regard qui se perd dans le vide un instant.
Tombeau : "Il faut éviter le naufrage, non ? [...] Quant à toi, Abysse, je doute qu'il te soit possible de t'offrir à l'océan. Tu vis dans la brûlure. Il fallait verser des larmes salines, c'est vrai. Tu as choisi l'expérience de la violence, de la guerre, pour cela. Tu as eu ton lot de pleurs et plus encore. Mais sous ton corps brasier, de chaque amorce de courant tu feras des déserts de sel qui te laisseront immobile".
Abysse : "La brûlure... comment on s'échappe de la brûlure ?"
Tombeau : "En délestant ta barque figée par tes souvenirs qui flambent trop lourd. Ce sont de véritables soleils de plomb qui gardent l'empreinte du feu".
Abysse : "C'est vrai... Et puis ?"
Tombeau : "Peut-être que tu pourras arrêter de pleurer et laisser tomber les pluies. Elles te laveront d'eau douce, te lècheront de caresses, délogeront la barque de la rivière de pierres".
Abysse : "Tu as sûrement raison".
Tu t'accroches à mes hanches et colles ton corps raide contre le mien. Ce désir si puissant que tu m'offres, indéfiniment.
Tombeau : "Alors fais glisser sur moi ta langue en fusion pour mettre la brûlure à l'extérieur de toi. Crache. Crache".
Abysse : "Je m'en veux Tombeau... Je crains d'en venir à assécher tes propres lacs, de ma présence caniculaire. Tu n'as pas peur, toi ?"
Tombeau : "Je n'ai pas peur, non. A vrai dire, je le rêvais depuis longtemps..."
Abysse : "De ?"
Tombeau : "Trouver mon foyer..."
Je te rends ce sourire que tu me tends, crépite, engourdie sous tes yeux d'homme et dépose à tes lèvres entrouvertes mes premières pierres volcaniques. L'on s'offre des baisers tressés de langues en dansant sur les laves.
Au séisme de nos vies, ton corps d'épices, mon épicentre.
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