Chapitre 3

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Lorsque Amaury se réveilla, la chambre était sombre et vide. Cela faisait quelques jours déjà qu'Aléna était partie travailler sur la Colline et son absence se faisait déjà sentir. Il avait passé les derniers jours à errer dans la capitale à la recherche de Roland ou de sa troupe de brigands sans succès. Sa famille lui manquait, Resort lui manquait, la Haute lui manquait et il désespérait de retrouver un jour son frère et de rentrer chez lui. Anastasie et Mélisande avait quitté Pierre Rose et voilà qu’il se retrouvait complètement seul. 

Il émergea de son lit, les cheveux en bataille et entreprit de s’habiller. Il avait profité de ces quelques jours pour faire quelques emplettes et une grande partie de ses écus étaient parties dans de nouveaux tissus colorés. Il recouvra ses cheveux d’un chapeau vert et descendit dans la grande salle de l’auberge. 

Edgar se trouvait déjà là, à courir entre les tables pour servir les clients pressés et Amaury le salua en sortant. Ce jour-là, il avait prévu de visiter un quartier qu’il n’avait pas encore traversé. Le Puit représentait la partie nord-est de la ville. A l’instar de Franc-pâle à Stagj, c’était un quartier peu fréquentable qu’il fallait mieux visiter de jour, lorsque les gardes-cité faisaient encore leur ronde. Mais le jeune homme savait que c’était le parfait endroit pour avoir des renseignements sur Roland. Peut-être que son frère se trouvait là bas ? A attendre le moment opportun pour frapper ?

L’air chaud fouetta son visage à l’instant où il sortit de l’auberge. L’été dans la Basse était difficile, et la plupart des fermiers des alentours s’inquiétaient pour leurs récoltes. Les ruisseaux provenants du Sabot commençaient à se vider et Theobald Livraux faisait de son mieux pour rassurer la population. 

Il suivit quelques rues larges pleines de monde et se dirigea vers le nord de la cité. Après plusieurs longues minutes de marche, et une pause pour s’acheter une pâtisserie au sucre, Amaury arriva dans le quartier du Puit. Le soleil était déjà haut dans le ciel et il trouva peu de personnes dehors sous une telle chaleur. L’atmosphère brûlante et silencieuse le fit frissonner: le quartier du Puit dégageait une mauvaise impression. Une vieille auberge miteuse annonçait l’entrée du quartier mais rien n’aurait pu permettre de faire la différence avec le reste de Château-Bas. Et pourtant ce quartier, au nord, était le plus exposé à la guerre. Il s’avança précautionneusement et entra dans l’auberge. Cette dernière était sombre et brumeuse et la fumée provenant de la cheminée étouffait l’espace. Les regards se tournèrent vers lui à son arrivée et il se sentit obligé de baisser le regard. Il mit la main instinctivement à sa bourse et vérifia qu’elle était bien en sécurité. Et puis, il prit son courage à deux main et alla s’asseoir seul à une table. Maintenant, il suffisait d’attendre que quelqu’un laisse échapper un mot de trop qui pourrait le mener jusqu’à son frère. 

Mieux que cela, il n’eut pas à attendre longtemps avant qu’un jeune homme encapuchonné vienne s'asseoir à sa table.

Amaury ne put ni distinguer son visage ni son apparence, camouflé qu’était le nouveau venu dans sa longue cape noire. 

« Vous êtes nouveau au Puit n’est ce pas ? » prononça la voix grave de l’étranger.

Amaury le fixa sans répondre. Il ne voulait pas trop en dire sur lui de peur que cela se retourne contre lui. 

Le jeune homme abaissa sa capuche pour montrer son visage, signe qu’il venait en paix. Il avait des cheveux très sombres et courts et des petits yeux perçants. 

« Laissez-moi deviner, vous cherchez quelque chose, sinon pourquoi venir au Puit. » continua l’homme brun.

« Je ne vois pas en quoi cela vous intéresse. » répondit Amaury.

« Je connais très bien Château-Bas et je peux vous aider. »

« Qui vous dit que j’ai besoin d’aide ? » argua le jeune homme.

« Tout sur votre visage. » s’esclaffa le nouveau venu. « Le Puit regorge d'informations, surtout concernant la Haute. »

Le regard d’Amaury s’éclaira et l’homme éclata d’un rire sec, il avait marqué un point.

« Que savez vous de la guerre ? » murmura Amaury en regardant si les autres clients de l’auberge portaient leur attention sur eux.

« Au Puit, tout le monde sait tout sur la guerre. Les soldats viennent d’ici et peu en reviennent. Les mères pleurent, les pères sont en colère. Et beaucoup, beaucoup en veulent aux hautois. » répondit-il en fixant Amaury. 

Une mauvaise impression traversa le jeune homme. Il se surprit à frissonner malgré la chaleur de la pièce.

« Vos yeux bleus sont magnifiques. De qui les tenez vous ? » dit l’étranger.

Amaury se redressa précipitamment. Que savait cet homme sur lui et que lui voulait-il ? Il adressa un signe de tête à l’homme en face de lui et commença à s’éclipser rapidement. 

Une fois dehors, il put enfin respirer. Il devait sortir de ce quartier le plus vite possible. Mais, il n’avait pas fait trois pas qu’une main ferme lui attrapa le bras. L’étranger l’avait suivi.

« De quoi as-tu peur, petit hautois ? » murmura l’homme. «  Tes beaux yeux bleus t’ont trahis, tu croyais que personne n’allait s’en apercevoir ? » s’exclama t’il.

Amaury chercha à dégager la main de l’homme. Il fallait qu’il parte d’ici le plus vite possible. 

Mais l’étranger fut plus rapide. Il attrapa son chapeau et le jeta par terre. Les longs cheveux blonds d’Amaury brillèrent sous le soleil. Un éclat de rire résonna soudain. L’homme avait une lueur folle dans les yeux. La haine des hautois n’avait jamais été aussi forte qu’au Puit mais ça, Amaury n’aurait pu le deviner. 

D’un geste brusque, il dégagea l’emprise de sa main et sortit son poignard de sa manche. Son adversaire ne s’y attendait pas et il eut un hoquet de surprise lorsque l’arme d’Amaury lui déchira le bras. Ce dernier ramassa son chapeau et s’enfuit sans demander son reste. 

Amaury ne savait pas quoi faire, l’étranger allait bien finir par alerter les autorités. Il devait quitter Chateau-Bas le plus vite possible avant de se retrouver avec les gardes-cité à ses trousses. Il ne pouvait pas laisser Aléna seule dans la grande ville mais il n’avait pas le choix. Il parcourut le chemin qui le séparait de l’auberge en courant, puis arrivé là-bas, il prépara son cheval et s’enfuit de la ville. Arrivé devant la grande muraille qui entourait la ville, il annonça du ton le plus naturel possible, qu’il avait fini de visiter la capitale et qu’il s’en retournait à Treseille. 

C’est ainsi que Amaury quitta, au petit trot, Château-bas, la peur au ventre de se faire rattraper. Il avait failli à sa mission, il n’avait ni retrouvé Roland, ni Neven. Le pire, c’est qui avait laissé Aléna seule dans la capitale. Comment allait-elle le retrouver ?

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