Chapitre 6

6 minutes de lecture

Une fois l'excitation passée, ils se faufilèrent avec leur monture à travers le brouhaha de la rue. De part et d'autre de la rue pavée, se trouvaient des étals de marchandises, du pain chaud et des brioches aux noix dégageaient une odeur qui mettait l'eau à la bouche. De l'autre côté, des cordonniers affichaient leurs nouvelles créations. Tout autour d'eux, du bruit et des odeurs. Aléna ne savait pas où donner de la tête et elle s'accrochait à la longe de Figuier pour se rassurer. Devant elle, Amaury avançait d'un pas incertain et cherchait autour de lui une auberge qui pourrait les accueillir pour la nuit. Aléna qui pensait avoir vu toutes les merveilles que la Basse proposait à Treseille découvrit que la capitale, deux fois plus grande, était en réalité un dédale de rues pavées et organisées autours du château central de Theobald Livraux et de ses conseillers. Ils finirent par déboucher sur une rue plus calme et tranquille dans laquelle ils purent enfin respirer. En suivant la ruelle, ils finirent par arriver devant un bâtiment un peu plus grand que ceux qu'ils venaient de dépasser, c'était une auberge du nom de "Pierre Rose" au mur effectivement rose pâle qui semblait pouvoir les accueillir, eux et leur chevaux. 

Amaury attacha sa monture devant la grande porte et fit signe à Aléna de l'attendre dehors, puis, il entra dans l'auberge. Lorsque la porte se referma derrière lui, un vent de solitude fit frissonner Aléna. Cela faisait plusieurs jours qu'elle avait quitté Stagj et la ville lui manquait. Madame Figue lui manquait. Ici, elle dépendait d'Amaury pour la guider et l'accompagner. Elle n'avait plus que lui pour découvrir pourquoi la vieille guérisseuse avait été tuée. Perdue dans ses pensées, elle n'entendit pas la porte s'ouvrir pour laisser apparaître devant elle Amaury et un jeune garçon au veston rouge vif et aux cheveux sombres qui, lorsqu'il croisa son regard, afficha un sourire amical.

" Je suis Edgar, et je suis le fils de Allan Landgrave le propriétaire de cette auberge. Je vais m'occuper de vos chevaux et puis je vous montrerai votre chambre, attendez moi à l'intérieur, il commence à faire froid." dit-il en s'adressant à Amaury. Puis il attrapa la longe de Figuier des mains de la jeune fille et partit en trottinant vers l'arrière du bâtiment ou devaient se trouver les écuries. 

Aléna avait l'habitude des auberges, celle de Stagj, celle de Treseille et maintenant celle de Château-Bas mais rien n'aurait pu la préparer à ce qu'elle trouva à l'intérieur de "Pierre Rose". Une fois la porte passée, Aléna du plisser les yeux tant la lumière était forte, des bougies suspendues à des sortes de lustres au plafond éclairaient l'entièreté de la salle. De plus, au lieu de trouver plusieurs tables espacées, une seule grande table trônait au milieu de la pièce. Tous ceux qui se trouvaient assis autour se retournèrent pour les regarder et Amaury vérifia bien que sa cape recouvrait ses cheveux. Il entraina Aléna loin des regards et ils se posèrent pour attendre Edgar à côté des marches de l'escalier.

" Nous sommes bien trop exposés ici." murmura -t-il. 

" Je ne pense pas que nous trouverons mieux, ici tout est extravagant, pas de place aux secrets… et puis Edgar est déjà parti avec les chevaux." répondit Aléna sur le même ton.

Ils observèrent discrètement l'auberge et ses occupants et les instincts d'Aléna se remirent en marche, comme dans l'auberge de Treseille. Elle remarqua que contrairement à Stagj et à Treseille, l'auberge était remplie d'hommes et de femmes à part à peu près égale. Tous portaient des vestes ou des robes colorées ce qui laissait apparaître un tableau multicolore que la jeune fille ne se lassait pas d'observer. Elle remarqua que les femmes portaient des coiffures compliquées composées de tresses qui ressemblaient à celles que pouvait avoir Madame Figue. Les hommes quant à eux avaient leur cheveux mi-long attachés en queue de cheval basse comme la plupart des hommes de la Basse.

Pour la jeune fille, la capitale était un nouveau monde qu'elle rêvait de découvrir. Quelques instants plus tard, le jeune Edgar, qui devait avoir à peu près l'âge d'Aléna, revint avec une grosse couverture dans les bras. 

" Suivez moi, je vais vous montrer votre chambre et puis vous pourrez redescendre pour souper." s'exclama-t-il en grimpant quatre à quatre les marches du grand escalier qui menait aux chambres.

Aléna et Amaury le suivirent jusqu'à une porte en bois au fond du couloir. Elle s'ouvrait avec une grosse clef que Edgar tendit à Amaury. Une fois sa mission accomplie, le jeune garçon redescendit l'escalier vers la salle principale aussi vite qu'il était monté. Lorsque la porte s'ouvrit pour laisser apparaitre la chambre, Aléna ne put retenir un rire: la pièce était à l'image des gens de la cité, colorée. Les murs en pierre avaient été tapissés de draps et de tissus de toutes les couleurs ce qui rendait la pièce légèrement étouffante. Une petite fenêtre donnait laissait entrer une faible lumière mais à l'instar de la salle à manger de l'auberge, de grandes bougies avaient été installées un peu partout pour éclairer la chambre. La pièce était meublée d'un grand lit en bois et d'une petite table et le sol recouvert d'un grand tapis de couleur ocre. 

" Je prendrais quelques couvertures et je dormirais par terre." annonça Amaury " Mais d'abord allons manger !" 

Aléna acquiesça avec enthousiasme car elle mourrait de faim. Aléna se débarrassa de son sac de toile dans lequel elle transportait depuis le début du voyage, des sachets d'herbes médicinales et la carte de la Basse qu'elle avait empruntée à Rudrick Hessle. Amaury quant à lui conserva sa pèlerine qui recouvrait ses cheveux blonds et tous les deux descendirent vers la salle principale.

Edgar les attendait en bas de l'escalier avec deux grands bols de bouillons de légumes et d'une viande blanche qu'Aléna supposa être du poulet. Il les conduisit au bout de la table, à côté de deux femmes qui discutaient. Elles devaient avoir la quarantaine et chacune portait une longue robe simple de couleur rouge sous une pèlerine bleu bleu marine. Aléna les salua d'un signe de tête et s'assit en face d'Amaury qui gardait les yeux baissés. Avec sa pèlerine brune et sa robe grise, Aléna se sentait un peu mal à l'aise dans cette multitude de couleur. Elle tritura ses longs cheveux châtains qui s'abîmaient dans son éternel tresse simple. 

" D'où venez-vous ? Vous ne semblez pas être de la capitale." s'exclama la femme à coté d'Aléna.

" Nous venons de Treseille." répondit Amaury.

Aléna se demanda pourquoi il n'avait pas précisé qu'ils venaient en réalité de Stagj mais le jeune homme devait avoir ses raisons. Habituée à écouter les conservations plutôt que d'y prendre part, elle laissa Amaury expliquer qui ils étaient. 

" Je m'appelle Amaury et voilà ma petite sœur Aléna. Nous venons rendre visite à de la famille." raconta le jeune hautois.

" Je suis Anastasie et voici Mélisande, nous faisons toutes les deux partie de la guilde des marchands de Château-Bas." 

La guilde des marchands, Aléna se souvint des leçons de Rudrick à leur sujet: des hommes et des femmes de différentes professions qui se rassemblaient avec les conseillers de la capitale pour discuter de certaines affaires importantes de la cité. La guilde avait peut-être un uniforme, ce qui expliquait les tenues identiques des deux femmes.

" Nous sommes des architectes." précisa Mélisande.

" Nous ne sommes pas venu ici depuis bien longtemps, quelles sont les nouvelles de la capitale ?" s'enquit Amaury.

" Beaucoup de choses se sont passées depuis plusieurs jours et la cité est en ébullition. Le mariage de Neven Livraux a été annulé d'urgence à la suite de la tentative d'assassinat…" 

" Une tentative d'assassinat !" l'interrompit Amaury " . 

" Oui quelqu'un a essayé de tuer le fils du haut-conseiller. Un poison dans son plat à ce qu'il parait. Personne n'a réussi à trouver ni le coupable, ni la plante qui a failli le tuer." 

À la mention du mot poison, Aléna se raidit. Peu de gens qu'elle connaissait pratiquaient l'art des poisons. Mais peut-être que ce n'était qu'une simple coïncidence. 

" Les gardes-cité sont à la recherche de l'assassin mais qui sait si on le retrouvera un jour. Avec les attaques sur les convois de marchandises et cet tentative de meurtre, le conseil est en état d'alerte." continua Anastasie. 

" Où se trouve le fils Livraux désormais ?" demanda Amaury.

" Ah ça personne ne le sait. Il a été mis à l'abri par son père. S'il lui arrivait quelque chose, Theobald Livraux n'aurait plus d'héritier et cela pourrait entraîner des problèmes dont la Basse n'a pas besoin, surtout avec cette guerre contre la Haute qui ne s'arrête pas." 

Amaury acquiesça. Anastasie avait raison: une tentative d'assassinat dirigée vers le fils du haut-conseiller était terrible pour le futur de la région. Il ne pouvait s'imaginer que son frère était prêt à commettre un meurtre pour mettre fin à la guerre. Il devait à tout prix découvrir où il se cachait et l'empêcher de réitérer. Quelques minutes plus tard, Amaury et Aléna prirent congé des deux femmes et se dirigèrent vers leur chambre, la tête pleine de réflexions.

Annotations

Versions

Ce chapitre compte 1 versions.

Vous aimez lire Cly ?

Commentez et annotez ses textes en vous inscrivant à l'Atelier des auteurs !
Sur l'Atelier des auteurs, un auteur n'est jamais seul : vous pouvez suivre ses avancées, soutenir ses efforts et l'aider à progresser.

Inscription

En rejoignant l'Atelier des auteurs, vous acceptez nos Conditions Générales d'Utilisation.

Déjà membre de l'Atelier des auteurs ? Connexion

Inscrivez-vous pour profiter pleinement de l'Atelier des auteurs !
0